de l’Inde ainsi que de l’étranger, à la recherche d’un guide spirituel...Il écrivit très peu durant ces années,mais un grand nombre des conversations qu’il a eu avec ses visiteurs ont été retranscrites par certains de ses proches disciples et ensuite
publiées par l’ashram :
EXPERIENCE DE LA MORT A L’AGE DE 16 ANS
C’était environ six semaines avant que je ne quitte pour de bon Madurai qu’un grand changement se produisit dans ma vie. Ce fut très soudain. J’étais assis seul dans une pièce du premier étage dans la maison de mon oncle. J’avais rarement été malade jusqu’ici et ce jour en particuliers, rien n’indiquait une altération de ma santé, mais, tout à coup, une soudaine et violente peur de la mort me saisit ; il n’y avait rien à cet instant qui la justifiait et je ne cherchais pas non plus à l’interpréter ou à en rechercher la raison. Je pensais seulement : « Je vais mourir » et commençais à réfléchir : «Que vais-je faire ?».
Il ne me vint pas à l’idée de consulter un docteur ni mes parents ou amis, je sentais que je devais résoudre le problème moi-même ici et maintenant. Par le choc de la peur, mon esprit se tourna vers l’intérieur et je me suis dit mentalement sans véritablement articuler les mots : « maintenant la mort est là, qu’est ce que cela signifie ? Qu’est-ce qui meurt ? ». C’est ce corps qui meurt et, aussitôt, je mimais sous forme de mini drame l’apparition de la mort : je m’étendais les membres étirés et raides et imitais un cadavre et, de façon à donner plus de réalité à la recherche, je retins ma respiration et maintins mes lèvres bien fermées pour qu’aucun son ne puisses’échapper, pas même le mot « Je ». Alors je me suis-je dit : « ce corps est mort, il va être transporté au champs de crémation et, là, être brûlé et réduit en cendres ; mais avec la mort de ce corps, suis-je mort ? ». Ce corps est silencieux et inerte, mais je sens la pleine force de ma personnalité et même la voix du « Je » à l’intérieur de moi indépendamment de lui. Ainsi, je suis l’esprit qui transcende le corps ; le corps meurt, mais l’esprit qui le transcende n’est pas touché par la mort ; cela signifie que je suis l’esprit immortel. Tout cela n’était pas pensée obscure mais lumière qui brillait comme vérité vivante et que je percevais directement presque sans mécanisme de pensée.
« Je » était quelque chose de très réel, la seule réalité de mon état présent, et toute l’activité consciente en relation avec mon corps était centrée sur ce « Je ». Depuis, et de façon continue, le « Je » ou « Soi », comme par une puissante fascination, dirige son attention sur lui-même.
La peur de la mort a disparue une fois pour toutes depuis lors, et l’absorption dans le Soi se maintient sans interruption. D’autres pensées peuvent aller et venir comme des notes de musique, mais le « Je » persiste comme la note (sruti) fondamentale qui sous tend les autres notes et se mélange à elles. Que le corps soit engagé à parler à lire ou à toute autre activité, je demeure toujours centré sur le « Je ». Avant que ce changement ne survienne, je n’avais pas de perception claire du « Soi » ni n’étais attiré consciemment vers lui, je ne ressentais pas non plus d’intérêt direct et perceptible pour lui, encore moins une inclination à demeurer en permanence en lui.
Conception et Composition : Sri Ramanasramam / Traduction française : Eleonore Braitenberg