vendredi 4 septembre 2020

L’Enseignement de la méditation au Centre Dürckheim ?


« Il y a mille et une façons de méditer ;
il n’y a qu’une manière de pratiquer zazen ».
Hirano Katsufumi Roshi

Prémisse radicale ! Elle a l’avantage d’éviter le mélange des genres.
« Il y a mille et une façons de méditer » !
Sont proposées aujourd’hui, sous le nom de méditation, des méthodes très différentes qui, curieusement, s’opposent les unes aux autres. Par exemple :
— une méditation dite moderne, parce que scientifique et objective, est opposée à la méditation dite ancestrale, décriée comme étant rituelle et subjective
— une méditation affirmée comme étant chrétienne est opposée aux méditations bouddhistes
— une méditation baptisée laïque est opposée à une méditation dénoncée comme étant confessionnelle.
Il est à craindre qu’il y ait bientôt, en Belgique, une méditation wallonne opposée à une méditation flamande.
« Il n’y a qu’une
 manière de pratiquer zazen » ! Et Hirano Roshi ajoute : « On ne pratique pas zazen avec le mental ».


Voilà ce qui différencie sans doute la pratique appelée zazen de la plupart des exercices méditatifs.
Synchronicité ? Quelques jours avant l’arrivée d’Hirano Roshi l’an passé, lisant un poème de Jacques Prévert (Paroles), je tombe sur ce vers : « Le monde mental ment monumentalement » ! On ne pratique pas zazen avec le mental. Cette affirmation confronte l’homme occidental qui s’intéresse aux exercices orientaux (Zazen, Kyudo, Aïkido, Yoga, Tai-Chi Chuan) à une difficulté majeure : l’éviction de notre approche habituelle du réel, désignée comme étant l’entendement. « Moi je pense que je suis ce que je pense que je suis et moi je pense que le réel est ce que je pense comme étant le réel » !
Dans les années 1960 je pratiquais l’Aïkido depuis déjà quelques années lorsque le Maître Masamichi Noro a

débarqué en Europe pour enseigner cet art martial. A peine arrivé, il était désemparé. Pourquoi ? « Parce qu’en Occident, les pratiquants cherchent à “comprendre” comment faire une technique afin de pouvoir l’exécuter ».
C’est une caractéristique de l’esprit occidental que de toujours vouloir comprendre mentalement, intellectuellement une action, une technique, imaginant que c’est la seule manière d’arriver à la réaliser. 

Au Japon, le maître de l’exercice qui enseigne une technique artistique, artisanale ou martiale, vous encourage non pas à la comprendre mais à … l’avaler. Autrement dit, plutôt que de chercher à comprendre mentalement ce qu’il serait bien de faire, vous êtes invité à vous imprégner physiquement de cette action, de cette technique en … la faisant, aussi bien qu’il vous est possible.
N’attendez donc pas de comprendre ce qu’est zazen pour pratiquer zazen.
Les explications théoriques concernant zazen, aussi brillantes soient-elles, ne pourront que vous éloigner du but de cet exercice : la connaissance du vrai soi-même, la connaissance de notre vraie nature d’être humain, la connaissance de notre être essentiel.
Le Tao (Do) est la technique ; la technique est le Tao (Do).
Ce qui signifie que pour se mettre ou se remettre en accord avec un ordre des choses qui n’est pas du ressort de l’ego, la Voie à suivre est l’exercice, l’action.
Dans le monde du zen, connaissance et action ne font qu’UN.
Rappel ! La pratique de zazen n’a qu’un but : préparer les conditions qui permettent et favorisent l’unité de l’homme avec sa vraie nature d’être humain.

Il ne s’agit pas d’une unité construite mais d’une unité constitutive.

Zazen est la pratique méditative enseignée au Centre Dürckheim. La Voie de l’action, proposée par K.G. Dürckheim à son retour du Japon (1947) n’est pas un chemin à suivre mais un chemin que chacun se doit de tracer. « Cet Enseignement n’utilise pas les moyens d’une pensée analytique, discursive, ni ne prend la forme d’une croyance dogmatique ou d’une métaphysique spéculative, mais se présente comme un chemin d’expérience et d’exercice »
Un exercice, des exercices, qui s’adressent au corps que l’homme EST (Leib). L’année dernière, au cours de la Sesshin qu’il animait au Centre Dürckheim, Hirano Roshi nous disait que « Lorsqu’on pratique zazen, le corps prend la forme du calme ! » Le CALME ! Symptôme de l’état de santé fondamental de l’être humain.


Jacques Castermane

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