mardi 4 février 2025

Sois présent !


 Question : Une émotion négative ne pourrait-elle pas contenir un important message ? Si je me sens souvent déprimé par exemple, c'est peut-être un signal indiquant que quelque chose ne va pas dans ma vie et ça me forcera peut-être à observer mes conditions vie et à les modifier. J'ai donc besoin d'écouter ce que cette émotion a à me dire et non pas de la repousser parce qu'elle est négative.
 

E. T. : Oui, en effet, les émotions négatives contiennent parfois un message, comme les maladies. Mais les changements que vous effectuerez, qu'ils soient reliés à votre travail, à vos relations ou à votre milieu de vie, ne sont en fin de compte « qu'esthétiques », à moins d'être le fruit d'une modification de niveau de conscience. Et ceci ne peut vouloir dire qu'une seule chose : devenir plus présents. Quand vous avez atteint un certain degré de présence, la négativité n'est plus nécessaire pour savoir ce dont vous avez besoin dans votre vie. Mais aussi longtemps qu'elle est là, servez-vous-en. Utilisez-la comme une sorte de signal qui vous rappelle d'être plus présent. Chaque fois que vous remarquerez que la négativité se manifeste en vous, sous une forme ou une autre, ne la voyez pas comme un échec dans votre démarche mais plutôt comme un précieux signal qui vous dit : « Réveille-toi ! Sors de ta tête ! Sois présent ! »

Eckhart Tolle

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lundi 3 février 2025

Le quotidien à vivre


L'extrait ici de l'interview de Christiane Singer (dans l'émission Visages en 2007) est très instructive sur notre position quotidienne dans l'existence.


A écouter avec une attention neuve : juste ici


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dimanche 2 février 2025

Relation musicale !

Texte de Gilles Farcet : 

« IL NE S’AGIT PAS DE MUSIQUE MAIS DE RELATION ! »

LEE LOZOWICK S’ADRESSANT AU GROUPE ATILLA THE HUNZA A LA VEILLE DE LEUR PREMIERE TOURNÉE EUROPÉENNE
(en illustration, photo - floue mais peu importe -prise il y a environ 25 ans, Gilles s'amuse à chanter le blues avec le groupe Shri. A gauche Doug Fulker, à droite Frank Gambielluco, sur scène entre autres Nachama à l'harmonica, Tina à la basse... Michel Tardieu au clavier .. Et les têtes de Lee et d'Arnaud au premier plan ! )
Alors que la petite tournée estivale de Gestion des Restes commence à être préparée (et aussi un EP de 6 compositions, un vinyle collector - les morceaux seront par ailleurs en ligne) , je fais mon miel de ce texte de Lee communiqué lors du récent séjour et concert de Survie aux Etats Unis par Sylvan Incao.

« L’essentiel, c’est que personne ne s’en va.
Personne ne quitte la scène, ne part au milieu d’un concert, et peu importe comment vous vous sentez.
La tension sera très forte, insupportable, mais vous ne partez pas.
Si vous avez un peu de temps libre dans une ville où vous vous trouvez et que vous faites une pause pour un jour ou deux, très bien, mais vous ne partez pas.
Ca, c’est la limite.
Vous faites une sieste si vous en avez besoin. La tension sera élevée et la principale manière de dissiper l’énergie passe par les disputes et les compensations - trop manger, faire du shopping, etc.
Si vous vous retrouvez à faire ça, vous pouvez considérer que toutes les années passées dans notre école ont été vaines. Se complaire dans des prises de tête et des compensations participe d’une non pratique et doit être vu comme tel.
Si vous êtes bien situé vous allez vraiment prendre du plaisir et beaucoup vous amuser. Il n’est pas nécessaire que ce soit toujours tendu. Oui, il faudra travailler dur mais ce sera vraiment super.
Si quelqu’un part, compense en buvant, ou autre, vous faites votre possible pour le remettre dans le bon axe mais jusqu’à un certain point.
Vient un point où vous arrêtez de chercher à les ramener à la pratique ; vous en faites une matière de travail pour vous même, vous y faites face.
Il y aura toujours quelqu’un pour arriver dans le van avec un quart d’heure de retard, toujours. Pas moyen de changer cette personne. Les gens qui sont en retard ne changeront jamais. Si ils continuent à se pointer avec un quart d’heure de retard vous vous contentez d’avancer l’heure prévue de 30 minutes, comme ça vous partirez à temps.
Ne laissez jamais la musique vous crisper.
Ne laissez jamais quelque chose d’aussi accessoire que la musique vous éloigner les uns des autres. Il ne s’agit pas de musique, ce n’est pas la question.
Ca arrive à tout le monde d’avoir un jour sans, un soir où il n’y a pas moyen de trouver le groove. Et alors ?
Ne laissez pas ça vous éloigner les uns des autres.
Cela n’a aucune importance.
N’en faites pas une question de musique ; c’est une question de relation.
Vous aurez forcément quelques très mauvais concerts sur la vingtaine prévus.
C’est la vie.
Les gens qui vous accueillent seront très cons, l’endroit pourri.
Vous jouez comme prévu et c’est tout, sans râler. Vous donnez le concert, prenez l’argent et vous vous en allez.

Soit vous finissez la tournée sur un petit nuage, soit vous la finissez dans la boue.
Ca dépend de vous.
Il y aura pas mal de tension et de stress mais il n’y a pas de raison que vous ne preniez pas du bon temps.
Si vous constatez que c’est la tension qui domine alors c’est que vous prenez les choses beaucoup trop au sérieux, vous êtes trop identifiés à tout.
Ne passez jamais vos nerfs sur les personnes qui vous reçoivent ou sur les gens chargés du son.
Gardez vos tensions pour vous. Elles ne les regardent pas et ils n’ont aucun besoin de savoir que vous êtes tendus.
Idéalement, ne passez pas non plus vos nerfs sur les autres membres du groupe, ne vous prenez pas la tête même si, bon, c’est inévitable.
Il s’agit de faire bonne impression en tant que groupe. Qu’on se dise que c’était facile de travailler avec vous, agréable, pas que vous êtes une bande de divas.
Q : comment pouvons nous intentionnellement considérer le groupe en tant que véhicule de l’enseignement ?
Lee : Bonté, générosité et compassion envers chacun et en toute situation.

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samedi 1 février 2025

Faut-il attendre ?

 La semaine dernière, le jour de mon anniversaire, j'écrivais :



Faut-il attendre 75 ans ?

Faut-il attendre de mourir,

pour découvrir l’éternité dans laquelle nous sommes ?

Faut-il attendre…

pour sentir l’espace infini qui sans cesse nous habite et nous enveloppe ?

Faut-il attendre…

pour éprouver la Vie sans laquelle nous ne pouvons pas vivre, grandir, souffrir et mourir ?

Faut-il attendre…

pour être conscient de la Conscience sans laquelle nous ne pouvons pas être conscient, penser, rêver et le dire ?

Faut-il attendre…

pour aimer l’Amour sans lequel nous ne pouvons pas aimer, désirer et nous réjouir ?

Faut-il attendre…

pour honorer celui qui est « Je suis » sans lequel je ne pourrai pas dire je suis ?

Faut-il attendre 75 ans ?

Faut-il attendre de mourir …

pour célébrer la divine circuminsession (on périchorese) dans laquelle nous sommes intriqués maintenant, depuis toujours et pour toujours ?

Ne rien attendre. Sans cesse s’attendrir…


Jean-Yves Leloup, Janvier 2025


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vendredi 31 janvier 2025

Sciences extrêmes

 


" Les sciences ont deux extrémités qui se touchent : la première est la pure ignorance naturelle où se trouvent tous les hommes en naissant. L'autre extrémité est celle où arrivent les grandes âmes qui, ayant parcouru tout ce que les hommes peuvent savoir, trouvent qu'ils ne savent rien, et se rencontrent dans cette même ignorance d'où ils étaient partis. 

Mais c'est une ignorance savante qui se connaît. Ceux d'entre eux qui sont sortis de l'ignorance naturelle, et n'ont pu arriver à l'autre, ont quelque teinture de cette science suffisante et font les entendus. Ceux-là troublent le monde et jugent plus mal de tout que les autres."


Source :
Maurice Zundel
L'homme passe l'homme.

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jeudi 30 janvier 2025

Dialogue avec un sage

 Parait ce mois-ci « Dialogue avec un sage. Arnaud Desjardins m’a dit… » de Yvon Ginchereau.

4ème de couverture :
« Souvenez-vous que la paix des profondeurs est déjà la nature
véritable de notre esprit ou de notre conscience. Et nous pouvons tenter, par une acceptation totale, de nous désengager des limitations du moment et de revenir à cette réalité que nous sommes déjà. » Ces paroles d’Arnaud Desjardins résument le chemin vers la vérité la plus profonde de notre être. D’une portée universelle, elles ont été adressées à Yvon Ginchereau qui a consigné dans ce livre son parcours singulier, selon la voie de l’adhyatma yoga, le yoga vers le Soi.
Ce récit, nourri par les nombreux entretiens et la correspondance personnelle entre le maître et l’élève sur trois décennies, relate une transformation alchimique au niveau de l’être. Il retrace pas à pas, d’une manière très vivante, un travail minutieux d’approfondissement de cette voie de connaissance.
Ce témoignage est riche et utile en ce sens qu’il démontre que l’on peut être tiré par le haut quelles que soient les influences auxquelles on a pu être soumis par le passé.
Outre les lettres d’Arnaud Desjardins, les citations qui émaillent le texte sont pertinentes et enrichissantes ; elles contribuent à consolider la structure du récit et à accompagner le lecteur au cœur d’une démarche intime propre à inspirer d’autres candidats à la sagesse.
En insistant sans relâche sur la nature fondamentale de son élève, le maître souligne la prééminence de la dimension transcendante et verticale par rapport aux encombrements d’ordre psychologique. Et, à notre époque de scepticisme prononcé, il est salutaire de rappeler qu’une telle possibilité de transformation existe !

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mercredi 29 janvier 2025

Nourritures

 


Depuis notre naissance, une seule chose guide nos vies : la nourriture. Ou plutôt, les nourritures.

Freud a bien identifié le stade oral du début de la vie. Mais au fond, en sortons nous vraiment ?

Pas sûr.

Dans nos premiers mois nous dépendons directement du lait, nutriment extérieur. Nourriture tangible, mesurable. Mais dès les premiers stades, cette nourriture est inséparable de l'affect de la personne qui nous nourrit. Ce lien entre nourriture et affect est indissociablement établi au plus profond de notre psychisme.

Plus tard, ce seront peut-être les jeux qui nous nourriront. Et avec qui on joue. Ou pas.

Les lectures. Les écrans. Les passions. Le sexe. Le saut à l'élastique. L'alcool. La spiritualité. Les dramas.

Peu importe, pourvu que l'on soit stimulés et que nous recevions ou ressentions de l'énergie et de l'attention.

Au fond, toute notre vie, nous recherchons des nourritures.

La seule chose qui différentie quelqu'un qui s'est déployé de quelqu'un qui n'y arrive pas c'est simplement le niveau de subtilité des besoins en nourriture.

Ce n'est pas une question de domaine. On n'est pas plus évolué en renonçant à certains domaines. La plupart du temps on ne fait que se frustrer.

On évolue et on grandit en espace intérieur en nous réjouissant de capter des nourritures de plus en plus subtiles, peu importe le domaine. 

Car oui, le plaisir et l'affect restent au centre de l'attrait pour les nourritures. Seule la subtilité de la nourriture change quand on élargit notre espace intérieur et notre présence. 

Et le subtil, le tout petit, le frémissant, est partout. Il est accolé au Beau. À notre dignité intrinsèque. Dans tous les domaines.

Saurons nous lâcher le trapèze du grossièrement stimulant qui cache l'appui indéfectible du subtil et de sa nourriture d'immortalité ?

C'est tellement difficile...

Fabrice Jordan


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lundi 27 janvier 2025

Ecoute...

 ECOUTE CE QUI SOUFFRE EN TOI


Ecoute écoute
Ecoute ce qui souffre en toi
Ecoute
N’attends pas d’être à terre
N’ attends pas l’avènement de ta déconfiture
Cale ton oreille au plus près
De ce qui souffre en toi
Au lieu de faire le fier
N’attends pas les grincements de dents
N’attends pas qu’on te jette au feu
Rabaisse ta prétention, je dis, rabaisse là
Oui je t’en prie, écoute
Ce qui en toi jamais ne s’est réconcilié
Ce qui veut en découdre
Redresser tous ces torts qui te furent infligés
Ecoute cette voix sans merci
Eprouve tout le poids de ce bras armé
Toujours tendu dans son effort
De disperser tes ennemis
N’attends pas de te voir démasqué
Sans t’ y être préparé
N’attends pas la honte
La peau à vif et cuisante
L’aperçu dévastateur
De ta stupidité faraude
Oui, ami, n’attends pas
L’envie de te foutre par la fenêtre
Quand tu te dis que tu ne vaux rien
N’attends pas, ami,
De crever comme chien
Ecoute
Non pas ce qui se plaint
Non, pas cela, mais bien
Ce qui souffre en toi
Cette voix là
T’indique le chemin
Cette voix là ne te trompe pas

............... Gilles Farcet


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dimanche 26 janvier 2025

Emmanuel Godo : « Toute naissance réintroduit dans le monde l’esprit du commencement »

L’enfant dans son berceau. Ce visage, cette présence inouïe qui émerveille et intimide. Venu ici, parmi nous, après un long voyage que la science n’explique pas. Que les raisons n’élucident pas seules. Ces mains fripées, ces yeux mi-clos, c’est un petit vieillard vénérable. Neuf et très vétuste. Il a marché pendant combien de siècles pour venir au monde, là, maintenant ? Il a traversé la nuit, l’absence, les grandes étendues du rien, toute l’histoire passée.

Le silence qui le porte est sacré. Barrès disait : « Il ne faut pas dire que les enfants sont de petits animaux. Ce sont des rois-prêtres qui sommeillent. » Il écrivait ces mots devant son fils, nouveau-né, Philippe. Et moi j’écris ces mots en pensant à mon petit-fils, Marceau, né fin septembre. C’est toujours la vie qui nous souffle ce que nous devons écrire. Ou plutôt, c’est elle qui nous demande des mots qui soient fidèles à sa déchirante beauté, celle qui, justement, nous laisse sans voix. On écrit avec, toujours, cet espoir : qu’un peu de cette splendeur de la vie vienne animer nos paroles, les faire sortir de l’hiver qui les tient prisonnières.


Aziliz Le Corre vient d’écrire un très beau livre, un hymne à l’enfantement : L’enfant est l’avenir de l’homme (Albin Michel, 2024). On y trouve des arguments contre les voix qui désespèrent, contre les sirènes du renoncement qui, la main sur le cœur et le néant à la bouche, serinent à chaque instant leur venin : ne plus faire d’enfant pour sauver la Terre. On reconnaît le mal à sa manière de vouloir rendre préférable l’inexistence. De privilégier les idoles creuses (Gaïa, la planète) aux dépens de la vraie vie : le paysage, l’enfant, le foyer — le monde à taille humaine.

Quelqu’un au bout du fil

L’enfant vient au monde appelé par la confiance et l’amour. Novalis l’a dit d’une manière fulgurante et définitive dans le Brouillon général : « Un enfant est un amour devenu visible » (Allia, 2000). Cet amour est humain mais tout amour a une racine et une destination divines. Devant l’enfant, il nous vient le désir de remercier, de dire notre gratitude. Et même si l’on a une idée floue de ce qu’est Dieu, on sent bien, de tout notre être, qu’il y a quelqu’un au bout du fil de la reconnaissance.

Aziliz Le Corre cite un très beau poème écrit par René Char à la vue d’un nourrisson, Élisabeth, la fille du poète Jacques Dupin : « J’ai vu tes yeux bleus de vingt jours / Donner un frisson clair aux feuilles / De l’ormeau qui ferme le parc / Où bientôt tu trottineras. / J’ai vu ton père se grandir / En t’élevant sur sa poitrine, / Et ta mère se définir / En baisant tes joues d’algue douce. / Dans le berceau conciliant / Où tu rougis petite aurore, / Élisabeth, je te découvre / Comme la rose des sous-bois. / Et je suis heureux de cela, / Moi qui marche sous la pluie fine. »

Les plus beaux poèmes sont des poèmes de circonstance, enracinés dans la vraie vie qui n’est pas ailleurs mais là, sous nos yeux, juste derrière nos représentations, nos mots prévisibles, le sommeil de nos idées.

Cette foi dans le monde

Aziliz Le Corre raconte comment Hannah Arendt, écoutant à Munich, en 1952, l’oratorio de Haendel le Messie, a la révélation de ce que signifie, profondément, la naissance des enfants : « Le miracle qui sauve le monde, le domaine des affaires humaines, de la ruine normale, “naturelle”, c’est finalement (…) la naissance d’hommes nouveaux, le fait qu’ils commencent à nouveau l’action dont ils sont capables par droit de naissance. » C’est cette espérance et cette foi dans le monde, poursuit Arendt, qui trouvent leur expression la plus resserrée et la plus glorieuse, dans la petite phrase des Évangiles : « Un enfant nous est né. »

Tout enfant redit la promesse. Toute naissance réintroduit dans le monde l’esprit du commencement. Le grand crépuscule où tourne en boucle notre mémoire de rose fanée est vaincu par presque rien : une toute petite aurore. 

Emmanuel Godo

source : La Vie

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samedi 25 janvier 2025

Citations de Kodo Sawaki


 Kodo Sawaki (1880–1965) était un maître zen japonais reconnu pour son approche directe et son franc-parler. Il a joué un rôle clé dans la diffusion de la pratique du zazen (méditation assise) en dehors des monastères, insistant sur sa pertinence pour la vie quotidienne. Voici 10 citations célèbres attribuées à Kodo Sawaki, reflétant sa sagesse et sa philosophie :

1. **"Zazen, ce n'est pas quelque chose que vous faites pour devenir un Bouddha. Zazen, c'est simplement s'asseoir dans la posture de Bouddha ici et maintenant."**

2. **"La vie est comme un rêve. On s'agite, on fait du bruit, on souffre, et puis tout s'arrête."**

3. **"Vous voulez toujours que la vie corresponde à vos désirs, mais la vie est indifférente à vos désirs."**

4. **"Le zen, ce n'est pas une question de suivre les autres ou d'imiter quelqu'un. C'est marcher sur son propre chemin, pleinement responsable de soi-même."**

5. **"Le bonheur ne se trouve pas en accumulant des choses. Le véritable bonheur réside dans la simplicité et dans le fait de se contenter de ce que l'on a."**

6. **"Si vous suivez vos envies et vos désirs, vous serez esclave de vous-même. Libérez-vous de vous-même, et vous trouverez la paix."**

7. **"La pratique du zen, c'est revenir à la maison. Mais la maison n'est pas un lieu : c'est l'instant présent."**

8. **"Être libre, ce n'est pas faire tout ce qu'on veut. Être libre, c'est ne pas être attaché à quoi que ce soit."**

9. **"Ce qui compte dans zazen, ce n'est pas ce que vous obtenez, mais ce que vous abandonnez."**

10. **"Le zen n'est pas une question de compréhension intellectuelle. C'est vivre pleinement chaque moment, au-delà des concepts et des mots."**

Ces citations illustrent la profondeur et la simplicité radicale de l'enseignement de Kodo Sawaki, mettant l'accent sur la pratique directe et l'expérience personnelle plutôt que sur les théories ou les dogmes.


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vendredi 24 janvier 2025

Comment faire ?

comment faire

quand 

à terre

je cherche des éclats 

de mon image fracassée ? 

qui donc es tu, toi ? 

je ne sais plus

je ne sais pas

fragments

volant au vent

un canard court 

décapité

bientôt plumé 

cuit

et servi 

nourriture appropriée

pour des instances plus élevées

Gilles Farcet

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jeudi 23 janvier 2025

Et si contempler la nature était notre plus belle leçon de vie ?

Cher(e) ami(e) du Tao, 

Vous connaissez sûrement ce sentiment de chercher une vérité profonde dans le tumulte de la vie. Comme si un sens caché existait quelque part, et qu’il échappait à notre regard. Comme si vous passiez à côté d’un enseignement essentiel, qui échappe à votre portée ?

Lorsqu’il est question de résilience, de quête d’harmonie et d’adaptabilité au changement, le Tao nous enseigne que la réponse se trouve dans un espace empreint de simplicité et de douceur.

La nature.

Et si la nature possédait toutes les réponses dont nous avons besoin pour vivre en harmonie ? En observant les cycles naturels, la vie des animaux et celle des plantes, nous pouvons alors accéder à une source de savoir inestimable. Car la nature est le reflet parfait du Tao dans sa grandeur, son harmonie et son flux ininterrompu.

D’après la traduction de Stanislas Julien du Tao Te King, le chapitre 8 du Tao Te King nous indique : 

"L’homme d’une vertu supérieure est comme l’eau. L’eau excelle à faire du bien aux êtres et ne lutte point. Elle habite les lieux que déteste la foule. C’est pourquoi (le sage) approche du Tao."

Découvrons ensemble comment ces principes s’expriment dans ce qui vit.

Au plus près de l’essence du Tao. 

L’harmonie cachée des cycles perpétuels


Le jour et la nuit, l’hiver et l’été, les marées montantes et descendantes sont de parfaites illustrations de l’harmonie existant au sein de la nature. Rien n’est constant dans la nature, tout n’est que changement, adaptation et renaissance. La Pleine Lune disparaît pour renaître 28 jours plus tard. Les feuilles meurent sur les arbres, pour réapparaître dans les mois suivants.

Le ciel sombre d’orage disparaît petit à petit pour laisser renaître le soleil. Les cycles naturels sont une magnifique expression des principes du Tao : l’équilibre, la transformation constante et l’adaptation...

Ces cycles nous enseignent une vérité fondamentale, essentielle et profonde. Tout n’est que changement, et il est impossible de lutter contre celui-ci.

En tant qu’humains, nous avons perdu de vue le lien puissant qui nous relie à ces cycles. Et pourtant, ils font partie de notre propre nature. N’avez-vous jamais remarqué combien l’hiver vous invite au calme et à l’introspection, au repos et à la solitude ? N’avez-vous jamais vu votre personnalité changer en été, vous offrant une soif de découvertes, d’aventures, de voyages et de sociabilité ?

Lorsque nous acceptons les changements inévitables dans notre humeur, notre énergie et nos envies, nous nous plaçons en phase avec notre nature profonde. Cyclique, et en constante évolution.

Je vous invite à en faire l’expérience, en observant les cycles naturels qui s’écoulent autour de vous.

La lumière qui change au fil de la journée. Les feuilles qui renaissent ou qui tombent. Demandez-vous : comment ces phénomènes résonnent-ils avec vos propres cycles intérieurs ?

Êtes-vous actuellement dans une phase de repos, de renaissance, ou d’éclosion ?

Une fois cette phase identifiée, il vous sera bien plus facile de comprendre où vous vous situez dans le cycle naturel des choses. Il vous sera également plus facile d’accepter le changement en cours et à venir.

Tout comme la nature ne lutte pas contre sa dégradation au moment de l’automne. Vous parviendrez à accepter le changement perpétuel dans votre vie, et à vous y accommoder pleinement.

Et si nous nous laissions guider par la sagesse de la nature ? 

En observant la nature, il est possible d’y trouver de sublimes métaphores pour nous aider à mieux appréhender les grandes notions du Tao.

L’adaptabilité. L’acceptation. La résilience. L’impermanence.

Le vent, changeant et imprévisible, nous démontre l’impermanence des choses. Rien ne dure toujours, et tout ne cesse de changer. Il est impossible d’empêcher le vent de souffler, tout comme il est impossible de forcer le changement à se produire. La roche, par sa solidité et sa longévité, nous offre une leçon de patience et de stabilité. Tout comme elle, nous nous construisons petit à petit, en nous formant au gré de nos expériences. Cependant, s’il y a un élément naturel qui illustre parfaitement les principes et enseignements du Tao, c’est l’eau.

Le Tao Te King, ouvrage de référence dans le milieu taoïste, consacre plusieurs de ses chapitres à l’étude de l'eau et de sa puissance insoupçonnée. L’eau y est ainsi comparée au plus grand bien, grâce à son caractère naturellement bienveillant et humble. Source inépuisable de vie, elle coule sans distinction, pour abreuver ceux qui en ont besoin. Elle ne cherche jamais à dominer, mais s’écoule là où elle le peut. Elle s’adapte continuellement, en modifiant ses formes selon son environnement, sans effort, et avec une souplesse remarquable.

Le chapitre 8, absolument passionnant, nous invite à nous rapprocher du comportement de l’eau pour vivre davantage en harmonie avec le Tao, tandis que le chapitre 78, quant à lui, nous invite à cultiver la persistance de l’eau face aux obstacles. Il ne s’agit pas alors de forcer les choses, mais de déployer suffisamment de patience pour contourner les obstacles et avancer avec constance.

Doucement, mais sûrement.


“Rien au monde n'est plus tendre et faible que l'eau. Pourtant, pour attaquer le dur et le fort, rien ne la surpasse.”

L’élément de l’eau nous invite ainsi à adopter une approche fluide face aux difficultés rencontrées. L’eau semble, à première vue, couler le long des obstacles, sans pouvoir les faire flancher. Comme un ruisseau qui s’écoule paisiblement entre des rochers. C’est au fil du temps seulement que nous pouvons voir combien l’eau est puissante. Avec patience et douceur, elle érode les rochers qui se trouvent sur son passage, tout comme nous parvenons petit à petit à avancer sur notre chemin de vie. L’eau est l’incarnation d’une victoire discrète, mais certaine, de la souplesse et de l’adaptabilité sur l’inflexibilité et la rigueur.

Je vous invite à présent à trouver un élément naturel qui vous inspire. Le Feu, le Bois, le Métal, l’Eau…

Observez-le pendant quelques minutes, et réfléchissez à sa puissance. Quels enseignements peut-il vous apporter aujourd’hui ?

Les animaux et les plantes : des maîtres discrets

Les éléments naturels ne sont pas les seuls porteurs d’enseignements riches et porteurs de sens.

Les animaux et les plantes, aussi, nous montrent comment s’intégrer pleinement dans notre existence sans en modifier les contours. Les animaux vivent en harmonie profonde avec le flux naturel de l’univers. Les oiseaux migrent à l’arrivée de l’hiver, sans s’attacher à un lieu précis. Ils savent choisir quel lieu est le meilleur pour eux, instinctivement. Les animaux sauvages, biches, renards et écureuils, vivent dans l’instant présent. En répondant à leurs besoins fondamentaux, sans ambition, projections ou regrets. Les animaux seraient-ils les maîtres incontestables du wu-wei ?

C’est bien possible !

Ils s’adaptent aux particularités de leur environnement, sans chercher à maîtriser tous ses composants.

Je vous invite à observer ceci par vous-même : lors de votre prochaine promenade, observez un animal qui croisera votre chemin. Notez son comportement, sa manière de s’intéresser à ce qui nous semble futile, à évoluer dans son environnement, à prêter attention à tout ce qui l’entoure. Imaginez alors ce que cet animal peut vous enseigner sur l’harmonie ou l’adaptation. Si vous n’avez pas la chance de croiser un animal lors de votre promenade, n’hésitez pas à reporter votre attention sur les plantes et arbres qui jalonnent votre chemin. Car, oui, les végétaux ont également beaucoup à nous apprendre. Véritable puits de sagesse, de résilience et d’adaptabilité, ils reflètent pleinement l’essence même du Tao. Les jeunes pousses n’apparaissent que dans les environnements qui leur sont propices. Elles plient face aux vents et aux intempéries, mais ne rompent pas. Les plantes nous montrent combien la souplesse et l’adaptabilité au changement sont nécessaires pour notre croissance.


Le vivant est souple et tendre, tandis que le dur et le rigide sont caractéristiques de la mort. Le vieil arbre mort, sec et rigide se brise sous les attaques du vent. Les arbres, jeunes et vigoureux, plient.

La nature nous enseigne ainsi combien la souplesse est un signe de force. Ce sont les êtres qui savent s’adapter qui survivent. Et si nous nous inspirons de ces principes naturels pour les appliquer à notre propre vie ?

Je vous invite à réfléchir à une situation rencontrée dans laquelle il serait préférable de faire preuve de souplesse. Comment pouvez-vous agir face aux évènements, afin de vous comporter de manière plus souple et adaptative ? Dans quelles situations et relations faire preuve de davantage de souplesse afin d’y trouver une issue favorable ?

Pratiques pour intégrer les enseignements de la nature

Les cycles naturels, les animaux et les plantes ont beaucoup à nous apprendre pour nous permettre d’inviter davantage d’harmonie dans notre vie. L’application de simples outils permet, au quotidien, de nous reconnecter à la nature pour mieux appréhender ses enseignements.


La marche contemplative ou méditative, par exemple, est un excellent exemple d’exercice facile à réaliser au quotidien. Promenez-vous sans objectif particulier, sans itinéraire prédéfini. Laissez-vous simplement porter par vos pas, sans aucune distraction. Notez autour de vous tous les détails de votre environnement.

L’arbre de vos voisins, qui laisse apparaître ses premiers fruits, après un hiver rude lui ayant coûté l’une de ses branches. Cet écureuil qui se prépare à l’arrivée de l’hiver, en fouillant le sol à la recherche de nourriture.

Chaque jour, la nature et votre environnement vous offrent des enseignements puissants et profonds.

Il suffit d’ouvrir les yeux… et le cœur.

Vous pouvez également réaliser une observation calme de la nature, en vous installant dans un parc ou dans votre jardin pendant une dizaine de minutes. Observez calmement la nature environnante, et laissez émerger une intuition ou une réflexion.

"Le Tao est grand comme la nature et proche comme l’eau."

Peut-être alors pourriez-vous vous rapprocher du Tao, en créant une connexion avec l’expression même de son existence.

La nature comme maître silencieux

Chaque élément, chaque cycle de la nature est riche d’un enseignement précieux, qui nous guide vers une vie plus harmonieuse.

Il nous suffit d’ouvrir les yeux, afin d’observer ce qui se passe autour de nous. 

Sans que nous n’ayons besoin d’intervenir.

Et vous, quelle leçon pourriez-vous apprendre de la nature aujourd’hui ?

Avec toute mon amitié, 

Charles Zhang

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mercredi 22 janvier 2025

Résolutions

 Je vous propose quelques résolutions possibles à tenir !


 - Juste dire un merci le matin au réveil 

- Soupirer quelques fois en émettant un grand son Aaaaaaaaaaaa !

- Ouvrir grand les bras en disant "Je m'aime !"

- Bâiller en sentant son corps se détendre

- Juste dire merci le soir avant de se coucher



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mardi 21 janvier 2025

La voie du Zen

 Rencontre avec Jacques Castermane, disciple de K.G. Dürckheim


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lundi 20 janvier 2025

Que faire de nos émotions (2)

 Comment se déclenchent nos émotions ?


Les émotions nous tombent dessus, elles nous « saisissent », mais leurs mécanismes neurophysiologiques sont aujourd’hui assez bien connus. De récentes études en neurobiologie ont démontré que les émotions sont un mélange de plusieurs facteurs biochimiques, socioculturels et neurologiques.


En stimulant avec des électrodes certaines zones cérébrales, on a notamment localisé quatre grands circuits neuro-anatomiques qui commandent la plupart de nos réactions émotionnelles et de nos comportements. Des chercheurs finlandais ont ainsi pu tracer par thermographie la première carte corporelle de nos émotions. C’est assez édifiant. On voit le corps « s’allumer » en zones chaudes et froides en fonction de la suractivité ou de la sous-activité provoquée par chaque émotion. La colère et la peur se distinguent par une augmentation de l’activité au niveau de la poitrine, « caractérisant vraisemblablement une accélération des rythmes respiratoires ou cardiaques », avec le ventre en plus pour la peur. La honte présente les mêmes réactions corporelles que la peur, mais à un degré moindre, ainsi qu’une suractivité au niveau des joues (rougir de honte). Le dégoût ressemble aussi à la peur, mais avec une diminution de l’activité au niveau de la poitrine et une augmentation au niveau de la bouche. On se souviendra que le dégoût est à l’origine une réaction physiologique destinée à nous dissuader de manger des aliments avariés, quelle que soit notre faim. La tristesse en revanche est associée à une diminution de l’activité du torse et des membres supérieurs, d’où l’expression « baisser les bras » fréquemment employée lorsque l’on se sent accablé. Assez étonnamment, seule la joie, le bonheur diraient d’autres, stimule l’activité de l’ensemble du corps, encore plus que l’amour qui, sans que l’on sache pourquoi, « coupe les jambes ». L’impression de jambes flageolantes souvent ressentie en cas de choc amoureux pourrait donc s’expliquer ainsi.

Pourquoi réprime-t-on nos émotions ?

Au début d’une émotion, il y a toujours une surprise, un choc physiologique, qui provoque des modifications brutales : accélération du pouls, palpitations cardiaques, pâleur, rougissement, tremblement... Alors, forcément, par peur d’être débordé, on a tendance à les réprimer, notamment les émotions négatives.

On pleure devant les images de la Shoah, on crie de colère devant son poste de télé quand la France encaisse un but non mérité, on regarde des films d’horreur pour se faire peur, mais paradoxalement, on s’interdit souvent de vivre ces mêmes émotions dans notre vie quotidienne, la règle étant : «Je ne veux pas éprouver de sensation pénible. » C’est bien plus facile par procuration. Elles font moins mal, nous troublent, mais sans nous ébranler comme le feraient nos propres émotions. Car une vraie émotion, ça secoue toujours un peu physiquement et moralement.

On réprime aussi nos émotions en songeant aux conséquences qu’elles pourraient avoir sur les autres ou sur notre relation avec eux. Et cela pour une multitude de raisons :

Pour nous conformer aux normes sociales. Par exemple, nous avons appris à ne pas rire pendant un enterrement, fût-il d’une tante particulièrement détestable, à modérer notre joie en cas de succès, à sourire vaillamment quand on a perdu, etc. Tout cela afin de ne pas encourir la désapprobation, les foudres de la bien-pensance.

Pour coller aux attentes. Ainsi, les femmes peuvent exprimer la tristesse, la peur et d’autres signes de vulnérabilité ; les hommes, la colère, l’animosité et d’autres signes d’hostilité. Le contraire fait désordre et est très mal perçu (les femmes sont alors considérées comme hystériques, des harpies, les hommes comme faibles, des lâches).

Pour protéger les sentiments des autres. Ainsi, on cache sa déception en recevant un cadeau qui ne nous plaît pas pour ne pas faire de peine à la personne qui nous l’a offert, ou on dit que tout va très bien quand ça va très mal pour ne pas inquiéter quelqu’un qu’on aime.

Pour se protéger soi, éviter d’être jugé négativement. Par exemple, on ne montre pas sa jalousie par crainte de reproches, voire de représailles, ou on ne manifeste pas qu’on est très envieux des autres parce que cela donnerait une mauvaise image de soi.

Tout cela ne va pas sans un certain nombre de dégâts pour soi. Quand on bloque nos émotions, elles retentissent à l’intérieur. Cela affecte nos sentiments de bien-être, mais aussi notre santé.


De nombreuses observations cliniques ont montré que notre niveau de défenses immunitaires dépendait pour beaucoup de nos émotions*.

Même si on connaît encore assez mal le mécanisme de ces influences, on sait que les émotions négatives (la peur, la colère, la tristesse), quand elles ne sont pas exprimées, occasionnent de nombreux bobos : allergies, asthme, colites, maladies infectieuses. Elles constituent aussi un important facteur de risque dans différentes maladies encore plus antipathiques : affections cardiovasculaires, cancers, etc.

Les effets négatifs de nos émotions sur notre santé sont d’autant plus importants qu’en bloquant nos émotions « moins », on bloque automatiquement nos émotions « plus ». On s’interdit de pleurer, d’exprimer sa colère, et finalement, on ne rit plus, on a de moins en moins de joies, de plaisirs. Cela affaiblit d’autant nos défenses immunitaires, et diminue notre espérance de vie.

Sans émotions, on prend aussi de mauvaises décisions. Des patients à qui manque le bout de cerveau des émotions restent tout à fait capables de raisonner, mais en l’absence de résonance affective, ils n’arrivent plus à se décider, ou décident mal, parce qu’ils ne font plus la différence entre bon et mauvais.

Bref, tout un engrenage toxique dont on ne peut sortir qu’en apprenant à réguler ses émotions de manière à la fois plus confortable pour soi et socialement acceptable, au lieu de les étouffer.

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Aller bien dans un monde qui va mal - Gilles Azzopardi
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dimanche 19 janvier 2025

S’émerveiller comme des enfants

Un peu blasés, maussades, désabusés ? Posologie : s’appliquer à retrouver son âme d’enfant, notamment la capacité à s’émerveiller. Soit le secret pour vivre une bonne et heureuse année…

 


« Il neige, il neige ! » À la maison, l’excitation est à son comble : nos enfants sautent littéralement. Pour quelques flocons, les voilà transfigurés. Les chamailleries sont oubliées, les jeux délaissés et les conversations terminées ; tous arborent de larges sourires et s’extasient bruyamment : « Waouh, c’est trop beau ! » Le vocabulaire est pauvre, mais la joie est riche, et, à vrai dire, contagieuse. À notre tour, nous nous laissons saisir par ce simple mais merveilleux spectacle.

Nous nous attendrissons devant cette capacité naturelle des enfants à s’émerveiller et à s’enthousiasmer de petits riens que nous n’aurions pas remarqués sans eux : la forme d’un nuage, la couleur d’un tronc d’arbre, l’aspect d’un caillou, la taille d’un insecte, la possibilité d’une cabane, de petits bruits dans les feuillages…

Lorsque c’est nous qui nous enflammons, nous avons le sentiment de retomber en enfance, comme si cette spontanéité n’était plus vraiment de notre âge. Il faut dire que nous posons parfois sur le monde un regard blasé, désenchanté, voire endurci. Des paysages vus cent fois peuvent nous sembler dénués d’intérêt ou bien nous nous positionnons en « sachants », croyant ne rien avoir à apprendre de la nature (alors que, pour notre part, nous sommes bien incapables de distinguer deux chants d’oiseaux).

Adultes et urbains, nous avons si bien appris à vivre dans le bruit que nous ne savons plus écouter. Nos yeux happés par les écrans ne savent plus voir et nos esprits sont tant encombrés de soucis et d’activités multiples que nous peinons à être présent à ce qui se vit autour de nous. Nous ne savons plus regarder, encore moins contempler, ce qui ne laisse guère de possibilité de s’émerveiller.

« La beauté sauvera le monde »


Il n’est finalement pas étonnant que tant de personnes restent insensibles aux problèmes environnementaux, car comment peut-on vouloir prendre soin de ce que l’on ne remarque plus ? L’émerveillement rend humble, il nous fait prendre conscience qu’il y a plus grand que nous et qu’il est vain de chercher le bonheur dans les possessions matérielles ou le statut social. Il évite aussi de tomber dans la désespérance ou le découragement face aux crises multiples que nous traversons.

Car nous croyons qu’il y a du vrai dans la phrase de Dostoïevski, « la beauté sauvera le monde ». Faisant de ces mots leur slogan, des communes ont choisi d’exposer des œuvres d’art sur les panneaux publicitaires de la ville. Et si nous nous exercions avec elles à une plus grande attention au beau dans nos vies, en nous laissant toucher par une nuit étoilée, une cathédrale rebâtie, les vers d’un poème ou le réconfort d’un ami ?

Tel François d’Assise, nous pourrions faire l’expérience d’observer le végétal, l’animal, le minéral, l’humain, nous dire par leur existence : « Regarde qui m’a créé ! Regarde mon créateur ! » En retrouvant une âme d’enfant, capable de s’émerveiller face au beau et au bien, qu’ils viennent de Dieu ou des hommes, nous aurons peut-être nous aussi envie de louer Dieu, et retrouverons sans doute l’espérance qui nous fait parfois défaut. Vraiment, ne craignons pas de redevenir de simples enfants, le royaume des cieux n’est-il pas à ceux qui leur ressemblent ?

Chronique écologiquement vôtre par Adeline et Alexis Voizard dans le magazine La Vie

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samedi 18 janvier 2025

Apaisé...


Apaisé maintenant, te souviens-tu
D'un temps où nous luttions à grandes armes,
Que restait--il
Dans nos cœurs qu'un désir de nous perdre, infini ?
Nous n'avions pas franchi
La seule grille au soir ou sagesse de vivre
Qui est dans la grisaille et l'acanthe des morts.
Nous n'avions pas aimé
Le feu de longue nuit, l'inlassable patience
Qui fait aube pour nous de tout branchage mort.

Yves Bonnefoy
A une terre d'aube in Hier régnant désert
Poésie Gallimard 1982

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vendredi 17 janvier 2025

c'est l'avenir qui viendra à vous...

 Q : Je confesse être d'humeur rebelle aujourd'hui. Tout me semble incertain, inutile...


Nisargadatta Maharaj : C'est une humeur profitable. Douter de tout, tout refuser, s'interdire d'apprendre quelque chose d'autrui. C'est le fruit de votre longue sadhana (pratique spirituelle). Après tout, on n'étudie pas éternellement.

Q : J'en ai assez. Cela ne m'a mené nulle part...

M : Ne dites pas nulle part. Cela vous a mené où vous êtes maintenant. 

Q : Toujours l'enfant et ses accès de colère ! Je n'ai pas avancé d'un pouce.

M : Vous avez commencé comme enfant, vous finirez enfant. Vous devez perdre tout ce que vous avez gagné et finir comme vous avez commencé. 

Q : Mais l'enfant se rebiffe ! Quand il est en colère, quand on lui refuse quelque chose, il se met à trépigner. 

M : Laissez-le trépigner. Regardez-le seulement, quand il trépigne. Et si vous avez trop peur des autres pour trépigner avec conviction, constatez-le. Je sais que c'est un travail douloureux. Mais il n'y a pas de remède, sauf de renoncer à chercher des remèdes. 

Si vous êtes en colère ou dans la peine, situez-vous hors de la colère et de la peine : observez-les. L'extériorisation est le premier pas vers la libération. Éloignez-vous et regardez. Les événements physiques continueront d'arriver, mais, en eux-mêmes, ils n'ont aucune importance. C'est le mental seul qui compte, quoi qu'il arrive. Vous ne pouvez pas trépigner et hurler dans les bureaux d'une compagnie aérienne ou d'une banque, la société ne le permet pas. Si vous n'aimez pas leurs manières, ou si vous n'êtes pas prêt à les accepter, ne voyagez pas et n'ayez pas d'argent. Marchez, et si vous ne pouvez pas marcher, ne voyagez pas. Si vous avez affaire à la société, vous devez accepter ses usages, car ce sont les vôtres. Vos besoins et vos demandes les ont créés. Vos désirs sont si complexes et si contradictoires qu'il n'est pas étonnant que la société que vous créez soit, elle aussi, complexe et contradictoire.

Q : Je le vois bien et j'admets que le chaos extérieur n'est qu'un reflet de mon propre manque intérieur d'harmonie. Mais quel est le remède ? 

M : Ne cherchez pas de remèdes. 

Q : Quelquefois on est dans un état de grâce et la vie est heureuse et harmonieuse. Mais un tel état ne dure pas ! L'humeur change et tout va mal.

M : Si vous pouviez seulement vous tenir tranquille, les attentes et les mémoires éclaircies, vous seriez capable de voir la belle mise en place des événements. C'est votre agitation abrutissante qui cause le chaos. Vous voulez des résultats immédiats ! Nous ne faisons pas de magie ici. Tout le monde fait la même erreur : refuser les moyens mais en voulant la fin. Vous voulez la paix et l'harmonie dans le monde mais vous refusez de les avoir en vous. Suivez mon conseil avec confiance et vous ne serez pas désappointé. Je ne peux résoudre vos problèmes simplement par des mots. Vous devez agir conformément à ce que je vous dis et persévérer. 

Ce n'est pas le conseil juste qui libère mais l'action qui se fonde sur lui. Voyez le docteur qui dit au patient, après lui avoir fait une piqûre : "Maintenant, restez tranquille. N'en faites pas plus, restez seulement tranquille" ; je vous dis comme lui : vous avez eu votre piqûre, maintenant restez tranquille, seulement tranquille. Vous n'avez rien d'autre à faire. Mon guru a fait la même chose. Il m'aurait enseigné quelque chose et ensuite aurait dit : "Maintenant restez tranquille. N'allez pas ruminer tout le temps. Arrêtez. Soyez silencieux."

Q : Je peux rester une heure tranquille le matin, mais la journée est longue et beaucoup de choses arrivent qui jettent à bas mon équilibre. C'est facile de dire : "Faites le silence", mais dites-moi comment, au milieu des hurlements en moi et autour de moi, peut-on y parvenir ? 

M : Tout ce qui doit être fait peut être fait dans le silence. Il n'y a aucune raison d'en être bouleversé.

Q : Tout ça n'est que théorie qui ne colle pas aux faits. Je vais retourner en Europe où je n'ai rien à faire. Ma vie est totalement vide... 

M : Essayez simplement d'être calme, tout viendra à vous, le travail, la force de le faire, la motivation juste. Faut-il que vous sachiez tout d'avance ? Ne soyez pas angoissé par votre avenir, soyez tranquille aujourd'hui et tout se mettra en place. L'inattendu arrivera certainement alors que l'attendu peut ne jamais se produire. Ne me dites pas que vous ne parvenez pas à contrôler votre nature. Il ne vous est pas nécessaire de la contrôler. Jetez-la par-dessus bord, n'ayez pas de nature à combattre ou à laquelle vous soumettre. Aucune épreuve ne vous blessera pourvu que vous n'en fassiez pas une habitude. Vous êtes la cause subtile de l'univers entier. Tout EST, parce que vous êtes. Accrochez-vous fermement et profondément à ce point – demeurez-y. Réaliser ceci comme absolument vrai, c'est la libération. 

La nature n'est ni plaisante ni déplaisante. Elle n'est qu'intelligence et beauté. La souffrance comme le plaisir ne sont que dans le mental. Changez votre échelle de valeurs et tout changera. Le plaisir et la souffrance ne sont que des perturbations des sens ; acceptez-les tranquillement, ils ne seront plus que béatitude. Puisque le monde est ce que vous en faites, rien ne vous empêche de le faire heureux. Seul le contentement peut vous rendre heureux. Des désirs assouvis naissent de nouveaux désirs. Se garder de tout désir, se contenter de ce qui vient de soi-même, est une attitude très fructueuse – un premier pas vers l'état de plénitude. Ne méprisez pas sa stérilité et sa vacuité apparentes. 

Croyez-moi, c'est la satisfaction des désirs qui engendre la misère. La liberté vis-à-vis du désir est béatitude. 

Q : Il y a des choses dont nous avons besoin... 

M : Ce dont vous avez besoin se présentera à vous si vous ne désirez pas ce dont vous n'avez pas besoin. Mais peu de gens atteignent cet état de lucidité totale et de complet détachement. C'est un état très haut, le seuil même de la libération.

Q : Ces deux dernières années, j'ai été stérile, désolé, vide, souvent j'ai appelé la mort...

M : Avec votre présence ici, les choses se sont mises en marche. Laissez-les se produire comme elles arrivent. Le tri se fera convenablement de lui-même en fin de compte. Ce n'est pas la peine de vous battre pour l'avenir – c'est l'avenir qui viendra à vous. Pendant un certain temps encore, votre démarche sera celle d'un somnambule, comme aujourd'hui, dépourvue de sens et d'assurance ; mais cette période aura une fin et vous trouverez votre travail fructueux et facile. 

Il y a toujours des moments où on se sent vide et détaché. De tels instants sont des plus désirables car ils montrent que votre âme a largué ses amarres et vogue vers des pays lointains. C'est cela le détachement : quand on en a fini avec le vieux et que le nouveau n'est pas encore arrivé. Si vous avez peur, cet état peut être éprouvant ; mais il n'y a là rien dont vous puissiez être effrayé. Souvenez-vous de cette instruction : quoi qu'il vous arrive – dépassez-le.

~ Nisargadatta Maharaj 

Je Suis, chapitre 53

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