D’avoir souffert de surpoids et ressemblé à une fille quand j’étais petit a réveillé chez moi une palette sentimentale que je n’aurais sans doute pas connue si j’avais été dans la norme. Face à une situation familiale compliquée, j’ai appris à me taire, pour éviter de juger ceux que j’aimais ou de prendre parti. Face aux combats relationnels, passionnels entre mon père et ma mère, je m’efforçais de m’échapper dans un autre monde. Couchés sur le papier, mes poèmes traduisaient une vie intérieure enfouie. Malgré ça, j’ai réussi à me faufiler entre les chagrins des autres, avec un bonheur extraordinaire. Tous mes complexes de jeune garçon m’ont permis de développer d’autres choses.
Des années plus tard, alors que j’étais dans un bus, je me suis trouvé nez à nez avec des enfants autistes. Je fus comme aimanté. Ces personnes me rappelaient le petit garçon que j’étais lorsque, blotti le soir dans ma chambre, je balançais mon corps dans un mouvement similaire au leur pour m’apaiser. Depuis, je n’ai cessé de m’investir auprès d’eux, notamment par le biais du journal Le Papotin, que nous concevons ensemble. La foi, c’est aussi se battre en faveur de causes. Quelqu’un a dit que Jésus était le premier communiste. J’aime cette idée.
Plus le temps passe, plus je prends de la distance dans ma vie personnelle et professionnelle. Je deviens assez minimaliste dans mes fréquentations. Alors qu’avant je faisais pulser mon être dans la guitare, les studios et les pellicules, j’ai maintenant besoin de lire, d’écrire en long format ; de m’affranchir d’une machine à fabriquer des vedettes. Cette période d’absence, sorte de retraite que je m’impose et que j’impose aux autres, n’est pas facile, et pourtant essentielle. Je sens que je suis à un tournant de ma vie. J’ai 52 ans, j’ai perdu mes parents, mon producteur est parti. Je ne suis pas un impatient de la fin, je fais le point. Il me faut traverser ce désert et cesser de me raccrocher à des protections infantiles. J’expérimente aussi le paradoxe de la solitude malgré la présence des autres. Dieu, lui, habite cette béance. Il marche à côté de moi, du moins devant.
Je suis encore un adolescent, un débutant dans la foi. Il me faut accepter cette immaturité, c’est elle qui peut aboutir à une forme d’épanouissement. Ignorant, j’ai l’impression de démarrer une carrière dans ce domaine, me menant vers une nouvelle culture. Lorsque vient le Notre Père à la messe, je scrute les lèvres pour suivre. Je suis un enfant répétant naïvement les paroles. Jusqu’alors, il ne me paraissait pas important de connaître la langue religieuse. Je réalise qu’en l’apprenant j’emprunterai un chemin où chaque pas me fera découvrir ce qui se niche derrière les mots, le discours. Et fera écho, je l’espère, à ma propre existence.
J’ai reçu un appel à l’âge de 5 ans ; j’ai toujours 5 ans aujourd’hui. L’appel ne vieillit pas. Je tente ma chance, tout en prenant mon temps. Je ne sais pas quel est ce lien avec celui que l’on appelle Dieu. Est-ce mon rôle de le dire ? Est-ce que les mots suffisent ? Ne serait-ce pas simplement le silence sans le vide ? Ne serait-ce pas une succession répétitive d’actes et de dons de soi, sans rien attendre en retour ? Ne serait-ce pas simplement ce désir de faire le bien sans se demander pourquoi ?
Des années plus tard, alors que j’étais dans un bus, je me suis trouvé nez à nez avec des enfants autistes. Je fus comme aimanté. Ces personnes me rappelaient le petit garçon que j’étais lorsque, blotti le soir dans ma chambre, je balançais mon corps dans un mouvement similaire au leur pour m’apaiser. Depuis, je n’ai cessé de m’investir auprès d’eux, notamment par le biais du journal Le Papotin, que nous concevons ensemble. La foi, c’est aussi se battre en faveur de causes. Quelqu’un a dit que Jésus était le premier communiste. J’aime cette idée.
Plus le temps passe, plus je prends de la distance dans ma vie personnelle et professionnelle. Je deviens assez minimaliste dans mes fréquentations. Alors qu’avant je faisais pulser mon être dans la guitare, les studios et les pellicules, j’ai maintenant besoin de lire, d’écrire en long format ; de m’affranchir d’une machine à fabriquer des vedettes. Cette période d’absence, sorte de retraite que je m’impose et que j’impose aux autres, n’est pas facile, et pourtant essentielle. Je sens que je suis à un tournant de ma vie. J’ai 52 ans, j’ai perdu mes parents, mon producteur est parti. Je ne suis pas un impatient de la fin, je fais le point. Il me faut traverser ce désert et cesser de me raccrocher à des protections infantiles. J’expérimente aussi le paradoxe de la solitude malgré la présence des autres. Dieu, lui, habite cette béance. Il marche à côté de moi, du moins devant.
Je suis encore un adolescent, un débutant dans la foi. Il me faut accepter cette immaturité, c’est elle qui peut aboutir à une forme d’épanouissement. Ignorant, j’ai l’impression de démarrer une carrière dans ce domaine, me menant vers une nouvelle culture. Lorsque vient le Notre Père à la messe, je scrute les lèvres pour suivre. Je suis un enfant répétant naïvement les paroles. Jusqu’alors, il ne me paraissait pas important de connaître la langue religieuse. Je réalise qu’en l’apprenant j’emprunterai un chemin où chaque pas me fera découvrir ce qui se niche derrière les mots, le discours. Et fera écho, je l’espère, à ma propre existence.
J’ai reçu un appel à l’âge de 5 ans ; j’ai toujours 5 ans aujourd’hui. L’appel ne vieillit pas. Je tente ma chance, tout en prenant mon temps. Je ne sais pas quel est ce lien avec celui que l’on appelle Dieu. Est-ce mon rôle de le dire ? Est-ce que les mots suffisent ? Ne serait-ce pas simplement le silence sans le vide ? Ne serait-ce pas une succession répétitive d’actes et de dons de soi, sans rien attendre en retour ? Ne serait-ce pas simplement ce désir de faire le bien sans se demander pourquoi ?