IMITER LE SOMMEIL
Pour commencer, le plus simple est d’imiter une façon de s’endormir assez commune à tout le monde : l’inspiration monte, s’étire un peu, puis retombe avec l’expiration, s’effondre avec une pause respiratoire à poumons vides. « En la répliquant volontairement, ma propre respiration du dormeur s’installe très rapidement et spontanément », constate Pierre Bonnasse.
Il n’y a rien à faire, ne surtout pas intervenir dans le processus pour l’apprécier tel qu’il est vraiment et non tel qu’on le pense.
Dans ce travail de repérage, il suffit d’observer le phénomène respiratoire à l’œuvre. L’écoute est portée sur l’air qui entre et sort par les narines, ou celle des deux qui est le plus en activité, et sur la sensation tactile. Quelques minutes avant que l’on s’endorme, la respiration change, chaque expiration s’allonge, s’étire et se trouve suspendue dans des rétentions naturelles à poumons vides. Le souffle s’amenuise. Le corps s’endort, consomme moins d’oxygène.
LES VERTUS DE LA FRAÎCHEUR
Sur le plan physiologique, le corps et les tensions se relâchent en profondeur, l’état de détente s’installe, les sens s’intériorisent, s’effondrent et la température du corps s’abaisse. Ce rapport au froid est important, car il permet de garder un certain éveil, contrairement à la chaleur qui entraîne l’engourdissement. Le froid nous relie à la sensation tactile, au toucher, à la peau et donc, conformément à l’interdépendance des éléments, au centre d’énergie du cœur, le centre du sommeil. C’est pourquoi, durant cette pratique, je peux essayer de rester le moins couvert possible pour sentir le froid et m’habituer à cette sensation de fraîcheur. Au niveau de la peau, cette fraîcheur se manifeste par une sensation particulière au cours de l’endormissement. Mais il ne faut pas non plus que la situation devienne inconfortable. Si nécessaire, on peut se couvrir.
DES IMAGES VENUES DE LOIN
Sur le plan mental, l’ordre et la cohérence disparaissent. Lors de la phase d’endormissement, le mental se déstructure, perd son agencement de l’état de veille, les pensées se dénouent. Je pénètre dans un monde différent, avec l’impression d’entrer et de m’enfoncer dans un profond couloir, avec des images ou des flashs qui défilent de plus en plus vite à mesure qu’approche le sommeil. Les impressions latentes se manifestent sous un nouveau regard. Des images s’associent, des souvenirs de la journée, puis d’autres en relation avec un passé plus lointain, encore identifiables, enfin certaines d’apparence inconnue.
LA NARINE GAUCHE
Sur le plan respiratoire, le souffle se confond progressivement à l’approche du sommeil avec la respiration du dormeur. Si je suis couché sur le côté droit, dans la posture du Bouddha allongé, je me concentre sur l’activité de la narine gauche, en écoutant simultanément le son intérieur, jusqu’à tranquillement glisser dans le sommeil, en pleine conscience. De l’autre côté du miroir. Cette pratique peut être conduite au milieu de la nuit. Il suffit alors de se munir d’une alarme, de se réveiller et d’alterner phases de veille et de sommeil. Mais l’exercice est déconseillé au non-initié, car il peut s’avérer déstructurant.
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