samedi 21 novembre 2015
vendredi 20 novembre 2015
Souffrance et vision non-duelle : interview de Suyin Lamour
Annick : Au sujet de changer de regard sur les événements et sur le monde, tu dis : « Nous ne pouvons pas changer les événements, nous pouvons seulement changer notre façon de les interpréter, en observant nos croyances et en nous ouvrant à la possibilité de regarder autrement. »
Je peux le comprendre à l’échelon individuel. Mais je ne peux pas le comprendre à l’échelon collectif. Comment peut-on changer de regard sur la Shoa, la barbarie, le terrorisme, la torture, le djihadisme… ?
Suyin : Ton regard sur ces choses-là est toujours personnel. Un terroriste n’a pas du tout le même regard que toi sur la situation. Lui il est convaincu de faire le bien, d’œuvrer pour une grande cause.
Annick : Oui bien sûr, mais moi je ne peux pas changer ma façon d’interpréter ces choses-là. Au niveau individuel, si quelqu’un me fait une vacherie, je peux toujours tenter de comprendre ses motivations. Mais au niveau collectif, avec toutes les horreurs qu’on peut voir dans notre monde, j’ai plus de mal. Mais peut-être que toi tu ne l’appliques pas au niveau collectif ?
Suyin : Si, c’est pareil. Si j’entends par exemple l’annonce d’un acte de terrorisme, je vais avoir sur le coup une réaction de stupeur ou d’horreur, et cela peut générer des pensées du type : c’est injuste, comment de telles choses peuvent-elle exister, etc. Mais je peux aussi essayer de voir quelles sont les motivations de ceux qui font ça, est-ce que dans leur tête ils font le mal ? Non, ils sont convaincus d’œuvrer pour le bien. Sont-ils responsables de leurs actes ? Non, ils répondent à un conditionnement. Est-ce que ma vision est plus juste que la leur, je n’en sais rien, parce que dans l’absolu c’est un conditionnement aussi. Pour eux, leur vision est plus juste que la mienne. En quoi la mienne ou la leur serait plus juste ? Ce sont des conditionnements.
Et aussi, je n’ai aucune idée des conséquences sur le long terme de leurs actions, car je n’ai pas la vision globale de la situation, je n’en ai qu’un aperçu limité. Regarde comment la Shoa a fait par contrecoup se développer considérablement les valeurs humanistes, tolérantes, solidaires, dans la société occidentale. Nous ne savons pas si sans de tels extrêmes qui ont profondément choqué et marqué les consciences, l’Europe et les Etats-Unis ne seraient pas aujourd’hui des pays totalitaires.
Mais la question n’est pas tellement de chercher des bonnes raisons ou d’avoir une pensée positive, car c’est encore entretenir l’idée qu’il y a quelque chose de bien et quelque chose de mal. C’est plutôt d’avoir un regard non-duel, c’est à dire dépouillé de jugement.
Annick : Mais si tu arrives à n’avoir aucun jugement sur la Shoa et sur les choses qui se passent en ce moment, cela veut dire que tu deviens sacrément indifférente au monde qui t’entoure ? Comment peut-on vivre avec un tel détachement ?
Suyin : Ce n’est pas de l’indifférence, le détachement n’empêche pas la compassion. Le vécu de souffrance est réel, et j’ai une immense compassion pour les êtres qui souffrent. Mais est-ce que le fait que je souffre pour eux va alléger leur souffrance ? Si j’adopte un point de vue sans jugement, je peux être remplie de compassion parce qu’en tant qu’être humain je suis touchée, et pourquoi pas agir concrètement pour aider autrui, sans pour autant rajouter de la souffrance à la souffrance. D’ailleurs, sur un plan vibratoire, ce n’est pas la peine de diffuser encore plus d’énergies de souffrance dans ce monde, il y en a déjà suffisamment.
Annick : Concernant la Shoa, je n’en souffre pas, mais je ne peux pas considérer que c’est une chose juste qui est arrivée. On a infligé des souffrances inhumaines à des êtres humains au nom d’une idéologie, et je ne peux pas changer mon regard là-dessus. Je ne peux pas dissoudre ça.
Suyin : Tu ne peux pas dissoudre la croyance que c’est injuste ?
Annick : Non. Et même si je pouvais je ne le voudrais pas.
Suyin : Et bien, si tu ne souhaites pas la dissoudre, il n’y a pas de nécessité à le faire. On est libre de dissoudre nos croyances, et on est libre aussi de ne pas le faire. Je veux juste dire qu’on en a la possibilité. Tout dépend comment on veut se sentir par rapport au monde.
Si je suis très mal à l’aise avec ça au point de ressentir de la haine ou d’avoir des envies de suicide, ça peut être intéressant pour moi d’investiguer cette croyance plutôt que de souffrir de cette façon.
Sinon, il n’y a pas de problème. La croyance que c’est injuste n’est pas plus fausse que la croyance que c’est juste. On peut penser que c’est juste, on peut penser que c’est injuste, les deux sont faux dans l’absolu. Car dire que c’est juste, c’est croire qu’il y a une volonté derrière, que la vie a voulu que ça arrive. Or je ne suis pas sûre du tout de cela. Je pense plutôt que ce sont des phénomènes qui échappent à toute volonté. Et c’est en cela que je ne peux pas juger la vie. Comme je ne peux pas juger un banc de sauterelles qui va tout détruire sur son passage. Quand c’est des sauterelles, on ne les juge pas, elles font un véritable génocide mais personne ne dit que c’est injuste ! Mais dès qu’il s’agit de l’être humain on trouve cela injuste car on prête à l’humain une volonté personnelle et une responsabilité vis-à-vis de l’humanité. Or, l’humain, comme les sauterelles, ne fait que répondre à un conditionnement, plus élaboré certes, et basé sur l’idée que nous sommes des individus séparés, ce qui entraîne toutes les souffrances que nous voyons dans le monde.
Et la seule chose qui pourrait véritablement mettre fin à ces souffrances, ce serait de cesser de croire à cette idée, de cesser de vivre selon cette perspective, cette croyance en la séparation. Ce serait de réaliser que nous sommes Un.
source : site de Suyin LamourJe peux le comprendre à l’échelon individuel. Mais je ne peux pas le comprendre à l’échelon collectif. Comment peut-on changer de regard sur la Shoa, la barbarie, le terrorisme, la torture, le djihadisme… ?
Suyin : Ton regard sur ces choses-là est toujours personnel. Un terroriste n’a pas du tout le même regard que toi sur la situation. Lui il est convaincu de faire le bien, d’œuvrer pour une grande cause.
Annick : Oui bien sûr, mais moi je ne peux pas changer ma façon d’interpréter ces choses-là. Au niveau individuel, si quelqu’un me fait une vacherie, je peux toujours tenter de comprendre ses motivations. Mais au niveau collectif, avec toutes les horreurs qu’on peut voir dans notre monde, j’ai plus de mal. Mais peut-être que toi tu ne l’appliques pas au niveau collectif ?
Suyin : Si, c’est pareil. Si j’entends par exemple l’annonce d’un acte de terrorisme, je vais avoir sur le coup une réaction de stupeur ou d’horreur, et cela peut générer des pensées du type : c’est injuste, comment de telles choses peuvent-elle exister, etc. Mais je peux aussi essayer de voir quelles sont les motivations de ceux qui font ça, est-ce que dans leur tête ils font le mal ? Non, ils sont convaincus d’œuvrer pour le bien. Sont-ils responsables de leurs actes ? Non, ils répondent à un conditionnement. Est-ce que ma vision est plus juste que la leur, je n’en sais rien, parce que dans l’absolu c’est un conditionnement aussi. Pour eux, leur vision est plus juste que la mienne. En quoi la mienne ou la leur serait plus juste ? Ce sont des conditionnements.
Et aussi, je n’ai aucune idée des conséquences sur le long terme de leurs actions, car je n’ai pas la vision globale de la situation, je n’en ai qu’un aperçu limité. Regarde comment la Shoa a fait par contrecoup se développer considérablement les valeurs humanistes, tolérantes, solidaires, dans la société occidentale. Nous ne savons pas si sans de tels extrêmes qui ont profondément choqué et marqué les consciences, l’Europe et les Etats-Unis ne seraient pas aujourd’hui des pays totalitaires.
Mais la question n’est pas tellement de chercher des bonnes raisons ou d’avoir une pensée positive, car c’est encore entretenir l’idée qu’il y a quelque chose de bien et quelque chose de mal. C’est plutôt d’avoir un regard non-duel, c’est à dire dépouillé de jugement.
Annick : Mais si tu arrives à n’avoir aucun jugement sur la Shoa et sur les choses qui se passent en ce moment, cela veut dire que tu deviens sacrément indifférente au monde qui t’entoure ? Comment peut-on vivre avec un tel détachement ?
Suyin : Ce n’est pas de l’indifférence, le détachement n’empêche pas la compassion. Le vécu de souffrance est réel, et j’ai une immense compassion pour les êtres qui souffrent. Mais est-ce que le fait que je souffre pour eux va alléger leur souffrance ? Si j’adopte un point de vue sans jugement, je peux être remplie de compassion parce qu’en tant qu’être humain je suis touchée, et pourquoi pas agir concrètement pour aider autrui, sans pour autant rajouter de la souffrance à la souffrance. D’ailleurs, sur un plan vibratoire, ce n’est pas la peine de diffuser encore plus d’énergies de souffrance dans ce monde, il y en a déjà suffisamment.
Annick : Concernant la Shoa, je n’en souffre pas, mais je ne peux pas considérer que c’est une chose juste qui est arrivée. On a infligé des souffrances inhumaines à des êtres humains au nom d’une idéologie, et je ne peux pas changer mon regard là-dessus. Je ne peux pas dissoudre ça.
Suyin : Tu ne peux pas dissoudre la croyance que c’est injuste ?
Annick : Non. Et même si je pouvais je ne le voudrais pas.
Suyin : Et bien, si tu ne souhaites pas la dissoudre, il n’y a pas de nécessité à le faire. On est libre de dissoudre nos croyances, et on est libre aussi de ne pas le faire. Je veux juste dire qu’on en a la possibilité. Tout dépend comment on veut se sentir par rapport au monde.
Si je suis très mal à l’aise avec ça au point de ressentir de la haine ou d’avoir des envies de suicide, ça peut être intéressant pour moi d’investiguer cette croyance plutôt que de souffrir de cette façon.
Sinon, il n’y a pas de problème. La croyance que c’est injuste n’est pas plus fausse que la croyance que c’est juste. On peut penser que c’est juste, on peut penser que c’est injuste, les deux sont faux dans l’absolu. Car dire que c’est juste, c’est croire qu’il y a une volonté derrière, que la vie a voulu que ça arrive. Or je ne suis pas sûre du tout de cela. Je pense plutôt que ce sont des phénomènes qui échappent à toute volonté. Et c’est en cela que je ne peux pas juger la vie. Comme je ne peux pas juger un banc de sauterelles qui va tout détruire sur son passage. Quand c’est des sauterelles, on ne les juge pas, elles font un véritable génocide mais personne ne dit que c’est injuste ! Mais dès qu’il s’agit de l’être humain on trouve cela injuste car on prête à l’humain une volonté personnelle et une responsabilité vis-à-vis de l’humanité. Or, l’humain, comme les sauterelles, ne fait que répondre à un conditionnement, plus élaboré certes, et basé sur l’idée que nous sommes des individus séparés, ce qui entraîne toutes les souffrances que nous voyons dans le monde.
Et la seule chose qui pourrait véritablement mettre fin à ces souffrances, ce serait de cesser de croire à cette idée, de cesser de vivre selon cette perspective, cette croyance en la séparation. Ce serait de réaliser que nous sommes Un.
jeudi 19 novembre 2015
LA JOIE D’ETRE de Suyin Lamour, un livre précieux
Voici un livre dont la simplicité
du titre correspond parfaitement à celle du contenu. Une légèreté profonde. Ce récit
écrit à la première personne du singulier se conjugue pour l’essentiel au
présent de l’indicatif. Le seul temps qui puisse épouser le jaillissement de
l’éternel Instant.
Trois grandes parties composent
ce bref et dense ouvrage :
-
Le déclic ;
-
La vision
nouvelle ;
-
La danse de la
vie.
Depuis le « déclic » qui pousse l’auteure à comprendre un jour que
son expérience d’éveil, treize ans auparavant, n’était en fait qu’une
expérience spirituelle spectaculaire, mais certainement pas la Libération…
...jusqu’à l’installation, peu à
peu, d’une « vision nouvelle » de son être profond ; une compréhension
plus fine, profonde et juste de ce qu’est le véritable Eveil, avec
ses difficultés, ses étapes et la joie de goûter enfin la liberté d’être
soi-même : « Je sais maintenant ce
qui devait mourir, être dissous. Non pas le personnage-moi, puisqu’il n’existe
pas. Mais la croyance en l’existence de ce personnage. […] Tous mes
systèmes de croyance s écroulent comme un château de cartes, et je sens
que ce n’est qu’un début. »
Quelle vertigineuse aventure
intérieure… Et pourtant, cette plongée dans la matière, ce saut dans le
vide, cette immense glissade « dans
les bras de l’Etreté », tout cela se vit au plus près du simple
quotidien, « comme si on ouvrait une
fenêtre au petit matin ». Thème après thème – « le jeu », « le personnage », « l’amour », « la
foi », « la mort », « les émotions », « le
libre-arbitre », « la pratique », etc. -, la « vision nouvelle » de Sunyin
Lamour se déroule, de plus en plus vive et assurée, dans la pure joie d’être au
monde.
Alors peut se déployer la « danse de la vie » :
danse du je
libéré avec le mouvement naturel d’une vie qui ne lui appartient pas mais qui
l’emmène vers le meilleur de ce qui est à vivre. Une danse émouvante, lorsque Suyin nous entraîne avec elle
dans les bois où elle se promène, parmi ses « amis
de sève et de pierre », les buissons et les rochers, toute baignée de
larmes d’amour, qui lui lavent le corps et le cœur. Une danse sensuelle et poétique
à la fois, lorsque l’auteure se décrit, immobile, « écoutant le vent, sentant l’énergie de la nuit, la vibration de
Ce qui est ». Une danse désirante aussi, animale, même, lorsque la
narratrice évoque avec gourmandise son « ardente
et rugissante envie ». Une danse ludiquement divine, lorsqu’elle
coïncide avec le jeu d’un Dieu qui s’amuse comme un enfant à se refléter à
travers ses propres formes. Une danse lumineuse et amoureuse comme une « force tranquille qui accueille
tout ce qui se vit en nous et nous porte même quand tout s’effondre »… Une
danse voyageuse et miraculeuse : « Tout
pétille de conscience » ; « Seul m’intéresse ce qui est dans
l’instant, ce dont je fais l’expérience. »
L’une des originalités de ce
livre réside dans sa sincérité et sa vivante proximité avec le lecteur. Les mots traduisent
le tâtonnement de la recherche. Le
lecteur accompagne tout naturellement, sans effort, l’auteure dans sa quête,
dans ses croyances peu à peu démasquées, dans l’affinement progressif de sa
vision des choses et d’elle-même. Ce qu’on appelle communément "éveil" est
volontiers recouvert de notions mal comprises, comme la mort de l’ego. Le texte
de Suyin Lamour demeure au plus près de l’expérience vécue ; son langage
est clair, dépouillé, sans détours. Le bonheur de vivre est décrit dans l’immersion
du quotidien, parfois semé de déceptions utiles, qui font faner les croyances
illusoires et refleurir la justesse de l’expérience vécue. Jusqu’à la
découverte d’une délivrance réelle, dans la Joie qui demeure.
Sabine Dewulf
mercredi 18 novembre 2015
Antoine Leiris : “Vous n’aurez pas ma haine”
Son épouse, Hélène, était au Bataclan, et elle y a perdu la vie. Le journaliste Antoine Leiris, qui assurait la chronique Tableauscopie sur France Info a publié un post poignant et digne sur son profil Facebook.
Vendredi soir vous avez volé la vie d’un être d’exception, l’amour de ma vie, la mère de mon fils mais vous n’aurez pas ma haine. Je ne sais pas qui vous êtes et je ne veux pas le savoir, vous êtes des âmes mortes. Si ce Dieu pour lequel vous tuez aveuglément nous a fait à son image, chaque balle dans le corps de ma femme aura été une blessure dans son coeur.
Alors non je ne vous ferai pas ce cadeau de vous haïr. Vous l’avez bien cherché pourtant mais répondre à la haine par la colère ce serait céder à la même ignorance qui a fait de vous ce que vous êtes. Vous voulez que j’ai peur, que je regarde mes concitoyens avec un oeil méfiant, que je sacrifie ma liberté pour la sécurité. Perdu. Même joueur joue encore.
Je l’ai vue ce matin. Enfin, après des nuits et des jours d’attente. Elle était aussi belle que lorsqu’elle est partie ce vendredi soir, aussi belle que lorsque j’en suis tombé éperdument amoureux il y a plus de 12 ans. Bien sûr je suis dévasté par le chagrin, je vous concède cette petite victoire, mais elle sera de courte durée. Je sais qu’elle nous accompagnera chaque jour et que nous nous retrouverons dans ce paradis des âmes libres auquel vous n’aurez jamais accès.
Nous sommes deux, mon fils et moi, mais nous sommes plus fort que toutes les armées du monde. Je n’ai d’ailleurs pas plus de temps à vous consacrer, je dois rejoindre Melvil qui se réveille de sa sieste. Il a 17 mois à peine, il va manger son goûter comme tous les jours, puis nous allons jouer comme tous les jours et toute sa vie ce petit garçon vous fera l’affront d’être heureux et libre. Car non, vous n’aurez pas sa haine non plus.
Antoine Leiris
Vendredi soir vous avez volé la vie d’un être d’exception, l’amour de ma vie, la mère de mon fils mais vous n’aurez pas ma haine. Je ne sais pas qui vous êtes et je ne veux pas le savoir, vous êtes des âmes mortes. Si ce Dieu pour lequel vous tuez aveuglément nous a fait à son image, chaque balle dans le corps de ma femme aura été une blessure dans son coeur.
Alors non je ne vous ferai pas ce cadeau de vous haïr. Vous l’avez bien cherché pourtant mais répondre à la haine par la colère ce serait céder à la même ignorance qui a fait de vous ce que vous êtes. Vous voulez que j’ai peur, que je regarde mes concitoyens avec un oeil méfiant, que je sacrifie ma liberté pour la sécurité. Perdu. Même joueur joue encore.
Je l’ai vue ce matin. Enfin, après des nuits et des jours d’attente. Elle était aussi belle que lorsqu’elle est partie ce vendredi soir, aussi belle que lorsque j’en suis tombé éperdument amoureux il y a plus de 12 ans. Bien sûr je suis dévasté par le chagrin, je vous concède cette petite victoire, mais elle sera de courte durée. Je sais qu’elle nous accompagnera chaque jour et que nous nous retrouverons dans ce paradis des âmes libres auquel vous n’aurez jamais accès.
Nous sommes deux, mon fils et moi, mais nous sommes plus fort que toutes les armées du monde. Je n’ai d’ailleurs pas plus de temps à vous consacrer, je dois rejoindre Melvil qui se réveille de sa sieste. Il a 17 mois à peine, il va manger son goûter comme tous les jours, puis nous allons jouer comme tous les jours et toute sa vie ce petit garçon vous fera l’affront d’être heureux et libre. Car non, vous n’aurez pas sa haine non plus.
Antoine Leiris
"Je continuerai à vivre parce que je ne veux pas que mon fils grandisse dans la haine,
la violence ou le ressentiment."
source : France Info
la violence ou le ressentiment."
source : France Info
mardi 17 novembre 2015
Cheikh Khaled Bentounès: "qui sont-ils pour prétendre agir au nom de Dieu ?"
Réagissant aux attentats qui ont touché Paris, le chef de la confrérie soufie Alawiyya a rappelé qu’il était plus que jamais nécessaire de bâtir des ponts entre les religions, dans la paix.
A l’annonce des attentats perpétrés par des terroristes islamistes à Paris vendredi soir, le cheikh Khaled Bentounès reconnaît "avoir été touché au plus profond de son être". Actuellement en Algérie, le chef de la confrérie soufie Alawiyya devait inaugurer vendredi une chaîne de télévision dans ce pays, dans l’espérance de pouvoir relier "les deux rives de la Méditerranée, pouvoir travailler, se connaître et échanger". Une ambiance joyeuse très vite ternie à l’annonce des premiers bilans.
Pour Khaled Bentounès, ces attentats sont une nouvelle catastrophique pour "tous ceux qui travaillent à construire des ponts entre les civilisations, entre les cultures et les religions". Ce dernier ajoute que "plus que jamais, il faut être déterminé à aller de l’avant." "Nous pensons aux familles" explique le cheikh, "et toute notre compassion va vers ceux qui, innocemment, ont été touchés à Paris".
"Je voudrais que les gens réfléchissent profondément et mettent aujourd’hui tout ce qui est en leur pouvoir pour agir ensemble, afin de ne pas être emporté dans ce tourbillon de violence et de haine" ajoute ce représentant de la branche pacifique de l’Islam. Khaled Bentounès ajoute à ce propos que "Dieu n’appartient à personne. Dieu est trop grand pour appartenir à une seule communauté."
"Qui sont ces gens-là pour prétendre agir au nom de Dieu" s’interroge avec émotion le chef de la confrérie Alawiyya. "En tant que musulman, et en temps qu’être humain, je refuse cela" conclue-t-il.
Interview de Cheikh Khaled Bentounes par la radio RCF
(6 min.)
Message de Gilles Farcet
Je reçois des messages d'inquiétude, comme je suppose des milliers de parisiens (même si je ne vis plus à Paris qui cependant reste "ma ville", celle où vivent mes enfants , tant de mes amis, et où je vis et partage encore tant de choses). Je vais bien, merci à tous, j'ai appris les nouvelles au saut du lit dans ma campagne ce matin.
J'ai pendant bien longtemps été voisin du Bataclan ... Par delà tout ce que chacun comme moi, comme nous tous, peut éprouver, une seule conviction : continuer, continuer à travailler à mûrir , à être plus conscient et donc plus responsable et donc plus aimant, émerger de l'illusion de la séparation à l'origine de toutes ces horreurs. Nous souvenir de ceux et celles qui avant nous ont poursuivi leur travail dans des conditions effarantes (je pense entre autres à Gurdjieff et ses élèves en pleine révolution russe ).
Tout en étant plus que jamais citoyen, participer de moins en moins à la maladie du monde, de plus en plus à sa guérison. Eviter la surenchère de l'émotion, s'enraciner dans la profondeur du sentiment. Etre. L'urgence encore et toujours c'est d'être.
Ce l'était hier, ce l'est aujourd'hui , ce le sera demain.
Merci à tous.
lundi 16 novembre 2015
dimanche 15 novembre 2015
Déclaration de Karmapa au sujet des attaques à Paris
Il est très triste de voir combien les êtres humains que nous sommes peuvent être destructeurs. Il est particulièrement important, dans ce moment, de se rappeler que nous sommes aussi capables d’un grand courage et de beaucoup de compassion. En ce jour tragique, je dédie mes prières aux victimes, aux auteurs [de ces crimes] et à tous ceux qui ont été blessés, directement ou indirectement.
Nous devons trouver une façon d’utiliser ce moment pour développer davantage de conscience et de compréhension, afin que nous puissions vivre sans peur. Nous devons trouver une façon d’utiliser ce moment pour résister à la peur et à la panique et ne pas y succomber. Nous devons trouver une façon d’utiliser ce moment pour développer de la compassion et montrer aux autres que c’est le manque de conscience, de sagesse et de compassion, se manifestant sous la forme des émotions, qui constitue le réel problème auquel nous devons résister.
Je prie afin que nous trouvions tous une façon d’utiliser ce moment pour répondre avec bienveillance, pour se relever avec l’espoir au cœur et pour se rappeler que les êtres humains sont aussi capables d’un grand courage et de beaucoup de compassion. Je demande à tous ceux qui sont affectés par cette tragédie, directement ou indirectement, de se joindre à cette aspiration.
samedi 14 novembre 2015
vendredi 13 novembre 2015
jeudi 12 novembre 2015
mercredi 11 novembre 2015
La grâce du "Je Suis"
"Être pleinement" se produit précisément où nous sommes à l'instant et ne nécessite aucune modification. Il convient de distinguer le fait de rendre "acceptable" notre incomplétude, et l'Amour inconditionnel à l'égard de cette incomplétude. Tout ce que nous estimons grossier, inabouti, imparfait, perfectible en nous, ne constitue pas un obstacle au fait que "nous soyons". "Je Suis !" ; c'est en cela que réside ma complétude, mon accomplissement, mon intemporalité céleste. Y a t-il une plus grande source de satiété et d'étonnement que cette grâce ?
Frédéric Samnidhi
mardi 10 novembre 2015
Les mains de l'humanité avec Christiane Singer
Partout où des mains se joignent et se rejoignent continue la plus vieille histoire de la nature
et de l'humanité, la saga de la solidarité.
De nouvelles mailles se nouent au filet
qui nous retient de tomber dans l'abîme de l'inhumanité.
Christiane Singer
- Où cours-tu ? Ne sais-tu pas que le ciel est en toi ?
Page 73 - Ed. Poche
lundi 9 novembre 2015
Les conseils de Nicolle Carré pour vivre pleinement
1. Ne transigez pas avec votre désir
Laissez flamber au plus profond de vous ce feu intérieur qui peut être caché sous la cendre. Laissez-le jaillir. Dans la souffrance, il avait suffi que je dise « oui » à vivre l'instant présent, et donc « non » à la fuite de cet instant-là, pour que tout me soit donné. Ma quête intérieure, la soif d'absolu qui m'habitait depuis ma petite enfance, s'est mue avec la maladie, en présence à moi-même, en accueil. Accueillons notre désir au présent.
2. Acceptez d'être là où vous en êtes
Je n'attends pas d'être capable de grandes choses pour commencer de goûter la vie. Je pars de là où j'en suis, aussi bas que cela me paraisse. C'est quelquefois très peu, un petit rien, un germe. Accepter d'en être là où l'on en est, ce n'est pas s'y complaire ni baisser les bras : c'est sortir du mensonge dans lequel nous vivons et nous accueillir nous-mêmes. Comme le dit sainte Thérèse de Lisieux : « Si nous consentions à notre faiblesse, Dieu pourrait faire en nous des merveilles. »
3. Ne désespérez pas : le présent peut réparer le passé
L'important, ce n'est pas ce qui a été ou ce qui n'a pas été, mais ce qui est maintenant. Une manière de consentir à ce qui a été et à le reprendre de façon neuve. Alors, tout ce qui m'a été donné m'est redonné : je cesse d'être le centre du monde, nous pouvons être ensemble, chacun, tels que nous sommes en vérité. En approchant la mort, longuement, j'ai appris que chaque instant est une naissance. Peut-être est-ce cela qui rend la vie si belle...
4. Si la mort vous préoccupe, soyez vivant
Mourir, c'est avant tout mourir à soi-même et au monde que l'on a bâti avec son imagination. C'est être présent au monde qui vient et faire confiance. Posez-vous plutôt la question suivante : « Est-ce que je vais quitter ce monde en vivant ? » Derrière ce paradoxe curieux me revient la phrase de Maurice Zundel : « On se demande si on sera vivant après la mort au lieu de se demander si on sera vivant avant la mort. Il n'y a aucun sens à postuler quoi que ce soit au-delà de la mort, si d'abord on n'a pas vaincu la mort durant la vie. »
(source : La Vie)
dimanche 8 novembre 2015
Nicolle Carré, jusqu'au bout, prendre soin de sa vie
En avril 1992, j'appris que j'étais atteinte d'une leucémie aiguë. Le diagnostic était là : je pouvais mourir d'un moment à l'autre. Mes jours, voire mes heures, étaient comptés. Ma première pensée fut pour mon mari et mes enfants : qu'allaient-ils devenir ? Simultanément, je compris qu'en rejoignant Dieu mes combats intérieurs allaient cesser, ce qui me plongea dans une certaine joie. Mais, une fois malade, à bout de force, un grand tournant s'opéra en moi : je pris conscience que l'existence était un don, un don de Dieu. Que Dieu était Vie, et au coeur de toute vie humaine. Derrière mon désir de le rejoindre se cachait en fait une peur d'affronter cette dernière. Dieu était là, alors, pourquoi le chercher sur l'autre rive ? Puisqu'il m'avait donné cette existence, je devais en prendre soin.
La psychanalyse, dont j'ai fait ensuite mon métier, est très importante pour moi, et d'une grande richesse. Mais c'est au coeur de la maladie que j'ai découvert l'essentiel : c'est lorsqu'on est dépouillé de tout que la volonté de posséder sa vie s'évanouit. La seule chose qu'il nous reste alors est de s'ouvrir à ce qui est là. Avant, je voulais gagner, désormais je n'avais plus rien à gagner. Tel un petit enfant, je ne pouvais qu'accueillir ce qui advenait. Ce changement radical m'a permis, peu à peu, de faire de mon quotidien un exercice de l'instant présent : dans chacun de mes actes, j'accueillais la moindre chose comme un cadeau de Dieu. Je ne savais plus si j'avais la foi ni ce qu'est la foi, mais il y avait en moi une prière continuelle : « Abba, Père. Que jamais je ne sois séparée de toi. » L'équipe médicale qui me soignait et m'accompagnait s'étonnait de la manière dont j'appréhendais ces instants cruciaux. Dieu, à qui j'ouvrais le plus profond de mon être, était mon souffle, alors même que je ne pouvais pas respirer sans l'aide de machines.
Avant ma maladie, ma croyance en Dieu était déjà intense. Mais je cherchais davantage à le connaître qu'à vivre de lui. Ma jeunesse passée en Tunisie m'avait permis de découvrir l'aspect profondément religieux de la culture musulmane. Après avoir cheminé dans les voies de la spiritualité hindouiste, j'avais retrouvé la foi chrétienne au cours d'une messe de minuit, en 1989. Ce soir-là, je pris véritablement conscience que Dieu s'était incarné à la naissance de son fils Jésus. Mon existence en fut retournée et l'émerveillement d'un Dieu fait homme ne s'est, depuis lors, jamais estompé.
Un nouveau bouleversement se produisit en 1998 : je rechutai dans la leucémie. Après ma rémission, je m'étais tellement mise à aimer la vie, que je ne voulais plus la quitter. J'en avais fait un joyau, un don à découvrir chaque jour. Une fois remise sur pieds, j'étais revenue chez moi et avais retrouvé mon mari, mes enfants et divers engagements, comme mes études de théologie et mes activités en paroisse. Aussi, lorsque j'appris que ma leucémie repartait, la peur de mourir m'envahit. Grâce à mon mari, à sa présence à mes côtés, à la justesse de ses mots, à son accueil de mes angoisses, j'ai pu, tout doucement, apprivoiser la mort en mettant de l'ordre dans mes affaires. J'ai fini par accepter derecevoir à nouveau le sacrement des malades. Je voulais que ce soit une grande fête réunissant ceux que j'aimais avec toutes leurs différences religieuses : orthodoxes, catholiques, protestants, musulmans, hindouistes, mais aussi athées. Il me fallait célébrer ce qui nous liait et qui était plus fort que la mort. Il me fallait aussi leur exprimer, par cette fête, combien j'avais besoin d'eux dans ma lutte, et combien je me sentais responsable d'eux dans ma manière d'affronter la fin. Au cours de la messe où j'ai reçu ce sacrement, un vieil ami prêtre a fait l'homélie : « Nicolle, vous vous trompez : le Christ ne va pas vous aider à vivre la maladie, il va la vivre en vous. » Cette phrase a été un second virage intérieur : une paix et une joie immenses ont germé en moi. Durant les semaines passées au bord extrême de la mort, où je ne parvenais plus à respirer malgré l'oxygène, où la fatigue ne me permettait plus de porter mon corps, où la douleur et l'angoisse me terrassaient, je ne savais plus si je croyais en Dieu. Mais je savais que le Christ était en moi. Cela me suffisait.
Depuis trois ans, les médecins me considèrent comme guérie. Cette paix et cette joie ressenties pendant l'homélie ne m'ont pas quittée. Je ne vis pas sur un petit nuage : je suis comme tout le monde, je continue de traverser des moments difficiles. Mais désormais, je n'essaie plus de les fuir ni de les maîtriser. Je sais bien que je ne peux pas tout. Je sais surtout que « je peux tout en Celui qui me fortifie » (Philippiens 4, 13), et donc que tout est ouvert si j'y consens. Je sais que je mourrai un jour comme tout le monde. Tant d'années passées à surveiller ma santé, à naviguer entre des résultats incertains, les effets à long terme des traitements, mais aussi des bonnes nouvelles, ont fait de la pensée des fins dernières une quotidienneté. Les angoisses sont parfois là, mais j'apprends à aimer ma faiblesse. Parce que je suis faible, je n'ai plus besoin d'être forte : j'accueille chaque instant qu'il m'est donné de vivre. Au fond, je suis de plus en plus libre.
Lorsqu'on fait le bilan de son existence, certaines choses, qui apparaissaient jusque-là importantes, ne sont plus essentielles. Finalement, demeure une question : ai-je accueilli l'autre, ai-je été moi-même ? Un sage hassidique a dit : « Au jour du jugement, on ne te demandera pas si tu as été Moïse, on te demandera si tu as été toi-même... » C'est-à-dire avec mes peurs, mes fragilités... Je ne peux pas les enlever, juste les accueillir, et alors cela change tout. L'approche de la mort est la découverte que l'on ne peut pas maîtriser la vie... Quel combat et quelle libération !
> Au bord du mystère
« J'apprends à vivre en apprenant à mourir. Je pressens que l'inconnu est l'inconnu du don. Ma peur de la mort s'apaise lorsque j'entre dans ce mystère du don. La vie est assez large pour tout contenir, même la mort... » En des mots choisis, Nicolle Carré livre ici le fruit de son combat, celui de ses émotions lors de son parcours au bord du mystère, à la crête de la vie et de la mort, entre douleurs, souffrances et rémissions. Un ouvrage de circonstance pour ceux qui traversent la maladie et pour leurs proches.
Préparer sa mort. Un hymne à la vie, de Nicolle Carré, l'Atelier, collection Mieux vivre, 15 EUR (en cours de réimpression).
> Les étapes de sa vie
1939 Naissance à Tunis.
1959 Découverte du mystique musulman al-Halladj (858-922).
1960 Retour en France.
1960-1964 Études de psychologie.
1969 Mariage avec Olivier, dont naîtront deux enfants.
1977-1989 Séjour en Inde, découverte de l'hindouisme.
Noël 1989 Expérience mystique du Christ.
Avril 1992 Atteinte d'une leucémie aiguë.
1998 Rechute.
Depuis 2001 Psychanalyste et conférencière.
2007 Vivre avec une personne malade (l'Atelier).
2012 Déclarée en rémission complète par les médecins.
1959 Découverte du mystique musulman al-Halladj (858-922).
1960 Retour en France.
1960-1964 Études de psychologie.
1969 Mariage avec Olivier, dont naîtront deux enfants.
1977-1989 Séjour en Inde, découverte de l'hindouisme.
Noël 1989 Expérience mystique du Christ.
Avril 1992 Atteinte d'une leucémie aiguë.
1998 Rechute.
Depuis 2001 Psychanalyste et conférencière.
2007 Vivre avec une personne malade (l'Atelier).
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