Ces deux mots, perception et conception, traduisent respectivement les mots sanscrits célèbres : rupa, la forme, nama, le nom. Je perçois les flammes qui dansent – simple vision sans qualification – et je conçois, c'est-à-dire je nomme ma perception : c'est l'incendie de ma maison. L'essentiel à saisir, c'est que tout se passe pour nous non pas à l'extérieur mais au-dedans de nous, parce que nous intériorisons l'événement dont nous sommes témoins.
Donc, notre existence n'est pas une affaire entre moi et le monde extérieur mais entre moi et moi ou, plus précisément, entre moi et mes pensées, mes émotions, mes sensations. Ce n'est pas à cause des événements que je suis heureux ou que je souffre, c'est à cause de mes pensées relatives à ces événements, de mes émotions relatives à ces événements.
Pouvez-vous admettre que nous sommes, avant tout, juste conscience? Imaginons une conscience ou, si vous préférez, un esprit vide comme le ciel sans un nuage, sans un oiseau qui le traverse. L'infini de la voûte céleste a toujours été utilisé comme image de cette immensité. Et dans cette immensité de l'esprit apparaissent et disparaissent des formes – les sensations, les perceptions, les conceptions, les émotions, les idées, les pensées, les peurs, les désirs – mais tout cela se passe au dedans de nous. Notre réalité essentielle, c'est juste la conscience, une conscience que rien ne limite, au-delà de l'espace, du temps, de la mesure, infinie, vide, lumineuse et, qui plus est, absolument heureuse.
Arnaud Desjardins
La Voie et ses pièges
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