L’éternité n’est pas pour demain, elle est la clé de notre vie présente, d’une finesse extrême, qui d’un tour, sans bruit, l’ouvre à sa pleine dimension. L’autre monde surgit de celui-ci qui le façonne, comme à l’intérieur d’un œuf. C’est par la terre qu’on rejoint le ciel. Elle nous élève, nous soulève. Elle nous enseigne même, en puisant dans ses innombrables paraboles, mais pour un fruit qui mûrit dans un espace et une lumière qui la dépassent infiniment. Tout m’appelle, tout autour de moi devient signes, signes visibles d’une réalité toujours plus loin, plus secrète, plus intérieure...
La vie qui s’écoule ne nous présente pas seulement l’image d’un passage, d’une traversée, elle est le lieu même du secret, sa résonance, dont nous devinons à peine le fin mot, dans un murmure intermittent. L’éternité à laquelle j’aspire agit en moi à la manière d’un ferment, jusqu’à l’éclatement de mon enveloppe provisoire. Me perdre, me distendre, m’oublier, voilà l’autre monde, car on ne peut s’abîmer que dans un plus grand que soi. Il faut d’abord avoir ce goût-là, cette soif des lointains, pour rendre vie à un ailleurs qui deviendra une véritable passion.
À quoi ressemblerait l’espérance si elle n’était que désir de continuité, refus de partir, si elle se dérobait à cette force d’arrachement, de dépassement qui ne cesse de nous travailler, en prenant appui sur chaque aujourd’hui ? On ne peut plus concevoir la vie éternelle à la manière d’une récompense bien méritée. Commençons par rejoindre en nous ce qui déjà ne nous parle que de lumière, cessons surtout d’y projeter nos modèles domestiques, pour traverser la mort comme nous aurons traversé la vie, avec le seul désir de Dieu, sans rien emporter, en laissant tout derrière nous, et ne considérant que cette incomparable dignité humaine qui tient à sa position unique dans la splendeur de la Création.
Le paradis ? Plus qu’en nous, il est nous-mêmes. Ou plutôt, ce pour quoi nous sommes faits. Une plénitude à laquelle nous aspirons par un désir imprimé au plus clair de notre cœur, au plus tendre du noyau qui nourrit un autre jour, en nous mais comme séparé par un degré infranchissable, une différence d’échelle infime et cependant insurmontable. On y entrera en se délestant, grâce à la transparence d’âme que notre existence nous aura permis de développer. Le reste tombera comme une vieille peau, une gangue devenue inutile, l’enveloppe sèche qui libère le fruit mûr d’une vie longtemps cachée, comme si l’espace de notre cœur, soudain, devenait tout l’horizon...
Joie d’être en Dieu – de passer en Dieu – dans une lumière qui me transforme à mesure qu’elle m’absorbe... Nous la rejoindrons comme par enfantement, par une vie qu’il nous faut porter jour après jour à son terme... Quel chemin parcouru depuis les balbutiements de l’homme ! En même temps que ses premiers pas sur la terre naissait la lueur timide du mystère, sous une peau qui le distinguait à peine de l’animal, alors qu’en lui le monde résonnait, l’espace se creusait, libérant une clarté grandissante qui continue de croître à travers notre intériorité présente. C’est par cette découverte d’un être unique, inaliénable, qui s’impose comme un absolu par son caractère indépassable, que Dieu se manifeste encore aujourd’hui, dans un ciel intérieur sans bord ni fond, une transparence infinie dont l’éternité devient le lumineux aboutissement...
Philippe Mac Leod est écrivain, il a publié plusieurs recueils de poésie. Son dernier ouvrage, l’Infini en toute vie, est paru aux éditions Ad Solem.
Source : "La Vie"
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La vie qui s’écoule ne nous présente pas seulement l’image d’un passage, d’une traversée, elle est le lieu même du secret, sa résonance, dont nous devinons à peine le fin mot, dans un murmure intermittent. L’éternité à laquelle j’aspire agit en moi à la manière d’un ferment, jusqu’à l’éclatement de mon enveloppe provisoire. Me perdre, me distendre, m’oublier, voilà l’autre monde, car on ne peut s’abîmer que dans un plus grand que soi. Il faut d’abord avoir ce goût-là, cette soif des lointains, pour rendre vie à un ailleurs qui deviendra une véritable passion.
À quoi ressemblerait l’espérance si elle n’était que désir de continuité, refus de partir, si elle se dérobait à cette force d’arrachement, de dépassement qui ne cesse de nous travailler, en prenant appui sur chaque aujourd’hui ? On ne peut plus concevoir la vie éternelle à la manière d’une récompense bien méritée. Commençons par rejoindre en nous ce qui déjà ne nous parle que de lumière, cessons surtout d’y projeter nos modèles domestiques, pour traverser la mort comme nous aurons traversé la vie, avec le seul désir de Dieu, sans rien emporter, en laissant tout derrière nous, et ne considérant que cette incomparable dignité humaine qui tient à sa position unique dans la splendeur de la Création.
Le paradis ? Plus qu’en nous, il est nous-mêmes. Ou plutôt, ce pour quoi nous sommes faits. Une plénitude à laquelle nous aspirons par un désir imprimé au plus clair de notre cœur, au plus tendre du noyau qui nourrit un autre jour, en nous mais comme séparé par un degré infranchissable, une différence d’échelle infime et cependant insurmontable. On y entrera en se délestant, grâce à la transparence d’âme que notre existence nous aura permis de développer. Le reste tombera comme une vieille peau, une gangue devenue inutile, l’enveloppe sèche qui libère le fruit mûr d’une vie longtemps cachée, comme si l’espace de notre cœur, soudain, devenait tout l’horizon...
Joie d’être en Dieu – de passer en Dieu – dans une lumière qui me transforme à mesure qu’elle m’absorbe... Nous la rejoindrons comme par enfantement, par une vie qu’il nous faut porter jour après jour à son terme... Quel chemin parcouru depuis les balbutiements de l’homme ! En même temps que ses premiers pas sur la terre naissait la lueur timide du mystère, sous une peau qui le distinguait à peine de l’animal, alors qu’en lui le monde résonnait, l’espace se creusait, libérant une clarté grandissante qui continue de croître à travers notre intériorité présente. C’est par cette découverte d’un être unique, inaliénable, qui s’impose comme un absolu par son caractère indépassable, que Dieu se manifeste encore aujourd’hui, dans un ciel intérieur sans bord ni fond, une transparence infinie dont l’éternité devient le lumineux aboutissement...
Philippe Mac Leod est écrivain, il a publié plusieurs recueils de poésie. Son dernier ouvrage, l’Infini en toute vie, est paru aux éditions Ad Solem.
Source : "La Vie"
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