Trois modes de conscience (suite et fin)
F.B. : J’ai bien compris que le basculement en mode 3 relève de la grâce. Mais je me souviens aussi que l’ensemble de l’enseignement de Swâmi Prajnanpad et d’Arnaud Desjardins repose sur le mot pratique. Qu’est-il donc possible de pratiquer pour nous ouvrir à la grâce de ce basculement en mode 3 ?
F.B. : J’ai bien compris que le basculement en mode 3 relève de la grâce. Mais je me souviens aussi que l’ensemble de l’enseignement de Swâmi Prajnanpad et d’Arnaud Desjardins repose sur le mot pratique. Qu’est-il donc possible de pratiquer pour nous ouvrir à la grâce de ce basculement en mode 3 ?
Alain Bayod : A
une époque, je parlais beaucoup de ce que j’appelais « le doute
identitaire ». Pour vivre l’expérience du mode 3, il est nécessaire de
cultiver ce doute avec beaucoup de persévérance. On n’ira pas très loin
si on se cramponne à la vision habituelle : « T’es qui toi ? Ben, j’suis
moi ! Tu veux ma photo ? » Si on reste dans cette conviction il nous
sera impossible d’investir suffisamment d’énergie dans la question :
« Qui suis-je ? » Nous sommes tellement convaincus de savoir qui nous
sommes. Vient le moment où il faut oser remettre nos croyances en
question ; avoir le courage de prendre au sérieux les maîtres auxquels
nous faisons par ailleurs tellement confiance. Il faut se demander avec
beaucoup de gravité : mais de quoi parlent tous ces sages ? Que
veulent-ils dire quand ils affirment que nous ne sommes pas ce que nous
croyons être ? Il faut dresser l’oreille : « AH ??? Je ne suis pas ce
que je crois être ? Mais je suis qui alors ? » Ce n’est plus une
question philosophique mais une question existentielle ? Je me rappelle
d’une réunion au cours de laquelle Arnaud avait très lourdement insisté
sur ce thème. Je revois la manière dont il nous interpellait :
« J’insiste, écoutez-moi ! Je vous le dis en vous regardant un par un :
vous n’êtes pas ce que vous êtes persuadés d’être ! Tous vos problèmes,
toutes vos souffrances viennent du fait que vous êtes ego centrés. Mais
vous n’êtes pas ce petit être séparé et limité. Vous êtes la conscience
libre, éternelle, infinie. » Quelque fois, il nous regardait avec
intensité et nous demandait : « Vous y croyez à ça ? » Nous on se
tortillait un peu gênés en marmonnant un truc du genre : « Ben… » À un
moment donné il s’agit donc de faire preuve de ce que j’appellerai une
curiosité essentielle. Qui suis-je vraiment ? Cette question ne doit pas
nous laisser en paix. Il faut aussi admettre, et là on sort clairement
de la pratique au sens volontariste du terme, que ce mode 3 ne peut pas
se comprendre. Il est de l’ordre de la spontanéité, de la naïveté. Pour
illustrer ce point, je prends toujours le même exemple parce que je le
vis au moins une fois par an en Ardèche. Je veux parler de l’instant
magique où, je m’aperçois qu’il commence à neiger. Je m’approche de la
fenêtre, et pendant quelques secondes je me trouve dans les bonnes
dispositions pour basculer de l’autre côté. Il n’y a plus de place pour
l’intellect. C’est un moment de magie et d’émerveillement pendant lequel
je suis débarrassé du moi. Ce n’est plus moi qui regarde, qui pense,
qui ressens. Comme dit l’Inde, il y a alors une unité aussi brève que
totale entre « ce qui est perçu, ce qui perçoit et le fait de
percevoir ».
F.B. : Je
me souviens de t’avoir entendu dire que la découverte du mode 3 était
le début et non l’aboutissement du chemin. Je trouve ce point de vue
passionnant et inhabituel. Beaucoup de chercheurs spirituels ont en
effet l’habitude d’envisager « l’Éveil » comme l’aboutissement du
chemin.
Alain Bayod : Oui. [Silence] Je
sais que certains sont dérangés par cette manière d’envisager les
choses. Je vais donc essayer de nuancer quelque peu mon propos. En
théorie, il est tout à fait possible que cette découverte préalable ne
soit pas nécessaire. Je peux tout à fait admettre qu’un certain nombre
de pratiques, qu’il s’agisse d’ascèses basées sur le service, la
dévotion, le discernement, puissent, dans des conditions extrêmement
favorables, amener le lâcher prise dont nous parlons. C’était évidemment
aussi le cas de cette incroyable alchimie psychocorporelle qu’était le
hatha-yoga de l’antiquité indienne. C’est possible… Mais cela ne
correspond en rien à mon expérience personnelle. Il y a maintenant plus
de trente ans que j’accompagne des gens sur ce chemin et force est de
constater que le fait de travailler exclusivement sur nos processus
mentaux et émotionnels (donc de rester en mode 2) ne nous mène pas à ce
doute identitaire qui est la condition sine qua non du basculement dans
le mode 3. Ce qui me confirme dans cette idée, c’est que l’enseignement
de Swamiji se base sur quatre piliers. On va s’épargner les mots
sanskrits :
1 - La science du Vedanta
2 - La destruction du mental
3 - La purification de l’inconscient
4 - L’érosion des désirs
1 - La science du Vedanta
2 - La destruction du mental
3 - La purification de l’inconscient
4 - L’érosion des désirs
Alain Bayod : J’ai ma propre traduction de ces quatre piliers. Je le traduits le premier pilier par : « Au fait, de quoi s’agit-il ? De la possibilité de découvrir ma nature divine et d’en faire l’expérience. » OK. Passons maintenant au pilier numéro deux : « Comment vais-je y arriver ? Par la destruction du mental. » En un sens tout est dit. Pourquoi avons-nous besoin des piliers trois et quatre ? Parce que, sauf cas exceptionnel, et là, je pense à des êtres de la trempe de Ramana Maharshi, la découverte n’est pas l’établissement. Mais cette découverte, pour incomplète et éphémère qu’elle soit est indispensable. On ne peut pas intégrer quelque chose que l’on n’a pas découvert. Cet « éveil » initial va être oublié plus ou moins rapidement. Tout le chemin va ensuite consister à y revenir de manière inlassable à chaque fois qu’on le perdra à nouveau de vue. J’insiste sur un point important : le fait d’avoir vécu ce premier éveil ne nous dispense pas d’accomplir notre boulot d’êtres humains. Éveil ou pas il faudra bien tenter de réaliser les quelques grands désirs incontournables que nous portons en nous et s’armer de patience et de courage pour défaire ce que l’Inde appelle si joliment « les nœuds du cœur ». Mais quelle que soit l’ampleur du travail à réaliser, rien ne nous empêche de nous intéresser dès maintenant à la dimension spirituelle. Arnaud répétait souvent une formule qui m’a beaucoup frappé : « Pas quand, pas si, maintenant ! » La possibilité spirituelle nous est accessible à tout moment. La pratique authentique est une pratique en croix, pas une pratique en angle. Comme disait Daniel Morin : « Le spirituel quand et le spirituel si, c’est le spirituel jamais ! »
F.B. : Les
maîtres tibétains parlent beaucoup des « moyens habiles » qu’ils
utilisent pour accéder à ce qu’ils appellent la véritable nature de
l’esprit. Quels sont ceux dont tu as fait le plus souvent usage dans le
cadre de ta pratique ?
Alain Bayod : Les moyens habiles les plus simples se révèlent parfois les plus efficaces. Le
silence, l’immobilité et la contemplation constituent ainsi de
formidables portes d’accès vers le mode 3. Je reviens très souvent sur
ce point. Ce n’est pas que je radote mais ça me paraît tellement
important. Et puis on a pas trouvé tellement mieux. Ceci dit, j’ai
pratiqué avec beaucoup de profit les exercices mis au point par Douglas
Harding. Lors d’une émission récente (sur Baglis TV), tu m’as déjà
interrogé sur le rôle décisif que cet homme a joué dans ma vie. Je peux
affirmer sans exagération que la rencontre de Douglas a été déterminante
pour moi. D’un point de vue ordinaire et spirituel, il y a eu un avant
et un après. C’est grâce à Douglas que j’ai enfin pu accéder au mode 3.
Le basculement s’est fait le premier novembre 1993 à 11h00 alors que ma
tête se trouvait enfoncée dans l’une des extrémités d’un tube en papier.
Les deux questions que Douglas nous a posées à ce moment résonnent
encore à mes oreilles. Il nous a d’abord demandé « En vous basant sur
votre expérience présente, combien de visages voyez vous dans le
tube ? » avant d’enchaîner sur la question suivante :
« Vous voyez le visage de l’ami qui vous fait face ? Que voyez-vous de
votre côté du tube ? » Rien ! C’est là que l’évidence m’a sauté aux
yeux. De mon côté, il n’y avait qu’un espace de présence et
d’ouverture. [Silence] Douglas
a inventé un nombre d’exercices considérables. Il faut dire qu’à partir
de l’âge de 35/40ans, il a passé la plus grande partie de son temps à
concevoir des méthodes de passage en mode 3. Ça a été sa passion et son
génie. Pour ma part, surtout depuis la maladie, je pratique beaucoup la
méditation couchée. Ce que le yoga appelle la « posture du cadavre ».
C’est un exercice d’une simplicité redoutable. Il consiste tout
simplement à s’allonger sur le sol, les yeux fermés et à rester immobile
un certain temps. Je conseille toujours de faire durer l’exercice au
moins une demie heure. Arnaud, qui aimait et pratiquait beaucoup cette
posture y avait apporté un petit raffinement : il se bouchait également
les oreilles. Si on reste lucide pendant la pratique, on s’apercevra
d’une part que le seul fait de fermer les yeux suffit à abolir le monde
des formes et d’autre part, que nous compensons immédiatement cette
disparition à l’aide de la mémoire. Nous recréons par le souvenir la
forme du corps devenu invisible. Cela nous permet de préserver notre
croyance fondamentale : « Je suis MOI et seulement moi. Moi limité,
séparé, fermé sur moi-même… » Par contre, si on lâche prise et que l’on
accepte d’être dans l’évidence de l’instant présent, c’est l’ouverture
immédiate. Quand on y pense, il est assez drôle que cet exercice soit si
efficace puisque tout le monde est amené au moins une fois par jour à
se coucher et à fermer les yeux. Comment se fait-il que plus de gens ne
fassent pas l’expérience du mode 3 ? Cela vient sans doute du fait qu’il
n’y a pas d’intention. C’est ça qui fait toute la différence.
F.B. : En dehors de la « posture du cadavre », as-tu recours à d’autres moyens habiles pour t’exercer à passer en mode 3 ?
Alain Bayod : Comme
je passe une bonne partie de mes journées à entrer en relation avec
d’autres gens, l’exercice le plus simple consiste, à chaque fois qu’une
personne entre dans mon bureau, à vérifier que je ne suis pas en
symétrie avec elle. Je peux voir qu’au-dessus de ses épaules, il y a une
forme qui de toute évidence n’existe pas de mon côté. Il m’arrive
d’oublier bien sûr. Mais ce n’est pas le cas maintenant. En te parlant,
je vois ton visage, tes yeux, ta bouche, tes oreilles… Force est de
constater que rien de tout cela n’existe de mon côté. Cette simple
observation me reconnecte immédiatement avec cette fameuse bascule de
novembre 93. Ce n’est pas seulement le souvenir de quelque chose qui
s’est déroulé il y a 25 ans. C’est une expérience toujours vivante,
toujours présente et toujours disponible pour peu que je sois vigilant.
Voilà, ça c’est l’un des nombreux exercices possibles… Je vais cependant
insister une nouvelle une fois sur les vertus de la « posture du
cadavre ». Je ne peux pas concevoir d’exercice plus simple ni plus
direct que de s’allonger en fermant les yeux et d’en tirer toutes les
conséquences. Il faut cependant faire bien attention de ne pas confondre
le moyen et le but. La « posture du cadavre » n’est pas une posture de
relaxation. C’est un exercice qui utilise la relaxation dans le but
d’effectuer un travail de désidentification radical. Comme son nom
l’indique, il s’agit ni plus ni moins que d’un travail d’apprentissage
de la mort. Tu imagines bien que les yogis d’il y a deux mille ou trois
mille ans se foutaient éperdument de la relaxation. C’étaient des géants
de l’alchimie énergétique pas des cadres stressés et surmenés. Aux yeux
de ces ascètes, la relaxation n’était qu’un moyen pour mourir à
eux-mêmes. Il s’agit d’un exercice éminemment spirituel.
F.B. : Le mode 3 est-il accessible à tous ?
Alain Bayod : En
théorie oui. En pratique non. Il nous reste inaccessible tant qu’on a
pas commencé à mettre son identité en doute. L’absence de ce doute
constitue l’obstacle majeur au passage en mode 3. Quelque fois ça me
ferait presque pleurer. Chez certaines personnes c’est tellement gros.
Je vois la manière dont elles s’accrochent farouchement à ce qu’elles
pensent, à ce qu’elles croient, à ce qu’elles craignent afin de ne
surtout pas laisser le moindre doute quand à leur identité. Dans ces
conditions, il n’y a pas de basculement possible. La réponse à ta
question est donc oui et non… Mais peut-être est-il préférable de dire
que cette expérience est accessible à tous et que ce n’est qu’une
question de temps… Je me souviens avoir trouvé un jour devant la porte
de mon bureau une bouteille de vin de grand prix. Renseignements pris,
j’ai appris qu’elle avait été déposé là par un homme qui, sept ou huit
ans auparavant, avait participé à l’un de mes groupes. Sur le coup,
cette histoire de mode trois l’avait laissé très perplexe… Mais c’était
tout de même resté dans un coin de sa tête. Un jour, ça lui est revenu
et il a vu. Donc…
Corinne (intervenant du fond de la pièce) : La réponse à la question est oui !
Alain Bayod : Ma femme dit que la réponse est oui. La question est donc close !(rires) Les
maîtres taoïstes disent qu’un jour surviendra ce qu’ils appellent « une
silencieuse coïncidence. » C’est une expression qui m’a toujours
touchée. J’ai attendu cette silencieuse coïncidence pendant 25 ans. Dans
le cas de Corinne, ça lui est tombé dessus avant même qu’elle aie eu le
temps de la désirer. Le monde est décidément injuste… et très
mystérieux.
F.B. : Question
suivante. Je continue à tourner autour du même thème comme un renard
autour d’un poulailler. Pour nous occidentaux modernes, ce doute
identitaire est un gros morceau à avaler. Cette possibilité ne nous
effleure même pas l’esprit. Comment alimenter ce doute identitaire ?
Autrement dit, comment commencer à mettre en cause ce qui a pour nous la
force d’une évidence ?
Alain Bayod : En tant que professeur de yoga, j’avais lu le Hatha Yoga Pradîkipâ. Sur les conseils d’Arnaud, j’ai également lu deux autres textes fondateurs du Hata yoga : le ShivaSamhita et le Gheranda Samhita qui
sont des compilations d’enseignements très anciens. Les deux livres
insistent sur l’importance fondamentale du darshan et du satsang.
Autrement dit la nécessité de la fréquentation des sages et des saints.
Si les « yogis professionnels » de l’Inde antique, accordaient une telle
importance à ce genre de pratique, nous autres modernes devons prendre
ce conseil très au sérieux. L’expérience m’a montré combien le darshan
est précieux. Le mode 3 est extrêmement contagieux. Quand on est en
présence d’un homme ou d’une femme qui vit en permanence sur ce mode, on
est dans les meilleures conditions pour en faire soi-même l’expérience.
Comme tout le reste, ce n’est pas garanti sur facture mais cela apporte
tout de même une aide considérable… Ce qui peut également être très
précieux, c’est de se plonger encore et encore dans les textes des
maîtres. Je ne peux pas dire que ces lectures m’aient facilité le
passage en mode 3. Elles m’ont en revanche aidé à valider l’expérience. [Silence] Vivre
l’expérience n’est pas suffisant. Pour la goûter pleinement et
commencer à l’intégrer, même de manière très modeste, il faut la
valider. Pour ce faire, les textes des grands maîtres, de Ramana
Maharshi à Maître Eckhart en passant par Saint Augustin et les maîtres
tibétains m’ont été d’un secours extraordinaire. Si on les lit d’un œil
averti, on s’aperçoit qu’ils ne parlent tous que de cette expérience
fondamentale. La seule chose qui change d’une tradition à l’autre c’est
le vocabulaire. Un shaman amérindien va parler de Wakatanka et un maître
tibétain de la véritable nature de l’esprit. Pour celui qui a basculé,
ne serait-ce qu’un instant en mode 3, les deux se réfèrent très
clairement à la même présence qui est en même temps une absence. Voilà
pour les aides. Comme je l’ai déjà dit, le reste dépend de la Grâce.
Celle-ci va se manifester dans nos vies par des chocs. Ces chocs peuvent
être qualifié de terribles ou de merveilleux. Nous pouvons expérimenter
le mode 3 en croisant le regard d’un enfant, en écoutant une musique
sublime ou lors d’un rapport sexuel particulièrement réussi. Mais ce
choc peut également prendre la forme d’une maladie ou d’une nouvelle que
nous qualifierions ordinairement de tragique. S’il nous est donné de
lâcher prise, ce choc va nous faire découvrir que derrière le monde des
formes, celui que l’on peut regarder et photographier, en existe un
autre. C’est comme si il y avait deux plans et que l’on pouvait vivre
simultanément dans les deux.
F.B. : Le mot de la fin ?
Alain Bayod : Quoi
de mieux que de finir en répétant qu’il est indispensable d’accorder de
plus en plus de place à la contemplation dans nos vies. Il est
également très important de faire très attention aux nourritures
d’impression que nous absorbons. Je conseillerais d’éviter autant que
possible des nourritures que nous ressentons comme toxiques. Ce que
certains appellent ou appelaient « la grande messe du 20h00 » est par
exemple plus souvent une occasion de diversion que de conversion. Le
monde contemporain nous offre une belle variété de nourritures.
Certaines nous rapprochent du centre, d’autres nous en éloignent. A nous
de faire les choix les plus appropriés.
F.B. : Quelle forme prend la contemplation dans ta vie quotidienne ?
Alain Bayod : Je
pratique beaucoup l’observation du souffle. Là aussi, c’est un
exercice très simple qu’il est possible de pratiquer dans n’importe
quelle circonstance. J’observe l’inspiration et l’expiration.
L’inspiration est une naissance, l’expiration une mort. Si tu es
attentif, tu remarques qu’entre les deux, se glisse un moment très
particulier. C’est un moment de silence et d’immobilité. Ce moment
d’absence est la seule réalité. L’inspire comme l’expire se déroulent
dans le temps. Elle sont plus ou moins longues et profondes. Elles
représentent le manifesté. Le moment dont je te parle, c’est le non
manifesté. Swami Prajnanpad est très clair à ce sujet. Il disait que
pour tout manifesté il y a un non manifesté et que c’est ce non
manifesté qui est réel. En dehors de l’observation du souffle, la
contemplation peut prendre la forme de la méditation. Qu’elle soit
assise ou couchée, la méditation peut être décrite comme une
fréquentation du silence et de l’immobilité. C’est l’opportunité de
côtoyer Dieu… Dans notre contexte très matérialiste, cela peut paraître
exagéré, mais c’est bien de cela dont il s’agit. Certains peuvent se
servir de points d’appui comme la nature et la musique sacrée. Il y en a
beaucoup d’autres… L’essentiel est toujours de pratiquer avec un cœur
d’enfant. Je le répète, il est important de lâcher toute forme de
prétention. Notamment celle de comprendre… A chaque fois que je lis les
Évangiles, je suis frappé par l’insistance du Christ sur cet état
d’innocence enfantine. Il en fait une condition sine qua non pour
accéder à ce qu’il appelle le Royaume des Cieux. Pour notre plus grand
malheur, nous avons un peu trop tendance à l’oublier.
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