E comme Enfance
« Quand je vois quelqu'un de vivant, je revois l'enfant qu'il est ou qu'il était. L'enfance n'est peut-être pas une question d'âge ni d'état civil. Quand Matisse fait ses papiers découpés, il arrive vers la fin de son travail de peintre, mais il a une petite âme de 3 ou 4 ans qui taille des feuilles de couleur. Mon enfance grandit de plus en plus chaque jour, elle n'est pas en arrière de moi, elle n'est pas dans ma mémoire, elle n'est pas un souvenir : c'est elle qui écrit. Moi, je n'écris pas. C'est l'enfant en moi qui écrit. Je lui passe le feutre, à charge pour lui de faire les livres. Je me contente de les relire...
J'ai un visage en argile, ce que je ressens s'imprime tout de suite dessus. C'est la raison pour laquelle les nouveau-nés sont mes frères. Car si une ombre les traverse, elle va les emporter tout entier. Si un rire les secoue, il va les secouer tout entier. Je ressens les événements de cette vie avec la même force que celle qu'on attribue aux enfants. Le vrai nom de l'enfance, c'est l'esprit, un mélange de gravité et de fantaisie et la capacité de faire face dans le noir en sifflotant un air pour se donner du courage. De là naissent mes livres. »
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