Je vous dépose, sous la brise du soir, un extrait de texte issu de la revue 3ème millénaire, n°84, de Hélène Naudy, thérapeute :
Alors oui, psychologie et spiritualité s'adressent au même homme que nous sommes, du moment que nous nous vivons au présent, du moment que nous ne nous cloisonnons plus et que nous ne vivons plus dans des opposés intérieurs du type « psychologie ou spiritualité ? ». Je pense à Prajnanpad et au discernement et à la perspicacité dont il a fait preuve en prenant conscience et en exposant le manque inhérent dont pâtit la spiritualité indienne. Non seulement il a expérimenté les limites de sa tradition (expérience qui a atteint son corps physique de manière irréversible), mais en plus il s'est rendu compte du peu d'attention et du peu d'intérêt que celle-ci accordait au corps, aux émotions, en fait à ce par quoi nous passons tous : l'identification. La Bhagavad Gita, si lumineuse qu'elle puisse être, ne s'inscrit pas dans la chair, dans le conditionnel. Prajnanpad a puisé dans les recherches de Freud les éléments indispensables permettant de combler le vide de sa tradition. Il a compris, il a vu clairement que la spiritualité sans la connaissance de soi est un leurre. Comment peut-on se comprendre tant qu'on ne s'est pas compris ? Comment peut-on mourir à soi-même tant qu'on reste identifié à notre mental ? Nombreux sommes-nous à prétendre se connaître alors que nous confondons connaissance intellectuelle et observation vivante, parler de la réalité et être avec le réel. Nous pensons que ces différents hommes et femmes éveillés l'ont été par une grâce, une chance, un cadeau tombé du ciel, nous pensons que nous devons nous purifier corporellement, énergétiquement, mentalement, émotionnellement, psychologiquement, pour avoir cette chance... tout cela dénote notre enfantillage. Regardons nos croyances, observons de près nos opinions à ce sujet. voyons combien nous ne voulons pas démordre de nos références, regardons-nous les yeux ouverts : regardons ce mental auquel nous sommes identifiés, regardons nos innombrables jugements et notre capacité à accuser l'autre, croyant que le jugement vient de cet autre, regardons ouvertement notre capacité à projeter sur l'autre nos propres dénigrements, regardons combien nous nous culpabilisons, et que cette culpabilité est produite uniquement par les jugements que nous nous infligeons, regardons combien nous nous moquons de nous, et nous croyons faibles, stupides, inintéressants ou tout puissants. La lumière n'éclairera pas notre intériorité, c'est notre obscurité qui nous éclaire, c'est par notre obscurité que nous nous voyons mieux, plus distinctement. La lumière ne fait que nous éblouir, et nous sommes éblouis. N'abandonnons pas notre corps et nos émotions dans l'oubli, ils ne feraient que se cristalliser davantage, et nous en deviendrions insensibles et obtus. Allons dans nos ténèbres, voyons nos identifications et le mécanisme identificatoire avec bienveillance, avec pour seule lumière l'écoute et la sincérité.
Un autre texte à lire librement...