mercredi 28 février 2018

Silences. Maintenant elle est comme les autres...

Le silence dans la forêt. Il est froissé tout d'un coup par la main du vent, comme on jette une lettre ratée au panier. Ce silence empêché d'être parfait est une des choses les plus fraternelles qui soient. 
À Paris, le silence vient par les yeux. Ce mendiant, une couverture sur les jambes, mangeait un yaourt. L'air était si froid que les atomes gelaient. Il ne bougeait presque pas, sidéré par le froid. Il mangeait sa mort à la petite cuillère. Un silence l'enveloppait, contre lequel les bruits des affairés tapaient sans pouvoir le briser. 
Le silence de Lao Tseu passant la douane et laissant son traité comme gage, don, sourire. Il s'éloigne. On ne le reverra plus. Quand on ouvre son livre, le coeur se remet à battre. On ne savait même pas qu'il était arrêté. Le texte : un visage avec un doigt sur les lèvres closes. Les commentateurs arrivent, se pressent pour réduire le miracle. Le visage sourit, ne dit rien. La pensée est un moustique, c'est agaçant ce bruit qu'elle fait à notre oreille. Ouvrons le livre, passons la douane, disparaissons. 
Le silence du poème. Ce que les psychanalystes appellent un passage à l'acte est, dans sa soudaineté éclairante, proche de ce qu'est un poème, mais c'en est la version diabolique, destructrice. La vitesse du poème dépasse celle de la lumière. Elle n'est comparable qu'au sourire sans cause du nouveau-né. Ce sourire monte au ciel d'où il était venu. 
Le silence de la Bible. Lisant un psaume de David, j'ai reçu le souffle de l'éternel, c'est-à-dire du mortel, en plein visage. Les écritures dites « saintes » ne sont pas plus saintes qu'une liste de courses épinglée sur une plaque de liège dans une cuisine : les deux témoignent du souci d'un vivant, du petit désir adorable de maintenir vie et souffle le plus longtemps possible. 
Le silence d'un citron. Si nous avions l'oreille fine, nous entendrions le bruit d'un réacteur atomique, le bourdonnement méditatif de l'absolu sous la coquille jaune. Mais nous n'avons pas l'oreille fine. Nous ne voyons qu'un citron et sa dureté joviale caractéristique des fils du soleil. 
Le silence de la neige qui tombe sur la neige. C'est le silence des évènements qui nous refont un cœur vierge. « Neige-qui-tombe-sur-de-la-neige » est le nom de l'amoureuse et son visage est plus noir que celui d'une icône.
Le silence du général de Gaulle protégeant sa petite fille mongolienne, Anne. Il rêvait qu'il était le général de Gaulle. Le seul point réel de sa vie était le petit visage oriental rieur d'Anne. L'enfant éternel un jour mourut. À la fin de l'enterrement, s'éloignant de la tombe, le vieil homme dit à sa femme : « Viens, maintenant elle est comme les autres ». Le silence parfois fleurit en une seule parole. Les témoins de cette floraison ne l'oublient jamais plus.
source : Le monde des religions

***

mardi 27 février 2018

Chemin chamanique ?


Gilles Farcet et Fabrice Jordan nous partagent ce lien qui peut éclairer notre chemin spirituel sur lequel les tentations sont nombreuses de nos jours.


http://www.inspir.be/?page_id=2792

Bonne lecture

***.

lundi 26 février 2018

Présence... présente grâce à Jean-Pierre Vaissaire.


En octobre dernier, de retour des Pouilles j'ai décidé de passer par Rastenberg. (d'accord, c'est pas bien le plus court chemin...) 
Je n'y étais jamais retourné depuis l'enciellement de notre chère Christiane, mais les images des "jours heureux" sont gravées non seulement dans ma mémoire, mais dans ma chair vive, dans tout mon être. Ancrées. Devenues partie de ce que je suis, pense, ressens. Je me dis souvent que Christiane n'est pas partie, qu'elle est toujours là, à mon côté, présente, si présente parfois...
J'arrive à Rastenberg, c'est la fin de journée, je décide de poser mon camping car dans la forêt, non loin du zendo; Et bien sûr d'aller roder en direction de cette petite maison, voir ce que tout cela devient depuis dix ans.
Je m'approche à pas lents. Et plus j'approche plus se forge une évidence. Christiane est là. De toute sa présence. Christiane est là, devant moi, elle est assise sur les marches de l'entrée du zendo, elle est vêtue d'un pantalon bleu marine et d'un haut blanc, elle est là, elle me sourit, doux regard ... Elle est "comme d'habitude" et elle me dit: "Alors vieux brigand, qu'est ce que tu viens faire par ici?"
Je suis confondu. Bien sûr je ne suis pas fou, mon "esprit" sait bien qu'elle est morte, comme on dit, il y a dix ans. Mais je connais trop ces percées, rarissimes, du réel, ces instants qu'elle nous a appris à reconnaître, ces infimes mais immenses traits d'union entre visible et invisible, pour me traiter moi-même de fou ou d'illuminé. Je SAIS la réalité de cette présence, je le sais comme plus fort que tout au monde, et je lui réponds, les larmes aux yeux "Tu le sais bien" (ou qq chose d'approchant). Je la remercie très fort d'être venue m'accueillir, j'entends une réponse du genre "tu le vaux bien".
Qui parle ici?
Qui entend? Qui sent, qui voit, quel est ce lien?
Jugés avec l'esprit cartésien, ces instants n'ont aucune existence. Mais je me moque bien de Descartes. Je sais ce que je vis, et ça pulse, ça palpite, ça respire, mieux, plus qu'une certitude avérée.
Somme toute, rien ne me surprend. De son "vivant", Christiane m'a souvent pris par la main et emmené à "la porte".
- Tu vois, le Réel, c'est ici. Que décides-tu, vas-tu entrer?"
Qu'elles sont douces, les larmes que j'ai versées les yeux dans les siens...
Comme c'était émouvant de la retrouver là 10 ans après...
et si naturel, en somme. Très "naturellement" bouleversant.



Alors, amis, je n'ai qu'une chose à vous dire, : allez-y. Peut-être vous y attend-elle comme elle m'attendait . Son travail ici bas n'est pas terminé...
(et dire qu'elle ne "voulait laisser aucun sillage")....!


Jean-Pierre Vaissaire 

*****

dimanche 25 février 2018

Jeûner, se remettre à l'écoute de son corps


Pendant le carême, Christophe André nous livre sa chronique sur la vie intérieure. Cette semaine, il nous explique comment, en s’abstenant de manger, on peut redécouvrir le plaisir de se nourrir.





« Jésus jeûna 40 jours et 40 nuits, après quoi il eut faim », nous raconte saint Matthieu dans son Évangile (4, 2). Mais cette fois, ce n’est pas un miracle : la plupart des êtres humains peuvent survivre à 40 jours de jeûne (à l’expresse condition de boire suffisamment). Toutes les traditions religieuses ont recommandé des périodes de jeûne. Et le jeûne est récemment revenu à la mode, à la fois pour des raisons médicales (il semble être bénéfique pour la santé) et psychologiques (dans nos sociétés de pléthore, il est un acte de résistance libérateur).
Le temps du carême est souvent associé à l’idée de jeûne. Mais de quel type de jeûne parle-t-on ? Et surtout dans quel esprit ? Le jeûne ne doit pas consister seulement en une restriction et une privation, mais doit plutôt représenter une manière de développer un nouveau rapport à la nourriture. Il ne s’agit pas, ou pas seulement, de se priver mais aussi de se recentrer, de moins manger, peut-être, mais surtout de mieux manger : savourer le bonheur que représente le pain quotidien, s’émerveiller et rendre grâce. On se propose alors d’habiter nos gestes différemment. Par exemple en prenant ses repas en pleine conscience, c’est-à-dire en se rendant vraiment présent à notre nourriture.
Souvent, nous ne ­nous mettons pas à table parce que nous avons vraiment faim, mais parce que c’est l’heure, parce que ça sent bon, parce qu’on s’ennuie...
Cela consiste à ne rien faire d’autre que se consacrer à son repas : ne pas lire, ni regarder la télé, ni écouter la radio, mais se centrer sur ce que nous mangeons. Bien mâcher, savourer, finir chaque bouchée avant de remplir à nouveau sa cuillère, prendre le temps d’écouter le message de notre estomac : “Stop” ou “encore” ? En prenant cette habitude, nous allons découvrir des tas de choses dans notre rapport à l’alimentation : souvent, nous ne ­nous mettons pas à table parce que nous avons vraiment faim, mais parce que c’est l’heure, parce que ça sent bon, parce qu’on s’ennuie, parce que cela nous permet de retrouver les autres... Nous pouvons aussi mieux comprendre pourquoi nous ingérons parfois trop : c’est le cas si nous prêtons trop attention au contenu de notre assiette (parce que c’est très bon ou parce qu’on se dit qu’il faut tout finir) et pas suffisamment à ce que ressent notre corps (il nous signale souvent qu’il est rassasié mais nous ne l’écoutons pas). Bien sûr, nous ne pouvons pas prendre tous nos repas ainsi… mais nous pouvons, de temps à autres, nous apercevoir que nous ingurgitons des quantités sans même nous en rendre compte.
Du coup, nous pouvons décider de régulièrement déguster un aliment, un plat ou tout un repas en pleine conscience : bouchée après bouchée, seul, sans distractions, sans discussion, en silence… Juste ressentir le goût des mets et aussi l’état de faim ou de satiété de notre corps, au fur et à mesure que le repas avance… C’est toute la différence qui existe entre simplement manger – avaler des aliments – et se nourrir : prendre conscience de toutes les grâces présentes derrière chacun des aliments qui nous sont offerts à chacun de nos repas.
En procédant ainsi, chaque jour du carême, ou lors de certains d’entre eux, nous allons redécouvrir le plaisir lié à la nourriture, redécouvrir la grâce que représentent le fait d’en disposer et le fait de se nourrir. Redécouvrir, finalement, les fondements simples pressentis par l’Ecclésiaste (9, 7) : « Va, mange ton pain dans la joie, et bois de bon cœur ton vin… »
Comment faire ?
Sur un plan « technique », il existe toutes sortes de jeûnes. Le jeûne total, dans lequel on ne mange rien, et l’on ne fait que boire des liquides, est réalisable par tout le monde, par exemple un jour par semaine. Le jeûne partiel consiste à manger moins, à s’assurer que l’on sort de table avec le sentiment qu’on aurait pu manger davantage : il s’avère plus adapté aux personnes inexpérimentées en la matière, et il peut être mené sur une durée plus longue. Enfin, le jeûne sélectif consiste en l’exclusion de certains aliments (viande, desserts, vin) : il peut être mis en place pour un temps plus long, par exemple le carême.
Sans danger pour la santé, au contraire, chacun de ces types de jeûne présente un intérêt sur le plan personnel et spirituel : on se débarrasse de certaines mauvaises habitudes liées à la nourriture (trop manger, trop vite), on retrouve une forme de liberté qui nous permet d’orienter nos pensées et nos énergies vers d’autres actions que les repas (les dialogues, le don, la prière).
source : La Vie
*****

samedi 24 février 2018

Pour être en cohérence avec soi

A propos de la cohérence cardiaque :
"Cela suggère que lorsqu'une personne est dans un état physique cohérent (cohérence cardiaque), elle ou il va montrer une meilleure capacité à ressentir les signaux électro-magnétiques et les informations encodées par les champs émis par le cœur des autres. Au premier abord, ces données pourraient faire penser que ces personnes en cohérence sont plus facilement susceptibles d'être vulnérables aux influences potentiellement négatives de champs incohérents émis par l'entourage. En fait, c'est l'inverse qui est vrai. Quand les gens sont capables de maintenir l'état de cohérence interne, ils sont moins vulnérables aux champs incohérents des autres. Paradoxalement, on constate qu'une plus grande stabilité interne est ce qui permet l'émergence d'une plus grande sensibilité"
HeartMath® Institute


Je vous indique le lien qui permet de comprendre la cohérence cardiaque en regardant les vidéos proposées :


*****

vendredi 23 février 2018

Incarnation...

"Incarner le changement, c'est ne pas réserver mon sourire qu' à ceux qui me sourient. 
Incarner le changement, c' est rendre tangible , manifeste, cette unité intérieure qui ne peut s' accommoder d'aucune idée de comparaison ou de séparation d'avec l'autre ...........
Incarner le changement, c' est spiritualiser la matière, c'est à dire amener le plus haut degré de moi-même dans mes aspects les plus denses. 
Incarner le changement, c'est tel le soleil, éclairer avec la même intensité le jardin d'enfants et le champ de bataille ........... 
Incarner le changement c'est être ce que je dis et dire ce que je suis ." 

Gregory Mutombo 
p 155 " La symphonie des âmes

jeudi 22 février 2018

Une autre agriculture possible...



Et cette année encore, c’est grâce à un travail de fonds remarquable que Générations Futures revient sur le devant de la scène : l’association a dressé un classement des fruits et légumes non-bio contenant le plus de pesticides. Pour cela, il lui a suffit de compiler les données officielles (ce qui n’avait jamais été fait avant) publiées chaque année par la Direction générale de la concurrence, de la consommation, et de la répression des fraudes. La DGCCRF analyse des dizaines de produits frais dans les rayons des supermarchés et chez les grossistes, et publie les résultats. En compilant tous ces chiffres (plus de 11 000 analyses sur les 5 dernières années), et en s’assurant d’avoir des résultats suffisamment exhaustifs pour être parlants, Générations Futures dresse donc un terrible constat sur 52 fruits et légumes de grande consommation.

Plus de 80% des oranges, pêches, nectarines, fraises, pamplemousses, cerises, clémentines et raisins testés laissent apparaître des résidus de pesticides quantifiables, et donc susceptibles de se diffuser dans notre organisme pour on-ne-sait-quels-effets ultérieurs. Du côté des légumes, ce sont les céleris raves, les endives et les herbes fraîches qui décrochent la timbale avec plus de 70% des échantillons où l’on retrouve des pesticides. Pour le céleri branche, la proportion grimpe même à près de 85%. A l’inverse, les asperges, betteraves, ou le maïs font figure de bons élèves avec moins de 5% des échantillons analysés incriminés.

Un tel avertissement fait bien sûr office d’incroyable promotion de l’agriculture biologique : grâce à ses méthodes, il est (presque) impossible de retrouver des engrais et des pesticides dans les légumes et fruits consommés. Pour la santé de la terre comme pour celle du consommateur, nous ne redirons jamais assez : vive le bio !

source du texte : univers nature
***

mardi 20 février 2018

Faire valoir intérieur ou valoir des miettes...




Ne confondez pas ce qui vous est offert avec ce que vous valez.

La façon dont une personne vous traite n’est pas le reflet de votre beauté ni de votre grandeur. C’est le reflet de la façon dont elle traite les autres, tout simplement. L’expression de qui elle est, le prolongement de comment elle se sent.

Si elle donne des miettes, cela ne fait pas de vous une personne qui mérite des miettes. Cela fait d’elle une personne qui donne des miettes. Point final. 

Certes, la décision de se rapprocher de vous ou non dépend de son attrait pour vous. Mais même son attirance n’est pas une mesure infaillible… Par exemple, combien de gens recherchent la compagnie de personnes qui nourrissent leurs vieilles schémas toxiques et fuient celles avec qui ils pourraient vivre quelque chose de vrai et de beau? On pourrait dire que parfois, être rejeté semble même le plus grand compliment. 

Ainsi, chacun donne seulement ce qu’il est capable de donner. La capacité de donner d’une personne – ou ce qui l’attire – repose sur des facteurs qui n’ont absolument rien à voir avec nous. Et aussi convaincants soient les scénarios qu’on a l’habitude de se monter, la seule et unique raison pour laquelle on reçoit des miettes, chers amis, est qu’on choisit de les accepter. 
Marie Pier Charron, 

....

lundi 19 février 2018

Prendre soin avec Christian Bobin




"Prendre soin", ce pourrait être la devise d'un artisan, d'une mère ou d'un amoureux. C'est la devise de la vie dans son ensemble, puisque son ensemble n'est composé que de détails, comme la peinture qui grandit sur la toile par légères touches du pinceau, minuscules vibrations de la main.
"Prendre soin", c'est ce que murmure la vie fragile à Boubat.
Boubat. Celui-qui-prend-soin-des-invisibles.
Prendre soin, être confiant. Et naître.
Naître une fois, deux fois, trois fois, entrer à chaque instant dans une vie blanche comme dent de lait."
Christian Bobin

****



"La confiance est la matière première de celui qui regarde : c'est en elle que grandit la lumière. La confiance est la capacité enfantine d'aller vers ce que l'on ne connaît pas comme si on le reconnaissait. "Tu viens d'apparaître devant moi et je sais qu'aucun mal ne peut me venir de toi puisque je t'aime, et c'est comme si je t'aimais depuis toujours.
La confiance est cette racine minuscule par laquelle le vivant entre en résonance avec toute la vie,avec les autres hommes, les autres femmes, comme avec l'air qui baigne, la terre ou le silence qui creuse un ciel.
Sans confiance, plus de lien et plus de jour. Sans elle, rien."
Christian Bobin

***

samedi 17 février 2018

Jeûner pour s'ouvrir à l'Esprit

Pour préparer Pâques, le mensuel Prier vous ouvre chaque semaine à l'art de la prière. Première expérience spirituelle, le jeûne.





« Le jeûne est pour moi une expérience bouleversante. L'expérience que le Christ nous rejoint dans notre quotidien, d'une intimité qui change tout ce que l'on fait et la manière dont on voit le monde. Je marche moins vite. Je vis plus simplement. Plusieurs fois, j'ai vécu des réconciliations dans ma famille », témoigne Élisabeth Siewert, 50 ans, enseignante, qui vit chaque année durant le carême une expérience de jeûne au sein de sa paroisse du Chesnay. 

D'où cela vient-il ?

Cette pratique enracinée dans l'Ancien Testament est illustrée par Jésus durant ses 40 jours au désert (Matthieu 4, 2). Il invite par la suite ses disciples à jeûner « lorsque l'Époux leur aura été enlevé » (Matthieu 9, 15). Les premiers chrétiens s'abstenaient ainsi de nourriture le mercredi et le vendredi (en souvenir de la trahison de Juda et de la Passion du Christ), durant le carême et avant chaque eucharistie.

Pourquoi se priver ?

Si s'abstenir de télévision, par exemple, a un sens, cela vient après le jeûne alimentaire, avance Jean-Luc Souveton, prêtre à Saint-Étienne. « Vaincre la faim nous montre que "l'homme ne vit pas que de pain mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu" (Matthieu 4, 4). On comprend que notre énergie vient aussi de l'intérieur. Physiquement, nous faisons appel aux réserves graisseuses pour que le corps fonctionne. Spirituellement, cela remet en cause notre quête inquiète de combler un vide intérieur. On découvre en soi non pas le vide, mais la vie. »

Ce que demande l'Église

L'Église catholique prescrit aux personnes en bonne santé de s'abstenir de viande tous les vendredis de carême et de jeûner le mercredi des Cendres ainsi que le Vendredi saint, c'est-à-dire de ne prendre qu'un seul repas sans viande ni alcool et une simple collation le soir. Elle demande également de se préparer à l'eucharistie en s'abstenant de nourriture, au moins une heure avant de communier. Pourquoi ne pas insister sur ce point cette année ? C'est une façon simple et puissante d'éveiller notre faim de Dieu et notre conscience de Celui qu'on va recevoir.

Quelle attitude intérieure ?

Dans la tradition chrétienne, jeûner n'est pas une fin en soi, mais un moyen spirituel de devenir « disciples et fils de Dieu ». Pour Jean-Luc Souveton : « De même que le Christ est tenté au désert, jeûner nous révèle les combats que nous devons mener pour nous libérer de notre soif de pouvoir, de notre orgueil... » Le jeûne est là pour favoriser une prière plus intense et un souci des autres qui se traduit notamment par l'aumône.

Une expérience paroissiale

Durant le carême, la paroisse organise un jeûne. Chaque soir pendant une semaine, les paroissiens se retrouvent pour un temps d'adoration suivi d'une tisane. Ils rapportent chez eux la miche de pain complet qui fera leur unique repas du lendemain. Durant toute la semaine, ils prient à partir de l'Évangile et des psaumes. « Cette expérience a rendu la paroisse plus fraternelle, témoigne Élisabeth Siewert. On prie les uns pour les autres, on découvre de nouveaux visages, qui osent témoigner de ce qu'ils vivent. Et le dernier soir, chacun apporte de quoi préparer la fête ! »

*****

Toucher du doigt le passé

 
(peinture par Piper Lane)



" si vous regardez profondément dans la paume de votre main, vous verrez vos parents et toutes les générations de vos ancêtres. Ils sont tous vivants en ce moment. Chacun est présent dans votre corps. Vous êtes la continuation de chacune de ces personnes." 
~ Thích nhất hạnh

*****

vendredi 16 février 2018

Nouvel an chinois


En 2018, nous entrons dans l’année du Chien de terre. Onzième animal de ce zodiaque oriental, le Chien est associé à la loyauté, la confiance et la générosité. Des qualités dont nous avons bien besoin ! Espérons que ce cycle verra une amélioration des relations humaines et de la conscience générale. D’importants progrès dans l’éducation et les sciences devraient se développer, ce qui ne serait pas trop tôt, surtout en France... Les changements climatiques deviennent cruciaux, il y a donc urgence pour trouver des solutions utiles. Pragmatique et perfectionniste, le Chien devrait aider en ce sens.

Bonne année, donc, sur le chemin qui mène à l’approfondissement et à ce bon sens qui s’apparente à une certaine sagesse...

Marie-Christine BESSE DARCQ



****

jeudi 15 février 2018

Les bonnes résolutions de carême, un “engagement envers soi“

 Pendant le carême, Christophe André nous offre sa chronique sur la vie intérieure. Cette semaine, il nous explique pourquoi prendre un engagement envers soi, Dieu ou les autres fait du bien. Médecin psychiatre, il a été un des premiers à introduire la méditation à l'hôpital et est l'auteur de best-sellers sur la psychologie positive et la méditation.

Prendre de bonnes résolutions, c'est accepter un face-à-face avec soi-même. Cela nécessite un temps d'arrêt et de réflexion sur la conduite de sa vie, un détour par sa vie intérieure. Il s'agit de faire ce que nous ne prenons par le temps de faire le reste de l'année : rectifier l'écart qui se creuse entre nos idéaux, spirituels ou relationnels, et nos comportements quotidiens. Pour beaucoup d'entre nous, le carême est associé à un certain nombre de résolutions, tournées autour de la prière, du jeûne et du don. Et ces résolutions méritent d'être prises à la lumière de trois questions : pourquoi ? Quoi ? Comment ? 
Pourquoi ? C'est-à-dire avec quel sens ? Et quels objectifs ? Il ne s'agit pas seulement de s'imposer une contrainte ou une privation, mais de nous rapprocher de ce en quoi nous croyons, de donner du sens à nos résolutions, de les placer dans une intention plus large que le simple autocontrôle, de comprendre qu'il y a alors un enjeu plus vaste que le seul raffermissement de notre volonté. 
Puis vient la question du quoi ? Nous choisissons souvent d'accomplir des efforts sur nous-mêmes : moins manger, ne pas boire d'alcool, cesser de fumer. Ou des efforts vers les autres : moins râler, ne plus se plaindre, sourire, écouter, aider, donner. Il ne s'agit pas, ou pas seulement, d'être fier de soi. Il s'agit de faire le bien. En se respectant davantage et en respectant les autres. Il s'agit parfois aussi de résister aux tentations du quotidien, mêmes bénignes, comme de moins fréquenter les écrans ; toutes les lois de ce qu'on appelle l'autocontrôle, toutes les études scientifiques disent la même chose : apprendre à résister aux petites tentations est le meilleur entraînement pour un jour résister aux grandes.
Enfin, la question du comment ? Il existe de nombreuses règles aux changements réussis : définir des objectifs concrets, réalistes ; toujours faire suivre la résolution d'un premier geste, symbolique et immédiat ( « un voyage de mille lieues commence toujours par un premier pas » , Lao-tseu) ; lorsqu'on a du mal ou qu'on est en échec, faire preuve de tolérance et d'autobienveillance ; s'engager devant autrui ; fragmenter les objectifs de long terme, vastes et généraux, en une succession d'objectifs de court terme, limités et ciblés (« un jour à la fois ») ; les écrire et tenir un journal de carême, etc. 
Nos habitudes ne peuvent s'effacer sur demande et sont souvent tenaces.
Une phase de travail spécifique sur nos résolutions est souvent indispensable, faute de quoi nos décisions ne tiendront pas sur la durée : nos habitudes ne peuvent s'effacer sur demande et sont souvent tenaces (« chassez le naturel et il revient au galop ») ; notre état biologique ou émotionnel nous influence avec force (on agit souvent en fonction de notre manque de sommeil, de notre glycémie, de nos agacements ou abattements) ; et puis nous sommes exposés à de très nombreuses influences extérieures, qu'il s'agisse de nos proches, ou de la société et de son consumérisme, qui pousse au non-effort du « fais-toi plaisir tout de suite ». 
Une résolution, ce n'est pas seulement une vague intention. C'est une décision suivie d'efforts prolongés ou répétés. Et c'est aussi un engagement pris envers soi-même - et dans le carême, envers Dieu ou notre communauté - pour atteindre un objectif, en ayant conscience des difficultés qui nous attendent pour initier ou maintenir le changement désiré. Il est certes plus facile de ne rien décider, plus confortable de ne pas s'exposer à l'inconfort des efforts et au risque de la mise en échec. Mais il est plus enrichissant de découvrir comment nous arrivons, ou pas, à nous engager et persévérer dans nos résolutions. Et vous, vers quelles résolutions allez-vous vous tourner ?


*****
source : la Vie

mercredi 14 février 2018

"Il faut accéder à un regard authentique sur soi" par Sarah Serievic

Pour la Saint Valentin, une approche de l'amour avec Sarah Sérievic

LE FIGARO. - Les personnes que vous recevez ont-elles des difficultés concernant leur authenticité dans leurs relations amoureuses ? 
Sarah SERIEVIC. - Je dirais d’abord que l’amour, c’est le plus haut niveau de l’être. Il est donc authentique par définition. Et ce n’est pas à confondre avec la dépendance amoureuse, qui relève davantage de l’exaltation, ce qui amène à sublimer son (ou sa) partenaire. Et inévitablement, l’idéalisation retombe peu à peu, le carrosse devient citrouille. On avait bien perçu, par exemple, que l’autre n’était pas à l’écoute de nos besoins et on a pris le pli de les refouler ou de les masquer. On a donc installé l’habitude de maquiller ses ressentis et de ne voir chez l’autre que ce qui continue de nous subjuguer. Tels sont les subterfuges inconscients générés par la peur de décevoir qui nous entraînent dans une relation inauthentique. Cela n’a donc rien à voir avec le fait de dire ou ne pas dire ? Mais l’amour authentique, ce n’est nullement «tout dire»! Il est même important de garder le mystère, en restant pleinement conscient de ce qui reste secret. À ne pas confondre avec le mensonge à soi-même. J’ai vu, par exemple, que mon partenaire a tendance à prendre des décisions sans m’en avertir. Mais plutôt que de me demander franchement, de moi à moi-même : « En quoi je collabore à ça?», je fais l’autruche ou je passe mon temps à me plaindre. L’amour est en cela l’occasion privilégiée de visiter ces parts de soi qui participent à ce qui ne nous convient pas. Et le couple est une merveilleuse opportunité d’accéder à un regard authentique sur soi, sans besoin d’un sauveur pour satisfaire nos attentes.

Comment cela se fait-il ? 

Deux attitudes sont à proscrire : la vénération (l'autre est tout pour moi) ou l’accusation (c’est à cause de lui que je souffre) pour oser prendre conscience des conditionnements qui nous mènent dans ce que j’appelle les « rôles ». En effet, en fonction de notre histoire, nous avons mis en place des manières d’exister. Ainsi, celle qui a eu un père autoritaire aura tendance à choisir un homme dominateur. Elle doit alors authentiquement se poser la question : « Est-ce que ça me convient de redevenir cette petite fille modèle qui se laisse dominer par peur de perdre l’amour ? »

Comment sortir de telles habitudes ? 

En arrivant à ce point où on doit prendre le risque de regarder le rôle qui sert d’évitement à la relation (le clown de service, le bon garçon, la sauveuse ou la femme forte). Oser parler pour sortir du faire semblant : « J’arrête de cautionner cela, ça ne fait de bien ni à moi, ni à l’autre, ni à notre relation. » Mais, je le répète, cela tient d’abord au niveau d’authenticité que l’on a avec soi-même. Rien à voir avec une posture infantile qui utilise la parole pour se plaindre, culpabiliser l’autre ou le manipuler.

L’autre n’est donc pas en cause ? 

Je pense que nous sommes des êtres magnétiques qui attirons la problématique dont nous avons besoin pour nous améliorer. Par exemple, je peux avoir été séduite par un partenaire colérique parce que je ne sais pas prendre la responsabilité de mes colères. Ce sont ces dimensions inconscientes que nous avons à observer pour sortir du reproche à l’autre et du mensonge à soi-même qui voudrait nous faire croire que l’autre a tort et qu’on a raison.


N’y aurait-il que la psychothérapie pour s’en sortir ? 
Non, pour nous rendre davantage conscients, la vie est une grande école qui peut nous faire passer à travers des crises, des maladies, des épreuves... Mais un grand voyage, la naissance d’un enfant, une rencontre importante peuvent aussi s’avérer initiatiques et transformateurs.

Sarah Serievic, psychothérapeute diplômée de l’École française de psychodrame et créatrice du Théâtre Authentique, est l’auteur de Rompre avec nos rôles, éloge d’être soi (Éditions Le Souffle d’or).

 source : Le Figaro
*****

mardi 13 février 2018

Aujourd'hui, c'est Maha Shivaratri

Maha Shivaratri est une fête hindoue célébrée chaque année en l'honneur du dieu Shiva . Il y a un Shivaratri dans chaque mois luni-solaire du calendrier hindou, la 13ème nuit / 14ème jour du mois, mais une fois par an en fin d'hiver (février / mars, ou Phalguna ) et avant l'arrivée de l'été, Maha Shivaratri signifie "la Grande Nuit de Shiva".
C'est un festival important dans l' hindouisme, ce festival est solennel et marque le souvenir de "surmonter les ténèbres et l'ignorance" dans la vie et le monde. On l'observe en se souvenant de Shiva et en chantant des prières, en jeûnant , en faisant du yoga et en méditant sur l'éthique et les vertus telles que la retenue, l'honnêteté, la non-injure, le pardon et la découverte de Shiva. Les pratiquants ardents restent éveillés toute la nuit. D'autres visitent l'un des temples de Shiva ou vont en pèlerinage à Jyotirlingams . 
C'est un ancien festival hindou dont la date d'origine est inconnue. 

source Wikipédia




La légende de cette cérémonie est mémorable. Elle nous parle d'un pauvre homme, grand dévot du Seigneur SHIVA, qui cherchait du bois de chauffage, dans une sombre forêt. Lorsque la nuit tomba, il ne retrouva pas son chemin pour rentrer chez lui. Dans la nuit il entendait le cri des tigres, ce qui l'effraya, il grimpa dans l'arbre le plus proche, pour être en sécurité en attendant le lever du soleil. Pour ne pas s'endormir, il cueillit les feuilles de l'arbre, et les laissa tomber à terre en chantant le nom de SHIVA.
Les premiers rayons de soleil apparurent, et l'homme se rendit compte que les feuilles étaient tombées sur un "SHIVA LINGA" qui se trouvait au pied de l'arbre. Ce travail inconscient, plu au Seigneur SHIVA, qui écarta les tigres et bénit ce pauvre homme.
Depuis ce jour nous disent les Puranas, cette histoire est récitée toutes les nuits de MAHASHIVARATRI.

Christophe André : “Se dépouiller permet de se rapprocher de l’essentiel“ (3)

Quel est cet « essentiel » pour vous ?
C’est l’amour du prochain, ma présence à lui. Dès lors qu’on est engagé dans une vie active, un des errements auquel on est souvent confronté est de ne pas être assez disponible aux autres. Pour moi, il va s’agir en premier lieu de mon épouse, de mes filles, de mes amis. Lorsque je rentre d’une journée de travail fatigante, que ma femme me dit que telle personne a appelé, qu’elle n’est pas en forme et que ce serait bien que je la rappelle, mon premier mouvement est de soupirer et de penser que cela me pèse. L’essentiel est que mon deuxième mouvement soit de me dire « Rappelle cette personne, elle a besoin de toi, c’est important » et que le troisième soit enfin : « Rappelle-la joyeusement. » J’aime beaucoup cette formule de Christian Bobin : « Tout ce qu’on fait en soupirant est taché de néant. » Car l’essentiel aussi est que je sois présent de tout cœur à cet appel. « Même si cela ne dure que dix minutes, fais-le à fond. » C’est la même chose lors de mes dédicaces avec mes lecteurs : chaque rencontre dure en moyenne entre 30 secondes et une minute, mais j’y suis totalement présent. J’écoute de toutes mes forces chacun et essaye de rentrer dans ce qu’il me dit pour lui donner des conseils ou des paroles d’encouragement. Après deux heures, je suis épuisé. C’est pour cela que je ne fais jamais de dédicace avant mes conférences. Le carême peut ainsi être un moment où l’on prend conscience de ce que l’on reçoit pour donner davantage aux autres. Il m’enjoint à me recadrer sur ce qui est important à mes yeux, à me dire : « Attache-toi à être plus attentif aux autres, au-delà de ta fatigue. » Et je crois que cela me fait du bien.
Et cela vous rend heureux ?
Dans le bonheur, il y a deux voies : celle de l’hédonisme, ce qui me fait plaisir, et celle de l’eudémonisme, ce qui a du sens pour moi. Rappeler telle ou telle personne en souffrance ne va pas me faire plaisir, mais a posteriori je me dirai que j’ai fait ce que j’avais à faire, et que je l’aurais fait de mon mieux, avec toutes les forces de l’instant. C’est ça qui me rendra heureux.


source : La Vie

lundi 12 février 2018

Christophe André : “Se dépouiller permet de se rapprocher de l’essentiel“ (2)

Comment être attentif à soi sans être autocentré ?
Par beaucoup d’aspects, notre société a tendance à nous rendre trop narcissiques. Les messages diffusés incitent les personnes à s’occuper d’elles, à être centrées sur elles, à se comparer aux autres pour rester dans la course. Ils leur susurrent aussi qu’elles ont beaucoup d’importance, de droits, que tout leur est dû. Or plus on est centré sur soi, sur ce que l’on nous doit, au détriment de ce que nous devons aux autres, plus on est malheureux. Sauf que la vie intérieure, ce n’est pas ça. L’intérêt pour soi relève plutôt de l’autobienveillance. Quand je suis en échec, plutôt que de tomber dans la dévalorisation de moi-même et l’autocritique, je gagne à me traiter comme je -traiterais mon meilleur ami. Je ne vais pas lui dire qu’il est minable et qu’il doit renoncer, mais : « Tu es malheureux, prends soin de toi, restaure-toi, essaie de comprendre ce qu’il s’est passé… » Ce regard sur soi bienveillant et exigeant amène à la prise de conscience que tout seul on n’est rien. La grande illusion serait en effet d’attribuer nos réussites à notre unique personne. Le déficit de vie intérieure peut ainsi aboutir à des égarements, où l’on va soit se surévaluer et négliger les autres, soit s’épuiser dans un altruisme névrotique et ne pas assez s’écouter. La fréquentation régulière de soi permet en somme de savoir où l’on en est dans sa vie.
Quels sont les signaux d’alarme ?
La culpabilité, l’inconfort émotionnel, la tristesse latente… Soit je me plonge en dedans de moi et m’interroge en profondeur sur ces maux et ma conduite de vie, soit je fuis davantage à l’extérieur, en buvant davantage, en me noyant dans le travail, en m’engouffrant dans les cinémas, en m’occupant toujours plus des autres… Prendre soin de sa vie intérieure permet de se maintenir en bon état de marche et d’être assez lucide sur ce que nous sommes.
Pour les chrétiens, le carême peut être le moment de s’interroger sur leur manière de vivre et d’agir, en cohérence avec leur foi. 
Cette entrée dans le carême 
est-elle justement un moment propice ?
Je vois cette période de 40 jours comme l’occasion d’un réajustement de nos valeurs, de notre foi, de nos convictions, dont le quotidien nous éloigne régulièrement. Le carême est l’occasion de faire un bilan assez prolongé, de resserrer un peu les boulons, de faire le choix de certaines contraintes fécondes ou résolutions, sans aller jusqu’à la souffrance. Pour les chrétiens, cela peut être le moment de s’interroger sur leur manière de vivre et d’agir, en cohérence avec leur foi. De prendre conscience de leurs petites et grandes dépendances qui les détournent de choses plus fondamentales.
Justement, peut-on être chrétien 
et passer à côté de sa vie intérieure ?
Si on n’est pas attentif à la cultiver, on passe à côté d’une partie du trésor de la foi. Un chrétien peut avoir de bonnes règles de vie et appartenir à une communauté tout en négligeant une vie de prière personnelle, laquelle ne consiste pas seulement à répéter des formules consacrées. À mes yeux, la prière doit commencer par un acte de présence à soi : on se pose, on prend conscience de l’état dans lequel on se trouve. Le carême peut être l’occasion de prier différemment : pas seulement plus, mais mieux, en essayant de voir plus fortement en nous ce qui nous éloigne de nos idéaux, mais aussi en prenant conscience de toutes les grâces reçues. Donnons-nous le temps, à l’exemple des moines et des moniales, qui, avant ou après les offices, goûtent au recueillement et à l’oraison. Cet ajustement entre vie intérieure et rituels nous mènera à une rencontre plus sincère et dépouillée à Dieu.
Et vous, comment vivez-vous le carême ?
Cela ne fait pas longtemps que ces questions m’interpellent. Je suis un chrétien sur le tard. Né dans une famille laïcarde et communiste, je suis arrivé à la religion par mon épouse et sa famille. Depuis quelques années, je les interroge sur la façon dont ils vivent le carême et j’essaie de m’y appliquer, très simplement. Cette année, par exemple, je vais essayer de ne pas boire d’alcool. J’espère que je ne serai pas invité chez des copains trop insistants ! Parfois aussi, j’ai la flemme de donner de l’argent aux SDF, mon porte-monnaie est au fond de mon sac, je n’ai pas envie de m’arrêter car il pleut… Alors je me dis que, durant cette période, je pourrais chaque matin mettre des pièces dans ma poche pour ne pas me dérober. Pour le chrétien que je suis, qui n’est pas dans une prière quotidienne, le carême pourra être l’occasion de prier quelques minutes après mon temps de méditation quotidien, auquel je suis pour le coup assidu. Ces 40 jours sont l’occasion de rectifier le cap et d’être, années après années, je l’espère, bonifié par les carêmes successifs. C’est d’ailleurs la découverte de la méditation qui m’a rapproché de la prière et c’est le jeûne laïc que je pratique qui m’a amené à mieux comprendre le jeûne chrétien : au-delà de la privation, il nous faire prendre conscience de notre chance de pouvoir nous nourrir chaque jour, mais nous aide aussi à nous dépouiller pour nous rapprocher de l’essentiel.
Pour le chrétien que je suis, qui n’est pas dans une prière quotidienne, le carême pourra être l’occasion de prier quelques minutes après mon temps de méditation quotidien.

*****

dimanche 11 février 2018

Christophe André : “Se dépouiller permet de se rapprocher de l’essentiel“ (1)

Expert en exploration de la vie intérieure, Christophe André nous donne 
ses conseils pour ne pas passer à côté de l’essentiel.





Depuis des décennies, Christophe André, médecin psychiatre, scrute les profondeurs psychiques de ses contemporains. Alors que le carême arrive bientôt, il nous livre ses réflexions et ses conseils sur la vie intérieure, traçant un trait d’union entre le corps, l’esprit et l’âme… plongeant dans l’essentiel de nos existences assoiffées de spiritualité.
Comment définir la vie intérieure ?
La vie intérieure est ce qui constitue notre personnalité intime et renvoie à tout ce qui se passe en nous en termes de pensées, d’émotions, de ressentis corporels, que nous en ayons conscience ou non.
Cette vie de l’intime relève-t-elle 
du psychologique, du spirituel… ?
Elle est de l’ordre de la globalité corps-esprit-âme, et c’est ce qui contribue à la rendre mystérieuse, attirante et passionnante. La question est de savoir si nous y prêtons attention et si nous la cultivons, ou bien si nous sommes sans cesse guidés par des sollicitations et des objectifs extérieurs, dans un monde qui nous pousse à faire de plus en plus de choses, de plus en plus rapidement et de façon superficielle. Beaucoup de personnes ne se penchent pas vers leur intériorité, soit par choix, soit pas peur, soit par négligence. Jusqu’au jour où leur vie intérieure va faire irruption, sous forme de bouffées émotionnelles douloureuses, de spleen, de malaises existentiels flous… Mais la vie intérieure peut aussi se révéler au travers de moments de grâce surgissant tout à coup, durant lesquels on va se sentir heureux -au-delà de ce qui est explicable ou prévisible : vertige existentiel face à la voûte étoilée, émotion infinie devant un nouveau-né, bouleversement esthétique dû à une œuvre d’art. C’est là qu’on voit bien que notre vie intérieure ne peut se réduire à une analyse rationnelle : elle nous fait alors prendre conscience d’une réalité mystérieuse, mais réelle, relevant du plus grand que soi.
Cette vie bruissant en nous nous rappelle que nous ne sommes pas des robots ni des amas de molécules.
La descente à l’intérieur de soi mène-t-elle forcément à la transcendance ?
Je crois en tout cas qu’elle nous y ouvre assez naturellement. Il y a une façon très matérialiste et concrète d’aborder la vie intérieure chez certains scientifiques, qui comptabilisent par exemple le nombre moyen de pensées par jour. Aborder la vie intérieure ainsi ne révèle pas sa richesse et son étendue. Cette vie bruissant en nous nous rappelle que nous ne sommes pas des robots ni des amas de molécules qui ne font que répondre aux sollicitations de l’environnement. L’homme héberge des zones de mystère, d’irrationalité. Et lorsqu’il descend en lui, il se retrouve bien souvent aspiré dans des dimensions beaucoup plus vastes que son simple quotidien, le poussant à se poser des questions existentielles et métaphysiques : qui suis-je ? D’où viens-je ? Pourquoi suis-je là ?
L’expression « cultiver sa vie intérieure » 
signifie-t-elle que cette dernière aurait une amplitude 
plus ou moins vaste selon les personnes ?
Je vois dans le terme « cultiver » l’image de l’entretien d’un jardin. S’intéresser à sa vie intérieure ne revient pas à se contenter de quelques minutes d’introspection dans le métro. Cela ressemble plus à l’art du jardinage, qui nécessite des efforts variés et réguliers : s’octroyer de vraies plages de lecture, prendre un temps avant ou après la prière afin de faire un petit bilan de son état personnel, s’offrir des temps de recueillement dans la journée, en s’arrêtant par exemple quelques minutes dans une église après le déjeuner… Ces efforts sont comparables au jardinage : si je ne le fais pas, tout et n’importe quoi va pousser, il n’y aura plus d’endroits pour passer. Cultiver sa vie intérieure, c’est de temps en temps nettoyer, racler, couper, planter, tracer des voies, de façon à ce que le passage soit un peu plus facile. Et plus je pratiquerai, plus il me sera facile d’y avoir des repères, de m’y retrouver.
Plus on est centré sur soi, sur ce que l’on nous doit, au détriment de ce que nous devons aux autres, plus on est malheureux.
.....
Source : La Vie