lundi 30 avril 2012

L’art d’habiter le corps avec Alexandre Jollien

La vie m’a donné un nouveau guide. Sur la table de chevet, le Voyageur chérubinique d’Angelus­ Silesius­ me console, m’apaise et me prodigue de grandes joies. Hier, j’ai savouré son poème intitulé le Serviteur de Dieu : « Mon corps ­ (Ô splendeur !) est le serviteur de Dieu, aussi ne l’estime-t-Il pas trop peu de chose pour y habiter. »


Angelus Silesius me ramène les pieds sur terre et me fait comprendre que je hais bien souvent le corps. Pour lui, c’est le temple de l’esprit, pour moi, c’est le lieu de la moquerie, des tentations et d’insatiables besoins. J’ai nié ce corps et je ne sais pas l’apprécier avec tout ce qu’il est, ses désirs, ses pulsions, ses richesses.­ Angelus Silesius me convainc qu’il a sa place, et que je me suis peut-être égaré dans la philosophie si je pensais fuir la sexualité, les pulsions et autres tentations. Et comment d’ailleurs, Angelus Silesius, mon « idole », contemplerait-il telle publicité de parfum où deux femmes à demi nues nous tendent une main accueillante ? Comment vivrait-il dans une société où l’attrait sexuel est nourri à l’envi ?


Quand je suis sorti de l’institut pour personnes handicapées (Alexandre Jollien souffre d’athétose, et a vécu dans un établissement spécialisé, ndlr), je croyais que j’étais le seul à ressentir de l’émoi devant une belle fille, ce qui me plongeait dans une culpabilité sans nom. Aujourd’hui, je découvre que la chose n’est pas si grave, et que les neuf plaisirs du corps ne sont pas forcément un péché. Et le merveilleux dans tout ça, c’est que c’est précisément un mystique qui me ramène à faire l’éloge du corps, celui que je suis loin d’habiter. Un corps de chair et d’os, non pas un corps ­idéalisé, parfait, inhumain…


Sans entrer dans les détails de mon intimité, mon cher ami m’invite à tracer une voie pour une vie saine, pour un usage des plaisirs doux et paisibles. Lorsque l’exigence est trop haute, quand la moindre pensée réveille un jugement impitoyable, l’invitation à se défaire de la culpabilité revient à accueillir avec bienveillance tout ce qui paraît hors de mon pouvoir. Car, le corps et ses désirs sont peut-être le lieu privilégié de ce que les Grecs appelaient akrasia. 
Nous n’avons pas de toute-puissance sur nous-mêmes, nous ne sommes pas toujours les maîtres à bord. J’aspire à la paix intérieure, et un panneau publicitaire montrant une jeune femme dénudée arrache littéralement mon esprit et, d’emblée, je me reproche cette minuscule incartade. Pourquoi ne pas rire de ces petits mouvements de la vie ? Pourquoi ne pas s’amuser de ces rappels qui démontrent que ma volonté n’est pas totalement souveraine. Il n’y a, assurément, pas mort d’homme, bien au contraire. Et me voilà convié à mieux habiter ce corps devant lequel je suis si ingrat. Pour m’y aider, rien de tel que des amis dans le bien. Non des contempteurs du corps pudibonds qui dépisteraient partout le scandale et, loin de m’apaiser, me jetteraient encore plus dans l’agitation. Non des hédonistes radicaux qui ne voient qu’à court terme et négligent le caractère sacré d’une relation intime, mais juste des amis en chair et en os pour me regarder droit dans les yeux quand je me trouble, pour me ­soutenir au besoin, pour être là.


Mais je devine aussi qu’il me faut varier les plaisirs car, ce n’est pas la frustration qui mène à la liberté mais la joie qui conduit au détachement. Et je reviens à mon Silesius, plein de reconnaissance. Le corps m’enlève cette volonté de toute-puissance, il me donne aussi 1 000 plaisirs simples que je ne sais pas goûter à fond.

Source : La Vie

dimanche 29 avril 2012

Les anges avec Annick de Souzenelle (3)

"Que celui qui a des oreilles pour entendre entende ! dit Jésus ! "L'Evangile est semé de cette injonction divine que déjà Israël faisait sienne : Ecoute Israël. . ." Quelle est donc l'oreille qui peut entendre ? Quel oeil, capable de voir ? Et quel est le coeur suffisamment ouvert pour comprendre ? Il semble que nos sens épris, du réel immédiat, épris du connu, ferment leurs capacités détectrices de l'essentiel !"




Dernière partie (15 min.)

samedi 28 avril 2012

Les anges avec Annick de Souzenelle (2)

Au long de décennies passées à interroger le texte biblique et les mystères de sa langue, Annick de Souzenelle a construit une lecture originale et vivante de la tradition hébraïque. Tout se fonde, dans le travail d'Annick de Souzenelle, sur une lecture pas à pas du texte hébraïque de la Genèse, à travers ses non-dits, ses allusions que seul peut comprendre celui ou celle qui a répudié les promesses illusoires de la traduction : les deux tomes volumineux d'Alliance de feu, réédités récemment, sont le fruit de ce patient cheminement. Partant d'une intuition profonde de la spiritualité chrétienne originelle, Annick de Souzenelle dégage ce patrimoine universel de sa gangue moralisatrice pour en restituer la vitalité enthousiasmante. Mettant à portée de tout un chacun la richesse infinie du texte sacré, elle nous donne ainsi à contempler l'amour divin derrière ces mots qu'un « exil existentiel » nous fait parfois lire comme terribles...


Partie 2 (18 min.)

vendredi 27 avril 2012

Les anges avec Annick de Souzenelle (1)

Annick de Souzenelle, infirmière anesthésiste pendant 15 ans, a suivit une formation Jungienne de psychothérapeute, fait des études de théologie chrétienne orthodoxe et d'Hébreu biblique. Elle est aujourd’hui écrivain et conférencière. L'émission se base sur le livre "Cheminer avec l'Ange", écrit en collaboration avec Pierre-Yves Albrech, publié aux éditions du relier 2011.




Partie 1 (20 min.)

mercredi 25 avril 2012

Jean-Marie Pelt et sa compréhension de la nature (2)

Coopération, loi du plus fort, beauté de la création, spiritualité... Jean-Marie Pelt nous raconte sa façon de voir notre monde...

mardi 24 avril 2012

Jean-Marie Pelt et la nature (1)

Un bilan écologique et une entrée dans la nature dressés par Jean-Marie Pelt...

lundi 23 avril 2012

Enluminons le présent avec Jean-Luc Leguay

Je débute la semaine en couleurs qui actuellement enluminent la nature.


Enivré par l'explosion des couleurs de la nature, le contraste est douloureux lorsque je suis de retour en ville. Mon oeil est agressé partout, en permanence. Ce déploiement de couleurs dans les journaux, les publicités criardes dans les rues me font violence. 


Après avoir connu les formes et les couleurs vraies, arriver à vivre dans le monde qui nous entoure est le combat d'un preux chevalier. J'ai envie de fermer les yeux devant ce chaos général de la couleur fausse et gratuite. Cela nous freine en profondeur, cet étalage tapageur est une barrière de plus à franchir pour arriver à la réalisation de nous-même. 


Il y a un effort supplémentaire à fournir, inconscient mais épuisant, pour trouver une harmonie intrinsèque au milieu de tout ça. Nous sommes souvent malheureux sans nous rendre compte que nous sommes sous influence. Combien d'entre nous partent un week-end dans la nature en disant "Je pars pour me retrouver " ? 
Nous allons aussi, et surtout, retrouver les formes et les couleurs vraies.


Jean-Luc Leguay, "Le maître de lumière", Ed. Dervy Poche, p. 122



dimanche 22 avril 2012

Le maître de Lumière de Jean-Luc Leguay

C'est le récit d'un chemin initiatique haut en couleur que je vous recommande à la lecture. Phytospiritualité avait déjà présenté cet homme. Il est bon de le rencontrer de nouveau...



Comme le danseur s'exerce à la barre sans relâche avant de voir ses efforts couronnés de succès, mon corps peu à peu se transforme. « Ce travail d'entraînement et d'enchaînement est capital si tu veux, un jour, prétendre représenter sur l'enluminure un vêtement de Dieu et non une forme de ton propre chaos », insiste mon Maître. Je comprends, grâce aux énergies que l'initiation a réveillées en moi, que briser une caillasse peut devenir un geste rituel qui agit sur moi en même temps que sur la matière. Avant et après ces trois jours, je ne travaille plus de la même façon. Je ne change pas seulement d'attitude, je change dans l'être. Au moment de moudre un caillou qui donnera du rose, j'entre dans la contemplation de la couleur. Et plus la poudre rose devient fine, plus elle libère son message et me guide dans mes méandres intérieurs : dans une sorte de vision, je sais alors dans quel contexte cette couleur va s'inscrire et je connais la signification profonde qu'elle donnera à l'enluminure. Une couleur enfermée dans un pot n'est rien, elle ne prend son sens et n'ouvre la voie qu'en illuminant une forme. 


Je comprends peu à peu l'enseignement souterrain, la vertu qui résident dans les gestes les plus humbles : lorsqu'un geste est juste, il n'y a pas à réfléchir, à l'interpréter, il se transcende en soi... Il peut avoir la beauté des gestes d'un officiant. Car il dénote le comportement confiant d'un homme uni à tout. Dès lors, casser une pierre a la même importance que dresser délicatement une auréole bleue autour du visage et des yeux baissés de la Vierge. "Comme tu as trié la terre pour en isoler la matière lourde et en faire jaillir la lumière, traverse ta propre matière, purifie-la en séparant le vil du subtil. Soumets la matière tour que le mystère et le réel ne fassent plus qu'un ", m'enseigne mon Maître. 


Je quitte mes sens ordinaires — les mélanges sont pestilentiels, la pierre est dure —, je me dirige vers mes sens spirituels, je vois au-delà de la forme, de la couleur, du toucher. Geste après geste, je cours d'éveil en éveil, je me libère, à mon rythme, de ce qui me bloque. Mes empêchements se dénouent. Même le bruit de mon marteau sur la pierre se transforme, au fil des mois, en incantation. Je pressens que là va être la clé de ma transformation. Un jour, une faille libératrice s'ouvre, l'esprit change de niveau et la pierre travaillée avec patience livre son trésor caché : ma propre pierre intérieure, réduite en poussière, se transforme, à son tour, en lumière bleue, jaune, rouge... 


L'enseignement ne pouvait être qu'oral et expérimental : ce que j'apprends doit être vécu, assimilé, jamais oublié. Tout est déjà imprimé en moi. Je suis un livre vivant qui, depuis l'origine, porte le secret de toutes mes transformations futures. 


Je réalise, avec des mois de recul, que, lors de l'initiation, le Maître m'a fait travailler sur les quatre éléments, terre, air, eau et feu. Ce sont les éléments constitutifs de la vie terrestre. Or, ces éléments nous fixent, nous suspendent, nous, la création, dans un état transitoire. Un enlumineur doit s'affranchir de cet état transitoire pour rejoindre un état d'éternité. « Tu dois prendre conscience de la quintessence qui se dissimule derrière chaque élément, chaque instant"...

Jean-Luc Leguay, "Le maître de lumière", Ed. Dervy Poche, p. 92-93

samedi 21 avril 2012

Longévité et bien vieillir...

Deux sujets qui nous portent : résilience et conation... si possible sans répression de la colère.

vendredi 20 avril 2012

Karlfried Graf Dürckheim et Jacques Castermane (3)

Dernière partie  ( 18 min.)

source : Les racines du Ciel (France Culture)

Nouvelles Clés. : Qu’avez-vous ressenti lorsque vous avez appris sa mort ?

Jacques Castermane : Des amis allemands m’ont téléphoné en fin de soirée le 28 décembre. Ce n’ était pas inattendu, au contraire. Je savais pour l’avoir revu quelques semaines plus tôt que cela pouvait arriver à chaque instant. Il n’empêche que ce qui m’a envahit, doucement, c’est une profonde tristesse. La tristesse de la séparation définitive de l’être proche. Mais en même temps je peux dire que j’ai reçu cette nouvelle très calmement parce que dans l’ordre des choses, c’est-à-dire qu’un travail sur le Chemin vous invite à intégrer ce qu’on appelle la vie et ce qu’on appelle la mort. Nous avions bien souvent envisagé le thème de la mort.

N. C. : Que vous disait-il de la mort ?

J. C. : Là encore me reviennent en mémoire quantité de souvenirs. Le 29 décembre, Christina et moi avons pris la route à quatre heures du matin pour le revoir une dernière fois. Graf Dürckheim reposait dans son bureau, là où je l’avais rencontré si souvent. Dès l’instant où je pénétrais dans cette petite pièce de quatre mètres sur quatre, je me sentais touché par une ambiance pénétrante et enveloppante : un silence.

Et dans cette dernière rencontre s’imposait le souvenir de ce qu’il disait du silence : "il y a le silence de la mort, où plus rien ne bouge ; et il y a le silence de la vie où plus rien n’arrête le mouvement de la transformation". Ce silence impressionnant était celui de la vie. Ou, comme il aimait à le dire, le silence de la grande Vie ?

Dans le cadre d’une leçon, Graf Dürckheim me pose une question inattendue : "Jacques, pensez-vous à la mort chaque jour ?" Il ne me faut pas réfléchir longtemps pour répondre que non. "Quel âge avez-vous ?" J’avais quarante-deux ans. "Si à quarante-deux ans on ne pense pas à la mort chaque jour c’est l’expression d’un manque de maturité !"

jeudi 19 avril 2012

K.G. Dürckheim par Jacques Castermane (2)

"Vous ne respirez pas, en ce moment, pour vivre dans deux ans.


Vous respirez, en ce moment, pour vivre en ce moment ! »


K.G. Dürckheim


Partie 2 ( 18 min.)

mercredi 18 avril 2012

Karlfried Graf Dürckheim et Jacques Castermane (1)






Jacques Castermane, a suivi de 1967 à 1988 l'enseignement de Karlfried Graf Dürckheim. Depuis 1981, il anime une école de méditation dans la Drôme (Le centre Dürckheim). Il a publié des entretiens avec ce maître : Le Centre de l'Être, aux éd. Albin Michel et, aux éd. de la Table Ronde, La Sagesse exercée, avec une préface d'André Comte-Sponville.



Partie 1 ( 15 min.)



mardi 17 avril 2012

Cuisson des aliments...

Je suis un peu cuit actuellement...voici une émission qui nous parle crûment de notre alimentation...

lundi 16 avril 2012

Résonances...

«La majorité des gens croit que nous recherchons tous un sens à notre vie. 
Je ne crois pas que c'est ce que nous cherchons. 
Je crois que ce que nous cherchons est l'expérience d'être vivant, de manière à ce que nos expériences de vie sur le plan purement physique soient en résonance avec notre réalité la plus profonde et intime, pour que nous puissions vraiment ressentir l'extase d'être vivant. »

Joseph Campbell
(Joseph Campbell, Bill Moyers, Puissance du mythe, J'ai lu, 1991)

dimanche 15 avril 2012

Voir et Croire...

Parce que tu m’as vu, tu crois. Heureux ceux qui croient sans avoir vu...
(Jn 20, 31)
Thomas l'incrédule (miniature du XIIe siècle)


Les deux occurrences de « voir » correspondent à deux verbes grecs différents : horaô et eidon. Il vaudrait mieux dire : « Parce que tu as regardé, tu crois ; heureux ceux qui croient sans avoir vu. » C’est qu’en vérité, il ne suffit pas de voir pour croire. Si bien que même la foi de Thomas dépasse la simple vision. Comme le dit Grégoire le Grand : « Il a vu un homme, mais il a cru un Dieu. »


source La Vie

samedi 14 avril 2012

Comment prier avec Soeur Emmanuelle

La manière de prier n’est pas toujours la même, elle évolue au cours de la vie et, au fur et à mesure que les années passent, elle se simplifie beaucoup. Quand j’étais jeune, j’aimais les belles prières mystiques. On est transporté par ces prières et, au moment où on les fait, on se sent consolé, heureux de prier et d’être avec Dieu. On est aussi content de soi parce qu’on a l’impression de bien prier et que notre âme est remplie de choses belles et bonnes. À un certain moment de la vie, il peut nous arriver de traverser une période durant laquelle on ressent une certaine aridité : la prière n’apporte plus de consolations, on s’ennuie en priant, on essaye d’écourter le temps consacré à la prière. Cela m’est arrivé à moi aussi. Notre Règle prévoit en effet une demi-heure de prière le matin et une demi-heure le soir, et quelquefois cela me semblait trop.


Et finalement, je suis arrivée à la troisième étape, celle de la prière du pauvre. On commence à se rendre compte que la prière devient quelque chose de vrai quand on se trouve devant Dieu dans toute notre nudité, notre faiblesse, notre impuissance, avec les distractions qui sont les nôtres. La prière devient quelque chose de vrai ; chaque être humain en effet a ses propres limites, plus ou moins grandes, selon sa propre condition et la période de la vie qu’il traverse. Dans la vieillesse, nous sommes obligés de voir nos limites, nous les touchons du doigt ; je crois que nous sommes alors plus proches de Dieu, (…) Dieu se penche avec prédilection sur l’être faible, sur l’être sans défense qui crie vers lui en demandant de l’aide. On se rapproche à ce moment-là de la prière du Christ sur la croix, (…) « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » (Évangile de Matthieu 27, 46 ; Évangile de Marc 15, 34).


Dans l’Évangile, nous voyons que Jésus prie Dieu en l’appelant « Abba ». Abba, en araméen, est un mot très simple que l’enfant utilise pour appeler son père. Un jour où je me trouvais sur les rives du Jourdain, (…) je vis un enfant sur le rivage qui voulait sauter dans l’eau, mais qui avait peur. Alors, il s’est mis à crier : « Abba ! Abba ! » et son père est arrivé immédiatement, lui a tendu les bras, et l’enfant s’est jeté à l’eau dans les bras de son papa. Je n’ai jamais oublié ce moment, avant tout parce que je me trouvais au bord du Jourdain, et puis à cause de ce cri : « Abba ! », suivi de l’arrivée immédiate du père. C’est devenu pour moi un symbole de la prière et de la vie spirituelle. On est sur terre et on a peur de l’eau, de la vie et on crie, on crie : « Abba ! Papa ! » C’est le cri de la confiance. C’est un terme affectueux qui signifie « mon cher papa ».


Mais pour arriver à prier ainsi, on doit traverser des moments d’épreuve, quand la prière ne semble plus avoir de goût, quand on ne sait plus bien à quoi elle sert, puisque, évidemment, Dieu ne nous répond pas de manière sensible. Et alors, quand on en arrive à ce point, où l’on se demande à quoi cela sert de prier, on peut dire : « Tu es mon papa, aide-moi. »
C’est à ce moment qu’entre Dieu et l’homme advient une sorte de symbiose, une union intime et très ­profonde (…). Mais même si notre prière part de ce cri : « Abba, papa ! J’ai peur, je n’y arrive pas, viens m’aider ! », cela ne se passera pas comme pour l’enfant sur la rive du Jourdain qui voit arriver immédiatement son père qui le serre dans ses bras (…). Cela se fera pourtant d’une manière plus forte que dans la vie sensible, d’une manière plus durable, éternelle, non passagère, parce qu’il s’agit d’une relation, d’un lien avec le Dieu tout-puissant, créateur du ciel et de la terre, de l’univers visible et invisible. Quand ce lien part d’un cœur de pauvre, il acquiert une force incroyable. Aujourd’hui, ma prière est devenue quelque chose d’extrêmement simple.

Ce texte est tiré des entretiens, jusqu’ici inédits, entre sœur Emmanuelle et Angela Silvestrini centrés sur les questions existentielles que chacun se pose. Éditions du Rocher, 17 €.

vendredi 13 avril 2012

Voir différemment ses traumatismes...

L’EMDR, thérapie d’intégration neuro-émotionnelle par des stimulations bilatérales alternées (mouvements oculaires ou autres), a été découverte en 1987 par une psychologue américaine Francine Shapiro.
L’EMDR permet la remise en route d’un traitement adaptatif naturel d’informations douloureuses bloquées (par exemple après un choc traumatique), la mobilisation de ressources psychiques et la restauration d’une estime de soi déficiente.

jeudi 12 avril 2012

Nos gestes disent tout de nous...Albert Palma



"L'essentiel de nos vies peut se ramener à une suite de gestes, harmonieuse ou chaotique. Comparée à celle des peuples plus proches de la nature, notre gestuelle d'humains modernes révèle de graves troubles mentaux, car c'est avec tout notre corps que nous réfléchissons _ les Grecs disaient : "L'homme pense parce qu'il a une main."


Comment revenir à cet essentiel au coeur de nous ?"


Albert Palma



Pour en savoir plus

mercredi 11 avril 2012

La médecine chinoise (2)

Cuisine diététique, préparations médicinales, masseurs de rues, qi qong... une panoplie pour le bien être.
La partie "travail à distance" est impressionnante...

mardi 10 avril 2012

La médecine traditionnelle chinoise (1)

Une vision holistique de l'être humain : la MTC...


La Médecine Traditionnelle Chinoise (MTC) est un système médical qui analyse le champ des maladies humaines et en propose un traitement efficace.

Elle plonge ses racines dans la plus haute antiquité chinoise, et en particulier dans le courant taoïste dont issus les principaux concepts philosophiques de la médecine chinoise: Yin et Yang (symbole de la bipolarité des choses), Wuxing (5 mouvements ou éléments: Terre, Métal, Eau, Bois, Feu).

Issue d'une tradition qui situe l'homme dans le macrocosme et le microcosme, où l'analyse des signes cliniques doit amener à rechercher la cause et la traiter, et non pas soulager seulement le symptôme résultant. De ce fait elle intervient aussi pour prévenir les déséquilibres sources des maladies.

La médecine chinoise cherche à comprendre l'être humain dans son ensemble, dans son environnement, à un moment donné, tant du point de vue des symptômes visibles qu'invisibles, et à rétablir l'équilibre interne, la circulation de l'énergie nommée Qi (ou Tchi) dans l'organisme...

lundi 9 avril 2012

Un humble témoignage... sur l'humilité.

« Je ne pense jamais que je suis humble ! C’est plutôt après coup quand je mesure combien j’ai été orgueilleux, que je pense à l’humilité ! Je ne prétendrai jamais non plus que les retraites de rue que nous faisons nous font vivre comme des SDF ! Car nous, en nous plongeant dans cette expérience, nous savons que notre situation ne va pas durer et qu’après trois nuits à dormir sur les trottoirs, ce sera terminé, ce qui change forcément les choses ! Par contre, déambuler sans but précis dans la ville, devoir chercher des toilettes, mendier, rester sale… Tout ce désœuvrement fait naître un état de vulnérabilité, proche de l’humilité. Celle-ci s’atteint quand on ne cherche plus à paraître, alors elle apporte une sensation de liberté intérieure.


Distribuer des repas ne rend pas plus humble non plus, et on peut même parfois faire ça par orgueil, mais, touché par la détresse de l’autre, on reconnaît une partie blessée de soi en son prochain. On y lit sa propre précarité, aussi cela donne envie de donner et de partager.
Et puis, il y a cet état qui s’atteint grâce à la méditation (ndlr : il enseigne le zen). Lorsqu’il faut s’ouvrir pleinement à l’instant présent, lorsqu’on lâche prise de ses idées, pensées, jugements et identifications,on “enlève des couches” et on touche à un intime de soi qui est plus intime que son souffle lui-même. Je crois que c’est saint Augustin qui définissait Dieu comme “l’Intime, plus intime que l’intime de moi-même”. Pour moi, c’est réellement cela l’expérience de l’humilité. »


Michel Dubois
fondateur d'une association pour les SDF

(source : La Vie

dimanche 8 avril 2012

Bonne fête de Pâques... bonne transformation...

Ce que vit Jésus

Au matin de la Résurrection, le Christ passe du séjour des morts au Père, c'est-à-dire à la vie éternelle. La Résurrection est une transformation, une transfiguration qui nous signifie que la vie ne peut mourir. Cet événement, cette Pâque survient avec une totale gratuité, de façon inattendue. Jésus manifeste que cette Résurrection est une réalité.



Ce que j'en fais

La Résurrection dont il est ici question est différente de celle qu'a vécue Jésus. Il est passé dans un autre monde alors que je parle ici des résurrections que nous vivons dans le quotidien de nos existences ; elles ont lieu au sein de notre humanité (cœur, vie psychologique, corps).
Nos limites ne disparaîtront pas car elles font partie de la condition humaine. Nous ne guérirons jamais d'avoir des limites. Mais nous apprenons à les connaître, à les gérer, à nous situer par rapport à elles. L'Esprit-Saint nous fera découvrir notre mesure spécifique, nous apprendra à la déployer.
Le sens de la Résurrection est que ce qui était mort en nous, ou à moitié mort, revient à la vie. Il nous appartient de laisser Dieu accomplir en nous et avec nous le travail de résurrection, qui pourra se manifester de diverses façons. Un pardon qui libère notre cœur, l'acceptation de l'autre dans sa différence, un nouvel élan vital, la délivrance d'un lien qui brouillait une relation, une joie très profonde.
Alors sommes-nous prêts à nous abandonner à celui qui fait toute chose nouvelle ?




Bonne fête de Pâques !


source : La Vie

samedi 7 avril 2012

De maître à disciple avec Gilles Farcet

Il y a 20 ans...
Gilles Farcet, écrivain, journaliste, animateur de stages, se consacre depuis une dizaine d'années, dans ses écrits comme dans sa vie, à une meilleure compréhension de la relation maître-disciple, située au cœur de toutes les traditions spirituelles.




Laura WINCKLER : Vous parlez souvent dans vos écrits de la relation maître-disciple. Pouvez-vous nous expliquer ce qui dans votre vie vous a amené à réfléchir et à mettre l'accent sur cette relation ?


Gilles FARCET : Tout d'abord la conscience très claire que pour progresser, pour croître dans quelque domaine que ce soit, profane ou sacré, humain ou spirituel (les deux étant d'ailleurs à mon sens inséparables) il faut apprendre. Je suis très étonné de constater que nombre de gens prétendent aujourd'hui se passer de maître dans le domaine spirituel, alors même que chacun s'accorde à reconnaître la nécessité d'un apprentissage rigoureux dans les autres sphères de l'existence. Si je désire jouer correctement du piano - sans parler d'être un virtuose - il me faudra prendre des cours, m'initier au solfège, m'ouvrir à certaines influences. Je devrai choisir un professeur et ne pas en changer tous les quinze jours. Tout le monde juge normal et même indispensable qu'un futur médecin aille à l'université et suive des stages à l'hôpital. J'avoue donc être surpris de voir cette nécessité d'une formation sérieuse si peu reconnue aujourd'hui parmi ceux et celles qui disent s'intéresser à "la spiritualité". Beaucoup "picorent" un peu partout, suivent un stage, puis un autre... Or, je crois que si l'on veut véritablement approfondir il faut, non pas être fermé et ne plus jurer que par une personne hors de laquelle on ne voit point de salut, mais du moins s'exposer de façon durable à une influence, à une "école", pour reprendre un terme cher à Gurdjieff ; quitte ensuite à pouvoir d'autant mieux s'ouvrir et se montrer disponible.


Donc, pour répondre de manière plus personnelle à votre question, mon intérêt pour le rapport maître-disciple vient de ce que j'ai eu assez tôt conscience de la nécessité de cette relation pour un travail spirituel digne de ce nom. Je ne vais pas vous raconter ma vie, mais disons qu'à l'âge de 23 ans, après avoir beaucoup pratiqué certaines techniques de méditation, fait de nombreuses et longues retraites, je me suis rendu compte de l'omniprésence de cette relation maître-disciple dans toutes les traditions. Qu'il s'agisse de la tradition hindoue, de la tradition bouddhiste, du soufisme, du christianisme des premiers temps et même de la tradition philosophique occidentale, celle de Socrate et Platon, on retrouve toujours et partout cette relation du maître et du disciple. Elle est d'ailleurs source de très belles histoires, vraies ou symboliques, et porteuses de vérités profondes. Par conséquent, je ne pouvais pas prétendre être un génie spirituel capable de tout découvrir par lui-même. Non que les génies spirituels n'existent pas : Ramana Maharshi, l'un des grands sages hindous du début de ce siècle, s'est éveillé "spontanément" à l'âge de dix-sept ans, sans avoir suivi d'enseignement. Mais quand on s'engage sur un chemin, on ne saurait partir du principe que l'on est un génie et un nouveau Maharshi... Si l'on aspire à bien jouer du piano et à composer, mieux vaut commencer tôt à prendre des cours plutôt que de se prendre d'emblée pour Mozart.




La rencontre d'un disciple avec son maître


L.W. : Pouvez-vous nous parler un peu de votre itinéraire ?


G.F. : Oui, mais à condition de préciser que cet itinéraire n'a rien d'exemplaire ou d'exceptionnel. Il se trouve que l'on m'interroge parce que j'écris des livres et ai quelques activités publiques. Mais il y a, ne serait-ce qu'en France, des personnes bien plus avancées que moi et qui pourraient parler avec davantage d'expérience et de perspective de la relation maître-disciple. Sans doute n'est-ce ni leur fonction ni leur désir. Ceci précisé et puisque je suis distribué dans le rôle du "parleur", allons-y ; il m'est très tôt apparu - aux alentours de mes vingt ans - que, quoique très intéressé par le bouddhisme, l'hindouisme et les spiritualités orientales en général, je me devais de rencontrer un maître occidental. Je me suis toujours senti d'Occident, appelé à une relative insertion dans le monde tel qu'il était, pour le meilleur et pour le pire ; je n'ai jamais durablement cru que ma vocation était de me retirer, d'aller vivre en Orient ou de mener une vie contemplative dans le sens précis de ce terme - c'est-à-dire accorder la priorité à la méditation plutôt qu'à l'action. J'aspirais à une spiritualité dépouillée de tous les exotismes, de tout le côté rituel ; en outre, il était pour moi très important de pouvoir entretenir cette relation avec un être humain bien sûr enraciné dans l'expérience spirituelle mais en même temps passé par les tribulations d'un Occidental moyen.


Comment dire ? Je voulais être guidé par quelqu'un dont les références culturelles au quotidien seraient essentiellement les miennes : quelqu'un à qui la nécessité de payer un loyer et des notes de téléphone ne serait pas étrangère, quelqu'un ayant eu une famille, ayant vécu et travaillé non dans un ashram en Inde, mais à Paris ou New York. Ceci me paraissait très important, justement parce que la sagesse, si elle existait, devait être possible partout et non dépendante d'une culture ou d'un contexte particulier. Cela n'enlève rien à la grandeur des cultures traditionnelles ni au fait que certains environnements semblent bien plus propices à la recherche intérieure. Reste que jamais je n'ai voulu rejeter mon héritage, ni même cette civilisation, malade sans doute, folle à bien des égards et cependant très propice à la recherche, du fait de sa folie même... A l'âge de vingt-trois ans, j'ai donc rencontré Arnaud Desjardins avec qui je me suis tout de suite senti en confiance. Dès notre premier contact - j'ai assisté à une réunion qu'il animait - je me suis trouvé à ma place et ai eu le sentiment d'avoir essentiellement découvert ce que je cherchais. Tout le travail restait encore à faire, mais il me semblait avoir trouvé mon "école".


L.W. : Cela, vous ne l'avez jamais remis en question ?


G.F. : Non. Si Arnaud Desjardins a beaucoup d'admirateurs, il a aussi ses détracteurs. Comme toute personne en sa position, il fait l'objet de critiques et de jugements parfois très sévères et tranchés. Je crois avoir toujours laissé monter en moi les doutes et les interrogations, parce que cela fait justement partie de l'enseignement de ne rien refouler et de regarder ce qui monte en soi sans se voiler la face ; mais jamais je ne me suis véritablement posé de "problème" vis-à-vis de sa transmission ou de telle ou telle de ses attitudes. Beaucoup de gens passent leur temps à chercher la petite bête, à se demander si le maître qu'ils prétendent suivre - surtout s'il s'agit d'un occidental ordinaire dont l'existence n'est pas exempte de difficultés courantes - est bel et bien éveillé, bien ceci, bien cela, s'il est "mieux" ou "moins bien" que tel autre, etc., etc. Pour ma part, j'ai d'emblée ressenti Arnaud comme profondément bon et honnête, enraciné en sa profondeur, animé par le désir non-égoïste de venir en aide à autrui et ne parlant que de ce qu'il avait lui-même vécu et expérimenté. J'ai eu par la suite l'occasion de le fréquenter d'assez près dans des situations diverses et il ne m'a jamais déçu, peut-être parce que mon aspiration de départ était claire et que je ne cherchais ni un super-héros ni un yogi miraculeux mais un maître, un guide - en d'autres termes une personne parvenue à la maîtrise et capable de m'indiquer comment moi-même progresser vers cette maîtrise. Le fait de me sentir à ma place auprès de lui ne m'a pas empêché de m'ouvrir à d'autres formes et à d'autres voies, ainsi qu'en témoignent mes articles et mes livres, notamment le dernier, L'Homme se lève à l'Ouest, les nouveaux sages de l'Occident (Albin Michel). Lui-même m'a encouragé à rencontrer des Sages, des disciples, et des maîtres. Ni sectarisme ni fermeture, donc, mais un nécessaire enracinement.


L.W. : Cette relation existe toujours ?


G.F. : Oui, bien sûr. Je crois qu'elle ne saurait être brisée. Encore faudrait-il savoir de quelle relation nous parlons...


Si j'évoque "ma" relation avec Arnaud Desjardins, on aura l'impression qu'il s'agit des rapports qu'entretient Gilles Farcet, 33 ans, écrivain et journaliste, avec Arnaud Desjardins, 66 ans, auteur de livres et gourou... Or il ne s'agit pas de cela. Certes, ma personnalité entretient effectivement des rapports avec la sienne, nous nous entendons plutôt bien. Je veux bien que l'on me dise que j'ai cherché en lui mon père, c'est tout à fait vrai, d'autant plus que je l'ai rencontré en pleine période de formation, alors que je terminais mes études et ne gagnais pas encore ma vie. Mais là n'est pas l'essentiel. Car après tout, j'ai eu la chance d'approcher beaucoup d'autres personnes remarquables et même susceptibles de me fasciner davantage sur le plan artistique ou humain. Le cœur de la relation est d'un autre ordre.


Il ne s'agit pas tant d'une relation entre deux personnes que d'une relation entre un maître et un disciple, ou un apprenti-disciple, ou un apprenti-apprenti-disciple, je ne sais pas... quelqu'un qui, en tout cas, essaie sincèrement de suivre le chemin proposé. Et cette relation, finalement, est à la fois extrêmement personnelle et tout à fait impersonnelle.


Si cette relation a vraiment été établie, elle ne peut pas être brisée. Elle ne se situe pas sur le seul plan immédiatement humain, elle transcende les formes transitoires.


L.W. : Pourquoi dites-vous : "Si cette relation a vraiment été établie..." ?


G.F. : Parce qu'en cette matière, il convient de rester très prudent.
Cela se vérifie dans le temps. Voilà une dizaine d'années que je m'expose à cette influence. Ce n'est pas mal mais, en même temps, c'est court et je suis encore jeune. Rendez-vous dans vingt ou trente ans...


L.W. : Peut-on parler de filiation d'idées ? Où se situe d'après vous l'origine de cette relation ?


G.F. : Elle part de l'essentiel pour aboutir à l'essentiel. Karlfried Graf Dürckheim distingue ce qu'il appelle le niveau essentiel du niveau existentiel. Dans la mesure où le maître a retrouvé au plus profond de lui-même ce qui constitue l'essence, la réalité ultime de tout être vivant, c'est à partir de cette essence qu'il établit une relation avec le disciple.


Et c'est également à partir de son être essentiel, même s'il n'en est pas conscient, que le disciple va vers le maître. Tout appel authentique, tout élan vrai vers le maître et ce qu'il transmet procèdent de l'essence. La relation maître à disciple se manifeste certes sur le plan existentiel : je puis téléphoner au maître, déjeuner avec lui, prendre le train en sa compagnie, avoir avec lui des entretiens... mais ce n'est là que l'apparence. L'important se joue dans l'ordre de l'essence. Tout maître authentique est véhicule et serviteur d'une essence universelle et impersonnelle, laquelle utilise ses qualités et aptitudes humaines pour se manifester. Aussi le maître s'adresse-t-il de l'essence à l'essence, "de mon âme à ton âme, de mon être à ton être, de mon cœur à ton cœur", comme le dit la belle expression traditionnelle. Sur ce plan, le gourou n'est pas un autre que le disciple. Mon essence - ce que je suis, au-delà de toutes les particularités et limites de la manifestation transitoire appelée Gilles Farcet - était à la recherche d'elle-même et s'est reconnue en la manifestation transitoire appelée Arnaud Desjardins, cette dernière constituant un véhicule plus purifié et transparent. Lorsque je percevrai qu'il "n'y a plus deux mais un", lorsque je ne me prendrai plus pour Gilles et ne prendrai plus Arnaud pour Arnaud, l'énergie du gourou aura fait son office. Cela, bien sûr, c'est le "but", si on peut parler de but pour une réalité qui est déjà là, bien que je n'en aie pas conscience. Mais dès le départ, la relation, si elle s'établit vraiment, se noue au niveau essentiel. C'est parce qu'elle relève de l'essentiel qu'elle est impérissable, alors que ce qui ne relève que de l'existentiel sera nécessairement périssable. Arnaud dit souvent que depuis que son maître est mort, jamais il ne s'est autant senti en communion avec lui. Il ne le perçoit plus comme situé dans l'espace et le temps mais le ressent toujours présent.




Le maître ne présente pas de signes extérieurs de sagesse


L.W. : A quoi reconnaît-on un maître ? Y a-t-il des garanties permettant de ne pas se tromper dans son choix ?


G.F. : C'est une question très difficile et qui prête à confusion. On s'imagine souvent, en effet, pouvoir reconnaître un maître de manière quelque peu miraculeuse. Nous avons tous été nourris de ces histoires - d'ailleurs vraies, pour la plupart - où le maître, voyant le disciple se présenter à lui pour la première fois, l'apostrophe : "Ah, enfin, vous voilà ! " Si de telles choses arrivent, elles ne sont pas si fréquentes, surtout en Occident. En outre, le maître n'apparaîtra pas nécessairement comme un être rayonnant, surnaturel ou hors du commun.


Outre Arnaud Desjardins, j'ai rencontré un certain nombre d'hommes ou de femmes que je considère comme des sages - rencontres racontées dans mon dernier livre. Dans la plupart des cas, ce sont des gens sur lesquels je ne me serais pas retourné dans la rue. Lors de certains moments intimes ou privilégiés, il arrive que le maître laisse transparaître un peu de ce qu'il vit intérieurement. Mais sinon, je ne crois pas à l'existence d'indiscutables signes extérieurs de sagesse.


L.W. : Le calme, le détachement, peut-être ?


G.F. : Oui et non. Nous allons appréhender le maître comme nous appréhendons le monde en général, c'est-à-dire à travers nos projections et notre mental. Comment pourrions-nous donc savoir ce qu'est le détachement ? Nous nous en faisons tout au plus une idée à la lumière de laquelle nous allons évaluer le détachement du maître. Et si la façon dont il manifeste son détachement ne correspond pas à notre attente, à notre représentation du détachement, nous allons être déçus et formuler des jugements. Nous pourrons ainsi nous tromper totalement, prendre pour détaché un homme qui ne le sera nullement et vice versa... Il est vrai qu'avec le temps et la maturation, le regard se purifie et l'on devient mieux à même, non de "juger" mais de tout simplement voir. Un disciple ayant un peu de "bouteille", si vous me permettez l'expression, ne se laissera pas abuser par le premier causeur venu, si impressionnant soit-il. Mais quant à reconnaître un sage... On dit que seul un sage peut en reconnaître un autre. Cela demeure en tous les cas une affaire intime et tout à fait subjective. Ce qui me frappe, moi, c'est le peu de distance que nous avons, de manière générale, vis-à-vis de nos opinions. J'entends par exemple X décréter que tel livre est excellent, très bien écrit, profond et Y affirmer que ce livre est décevant. Peu importe qui a raison : ce qui me sidère, c'est que X comme Y ne puissent un seul instant mettre en doute leur propre jugement qui pour eux semble définitif, prononcé d'en haut pour le temps et l'éternité. Et malheur à l'insensé qui dira le contraire... Nous conférons à nos opinions, la plupart du temps totalement subjectives, une valeur universelle et objective. Si cela est vrai pour un livre, que dire d'un maître ou d'un sage ? Certains sont très choqués de constater chez le maître un comportement en lequel ils voient la preuve de son absence de détachement. Mais d'autres considéreront cette même attitude comme un suprême témoignage d'amour et de sagesse... Je suis persuadé que le mental peut nous faire prendre des vessies pour des lanternes, nous faire voir l'avidité chez un homme généreux et la générosité chez un avare.


Donc, le point sur lequel je voudrais surtout insister en réponse à cet aspect de votre question, c'est que nous nous imaginons, en général, être capables de voir objectivement. Or, c'est faux. L'une des premières leçons dipensées par le maître, c'est que nous sommes longtemps incapables de voir. On me dira que c'est là "la porte ouverte à tout". C'est ainsi que les admirateurs de gourous, disons, discutables, en arrivent à justifier l'injustifiable, à conférer à des comportements néfastes une aura de sagesse. C'est effectivement un domaine très délicat. Mais la relation de maître à disciple ne répond pas aux critères soi-disant objectifs et rationnels sur lesquels notre société insiste tant.


Quelles sont les garanties ? Je dirai finalement qu'il n'y en a pas. C'est une entreprise risquée, à l'image de la vie. Il est parfaitement possible que l'on se trompe. Mieux vaut se tromper et prendre une bonne leçon que de rester tiède et indifférent. Aujourd'hui, nous prétendons vivre une vie intéressante mais assurée tous risques. Ce n'est tout simplement pas possible. Il faut s'exposer. Cela dit, un maître véritable pose des garde-fous et sait ce qu'il fait. Il ne nous entraîne jamais plus loin que là où nous pouvons aller. Néanmoins, la tradition a toujours admis la possibilité d'accidents, même auprès des maîtres les plus compétents. Si je fais du cheval, même avec l'instructeur le plus compétent, je cours le risque de tomber et de me casser la jambe, voire de me tuer... cela fait partie du jeu. Refuser le risque, c'est s'engluer dans une mentalité d'assisté qui ne nous mènera nulle part ailleurs que dans nos pantoufles !


L.W. : Une des caractéristiques des maîtres n'est autre que le sens de l'humour. Qu'avez-vous à dire à cet égard ?


G.F. : Je pense que tous les maîtres, sans exception, ont un sens de l'humour très développé. L'humour est une grande arme de guerre, si j'ose dire, pour le gourou, car il implique le paradoxe. C'est par l'humour que l'on peut donner à voir tout le côté paradoxal, mystérieux et incongru de cette existence. Le maître peut aussi amener le disciple à rire de lui-même, de ses faiblesses, des absurdités de son mental, de ses tentatives aussi vaines que désespérées pour se prouver qu'il y a d'autres solutions que de mettre en pratique l'enseignement... Une fois devenu un tant soit peu lucide, capable d'entrevoir l'étendue de sa propre folie destructrice, le disciple n'a d'autre possibilité que de pleurer ou de rire.


Autant rire... L'humour est capital parce qu'il témoigne d'une distance. Une personne dépourvue d'humour ne saurait être spirituelle. La langue française nous met d'ailleurs sur la voie : ne dit-on pas d'un être plein d'humour qu'il se montre très... "spirituel" ? L'humour est une qualité nous permettant de considérer les péripéties de l'existence avec recul et perspective. En fin de compte, qu'est-ce que la vie, sinon une tragi-comédie ? Comique, parce que toutes nos manœuvres et stratégies égocentriques sont parfaitement dérisoires et souvent maladroites ; tragique, parce que c'est là le tissu de nos vies et qu'à travers ces manigances, nous ne cherchons qu'à être aimés. Je crois qu'un être véritablement spirituel perçoit pleinement cette dimension tragi-comique de la vie. Mais ce qui, chez certains, aboutit au cynisme, se traduit chez lui par une compassion toujours plus profonde. Si l'on perd ses illusions sans s'être ouvert à la dimension spirituelle, on devient désabusé ; si, par contre, on ne se masque plus l'horreur de la situation tout en percevant la dignité fondamentale de l'humain, on ne peut qu'être touché et devenir de plus en plus aimant. Je renvoie les lecteurs à une remarquable anthologie de l'humour des sages composée par Eric Edelmann : Plus on est de sages, plus on rit, (La Table Ronde). D'après ce que j'ai pu voir du manuscrit, ce livre donne bien à sentir la place tenue par l'humour dans l'enseignement des maîtres de tous les temps. Nous en avions bien besoin !




A quoi reconnnaît-on l'aspirant-disciple ?


L.W. : Faut-il remplir certaines conditions pour devenir aspirant-disciple ?


G.F. : Bien sûr. On parle toujours des maîtres, mais très peu des disciples. Et en fait, s'il y a relativement peu de maîtres, les disciples ne sont pas non plus légion. Le maître d'Arnaud disait souvent qu'il n'avait pas de disciple. C'est pourquoi je rougis de me laisser présenter comme un disciple. Un vrai disciple est une denrée rare... Plutôt que de sans cesse passer le maître au crible, plutôt que de passer son temps à comparer les gourous et les enseignements, il faudrait peut-être essayer de se qualifier en tant que disciple potentiel.


L.W. : Et comment se qualifie-t-on ?


G.F. : J'allais dire que l'on se qualifie comme disciple en suivant l'enseignement d'un maître... C'est à partir du moment où l'on s'expose sérieusement à une voie vivante que l'on commence à entrevoir ce que peut être un disciple... On se qualifie peu à peu, en mûrissant, en apprenant. Je crois qu'il faut d'abord, sauf exceptions, passer par une première phase où l'on demande énormément au maître. Certaines demandes sont d'ordre psychologique : nous voulons que le maître nous aime, s'intéresse à nous... Nous demandons à la vie de nous donner certaines choses, et c'est bien légitime. Va-t-on reprocher à l'enfant de demander l'attention de ses parents ? Et puis, quand on a suffisamment reçu, si on ne veut pas s'arrêter là, si on veut grandir, vient un moment où l'on commence spontanément à avoir davantage envie de donner. On commence à s'intéresser un petit peu moins à soi et un petit peu plus aux autres, ce qui n'est qu'une manière un peu plus fine de s'intéresser à soi-même. La relation avec le maître commence à changer, elle devient un peu plus équilibrée. L'aspirant-disciple est un peu moins dans la demande, un peu plus dans l'écoute, dans l'ouverture. Cest difficilement descriptible... Le disciple, ou l'aspirant-disciple un peu plus mûr vit en présence du maître ou, disons, en communion avec l'enseignement tout au long de la journée, mais cela ne se voit pas. Bien sûr, il lui arrive plus ou moins fréquemment de déraper - des dérapages plus ou moins violents et incontrôlés - mais il se rattrape toujours. Il ne peut plus sombrer dans le ravin. Je ne voudrais pas m'étendre davantage sur cet aspect et donner l'impression d'être plus avancé que je ne le suis. C'est une réalité que je commence à découvrir et qui, de toute manière, est mise en cause à chaque instant.


L.W. : Y aurait-il une troisième phase dans cette relation ?


G.F. : Je n'en sais rien. Il y en a certainement une, mais dont je n'ai pas l'expérience. Tous les enseignements parlent d'une phase où, le disciple ayant véritablement repris contact avec sa profondeur, la relation avec le maître devient complètement purifiée et transparente.


Sans doute est-ce la phase ultime de la relation maître-disciple. C'est peut-être à ce stade que l'on en arrive à cette fameuse phrase selon laquelle, quand on rencontre le Bouddha, il faut le tuer. Le disciple très avancé peut "tuer" le maître, c'est-à-dire que tout en restant à jamais lié à lui - je ne contredis pas ce que je disais précédemment du caractère indestructible de cette relation - il peut vraiment marcher sur ses propres pieds. Toute relation de dépendance, dans le sens infantile du terme, est terminée. Le maître peut mourir, voire faire mine de renier le disciple... La communion ne saurait être rompue.


Or, beaucoup de gens citent cette phrase : "Si vous rencontrez le Bouddha, tuez-le" en la prenant comme si elle s'adressait aux débutants ; à peine ont-ils rencontré, pas même le Bouddha - pourquoi le Bouddha se dérangerait-il pour eux ? - mais quelqu'un qui pourrait leur apporter quelque chose, qu'ils prennent de grands airs et veulent le tuer... A mon avis, c'est aller un peu vite en besogne. Ne peut "tuer" le maître que celui qui l'a vraiment "rencontré" - du moins est-ce ainsi que je comprends cette parole célèbre. Et avant d'avoir vraiment "rencontré" le maître... il faut avoir cheminé. L'utilisation courante de cette formule constitue à mon sens un excellent exemple de cette perversion des vérités aujourd'hui si fréquente. Comment pervertir une vérité ? C'est très simple : prenez dans un livre une formule s'appliquant à un niveau bien plus élevé que le vôtre et mettez-vous en tête qu'elle s'applique à votre niveau. Résultat garanti ! Si j'ai de vagues notions de physique quantique, je puis prétendre que la table n'est pas si solide qu'elle en a l'air, qu'elle ne se compose que de particules dansant dans le vide. A un certain niveau de perception, c'est vrai. Mais si je me cogne contre ce "vide", je vais bel et bien me faire mal.




Pourquoi devient-on apprenti disciple?


L.W. : Qu'est-ce qui nous conduit à devenir disciple à un moment donné ?


G.F. : Premièrement, une conscience du fait que l'on est loin du but, et donc que l'on a besoin d'une aide. Deuxièmement, une sincère et intense aspiration à ce qui fait la raison d'être de la relation maître-disciple.


Je crois que le disciple est quelqu'un qui a compris qu'il ne pourrait s'en sortir en continuant à être prisonnier de sa vision du monde, de son ego ; et que son fonctionnement ne le mènerait qu'à la vieillesse et à la mort.


Un disciple est quelqu'un qui a perdu tous les espoirs que les gens entretiennent d'ordinaire. Si je vais jusqu'au bout de ma pensée, je dirai qu'un disciple est quelqu'un de "désespéré", mais dans le sens positif du terme. Il n'entretient plus de vains espoirs, il n'investit plus toute sa vie dans sa situation, dans sa famille, si précieuse que puisse lui être sa famille, ou ses possessions. Il sait que ce n'est pas cela qui lui apportera la paix et la joie qui demeurent. Par conséquent, la réponse absolue est à trouver sur un autre plan, sans qu'il s'agisse pour autant d'une fuite, au contraire. Mais les désespérés de cette sorte sont rares. Beaucoup de gens viennent voir un maître pour lui demander d'améliorer leur situation existentielle, ce qui, en soi, est légitime : on en a besoin pour se tourner vers l'essentiel. Mais il faut se rendre compte, à un moment, que ce n'est pas cela qui va nous procurer ce que l'on cherche vraiment. Ce n'est qu'un aspect de la question. Il importe de fonctionner sur les deux plans.


L.W. : Etes-vous d'accord avec cette phrase que l'on attribue à la Bhagavad Gîta : "Quand le disciple est prêt, le maître arrive" ?


G.F. : Oui, je suis complètement d'accord. C'est une phrase que l'on peut comprendre à différents niveaux.
Tout d'abord, on la comprend souvent dans un sens immédiat : quand le disciple est prêt, il rencontre physiquement le maître, il trouve son maître. C'est vrai. On peut aussi comprendre cette phrase à un autre niveau : le disciple doit devenir de plus en plus "prêt". Ce n'est pas parce qu'il a physiquement rencontré le maître que le maître est "arrivé" jusqu'à lui. Au contraire, c'est là que le chemin se concrétise. Le disciple doit devenir de plus en plus disciple, et c'est lorsqu'il est "prêt", c'est-à-dire vraiment disponible au maître, que ce dernier "arrive", intervient davantage dans la vie du disciple, s'infiltre en ses recoins ou, en tout cas, lui donne de nouvelles possibilités de grandir. Quand je parle du maître, je parle aussi de la vie qui en est l'expression. C'est lorsque nous sommes "prêts" que la vie nous offre des opportunités de croissance qu'auparavant nous n'aurions pas reconnues ou pas su mettre à profit. Donc, je crois que cette phrase "Quand le disciple est prêt, le maître arrive", est vraie à tous les niveaux, depuis la personne qui rencontre physiquement son maître pour la première fois, jusqu'à la même personne, trente ans après, pour qui, brusquement, quelque chose se passe, un déclic subtil se produit. Elle est prête à ce moment-là à recevoir quelque chose, et le maître arrive, il est toujours au rendez-vous, même, j'en suis sûr, quand il est mort. La vie nous donne un enseignement et la tâche du maître consiste à nous apprendre à apprendre, à nous rendre capables de recevoir les leçons infinies de l'existence. C'est si simple et si complexe...


J'ai eu avec Arnaud Desjardins des entretiens publiés sous le titre de Confidences impersonnelles (Critérion) dans lesquels nous abordons toutes ces questions. Je crois que même la personne devenue maître reste disciple et continue d'apprendre. Elle aussi doit être "prête " pour que son maître arrive. "Que ton règne arrive", dit le Notre Père... Ressentie à un certain niveau, cette prière prend tout son sens...




De l'obéissance à la liberté intérieure


L.W. : Comment concilier la relation maître-disciple avec la quête d'autonomie et de liberté intérieure ?


G.F. : Nous nous croyons "indépendants", mais ce n'est qu'une illusion de plus. Nous ne sommes pas indépendants. Tout d'abord, nous sommes en relation avec tout ce qui nous entoure, avec les autres, pris dans un réseau d'interdépendances hors duquel nous ne pouvons survivre. L'ego se construit une superbe solitude, un splendide isolement, mais c'est une prétention absurde. Deuxièmement, quelle liberté avons-nous ? Nous en avons très peu. Nous nous croyons libres alors même que, pour la plupart, nous sommes conditionnés, soumis à une mécanicité implacable. Nous ne savons même pas pourquoi nous faisons telle ou telle chose, pourquoi nous avons fait tel "choix", pris telle option dont il nous faut aujourd'hui supporter les conséquences. Se croire indépendant et responsable participe à mon sens d'une énorme illusion. Une relation avec un maître digne de ce nom nous amène à entrevoir ce que pourrait être la véritable indépendance. Mais comme la vie est truffée de paradoxes, il se peut que l'accès à la véritable indépendance passe par une forme relative et momentanée de dépendance ; dépendance qui n'est extérieurement pas très marquée dans la voie que je suis ou dans des voies occidentales, qui font plus appel à la connaissance et à la discrimination, mais qui est très forte par exemple dans la Bhakti hindoue où le disciple est totalement dépendant. La psychanalyse aura beau jeu d'y voir une régression totale. C'est une régression, oui... mais ce n'est pas que cela, à moins que le disciple s'arrête en cours de route, auquel cas il passera sa vie à marmonner "Ma Ma Ma..." (je pense à la dévotion portée à certaines saintes hindoues) sans pour autant dépasser intérieurement cette étape. Mais cela fait partie des risques inévitables, et peut-être faut-il en passer par là pour accéder à la véritable indépendance.


De toute façon, c'est une idée ridicule de croire que l'on peut croître et véritablement approfondir une expérience sans passer par une forme de dépendance. Qui veut être indépendant ? C'est un ego, de toute façon coupé de lui-même et coupé des autres, crispé sur son petit monde de peurs et de désirs. Pour lui, être indépendant signifie : "je fais ce que je veux, quand je veux, où je veux ; c'est moi le maître du monde, le maître de l'univers". C'est une volonté de puissance mais c'est aussi une illusion. Cela peut sembler marcher un certain temps, mais en général, cela finit très mal.


La relation de maître à disciple, loin d'asservir, libère. Elle responsabilise et rend adulte. Jamais un maître n'encouragera son disciple à devenir infantile et dépendant de lui, même s'il faut d'abord vivre une régression.

vendredi 6 avril 2012

L'autre versant du monde avec Christiane Singer

Une pensée de Christiane Singer pour découvrir l'autre versant d'un week-end pascal...


jeudi 5 avril 2012

mercredi 4 avril 2012

Pierre Rabhi au Forum Terre du Ciel (2009)

Il n'est plus temps de changer d'heure mais il est l'heure de changer de temps et de nourriture...

mardi 3 avril 2012

L'acte avec Yvan Amar

My dad's body would have turn 62 today... And after more than 12 yrs i can't believe how present and vibrant he still is!!! Feeling so grateful for all the moments shared and most of all for the precious gifts he left me, his unconditional faith and great sense of humor... i can still hear him laughing at me when i complain!! haha!!!!! and i'll always remember him telling me "I'd rather live 50 years fully than an empty 100's !!!!" And it has been 49 incredible years!! we've been all blessed with your presence!!
Happy Birthday Daddy!! You're ETERNAL !!!!!


Le corps de mon pére aurait eu 62 ans aujourd’hui… Et aprés plus de 12 ans, sa presence est toujours aussi radieuse, lumineuse!!! Je suis pleine de reconnaissance pour tous les moments partagés, et plus que tout pour les plus beaux des cadeaux qu’il m’ait fait, sa Foi inconditionnelle et son unique sens de l’humour!!! J’entends encore le son de son rire quand je me plains!! haha… Et ses mots resonnent encore en moi: « je prefere vivre 50 années pleines que 100 vides »!! et elles auront été 49 années plus que pleines !! Merci!!!
Bon Anniversaire Papa!! Tu es ETERNEL!!!

Anais Amar

(samedi 31 mars)



Question : On dirait que le chemin de transformation passe par le fait de poser des actes. Qu’est-ce qui fait qu’un acte est transformateur ?

Yvan : Je pense profondément qu’un acte est transformateur quand par cet acte là nous sommes entrés dans un acte infini. Nous ne connaissons des actes que les actes qui commencent et qui se terminent.
Qu’est-ce-que nous connaissons des actes?
Quand on parle d’un acte, c’est un acte qui a un commencement, un déroulement, une fin et un résultat. Mais est-ce que ça, c’est vraiment un acte?
Il n’y a qu’un seul acte c’est l’Acte de Dieu et qui consiste en fait à faire Dieu. Cet acte là, il est obligatoirement infini. Un acte n’est véritablement transformateur que lorsque qu’il n’a plus aucune cause et ni aucune conséquence, donc qui est l’acte infini de transformation pour faire Dieu. Un acte qui ne peut plus avoir aucun résultat. Poser cet acte là, c’est en fait déposer l’acteur une fois pour toute.


Si nous poursuivons continuellement des actes qui seront des actes significatifs sous prétexte que justement ils vont se distinguer des autres et se traduire par des résultats, nous sommes encore dans l’accumulation, nous sommes encore dans le règne de la quantité. Le règne de la qualité ne connaît qu’un seul acte c’est l’Acte créateur de Dieu. L’Acte créateur de Dieu, c’est faire Dieu, c’est rentrer dans le Faire Dieu. Cet acte là n’a plus de commencement, n’a plus de fin et n’a jamais de résultat. Il est transformateur parce qu’il est l’acte du Grandir Parfait. Il est l’acte du Grandir du Monde. Il n’est pas l’acte d’un résultat, il est l’Acte continuellement Acte. Dans la recherche des nouvelles formulations du Prologue par Goethe, ou il reprend : « Au commencement était la Parole », il dit :" Non, au commencement était la Force », il dit :"Non, au commencement était l’Acte ». C’est dans le Faust de Goethe.

Si la question se pose de cette façon là, l’acte que l’on va poser c’est l’Acte Infini, c’est le seul acte toléré dans cette voie là et pour que cet acte soit infini, il n’y qu’une seule façon, c’est qu’il soit l’acte de gratuité, l’acte qui n’a plus de résultat. Cet acte là est continuellement transformateur. Il n’accumule pas des résultats successifs à partir desquels on pourra dire il y a eu telle et telle transformation. L’Acte transformateur est un Acte de transformation Infini. C’est l’Acte de création et pour que cet Acte soit, il n’y a qu’une seule voie, il faut que l’acteur disparaisse. 


C’est l’Acte du Serviteur, c’est l’acte de celui qui se confond avec la Loi avec la volonté du Maître . Cet Acte là c’est la Loi. C’est l’obligation. La seule façon de poser un acte dans cette voie là, un acte éminemment transformateur c’est de déposer l’acteur. Il fut un temps ou on déposait les valises dans le train...

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Autour d'Yvan Amar
( septembre 1996 ) — avec David Amar et Anaïs Amar.

dimanche 1 avril 2012

Découvrir le fil d'Avril...par la nature

Regardez ! Regardez ! avec Joshin Luce Bachoux

« Regardez ! Regardez ! » Aussi bref qu'une respiration, aussi plein qu'un tableau, il y en a un pour chaque instant de notre vie : le « haïku », ce court poème japonais, nous montre de petites choses, si légères qu'on ne les voit pas, si habituelles qu'on ne les regarde pas. Il parle du fugace, de l'absolu, de l'instant :
« Au firmament d'automne,
un petit oiseau
aux dimensions du ciel... »
Issa

Comme on voudrait le saisir, l'attraper, juste ce moment ! J'ai les yeux plus grands que la tête et les mains qui me démangent ! C'est que cette matinée est si belle ! Juste fraîche, avec un petit parfum de feu de bois et de rivière. Il est tôt, et les oiseaux, eh bien, s'égosillent, il faut le dire, rien de très mélodieux, mais si joyeux, si pleins de vie qu'ils donnent envie de courir et de sauter... Et puis il y a la neige, et les pins aux fleurs de givre, et peut-être, là-bas, queue rousse, vite disparu dans un fourré, un renard - et on veut croire qu'il est venu voir le soleil se lever, et pas vérifier si la porte du poulailler du voisin est bien fermée !
Oui, il est si parfait ce matin, dans sa beauté et son impermanence, son effervescence et son foisonnement : je ne sais par quel bout le prendre ; je voudrais le ranger dans ma tête, pour le ressortir à l'envi, ou, mieux encore, pouvoir le faire vivre sur le papier... Mais je sens bien qu'il m'échappe, déjà, la lumière change, déjà, le moment est passé, déjà, il est trop tard...D'autres, avant moi, s'y sont essayés :


« Soir : la cloche du temple
arrêtée dans le ciel
par les cerisiers en fleurs. »
Chiyo


Attrapant au vol l'infiniment grand et l'infiniment petit, il nous fait rêver, ou rire, ou frissonner :


« Une par une
les étoiles apparaissent
- quel froid ! »
Taigi

Mais, toujours, il nous interpelle : ne dormez pas ! Tout est autour de vous, toujours... Regardez ! Regardez :


« Crépuscule,
dans l'eau de la flaque
la lumière vit encore... »
Issa

Ces courts poèmes illustrent bien cette phrase du peintre Shitao : « Trouver la profusion, au bord du pas-grand-chose, au bord du rien... »
Au bord du rien : un souffle, une esquisse de geste, un rêve :


« Sur ma paume
une libellule bleue
et son parfum d'eau. »
Kuroda


Le haïku : une évocation, un trait à peine tracé, une émotion attrapée au vol, le cœur qui se serre :


« Sur ce chemin,
nul ne vient,
- soir d'automne. »
Bassho


Oh, il n'est pas toujours romantique ; tout est bon, les gestes les plus quotidiens et les choses les plus ordinaires, il suffit de regarder autrement et nous voyons le comique des petits événements de notre vie :


« Pour vous aussi, les puces,
la nuit est peut-être longue
- mais elle n'est pas solitaire ! »
Issa


Il nous transforme en géant, ou en Lilliputien ; il nous fait ouvrir les yeux à un autre monde, il voit de la poésie là où, souvent, nous ne voyons rien...Ah ! Celui-ci, mon préféré, peut-être, au bord du minuscule, au bord du rien, et tout est là :


« Sur la pointe d'une herbe
dans l'infini du ciel,
une fourmi... »
Hosaï

Regardez ! Regardez !

Joshin Luce Bachoux est nonne bouddhiste. Elle anime la demeure sans limites, temple zen à Saint-Agrève, en Ardèche.