samedi 31 août 2024

Méditations

 


Pour que les actes accomplis dans le but d’aider autrui aient véritablement des conséquences bénéfiques, ils doivent être guidés par la sagesse, une sagesse qui s’acquiert par la méditation. La raison d’être ultime de la méditation est de se transformer soi-même pour mieux transformer le monde, ou de devenir un être humain meilleur pour mieux servir les autres. Elle permet de donner à la vie son sens le plus noble.

Matthieu Ricard, L’art de la méditation.



"Quelle est l'intention des méditations ? 

C'est l'intention qu'ont tous les êtres : être heureux, expérimenter le bien-être et éviter la souffrance, le mal-être !

Notre ignorance des conséquences de nos actes fait que, malheureusement, nous nous trompons souvent et nos actes, malgré notre bonne volonté, entraînent régulièrement de la souffrance pour nous-mêmes et pour les autres. Il s'agit donc d'essayer de mettre de la conscience sur nos actes.

Nous arrêter le temps de la méditation, observer ce qui se passe dans notre esprit est un premier pas vers la paix. Prendre conscience que chacun de nos actes est précédé d'une pensée. Prendre conscience que nous avons si peu de pouvoir sur le surgissement de nos pensées. Prendre conscience que nous avons la possibilité de devenir conscient de ce que nous allons faire de la pensée qui surgit.

A partir de là nous allons pouvoir commencer à essayer d'avoir une vie un peu plus consciente. Nous allons essayer de devenir conscient, de nous éveiller à notre véritable nature et à la véritable nature de tous les phénomènes.

Peut-être en arriverons nous à devenir conscient que la seule façon d'être vraiment en paix est de s'éveiller pour le bien de tous les êtres, ce qui est l'union de la sagesse et de l'amour.

Et pour tout cela nous avons à développer certaines qualités : la patience, le courage, la générosité, l'éthique, la concentration, la sagesse.

Vous voyez, il y a du travail pour chacun de nous..."

Philippe Fabri

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vendredi 30 août 2024

Silence du dedans


 "Un jour, on découvre ce silence du dedans, qui existe en dehors de tous les mouvements de l'âme. Comme un espace profond, mystérieux, inexprimable.

Ce silence du dedans n'est pas absence de bruit, mais une vie, une présence qui absorbe le temps, efface toute chose. A ce moment, le monde entier baigne dans le silence, il est enveloppé par lui, et ce silence est plénitude".

Erik Sablé, Brèves de Sagesse, Editions Dervy.



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jeudi 29 août 2024

Observation et connaissance

 


Le Bouddha nous a appris à observer les choses précisément là où elles apparaissent. Une fois apparues, elles ne durent pas ; elles disparaissent et d’autres choses apparaissent qui finissent aussi par disparaître.

Mais ce n’est pas ce que nous voulons !

Quand notre esprit est en paix, nous voulons qu’il continue à être en paix, nous ne voulons pas qu’il s’agite, nous voulons nous sentir bien !

Or, ce souhait est contraire à la réalité.

Le Bouddha nous a dit de commencer par voir et comprendre clairement la nature de tout ce qui nous entoure. Ce n’est qu’ensuite que l’esprit sera vraiment calme et paisible.

Tant que nous ne connaîtrons pas ces choses, tant que nous ne comprendrons pas nos humeurs, nous demeurerons des personnes changeantes, nous nous attacherons à nos humeurs, et cela tournera à l’entêtement et à l’orgueil. 

~ Ajahn Chah

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mercredi 28 août 2024

Amour joyeux


 Aristote écrit : « Aimer, c’est se réjouir », idée que reprendra Spinoza, quelques vingt siècles plus tard, en disant – et c’est la définition de l’amour que je préfère : « l'amour est une joie qui accompagne l’idée d’une cause extérieure ». Autrement dit, aimer c’est se réjouir de.

Si quelqu’un vous dit : « Je suis joyeux à l’idée que tu existes », vous prendrez cela pour une déclaration d’amour, et vous aurez évidemment raison. Vous aurez aussi beaucoup de chance, parce que c’est une déclaration spinoziste d’amour, ça n’arrive pas tous les jours, beaucoup de gens sont morts sans avoir entendu ça ; et puis, surtout, c’est une déclaration d’amour qui ne vous demande rien. Et ça, c’est tout à fait exceptionnel. Profitez-en bien ! Parce que si quelqu’un vous dit : « Je t’aime », mais s’avère être platonicien, son « je t’aime » signifie en vérité « Tu me manques, je te veux ». Donc il demande tout, puisqu’il vous demande vous-même. Alors que si quelqu’un vous dit : « Je t’aime » en un sens spinoziste, cela veut dire : « Tu es la cause de ma joie, je me réjouis à l’idée que tu existes ». Il ne demande rien puisque votre existence suffit à le convaincre et à le satisfaire.

l’amour selon Platon et Spinoza de André Comte-Sponville.

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mardi 27 août 2024

Alors respire....

"Le vent coule si paisible

sur le sommeil de la prairie

que les herbes semblent

inventer la brise en rêve.

Et les nuages passent sans bouger

tellement ils sont haut et loin

de nos pensées .

Et les pensées se perdent

Dans le bleu d'un autre ciel.

Alors respire le rien."

Jean Mambrino 1923-2012 - Ainsi ruse le mystère. Poèmes

peinture : Andrew Wyeth 1917-2009 Blackberries

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lundi 26 août 2024

Sortir des griffes du temps

 Bonne semaine accompagnée de repos chaleureux !


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Aussi zen qu'un bonze
Un gros chat attend son heure ~
Sagesse féline


🖊️ LD 18.05.24

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dimanche 25 août 2024

« J’ai le vague à l’âme de l’été, la nostalgie de l’enfance où le temps du repos était long »

 Paule Amblard arpente les rues désertées du Paris estival… et cette saison lui évoque l'insouciance de ses jeunes années, les déambulations des poètes, l'abandon au présent des spiritualités orientales.



À l’heure où j’écris, la ville dans laquelle j’habite est dépeuplée. À Paris, les rues sont en deuil avec leurs commerces fermés par les lourdes ferrailles des rideaux gris, les trottoirs sont désertés des humains, des poussettes, des chiens. Je pourrais me réjouir de ce calme retrouvé, où la cité semble reprendre souffle.

Débarrassée de son trop-plein d’habitants, elle apparaît nue dans la beauté de ses musées, de ses monuments, de ses immeubles de vieilles pierres, de ses éléments qui n’appartiennent qu’à elles : une entrée de métro signée Guimard, une fontaine Wallace avec ses cariatides, un bouquiniste le long de la Seine. La pierre reprend ses droits sur la foule qui s’est enfuie, elle redevient un objet de contemplation. Je pourrais me réjouir de ce spectacle qui brille pour une poignée d’égarés qui ne sont pas partis. Mais le temps radieux m’invite ailleurs.


Ce bonheur d’enfant

J’ai le vague à l’âme de l’été, la nostalgie de l’enfance où le temps du repos était long, heureux, loin de mon quotidien d’écolière. L’été avait le goût de pêche, l’odeur de fleur et de vent, la surprise de l’instant non prévu, le sourire des adultes détendus. C’était si simple, le temps d’enfance, à rêvasser, à bouger sans fatigue ou lassitude, à regarder l’infiniment petit dans une fourmi ou l’infiniment grand dans les constellations célestes.


À l’heure où je devrais travailler, j’aimerais voyager dans ce passé des étés de l’enfance, revoir mon grand-père dans le jardin confectionner pour ma sœur et moi des pagnes de Tahitiennes avec des fanes de carotte. J’aimerais revenir dans l’église où nous allions chaque dimanche célébrer la messe avec ma grand-mère, l’entendre chanter fort à me faire rougir d’être à ses côtés, mettre ma main dans la sienne à l’heure de communier, aller dans le cimetière sur la tombe familiale pour dire un bonjour hebdomadaire à ceux qui sont partis et nettoyer la pierre, l’orner de nouvelles fleurs et enfin revenir dans la maison, rejoindre mon grand-père qui ne croit pas mais respecte la ferveur de son épouse.

J’aimerais retrouver ce bonheur d’enfant fait de grandeurs et de manques, d’engouements et d’ennuis. Pourquoi à l’âge adulte est-ce devenu si complexe de vivre pleinement, sans crainte, en faisant confiance à notre destinée ? Il faudrait faire comme les bouddhistes, laisser passer les nuages des pensées, des obligations, des projections pour fixer sa conscience sur l’instant présent, qui laissera sa place à un autre instant.


Une question de conscience

Il faudrait être comme les poètes qui n’ont pas besoin de sortir de chez eux pour déambuler dans la nature et être en communion avec le monde : « J’irai dans les sentiers, / Picoté par les blés, fouler l’herbe menue : / Rêveur, j’en sentirai la fraîcheur à mes pieds. / Je laisserai le vent baigner ma tête nue. / Je ne parlerai pas, je ne penserai rien : / Mais l’amour infini me montera dans


l’âme », écrit Rimbaud dans son poème Sensation.

Il faudrait être comme les voyants, sentir le ravissement spirituel, quitter nos pesanteurs, se retourner et voir le ciel ouvert comme Jean à Patmos. Que l’on reste, que l’on parte, on voit bien que tout ceci est une question de conscience. Vacances ou non, il s’agit de trouver la bonne orientation, celle qui mène à l’Orient de nous-mêmes, vers la lumière qui est la nôtre.

Alors les nuages, les nostalgies seront laissées à ce qu’ils sont, des souvenirs. Si vous partez en vacances ou si vous ne partez pas, - puissiez-vous goûter les pêches et sentir l’odeur du vent. « Ici une buée, et là une buée / Et après la Clarté ! » (Emily Dickinson). 


Paule Amblard

Historienne de l’art, spécialisée dans l’art du Moyen Âge et la symbolique chrétienne, elle est l’autrice de l’Apocalypse de saint Jean, illustrée par la tapisserie d’Angers (Diane de Selliers, 2010), des Enfants de Notre-Dame et de la Chambre de l’âme (Salvator, 2021 et 2023).

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samedi 24 août 2024

lumière de la nuit

 Hexagramme du samedi 24 selon l'almanach Ton Shu :

29 - "L'Insondable" ou "L'Abîme" 坎 (Kǎn)

Il est constitué de la répétition du trigramme Kǎn associé à l'eau, au danger, aux défis.
"La peur est une attraction négative." (Swami Prajnanpad)
Imaginons une nuit sans étoiles, où les ténèbres enveloppent tout, rendant le chemin invisible et les pas incertains. Le silence oppressant amplifie chaque souffle, tandis que l’air, lourd et stagnant, semble drainer les forces. Dans cette obscurité totale, l'esprit vacille, cherchant désespérément un repère, une lueur rassurante.
Cette nuit noire incarne nos moments de doute, de peur, où l'avenir semble voilé, imprévisible, et où chaque décision pèse lourdement sur notre conscience, alourdissant un corps déjà épuisé par l’incertitude.
L'enseignement suggéré par l'hexagramme 29, est une invitation à avancer malgré le désarroi.
Parfois, nous nous retrouvons prisonniers d'un cycle de difficultés, comme englués dans un marécage d’épreuves sans fin, qui épuise notre énergie et affaiblit notre volonté. Dans ces moments-là, il est crucial de ne pas céder à la panique, ni de sombrer dans le découragement ou l’isolement.
L’obscurité, tel un voile trompeur, déforme la réalité, créant des ombres menaçantes qui rendent les obstacles plus terrifiants qu’ils ne le sont en vérité.
Pourtant, il ne faut pas oublier que les étoiles sont simplement cachées, prêtes à réapparaître lorsque la nuit commencera à se dissiper. Ainsi, l' Insondable nous exhorte à persévérer.
Chaque pas doit être mesuré, chaque décision mûrement réfléchie.
Il ne s'agit pas de se précipiter aveuglément ou de se laisser submerger par la peur, mais de progresser avec détermination et sagesse, même si cela implique parfois de prendre des décisions moralement coûteuses ou de tendre la main pour demander de l’aide.
Même dans la nuit la plus noire, il existe toujours une lueur d'espoir pour ceux qui savent attendre, affronter leurs peurs, et avancer prudemment vers l’aube inévitable. La lumière finira par percer les ténèbres.
De même que les eaux profondes de l’Insondable cachent des dangers et des mystères, l'inconscient abrite des forces psychiques puissantes – conflits, désirs cachés, pulsions, souvenirs refoulés – qui ne sont pas immédiatement accessibles, mais qui influencent néanmoins nos vies, parfois en générant des troubles psychologiques ou des comportements problématiques. Comme le Yi Jing conseille de faire preuve de persévérance dans les moments difficiles, la psychothérapie ou un travail "spirituel" nous invite à un travail intérieur profond, continu et engageant pour explorer ces recoins obscurs de notre psyché. Ce cheminement, bien que souvent ardu, conduit finalement à une libération.
Ainsi, l'hexagramme 29, avec son image d’eau profonde et insondable, devient une métaphore puissante des profondeurs de l’inconscient et de son travail de dévoilement.

Han Hi-Yes

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vendredi 23 août 2024

jeudi 22 août 2024

Jour de transformation...

 Hexagramme du 22 / 08 ..., il est tellement inspirant

🙂 :
50 - "Le Chaudron"
"Ding" (鼎)
Cet hexagramme est constitué des trigrammes suivants :
• En haut : Li (☲), le trigramme du Feu (火).
• En bas: Sun (☴), le trigramme du Vent ou du Bois (風).
Sous l’arche céleste, un pont sacré s’étend, invisible, reliant la terre dense et riche à l’infini des cieux. Ce pont, c’est le Chaudron, cet ancien symbole de transformation et de communion, où l’alchimie du feu et de la matière opère en silence.

Ambiance du jour :
Aujourd’hui, l’univers tout entier semble respirer au rythme de cette énergie subtile. C’est une journée où les choses se mettent en place avec une lenteur presque solennelle, où chaque geste, chaque parole, résonne avec un écho profond. Comme les piliers du pont, nos intentions se dressent, solides et inébranlables, pour soutenir cette traversée entre le tangible et l’intangible.
Dans le domaine affectif, ce pont est celui qui unit les cœurs, parfois à distance, parfois dans une proximité brûlante. Les liens se renforcent dans ce creuset sacré, où le temps joue en notre faveur, invitant à la patience et à l’attention portée à l’autre. C’est le moment de construire sur des fondations profondes, de laisser les relations évoluer avec la sagesse du feu qui ne consume pas, mais transforme.
Dans la sphère professionnelle, ce jour est une étape cruciale. Ici, les projets ne sont pas simplement des tâches à accomplir, mais des graines semées dans la terre du quotidien, appelées à croître grâce à l’inspiration et aux efforts partagés. La créativité s’élève comme une vapeur douce qui monte du chaudron, prête à prendre forme dans la réalisation. C’est une période pour innover, pour réévaluer avec soin, et pour guider avec une vision qui traverse le pont, reliant le présent tangible aux aspirations les plus élevées.
Ainsi, sous l’influence bienveillante du Chaudron, nous avançons avec respect et intention, conscients que chaque pas sur ce pont sacré est un acte de création.
C’est un jour où le ciel et la terre se rencontrent dans un espace de potentialité pure, où ce que nous préparons avec soin aujourd’hui deviendra les offrandes de demain, des cadeaux faits à nous-mêmes et à l’univers tout entier.
On ne peut évoquer le chaudron sans faire le lien avec le chamanisme car il en est le cœur battant, un symbole où convergent les forces célestes et terrestres. Il est le creuset de transformation, où le chaman, tel un alchimiste spirituel, mélange les énergies du monde visible et invisible. Dans son métal brûlant, les matières brutes sont purifiées, transmutées en sagesse et en guérison. Le chaudron devient alors un portail, un utérus cosmique où naissent les visions, où la vie et la mort s'entrelacent dans une danse infinie.
Les flammes en dessous libèrent l’essence des herbes, des chants, et des prières, les transformant en un souffle sacré qui monte vers les cieux. Chaque offrande devient un pont, chaque rituel, une cérémonie de communion entre l’humain et le divin, où les esprits sont nourris et apaisés.
Dans la profondeur de sa transe, le chaman plonge dans les mondes inférieurs ou s'élève vers les sphères célestes, traversant le voile de la réalité pour dialoguer avec les esprits, recueillir leurs conseils, et ramener la guérison.
Le chaudron devient ainsi l’outil de cette navigation mystique, un sanctuaire où les visions se forment, où le chaman, guidé par la sagesse ancestrale, traverse les dimensions pour restaurer l’équilibre entre le ciel et la terre.
A travers ce lien profond entre l'homme et le bol, se révèle la nature du chamanisme : une voie de transformation, de connexion sacrée, où chaque offrande, chaque rituel, et chaque voyage spirituel sont autant de pas sur le pont invisible qui unit l’éther au sol, le divin à l’humain.

Par Han Hi-Yes
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mercredi 21 août 2024

Douleur chronique


 À toutes celles et ceux qui endurent la douleur chronique sans trouver les mots pour la dire, pris au piège d’une prison d’autant plus redoutable qu’elle est invisible. Tenter de lui jeter un sort par le pouvoir cathartique de la poésie. Continuer, persévérer, ne pas rester figer, garder le fil du mouvement vital. Sortir de l’isolement en osant parler. Se fier à ce que le corps raconte de notre histoire et avancer main dans la main avec les thérapeutes qui jalonnent ce parcours du combattant pas toujours pacifique. Mon maître de chant Jean-Pierre Blivet m’a transmis une clef essentielle, fondamentale pour libérer la voix autant que le corps qui m’a beaucoup aidée :

 « P a s d e p r e s s i o n , p l u s d ’ e s p a c e  ». 

Plus je lutte, plus je me contracte. Plus je me contracte, plus j’exacerbe la douleur à mesure que les tissus se resserrent mis sous pression manquant d’oxygénation. En d’autres termes R E S P I R E R en conscience pour apporter de l’espace en soi là où la douleur tend à nous assécher. Je sais combien cela est difficile à mettre en œuvre mais je sais aussi que cela en vaut la peine. Laisser la vie chanter à travers soi aussi ténue et fragilisée soit-elle. Le souffle est - si ce n’est la voie - une des voies à suivre pour apaiser, transcender la douleur. Céline Dion nous en a montré un édifiant et bouleversant aperçu lors de la cérémonie d’ouverture des JO de Paris 2024. 

Juliette Touret
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mardi 20 août 2024

Deux déesses...


 Le fondement d'une existence réussie, c'est à mes yeux, je le disais il y a quelque temps, la foi dans la vie : quoi qu'il arrive, où que nous en soyons, même au pire du pire, au cœur du chaos de l'existence. Un chaos souvent perçu comme négatif alors qu'en réalité, il n'est qu'un réservoir encore informe de ressources inimaginables. 

C'est pourquoi Eris, déesse grecque de la discorde (Discordia pour les Romains), se situe à la base de la lyre cosmique dont joue la déesse Harmonie (schéma de gauche). Elle est fille de la Nuit (Nyx) et petite-fille du Chaos primitif, celui qui n'a pas de nom et dont tout procède.

D'une manière plus concrète, ce chaos, c'est l'ensemble de notre alphabet en désordre, c'est-à-dire toutes les potentialités de notre langage, par lequel nous cherchons à donner un sens au monde où nous jouons notre rôle, sans jamais pouvoir (heureusement !) en épuiser le mystère.

Regardez bien cette déesse qui semble redoutable, avec ses cheveux de jais et cette longue mèche qui lui barre le visage, le corps perdu dans un immense tourbillon : elle tient dans sa main une pomme d'or ! 

Bien sûr, dans le mythe grec, cette pomme est la cause de la terrible guerre de Troie, qui dura 10 ans, selon Homère. Mais si nous élargissons notre vision, nous constaterons que le jardin des Hespérides est un fabuleux Eden - certes très bien gardé 😉 - qui contient une multitude de fruits d'or ! 

N'est-ce pas là l'essentiel ?


Source : dessins de Marie Dewulf pour L'Oracle alphamythique -  texte Sabine Dewulf.

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lundi 19 août 2024

Un jardin d'instants...

A un jardin

Oui nécessaire clôture
Pour que le lieu devienne lien
Et le temps attente.

Que le sentier mène à l’amante,

Que tout désir aille à son terme,
Que chaque fleur porte visage et nom,
Que chaque fruit préserve faim et soif,
Que vent et pluie soir et aube
Renouvellent leurs offrandes sur l’herbe,
Que l’infini, lui, fasse halte
Sur la cime des pins.

Oui nécessaire clôture
Pour que le lieu soit appel,
Et l’instant répons sans fin.

François Cheng - La vraie gloire est ici

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dimanche 18 août 2024

La grandeur de l’être humain

 

Le quatrième épisode de la série documentaire Sur les Routes spirituelles s’intitule « La grandeur de l’être humain » ... Merci à "Les Films de la Table 10".


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samedi 17 août 2024

Laisser la place

 


Nous pensons que si nous méditions juste assez ou si nous faisions assez de jogging ou si nous mangions une nourriture parfaite, tout serait parfait. Mais du point de vue de quelqu'un qui est éveillé, c'est la mort. Chercher la sécurité ou la perfection, se réjouir de se sentir validé et entier, autonome et confortable, est une sorte de mort. Il n'y a pas d'air frais. Il n'y a pas de place pour que quelque chose entre et interrompt tout ça. Nous tuons le moment en contrôlant notre expérience. 

Faire cela, c'est se préparer à l'échec, parce que tôt ou tard, nous allons vivre une expérience que nous ne pourrons pas contrôler : notre maison va brûler, ou quelqu'un que nous aimons va mourir, ou nous allons découvrir que nous avons un cancer, ou une brique va tomber du ciel et nous frapper à la tête, ou quelqu'un va renverser du jus de tomate partout sur notre costume blanc.

Le truc est de continuer à explorer et de ne pas renflouer, même lorsque nous découvrons que quelque chose n'est pas comme ce que nous pensions. C'est ce que nous allons découvrir encore et encore et encore : rien n'est comme ce que nous pensions. Les choses sont toujours en transition, si seulement nous pouvions nous en rendre compte. Rien ne se résume jamais à la façon dont nous aimons les rêver. 

L'état hors centre, entre-deux, est une situation idéale, une situation dans laquelle nous ne nous faisons pas prendre et où nous pouvons ouvrir notre cœur et notre esprit au-delà des limites. C'est une situation très tendre, non agressive et ouverte : rester avec un tremblement, rester avec un cœur brisé, rester avec un ventre qui gronde, rester avec le sentiment de désespoir et de vouloir se venger — voilà le chemin du vrai réveil. 

Les choses qui s'écroulent sont une sorte de test et aussi une sorte de guérison. Nous pensons que le but est de réussir le test ou de surmonter le problème, mais la vérité est que les choses ne se résolvent pas vraiment. Elles se rassemblent et elles s'effondrent. Puis elles se réunissent à nouveau et s'effondrent à nouveau. C'est comme ça. La guérison vient du fait qu'il y ait de la place pour tout cela : place au chagrin, au soulagement, à la misère, à la joie.

~ Pema Chödrön 

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vendredi 16 août 2024

Deux réalités (fin)

 Il n'y a pas de séparation, pas de dualité, pas d'opposition entre la vague et l'Océan, entre le moi existentiel et notre réalité essentielle.

La souffrance propre à l'être humain, souffrance fabriquée mentalement, est la souffrance de la séparation. Une souffrance qui n'a donc pas une cause réelle mais notre représentation mentale du réel. Représentation que je me fais ou représentation à laquelle on m'invite à croire (le credo) ou à laquelle on m'oblige à adhérer (le dogme).

La vague qui pense être séparée de l'Océan, l'homme qui pense être séparé de sa propre essence souffre ; l'homme souffre d'un manque.

Non. Il souffre de l'impression d'un manque.

“Je ne souffre pas de ce qui manque ; je souffre d'ignorer ce qui ne manque pas.” K.G.Dürckheim


Afin de perdre l'ignorance, le maître Zen nous invite à nous mettre en chemin. Le chemin est la technique, la technique est le chemin. Un chemin d'expérience et d'exercice.

Vous êtes actuellement en vacances au bord de l'Océan. Profitez-en pour vous allonger à la surface de l'eau, et laissez-vous porter par cette action de l'Océan qu'est le va-et-vient des vagues. Comme, lorsque vous pratiquez zazen, vous vous livrez au va-et-vient qu'est le souffle vital. Ne rien faire, rien. Et le corps vivant que nous sommes prend de lui-même la forme du calme.

“La meilleure façon de purifier une eau boueuse est de la laisser tranquille.” (Alan Watts)

Jacques Castermane

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jeudi 15 août 2024

Deux réalités (1)

 

Tout être humain est tendu entre deux réalités

« L'homme est tendu entre deux réalités : sa réalité existentielle au cours de laquelle il se sent menacé — la durée de son existence dans le monde — par le chaos des événements extérieurs ET sa réalité essentielle, qui n'est autre que sa vraie nature, ce que j'appelle son être essentiel. » (K.G. Dürckheim)

"L'homme se sent menacé — la durée de son existence — dans le monde" ! Cela a toujours été et l'est encore aujourd'hui.

Aujourd'hui comme hier la menace relève de la puissance de la Nature. Ici un tremblement de terre ; là un tsunami. Ici une sécheresse ; là une inondation. Aujourd'hui plus qu'hier des dangers relèvent de la prétention de l'être humain. Exemple : identifié à son ego la vanité de l'homme est telle qu'il pense vivre – dans – la nature et qu'il peut donc dominer, contraindre, ce quelque chose à quoi il fait face. En réalité, comme tous les êtres vivants, l'homme vit – de – la Nature.

La vraie nature de l'être humain, sa réalité essentielle, est de la même Nature que la Nature.

La Nature est notre propre essence, notre réalité essentielle. Pour se libérer de cette menace le devoir de l'homme est de se mettre au service des lois de la Nature. Je crains que l'obsession de l'intelligence artificielle l'en dispense plus encore.

Lorsque, au début de mon séjour à Rütte (1967), j'ai dit à Graf Dürckheim que je n'arrivais pas à comprendre la relation entre ce qu'il désigne comme étant notre être essentiel et ce qu'il appelle le moi existentiel, il a souri et m'a dit "Je vous comprends ! Parce qu'on ne peut pas comprendre cette relation. Mais vous pourriez commencer par lire un récit qui me donne l'impression d'être une véritable clé de compréhension de la souffrance qui est propre à l'être humain. Cette allégorie attire notre attention sur la relation de la vague avec l'Océan".

Quel est ce récit ?

Le lendemain, sous la porte de ma chambre, s'était glissée cette métaphore qui répond à la question : « Qui suis-je ? »


LA VAGUE ET L'OCEAN.

« La vague n'est pas un objet différent de l'Océan, quelque chose qu'il serait possible de séparer de l'Océan. Le sentiment qui anime la vague tout au long de son parcours en surface, dans ce qu'on appelle le monde, est le sentiment de sécurité.

La sécurité ! Comment se fait-il ? Parce que la vague se sent UNE avec l'Océan.

Si la vague se différencie de l'Océan en pensant il y a moi et en dessous de moi il y a quelque chose, l'Océan, son parcours en surface est animé par l'angoisse et les états qui l'accompagnent. »

Cette allégorie reprend ce qui est commun à la plupart des voies de sagesse qui ont leurs racines en Orient et en Extrême-Orient.

Tout enseignant du Yoga, du Tai-Chi-Chuan, du tir à l'arc (Kyudo), de l'art du thé (Chado), de l'art du combat au sabre (Kendo), de l'art de la calligraphie (Shodo) devrait lire et relire ce qui est la clé de compréhension du fondement des ces pratiques à la fois différentes et identiques.

L'affirmation qui est commune à tous ces enseignements est que profondément, dans son essence, l'homme est réellement libre, calme, confiant. Comme la vague je peux envisager un parcours dans le monde dans la ... sécurité.

L'Océan est la matrice de chaque vague. De l'Océan s'extrait chaque vague. Chaque vague n'est autre que l'Océan. Il serait prétentieux de dire "Je suis l'Océan...!" Mais j'ai le droit de dire que "Jesuis un paquet d'Océan!"

Dans les années 1930, Graf Dürckheim pratique l'exercice appelé zazen et le tir à l'arc (Kyudo) depuis quelques mois. À D.T. Suzuki, qui lui a conseillé de ne pas aborder le Zen à travers son entendement de philosophe mais en entrant dans la pratique d'un exercice, il dit "Si je comprends bien, le Zen ouvre sur l'expérience d'être comme un poisson dans l'eau ?"

Réponse immédiate de Suzuki :"Non. Le Zen ouvre sur l'expérience d'être comme l'eau ... dans l'eau".

La Voie tracée par Graf Dürckheim, le Zen dans ce que cette tradition recèle d'universellement humain, me libère de l'illusion que la Vie est – dans - le vivant, me libère de l'illusion que l'Être est – dans - l'étant.

Le vivant, le corps vivant que je suis (Leib, IchLeib) "EST" la vie qui d'instant en instant prend forme existentielle.

Le corps n'est pas le contenant d'un contenu ... la Vie. De même que la vague n'est pas le contenant d'un contenu ... l'Océan.

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Jacques Castermane

A suivre.

mercredi 14 août 2024

La présence attentive (2)

 Est-ce le plus important dans l’existence, le bonheur ?

J’aime bien l’expression « présence attentive », qui combine deux mots extraordinaires : présence et attention. Dans cette présence attentive, plus rien n’est vraiment important, comme si tous nos besoins étaient comblés d’un coup. D’ailleurs, j’ai soigné des gens épuisés au travail qui faisaient des burn-out ou remettaient en question toute leur vie parce qu’elle avait perdu du sens à leurs yeux. Ils n’étaient plus dans le présent. Ils étaient dans la peur de l’avenir, les regrets du passé, les remords de ne pas avoir fait les bons choix, pris les bonnes décisions, dans la culpabilité. Et ils évoquaient des besoins qui n’avaient pas été comblés chez eux : être reconnu, être quelqu’un aux yeux d’un autre. Ils prenaient alors conscience qu’en s’initiant à la présence attentive, leurs besoins s’apaisaient parce qu’ils étaient tous comblés d’un seul coup. Dans cet état, les peurs disparaissent, les besoins sont comblés.

Le succès n’est pas synonyme de bonheur


Et les grandes capacités de l’être humain apparaissent : aimer, s’émerveiller, transmettre, toutes ces grandes capacités bloquées par la peur de ne pas être quelqu’un, de ne pas être à la hauteur, de ne pas être aimé. Comprendre ce que signifie être dans la présence attentive, c’est à la fois facile et difficile. Difficile, parce que dans la peine, il y a toujours la peur de ne pas être quelqu’un ; facile, parce qu’avec un petit garçon de deux ans et demi qui me prend la main et dit : « Viens jouer avec moi à l’astronaute », je n’ai qu’à être présent, à dire : « D’accord ». Pendant les prochaines minutes, toute mon attention va être avec lui. Je vais écouter ses rêves, son imagination. Je vais entrer dans cet espace où nous sommes tous les deux complètement ensemble. Des gens me disent : « Vous avez connu le succès. Vos livres se vendent bien. Ça doit être merveilleux. » Je réponds toujours : « Le succès n’est pas synonyme de bonheur. » Le bonheur et la véritable réussite sont dans la présence attentive, pas dans le succès qui est éphémère, passager. Dans la présence, on est vraiment dans un moment d'éternité.

Par quel moyen y parvenir ? Qu’est-ce qui vous paraît le plus important ?

C’est un entraînement. L’attention ne peut pas être à deux endroits en même temps. Si elle est accaparée par la peur - de ne pas avoir assez, de perdre -, par toutes sortes d’attachements, elle ne peut plus être dans la présence attentive. Alors, il faut s’entraîner. C'est possible à chaque instant de la vie. Je reviens à mon petit-fils parce que c’est ce que je vis actuellement. S’il me prend la main et que je pense à ce qui pourrait m’arriver demain si je ne pars pas pour Montréal, eh bien, je ne suis plus avec lui. Alors, je peux m’entraîner, découvrir où est mon attention : complètement dans le présent avec lui, ou dans le passé, avec des regrets, des remords, la culpabilité et toutes sortes d’émotions : ou encore dans le futur, en train de créer des scénarios catastrophes. Si je découvre où est mon attention, j'ai cette capacité extraordinaire de la ramener dans le présent : cela s’appelle la vigilance. En s’entraînant constamment, et durant toute la vie, on devient capable de ramener notre attention ici. Et alors tout s’apaise. Il y a même des relations qui se créent qu’on n’avait pas soupçonnées. Ce matin, quand j’ai retrouvé mon petit-fils et qu’il m’a dit : « Tu as un gros chagrin », c’était fascinant, car spontanément il me consolait, et il n’a pas trois ans. Nous étions dans une présence attentive de l’un à l’autre, qui faisait qu’à ce moment-là, tout était paisible et bon. Ensuite, on peut planifier le voyage à Montréal. C’est donc un entraînement : je peux constamment découvrir où est mon attention. Est-elle ici ? ou dans le passé ? ou dans le futur ? Une expression que j’aime beaucoup, très simple, mais très puissante, m’aide énormément : « Serge, reviens ici, reviens ici. Quand je prononce ces mots-là, cela ramène mon attention dans le présent. Dans les grands yeux de mon petit-fils, dans ses sourires, ses questions, je sais que je suis vraiment dans le bonheur, et que demain ou après-demain, je pourrai aller embrasser mon papa et être dans le présent avec lui, même s’il ne s’en rend pas compte. Et s’il n’est plus là, alors il s’agira d'être avec ma mère, mes sœurs, mes frères. 

Serge Marquis (extrait du magazine reflet)

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mardi 13 août 2024

La présence attentive (1)

 


Alors qu’il arrivait en France pour être auprès de sa fille sur le point d’accoucher, il venait juste d’apprendre que son père, vivant à Québec, était mourant. Nous le joignons à ce moment-là. Nous lui proposons de remettre l’interview. Il refuse. « Même si j’ai un peu de tremblements dans la voix parce que je suis sous le choc de cette annonce, je vais faire l’entrevue avec vous maintenant avec plaisir. » Cette circonstance douloureuse qu’il surmonte résume la qualité de ce médecin québécois. La présence attentive, c’est du vécu en direct.

Qu’est-ce que le bonheur ?

Bien des philosophes se sont posé cette question. J’y réponds simplement : c’est d’arriver le plus possible à avoir toute son attention dans le moment présent. En voici un exemple. Je suis aujourd’hui dans une situation incroyable. Je suis à Toulouse avec ma fille qui doit donner naissance à son bébé et j’apprends que mon papa à Québec va mourir dans les prochaines heures. Où est le bonheur dans tout cela ? Il est dans la présence totale et absolue que je peux avoir avec ma fille et aussi avec son petit garçon qui a presque trois ans. J’ai passé un moment absolument magique avec ce petit bout de chou. J’étais dans un bien-être profond d’être en sa présence, de jouer avec lui à l’astronaute, parce que toute mon attention était avec lui. Ses parents lui avaient dit que j’avais un grand chagrin. Alors, ce bout de chou de deux ans et demi a pris mon visage dans ses mains et m’a dit : « Je te fais des caresses pour ton chagrin. » Ce sont des petits moments tout simples. On cherche le bonheur ailleurs, alors qu’il est disponible à chaque instant. Le bonheur pour moi est dans l’apaisement de paquets de peurs inutiles, pour être complètement ouvert, disponible à ce qu’offre la vie dans des moments aussi difficiles que celui que je traverse présentement. Cette présence apaise la peur. Mon petit-fils, qui s’appelle Jules, avait inventé une station spatiale. Nous étions tous les deux dans l’espace. J’étais dans un grand moment de bonheur parce que la peur que mon papa parte sans que j’aie pu le revoir, l’embrasser s’est apaisée. Ce n’est pas de la négation, c’est être réaliste. J’allais pouvoir partir, aller au Québec. Il ne sera peut-être plus là quand j’arriverai peu importe. J’aurai profité de chaque instant de bonheur. Je n’avais qu'a ouvrir ma conscience, ma présence pour pouvoir les accueillir. Être vivant dans l’instant présent.

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Serge Marquis (extrait du magazine Reflets - mars 2019)

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lundi 12 août 2024

Histoire Zen


Taiyô Kyôgen (943-1027) et son maître allèrent présenter leurs condoléances à la famille d’un ami décédé.

Taiyô Kyôgen demanda à son maître : « Est-il vivant ou mort ? »

Le maître répondit : « On ne peut pas dire qu’il est vivant, on ne peut pas dire qu’il est mort. »

Taiyô Kyôgen demanda alors : « Pourquoi ne peut-on pas dire cela ? »

Le maître lui dit : « Si on ne peut pas le dire, on ne peut pas le dire. »

Taiyô Kyôgen se mit en colère : « Vous feriez mieux de me le dire ou je vous frappe ! »

Le maître répliqua : « Si tu dois me frapper, frappe-moi. Je ne le dirai toujours pas. »

Taiyô Kyôgen demanda alors : « Quel genre de maître êtes-vous ? Vous savez et pourtant vous ne voulez pas le dire à votre disciple. »

Taiyô Kyôgen frappa le maître et s’en alla. Quelque temps plus tard, son maître mourut. Taiyô Kyôgen trouva un autre maître nommé Ryôzan Enkan et lui posa la même question.

Ryôzan Enkan répondit : « On ne peut pas dire qu’il est vivant, on ne peut pas dire qu’il est mort. »

En entendant ces mots, Taiyô Kyôgen accéda à l’éveil.

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dimanche 11 août 2024

Pensées psychomagiques...

  • La vérité n'est pas la réalité. La vérité n'est que la saisie d'un des multiples aspects de la réalité.
  • Le désir de donner fait fleurir. Le désir de posséder fait flétrir.
  • Hors de notre opinion, les choses en elles-mêmes ne sont ni pures ni impures. La boue fertile est aussi pure ou impure que l'or.
  • Maître Ejo Takata m'a dit : « Vous êtes la cause de ce qui vous oppose. Il n'y a aucune opposition en dehors de toi. ”
  • Conseils pour la vie sociale : À l'intérieur le lumineux, dehors le neutre ; à l'intérieur la force, dehors la délicatesse ; à l'intérieur la noblesse, dehors la conduite commune. Ne t'exhibe pas !
  • Déclarations d'amour : Que signifie l'éternel sans ton regard éphémère ? Tel que tu es sans moins ni plus. Donnez-moi vos imperfections, je m'en contenterai.
  • Bonne éducation : Nous pouvons tous être nécessaires, peut-être jamais indispensables.
  • On lui fait du mal en forçant l'autre à recevoir quelque chose qu'il ne demande pas.

Alejandro Jodorowsky

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samedi 10 août 2024

Commémoration

 PRIERE DE L'AMI DÉFUNT 

Il y a exactement 13 ans aujourd'hui 10 août, mon ami spirituel (mon maître)-  qui dans sa forme cette fois ci s'appelait Arnaud Desjardins prenait congé de la forme en question. 

Il y a 42 ans (début août 82) un jeune homme de 23 ans portant mes noms et prénoms écrivait sa toute première lettre à cet homme qu'il n'avait encore jamais physiquement rencontré mais à travers lequel il avait entendu l'appel de la profondeur s'adressant à la profondeur. 

Cette première lettre que j'ai sous les yeux, soulignée de sa main, marque le début d'une relation en vérité intemporelle et qui se poursuit plus que jamais aujourd'hui, 13 ans après le "départ" d'Arnaud , commémoré en ce jour dans l'ashram qu'il a fondé. 

Cette année, je ne me trouve pas physiquement à cette commémoration, physiquement près de cette sépulture où je me suis rendu il y a moins d'un mois. 

Alors je partage ce texte. 

Il n'a pas été écrit spécifiquement pour "Arnaud Desjardins" mais s'applique bien entendu à lui. 

Au départ il m'est venu après avoir participé à une autre commémoration en juin, celle du départ d'un autre grand ami spirituel, Yvan Amar. 


PRIERE DE L'AMI DÉFUNT

Je ne demeure plus dans le temps

Pas plus que dans l’espace 

La sépulture où ont été mis en terre les restes du corps qui  me fut prêté, précieux serviteur de mon âme en chemin, cette sépulture existe. 

Mais vous ne m’y trouverez pas. 

Elle a été édifiée pour vous, vous qui demeurez encore au sein du temps et de l’espace. Vous êtes très bienvenus à vous y recueillir , à vous y rassembler parfois. 

Pas en mon nom mais au nom de ce Plus Grand auquel mon existence vint à être consacrée. 

Vous y trouverez un rappel de ce qui nous fit et nous fait être en relation. 

Puissiez vous y nourrir,  y raviver ce qui vous unit. 

Puissiez vous y recevoir l’invitation à ne jamais laisser les petitesses vous diviser. 

Auprès de cette sépulture, vous  trouverez le lien tissé entre vous tous à partir de ce dont je fus le serviteur 

Mais vous ne m’y trouverez pas. 

Je n’existe plus en tant que forme, sinon dans votre souvenir, je n’existe plus dans la trame de l’espace et du temps 

Et pourtant la forme dont vous vous souvenez,  dont vous pouvez voir l’image a différentes étapes de son vieillissement,  entendre encore la voix captée à divers stades  de sa maturation , cette forme évanouie demeure une porte d’entrée ;  comme un seuil du souvenir si pour vous elle en vint à être celle de l’Ami. 

Puisse donc les traces préservées de cette forme passante oeuvrer en vous comme un appel à franchir le seuil qui ouvre vers vous même  

Souvenez vous  de cette forme pour ce qu’il lui fut  donné de servir. 

Cependant, prenez garde de ne pas vénérer la forme elle même ;  défiez vous de de toute nostalgie, de tout romantisme, de tout attachement à ce qui un temps  fut mais n’est plus et ne sera jamais plus. 

Le Plus Grand vous préserve d’assimiler la forme à ce dont elle fut un fragile véhicule. 

 Gardez vous de l’idolâtrie qui est toujours blasphème . 

Aussi, n’érigez aucun piédestal à ma personne. 

Nul n’est supérieur, nul n’est inférieur, chacun est différent. 

N’effacez pas la mémoire, mais cultivez là uniquement en tant que force active au service du présent. 

Puisez en elle, apprenez d’elle pour aujourd’hui, donc pour demain, jamais pour hier. 

Je ne demeure plus dans la trame de l’espace et du temps. 

Je n’existe désormais qu’en tant que cette force non née non devenue dont je fus dans ma forme passante le si fragile serviteur 

Alors amis,  je vous en prie, cherchez moi et trouvez moi instant après instant dans le souvenir de votre essence  , dans le rappel à vous mêmes,  dans la conscience de votre dignité intrinsèque . 

Cherchez moi et trouvez moi en cette intimité libre de tout regard extérieur , de toute attente,  de toute revendication, de tout rejet et de toute appropriation . 

Cherchez moi et trouvez moi en la vie qui vous anime,  en cette énergie dont vous êtes parcelle , en cet océan dont vous êtes une vague …

Puisse le souvenir de la forme en laquelle je vins à vous servir vous inciter et vous conduire à respecter toutes les formes,  à célébrer l’un dans la danse du multiple , l’infini dans le mystère du fini 

« Ce que tu aimes vraiment demeure 

Ce que tu aimes vraiment est ton véritable héritage 

Ce que tu aimes vraiment ne te sera pas arraché 

Rabaisse ta prétention » 

écrivit un poète (Ezra Pound)

Le Plus Grand veuille que mon éphémère passage ait été et soit  pour vous une fenêtre ouverte sur l’amour qui demeure.

Gilles Farcet

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La voix de Swami Prajnanpad

Gilles  Farcet :

La parole de Swami Prajnanpad est la source et l'inspiration de bien des partages ici présentés. 

Et voilà que grâce au travail de Colette Roumanoff, chacun peut désormais entendre la voix de Swamiji, et pas seulement quelques secondes mais d'un bout à l'autre de plusieurs entretiens donnés à des élèves français. Pour celles et ceux qui se sont depuis longtemps nourris des formules de Swamiji,de sa perspective à la fois radicale et si humaine, quelle merveille ! La voix, c'est si ... parlant ! Imaginez entendre la voix du Christ ...Ou dans un autre registre, celle de Rimbaud lisant "le bateau ivre" ou de Whitman déclamant "Song of Myself' ... 

 D'autant plus remarquable, les enregistrements ici partagés s'accompagnent d'une transcription simultanée en anglais ET en français ! Je partage ici le lien vers un entretien avec Pierre Wack, mais le site en propose un certain nombre avec différents élèves. 

Alors, merci merci Colette et celles et ceux qui l'ont aidé !

Voici le lien pour écouter cette voix unique

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vendredi 9 août 2024

Vie quotidienne


"Mais si Ramana Maharshi m'a activement découragé d'avoir des relations sociales, il m'a également découragé de m'asseoir tranquillement et de méditer pendant les années où j'ai travaillé à l'ashram.
Pendant cette période de ma vie, si Bhagavan me voyait assis les yeux fermés, il m'appelait et me donnait du travail à faire.
À l'une de ces occasions, il m'a dit : " Ne t'assieds pas et ne médite pas,
"Ne t'assieds pas pour méditer. Il suffit que tu n'oublies pas que tu es le Soi. Garde cela à l'esprit tout le temps pendant que tu travailles. Cette sadhana vous suffira.
La véritable sadhana ne consiste pas à oublier le Soi. Ce n'est pas s'asseoir tranquillement les yeux fermés. Vous êtes toujours le Soi. Il suffit de ne pas l'oublier.
La méthode de Bhagavan ne crée pas de guerre entre le corps et l'esprit. Il n'oblige pas les gens à s'asseoir et à combattre l'esprit les yeux fermés.
Habituellement, lorsque vous vous asseyez en méditation, vous luttez pour atteindre quelque chose, vous vous battez pour obtenir le contrôle de l'esprit.
Bhagavan ne nous a pas conseillé de nous engager dans ce genre de combat. Il nous a dit qu'il n'était pas nécessaire de s'engager dans une guerre contre le mental parce que le mental n'a pas d'existence réelle et fondamentale.
Ce mental, disait-il, n'est rien d'autre qu'une ombre.
Il m'a conseillé d'être continuellement conscient du Soi pendant que je faisais les choses ordinaires de la vie quotidienne, et dans mon cas, c'était suffisant."
Annamalai swami
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jeudi 8 août 2024

Discipline

 DISCIPLINE

se maintenir
ou s’effondrer
se rassembler
ou s’effriter
se concentrer
ou se dissoudre
veiller
ou s’endormir
la discipline
n’est pas punition
pourvu qu’elle sache se faire
discrète en sa bienveillance
saupoudrée par pincées
légères mais récurrentes
dans la marmite du quotidien

Gilles Farcet

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