Entretiens avec SVAMI PRAJNANPAD : La CENSURE bloque la RELAXATION
Traduction de Colette et Daniel Roumanoff
Entretiens avec Frédérick Leboyer
S= Swami Prajnanpad
F= Frédéric ( "l'interviewer" )
S. Avez-vous essayé hier de vous relaxer?
F. Oui, oui.
S. Comment cela s’est-il passé?
F. Et bien ! Ce n’était pas difficile.
S. Pas difficile! Toute action, savez-vous, comporte trois parties pour ainsi dire. «Quoi?» «Pourquoi?» et «Comment?» Pour n’importe quelle action: «Qu’est-ce que c’est? Que dois-je faire?» Ceci est l’aspect intellectuel. L’intellect voit clairement et de manière explicite.
Et l’émotion vient. «Pourquoi dois-je le faire? Pourquoi est-il nécessaire que je le fasse? Que cela reste là. Qu’est-ce cela peut me faire?» Par exemple, vous vous êtes souvenu de tant de choses. Qu’est-ce que c’est pour vous? Vous devez sentir que: «Ceci est nécessaire pour moi. C’est à moi. Je ne peux que le faire». Cette explosion émotionnelle doit être présente. Pour cela, vous devez connaître le pourquoi de la chose: «Pourquoi devrais-je faire cela? Y a-t-il une quelconque nécessité? Si oui, très bien. Si non, adieu». Si votre conception intellectuelle est claire et votre conviction émotionnelle parfaite, alors votre action, le comment, devient aussi facile que possible.
Vous êtes toujours à la recherche du «Comment, comment puis-je faire? » Mais qu’est-ce que je cherche à obtenir? A quoi est ce que j’aspire? Vous ne vous en préoccupez pas. Voilà la difficulté
On vous demande ici de vous relaxer. «Pourquoi? Pourquoi devrais-je le faire?» Demandez-vous seulement: «Pourquoi devrais-je le faire? Pourquoi? Quelle en est la nécessité? Svâmiji dit que cela doit avoir un sens. Lequel?»
Ici, vous n’avez affaire qu’à vos émotions, pas à l’intellect. Que l’émotion sorte sous sa forme évidente à l’état spontané. Pourquoi devrait-elle sortir? Parce qu’elle est là et qu’elle représente le passé. Le passé subsiste en arrière-plan et cherche toujours à vous tirer en arrière. Mais vous devez avancer, aller de l’avant. Vous voyez, que quelque chose vous tire en arrière. Ainsi, vous devez d’abord en être libre, sinon votre énergie est bloquée. Pourquoi est-il nécessaire de libérer l’énergie, pour aller où? Laissez l’énergie s’écouler. Vers où? Ceci doit être clair pour l’intellect, pour l’intelligence. Pour qui? Pour vous, en tant qu’individu et en tant qu’homme. Vous agissez comme un individu, sans doute, mais vous essayez d’être un homme. Voyez la différence! Vous agissez comme un individu, sans doute, mais vous essayez d’aller en direction de l’homme.
F. Oui, vers l’accomplissement de toutes les possibilités qui se trouvent à l’intérieur.
S. Oui, c’est l’accomplissement de toutes vos énergies, vos possibilités, vos probabilités et vos potentialités.
F. Oui, elles doivent sortir.
S. Quelle est la destination? L’homme. Qu’est-ce que l’homme alors vers lequel vous devez vous diriger?
F. Eh bien même cela, c’est difficile de le savoir!
S. Pourquoi? Vous en avez discuté tant de fois! Qu’est-ce que vous recherchez en tant qu’individu?
F. L’infini.
S. Très bien. Ainsi, être infini doit être la destinée de l’homme ou plutôt de n’importe quelle forme de la Nature. L’homme est une forme consciente de la Nature, qui peut voir, comprendre, parvenir à cela, l’atteindre ou le devenir. C’est la destinée de l’homme d’être parfait, infini, complètement comblé. Ce stade de conscience, libre, complet, libre de toutes parts, où il n’y a rien, nulle part qui reste bloqué. Cette perfection, cet accomplissement c’est cela l’homme. La vérité est cela. Mais vous ne pouvez pas prétendre: «Je suis devenu un homme maintenant». Je suis où je suis et je dois aller là. Il faut voir clairement.
Par exemple, quand vous marchez, vos pieds sont sur le sol, mais votre regard se porte en avant. Votre intelligence, toute votre intelligence avec l’émotion qui l’accompagne, doit regarder vers ce but. Mais d’où partez-vous? De là où vous êtes!
F. Pour nager, on repousse l’eau en arrière
S. Très bien. Est-ce clair? Alors, d’où partez-vous? Partez d’ici et depuis le début. Cette liberté, cette liberté complète qui embrasse tout c’est cela la virilité. « Là où je me trouve ici et maintenant, je dois essayer d’être libre dans les circonstances dans lesquelles je me trouve. Mon intelligence doit être libre autant que possible, mes émotions doivent être libres autant que possible et mon action doit être libre autant que possible. Ainsi, tel que je me trouve situé maintenant, je dois être cela c’est-à-dire non-conditionné».
F. Je ne dois donc pas laisser le monde me diriger. Je dois me diriger moi-même.
S. Vous devez être vous-même, ici et maintenant dans les circonstances dans lesquelles vous vous trouvez. Ceci est la perfection ici et maintenant. Pour l’accomplir, votre intelligence doit donc être aussi claire que possible. Et l’émotion doit être libre et en harmonie avec votre intellect, de sorte que vous ne parliez pas de cette façons: «Oui, oui, je comprends, mais...»
F. Oui, oui. Dès qu’il y a le moindre doute concernant le but, il ne peut pas être atteint. Je le sais.
S. Parfois vous pouvez voir intellectuellement : «Oui. C’est ainsi». Mais l’émotion vous retient en arrière. L’émotion n’est pas en harmonie avec ce but. Que faire alors? Vous devez faire sortir l’émotion de son état déformé, de son état de manque vers son accomplissement. L’intellect et l’émotion doivent toujours être en harmonie. Si l’intellect est libre, l’émotion doit être libre également.
Comme vous l’avez vu, votre émotion n’est pas libre. Vous êtes attaché à votre enfance, attaché et attaché! Dans ces conditions comment l’émotion pourrait-elle sortir? Comment pouvez-vous avoir de l’énergie pour aller de l’avant? L’émotion vous tire toujours en arrière.
F. Oh! Oui! Je le sens fortement. Je dois m’en débarrasser, la brûler.
S. Comment faire? Quel est l’obstacle qui empêche l’émotion de sortir? L’obstacle est votre idée du jugement de valeur, votre conception du bien et du mal: «Ceci est mal, ceci est vertueux, ceci est un péché».
F. Mais cette censure se trouve dans l’inconscient ; peut-on la maîtriser? Peut-on la laisser partir?
S. Nous en avons parlé hier. Maintenant, répétons-le encore. Quand vous êtes seul, vous êtes seul. Vous êtes avec vos émotions. Quand vous êtes loin de toute société et de tout le reste, vous êtes seul. Vous êtes avec vous-même. Quand vous êtes vous-même, il n’est question ni de bien ni de mal. Parce que la question du bien et du mal ou de la moralité n’apparaît que dans la relation avec autrui. Quand vous êtes seul, vous êtes donc vous-même. Toute émotion qui vient, est la vôtre, tel que vous êtes situé. Vous ne pouvez pas la juger.
F. Mais si on décide: «Très bien, il n’y a pas de jugement de valeur, tout ce qui va arriver, très bien, laissons-le venir», cela va-t-il venir ou bien certaines choses vont-elles être repoussées par la censure?
S. Il n’y a que cette censure. Maintenant quelle est la nature de la censure? Qu’est-ce que la censure?
F. D’une certaine façon, on peut dire que ce sont seulement des jugements de valeur. Y a-t-il une autre censure qui ne dépend pas de notre volonté? Pouvons-nous agir sur elle et dire «S’il vous plaît » ou bien « Je t'ordonne de laisser les choses se dérouler ?»
S. Il s’agit de comprendre ce jugement de valeur, qui commande toujours: «Ne fais pas ceci, ne fais pas cela». En psychanalyse, on l’appelle surmoi. Ici en Inde, dans le yoga, on l’appelle sia-ahakâra: l’ego conditionné.
F. Cela veut dire que c’est une censure qui n’est pas soumise au pouvoir de notre volonté?
S. L’ego a toujours peur de ce surmoi, ou plutôt l’ego est sous sa domination.
F. Vraiment comme un petit enfant.
S. Oui, comme un petit enfant. A moins d’affaiblir ce surmoi, il n’y a pas de sortie. Ainsi, ce surmoi ou cet ego conditionné, quelle est son origine? Parce que, vous voyez, vous devez être en relation avec lui, et pour traiter avec lui, pour le contrôler vous devez connaître sa nature. Sinon, vous ne pouvez rien. Quelle est donc sa nature? Un tout-petit enfant n’a pas de surmoi.
F. Cela vient donc de l’éducation et probablement du souvenir que certaines choses sont permises et d’autres pas.
S. Et ce surmoi vient généralement et de manière prédominante du père, parce que l’autorité c’est lui.
F. Oui, c’est la raison pour laquelle Dieu est généralement...
S. Pris comme étant le père. Oui, vous y êtes. Super-Dieu n’est rien d’autre que le surmoi pour l’enfant, Dieu l’est pour l’ego d’un adulte. Rien de plus que cela. C’est bien montré par Freud dans son livre: «L’Avenir d’une illusion». C’est très bien décrit.
La censure vient donc de l’extérieur, c’est la première chose, le premier principe. La censure ne vient pas de l’intérieur mais de l’extérieur et elle est surimposée sur l’ego. Cela ne vous appartient pas. Parce que votre surmoi sera différent du surmoi d’une famille différente. Et votre surmoi sera également différent du surmoi d’un pays oriental. Vous voyez que le surmoi est le produit d’une influence extérieure. Aidez seulement votre intelligence et votre émotion à dire: «Parce cela vient d’une influence extérieure, ce n’est pas à moi».
F. Alors, pensez-vous que l’enfant qui n’aurait pas de père, qui aurait été élevé librement, n’aurait pas ce sentiment de surmoi?
S. Oh! S’il n’a personne pour le contrôler d’aucune façon, il sera sauvage, asocial et non civilisé. Et tout se trouvera dans une confusion complète. Ce surmoi est donc un mal nécessaire. Vous ne pouvez pas l’éviter.
La soif de liberté ou le goût de la liberté vient de l’asservissement. Vous devez donc être asservi pour être libre. Telles sont les choses aujourd’hui. Et au sujet de ce surmoi, par exemple, dans une famille où le grand-père dirige la famille, le surmoi du petit-fils sera très déformé, très anormal, parce que pour lui, son père est ce qu’il y a de mieux. Mais il sent: «Oh! Mon père est soumis à mon grand-père».
Traduction de Colette et Daniel Roumanoff
Entretiens avec Frédérick Leboyer
S= Swami Prajnanpad
F= Frédéric ( "l'interviewer" )
S. Avez-vous essayé hier de vous relaxer?
F. Oui, oui.
S. Comment cela s’est-il passé?
F. Et bien ! Ce n’était pas difficile.
S. Pas difficile! Toute action, savez-vous, comporte trois parties pour ainsi dire. «Quoi?» «Pourquoi?» et «Comment?» Pour n’importe quelle action: «Qu’est-ce que c’est? Que dois-je faire?» Ceci est l’aspect intellectuel. L’intellect voit clairement et de manière explicite.
Et l’émotion vient. «Pourquoi dois-je le faire? Pourquoi est-il nécessaire que je le fasse? Que cela reste là. Qu’est-ce cela peut me faire?» Par exemple, vous vous êtes souvenu de tant de choses. Qu’est-ce que c’est pour vous? Vous devez sentir que: «Ceci est nécessaire pour moi. C’est à moi. Je ne peux que le faire». Cette explosion émotionnelle doit être présente. Pour cela, vous devez connaître le pourquoi de la chose: «Pourquoi devrais-je faire cela? Y a-t-il une quelconque nécessité? Si oui, très bien. Si non, adieu». Si votre conception intellectuelle est claire et votre conviction émotionnelle parfaite, alors votre action, le comment, devient aussi facile que possible.
Vous êtes toujours à la recherche du «Comment, comment puis-je faire? » Mais qu’est-ce que je cherche à obtenir? A quoi est ce que j’aspire? Vous ne vous en préoccupez pas. Voilà la difficulté
On vous demande ici de vous relaxer. «Pourquoi? Pourquoi devrais-je le faire?» Demandez-vous seulement: «Pourquoi devrais-je le faire? Pourquoi? Quelle en est la nécessité? Svâmiji dit que cela doit avoir un sens. Lequel?»
Ici, vous n’avez affaire qu’à vos émotions, pas à l’intellect. Que l’émotion sorte sous sa forme évidente à l’état spontané. Pourquoi devrait-elle sortir? Parce qu’elle est là et qu’elle représente le passé. Le passé subsiste en arrière-plan et cherche toujours à vous tirer en arrière. Mais vous devez avancer, aller de l’avant. Vous voyez, que quelque chose vous tire en arrière. Ainsi, vous devez d’abord en être libre, sinon votre énergie est bloquée. Pourquoi est-il nécessaire de libérer l’énergie, pour aller où? Laissez l’énergie s’écouler. Vers où? Ceci doit être clair pour l’intellect, pour l’intelligence. Pour qui? Pour vous, en tant qu’individu et en tant qu’homme. Vous agissez comme un individu, sans doute, mais vous essayez d’être un homme. Voyez la différence! Vous agissez comme un individu, sans doute, mais vous essayez d’aller en direction de l’homme.
F. Oui, vers l’accomplissement de toutes les possibilités qui se trouvent à l’intérieur.
S. Oui, c’est l’accomplissement de toutes vos énergies, vos possibilités, vos probabilités et vos potentialités.
F. Oui, elles doivent sortir.
S. Quelle est la destination? L’homme. Qu’est-ce que l’homme alors vers lequel vous devez vous diriger?
F. Eh bien même cela, c’est difficile de le savoir!
S. Pourquoi? Vous en avez discuté tant de fois! Qu’est-ce que vous recherchez en tant qu’individu?
F. L’infini.
S. Très bien. Ainsi, être infini doit être la destinée de l’homme ou plutôt de n’importe quelle forme de la Nature. L’homme est une forme consciente de la Nature, qui peut voir, comprendre, parvenir à cela, l’atteindre ou le devenir. C’est la destinée de l’homme d’être parfait, infini, complètement comblé. Ce stade de conscience, libre, complet, libre de toutes parts, où il n’y a rien, nulle part qui reste bloqué. Cette perfection, cet accomplissement c’est cela l’homme. La vérité est cela. Mais vous ne pouvez pas prétendre: «Je suis devenu un homme maintenant». Je suis où je suis et je dois aller là. Il faut voir clairement.
Par exemple, quand vous marchez, vos pieds sont sur le sol, mais votre regard se porte en avant. Votre intelligence, toute votre intelligence avec l’émotion qui l’accompagne, doit regarder vers ce but. Mais d’où partez-vous? De là où vous êtes!
F. Pour nager, on repousse l’eau en arrière
S. Très bien. Est-ce clair? Alors, d’où partez-vous? Partez d’ici et depuis le début. Cette liberté, cette liberté complète qui embrasse tout c’est cela la virilité. « Là où je me trouve ici et maintenant, je dois essayer d’être libre dans les circonstances dans lesquelles je me trouve. Mon intelligence doit être libre autant que possible, mes émotions doivent être libres autant que possible et mon action doit être libre autant que possible. Ainsi, tel que je me trouve situé maintenant, je dois être cela c’est-à-dire non-conditionné».
F. Je ne dois donc pas laisser le monde me diriger. Je dois me diriger moi-même.
S. Vous devez être vous-même, ici et maintenant dans les circonstances dans lesquelles vous vous trouvez. Ceci est la perfection ici et maintenant. Pour l’accomplir, votre intelligence doit donc être aussi claire que possible. Et l’émotion doit être libre et en harmonie avec votre intellect, de sorte que vous ne parliez pas de cette façons: «Oui, oui, je comprends, mais...»
F. Oui, oui. Dès qu’il y a le moindre doute concernant le but, il ne peut pas être atteint. Je le sais.
S. Parfois vous pouvez voir intellectuellement : «Oui. C’est ainsi». Mais l’émotion vous retient en arrière. L’émotion n’est pas en harmonie avec ce but. Que faire alors? Vous devez faire sortir l’émotion de son état déformé, de son état de manque vers son accomplissement. L’intellect et l’émotion doivent toujours être en harmonie. Si l’intellect est libre, l’émotion doit être libre également.
Comme vous l’avez vu, votre émotion n’est pas libre. Vous êtes attaché à votre enfance, attaché et attaché! Dans ces conditions comment l’émotion pourrait-elle sortir? Comment pouvez-vous avoir de l’énergie pour aller de l’avant? L’émotion vous tire toujours en arrière.
F. Oh! Oui! Je le sens fortement. Je dois m’en débarrasser, la brûler.
S. Comment faire? Quel est l’obstacle qui empêche l’émotion de sortir? L’obstacle est votre idée du jugement de valeur, votre conception du bien et du mal: «Ceci est mal, ceci est vertueux, ceci est un péché».
F. Mais cette censure se trouve dans l’inconscient ; peut-on la maîtriser? Peut-on la laisser partir?
S. Nous en avons parlé hier. Maintenant, répétons-le encore. Quand vous êtes seul, vous êtes seul. Vous êtes avec vos émotions. Quand vous êtes loin de toute société et de tout le reste, vous êtes seul. Vous êtes avec vous-même. Quand vous êtes vous-même, il n’est question ni de bien ni de mal. Parce que la question du bien et du mal ou de la moralité n’apparaît que dans la relation avec autrui. Quand vous êtes seul, vous êtes donc vous-même. Toute émotion qui vient, est la vôtre, tel que vous êtes situé. Vous ne pouvez pas la juger.
F. Mais si on décide: «Très bien, il n’y a pas de jugement de valeur, tout ce qui va arriver, très bien, laissons-le venir», cela va-t-il venir ou bien certaines choses vont-elles être repoussées par la censure?
S. Il n’y a que cette censure. Maintenant quelle est la nature de la censure? Qu’est-ce que la censure?
F. D’une certaine façon, on peut dire que ce sont seulement des jugements de valeur. Y a-t-il une autre censure qui ne dépend pas de notre volonté? Pouvons-nous agir sur elle et dire «S’il vous plaît » ou bien « Je t'ordonne de laisser les choses se dérouler ?»
S. Il s’agit de comprendre ce jugement de valeur, qui commande toujours: «Ne fais pas ceci, ne fais pas cela». En psychanalyse, on l’appelle surmoi. Ici en Inde, dans le yoga, on l’appelle sia-ahakâra: l’ego conditionné.
F. Cela veut dire que c’est une censure qui n’est pas soumise au pouvoir de notre volonté?
S. L’ego a toujours peur de ce surmoi, ou plutôt l’ego est sous sa domination.
F. Vraiment comme un petit enfant.
S. Oui, comme un petit enfant. A moins d’affaiblir ce surmoi, il n’y a pas de sortie. Ainsi, ce surmoi ou cet ego conditionné, quelle est son origine? Parce que, vous voyez, vous devez être en relation avec lui, et pour traiter avec lui, pour le contrôler vous devez connaître sa nature. Sinon, vous ne pouvez rien. Quelle est donc sa nature? Un tout-petit enfant n’a pas de surmoi.
F. Cela vient donc de l’éducation et probablement du souvenir que certaines choses sont permises et d’autres pas.
S. Et ce surmoi vient généralement et de manière prédominante du père, parce que l’autorité c’est lui.
F. Oui, c’est la raison pour laquelle Dieu est généralement...
S. Pris comme étant le père. Oui, vous y êtes. Super-Dieu n’est rien d’autre que le surmoi pour l’enfant, Dieu l’est pour l’ego d’un adulte. Rien de plus que cela. C’est bien montré par Freud dans son livre: «L’Avenir d’une illusion». C’est très bien décrit.
La censure vient donc de l’extérieur, c’est la première chose, le premier principe. La censure ne vient pas de l’intérieur mais de l’extérieur et elle est surimposée sur l’ego. Cela ne vous appartient pas. Parce que votre surmoi sera différent du surmoi d’une famille différente. Et votre surmoi sera également différent du surmoi d’un pays oriental. Vous voyez que le surmoi est le produit d’une influence extérieure. Aidez seulement votre intelligence et votre émotion à dire: «Parce cela vient d’une influence extérieure, ce n’est pas à moi».
F. Alors, pensez-vous que l’enfant qui n’aurait pas de père, qui aurait été élevé librement, n’aurait pas ce sentiment de surmoi?
S. Oh! S’il n’a personne pour le contrôler d’aucune façon, il sera sauvage, asocial et non civilisé. Et tout se trouvera dans une confusion complète. Ce surmoi est donc un mal nécessaire. Vous ne pouvez pas l’éviter.
La soif de liberté ou le goût de la liberté vient de l’asservissement. Vous devez donc être asservi pour être libre. Telles sont les choses aujourd’hui. Et au sujet de ce surmoi, par exemple, dans une famille où le grand-père dirige la famille, le surmoi du petit-fils sera très déformé, très anormal, parce que pour lui, son père est ce qu’il y a de mieux. Mais il sent: «Oh! Mon père est soumis à mon grand-père».