jeudi 30 juin 2011

Denise Desjardins et le bonheur d'être soi-même

De Swâmi Prajnânpad à Mâ Ananda Mâyi, à Swâmi Ramdas et à sa Sainteté Karmapa, Denise Desjardins, qui fut la compagne et la collaboratrice d’Arnaud Desjardins, a vécu auprès des plus grands maîtres du siècle dernier. Ces gourous avaient alors attiré à eux un certain nombre d’Occidentaux. Estimant avoir beaucoup reçu, Denise Desjardins ne cesse de transmettre ce qu’elle a compris et assimilé. Que ce soit par la parole, l’écriture ou la pratique des lyings, une méthode de connaissance de soi mise au point par Swâmi Prajnânpad. Cette femme exceptionnelle, âgée de 80 ans, n’aime guère parler d’elle. À l’occasion de la sortie de son dernier livre, « Le bonheur d’être soi-même », elle a pourtant accepté, malgré ses multiples occupations, de nous recevoir dans sa demeure d’Uzès.


Votre dernier livre, « Le bonheur d’être soi-même » est accessible et stimulant. Qu’est-ce qui vous a donné envie de l’écrire et comment l’avez-vous écrit?


Denise Desjardins : Je l’ai écrit pour insister sur un point essentiel de l’enseignement de Swâmi Prajnânpad : le nettoyage de l’inconscient (chitta chudi). Selon lui, la vérité est en nous, inaltérable, donc le bonheur. Mais pour l’atteindre, nous devons nous désidentifier des notions inculquées dès l’enfance. Il nous faut examiner nos croyances, nos convictions et nos jugements. Et pouvoir les remettre en question. Si l’on est d’accord avec ce qui nous a été enseigné, on le garde. Dans le cas contraire, on le rejette car notre désaccord crée un conflit qui nous barre l’accès à notre propre nature. Swâmiji parlait de « se déséduquer ». Dans « La nuit obscure », Saint Jean de La Croix ne dit pas autre chose lorsqu’il parle d’« une forte lessive » comprenant les domaines émotionnels, intellectuels et les « habitudes imparfaites ».
J’ai mis un an à écrire « Le bonheur d’être soi-même ». Écrire fait partie de ce que Swâmi Prajnânpad appelait « l’expression de l’être ». À l’époque où j’avais arrêté de peindre, il m’avait dit : « You can write » (« vous pouvez écrire »).


Pourriez-vous définir ce soi-même qui fait le titre de votre livre ?


D. D. : Être soi-même, c’est rejoindre une zone intérieure de tranquillité et d’énergie, mais c’est aussi donner libre cours à l’expression de son être et de ses désirs les plus profonds quels qu’ils soient. Ce qui ne veut pas dire se laisser aller à la paresse, ni faire n’importe quoi, en répondant à ses désirs les plus excessifs, sous prétexte de spontanéité. Conservons toujours un garde-fou : ne nuire ni à autrui, ni à soi-même. Nous retrouvons alors une liberté, une aisance, une spontanéité qui constituent notre être véritable. Pour y parvenir, nous avons à nous délivrer de « soixante-dix mille voiles » disait le grand soufi Ghazâlî (XIème siècle) !


Suffit-il pour s’en délivrer de lâcher prise comme vous le montrez par plusieurs exemples tirés de votre vie où, à chaque fois que vous lâchez prise, le destin vous vient en aide ?


D. D. : Le lâcher prise est une attitude intérieure, qui ne nous empêche pas de nous opposer si nous ne trouvons pas juste ce qui nous est demandé. Il ne s’agit pas de se laisser manipuler. Lâcher prise, c’est changer de niveau, s’intérioriser. Mais on ne peut le faire tant que l’ego décide constamment et veut toujours être le plus fort. « Moi j’ai raison et l’autre a tort » dit l’ego. On rejette la responsabilité sur ses parents, la société, le monde. Si l’on n’essaie pas d’élargir l’ego en s’ouvrant aux autres et en les comprenant sans les juger, l’ascèse reste incomplète. L’ego est un mécanisme protecteur qui se forme dès les premières peurs. L’enfant qui reçoit des coups durs se blinde pour se protéger et ne pas souffrir. Et puis, il oublie. Ce blindage l’empêche, une fois adulte, d’être lui-même et d’avoir un contact direct avec les êtres et l’environnement. Il faut donc s’en délivrer. Au cas où on n’y arrive pas seul, on peut avoir recours à une thérapie.


À supposer que nous nous attaquions seuls à nos blindages, quels conseils nous donneriez-vous ?


D. D. : Premièrement, retrouver l’origine de son principal « nœud du cœur » pour s’en libérer. Puis, cultiver son attention et sa vigilance par tous les moyens possibles : yoga, méditation, différents exercices appartenant aux différentes traditions. On peut aussi se programmer comme on le fait pour se réveiller le matin en visualisant certains moments de sa journée sur lesquels on projette la nécessité d’une vigilance particulière. Je conseille parfois d’acheter une montre qui sonne. Au cours de sa visualisation, on se dit qu’à ce moment-là de la journée, on « changera de chaîne » : on passera de la chaîne extérieure à la chaîne intérieure, tout en gardant la conscience de ce qui se passe à l’extérieur.
Et enfin, ne pas se décourager. On va échouer dix fois ou plus, mais si l’on est tenace, çela finira bien par marcher. Pour développer sa ténacité, on décide à la fin d’une méditation de ne pas lâcher le morceau. Ne culpabilisons surtout pas en cas d’oubli. Ne cherchons d’ailleurs pas à en faire trop. Certains décident dans un bel élan d’enthousiasme de méditer deux heures par jour. N’y arrivant pas, ils laissent tout tomber.


Qu’est-ce que les nœuds du cœur ?


D. D. : Je traduis souvent nœuds du cœur (Hridayat Granthi) par conditionnements. Nous sommes conditionnés par notre hérédité, notre éducation, nos traumatismes éventuels finissent par former un nœud. C’est une sorte d’emprise sur notre liberté intérieure. Chacun d’entre nous a son nœud spécifique qu’il s’agit de découvrir. Swâmi Prajnânpad parlait de « remettre droit l’ego tordu ». Le mental, les émotions et l’ego étaient pour lui trois fils qui tissaient la corde de ces nœuds émotionnels.


Avons-nous quelque chance aujourd’hui de rencontrer des maîtres tels que Mâ Ananda ou Swâmi Prajnânpad ?


D. D. : Tous les maîtres que j’ai connus ont quitté leur corps. Mais il existe sans doute en Inde des êtres, encore inconnus, qui marchent vers leur vérité intérieure. Chandra Swâmi, dans le nord de l’Inde, a beaucoup d’élèves. Un maître qui a pris le silence et répond par écrit aux questions. On dit aussi que le maître se révèle quand l’élève est prêt. Les maîtres extérieurs sont des aides destinées à la révélation du maître intérieur.
Mais attention de ne pas confondre le maître intérieur avec les messages, plus ou moins vrais, surgis de l’inconscient. On voit la différence par les résultats. Swâmi Prajnânpad nous invitait à écouter ses conseils, à les mettre en pratique, et à voir si cela marchait.


Vous dites que le but est d’être un avec l’autre. Et que, plus nous voyons l’autre différent de nous et moins nous en sommes séparés. N’est-ce pas paradoxal ?


D. D. : Au début de mes rencontres avec Swâmi Prajnânpad, il m’avait donné ce mantra : « Il est différent, elle est différente ». Cela a l’air tout bête mais si on reconnaît que l’autre est différent, on ne peut pas lui demander d’agir selon ce qui nous plaît. On ne peut pas l’obliger à nous aimer si ce n’est ni le moment, ni son inclinaison.
Plus on voit l’autre comme différent de soi et plus on quitte son propre ego. Ce qui permet une approche de ce sentiment d’unité avec toutes choses. C’est un contact de profondeur à profondeur et non d’épiderme à épiderme. Tous les êtres sont unis par leur profondeur ou par leur essence mais non par leurs surfaces, leurs personnalités toujours différentes.
Si vous avez une écoute concentrée et intense de l’autre, vous n’êtes plus égocentré. Ce qui crée un vide en vous, vide d’ego et de pensées. Ce vide a un pouvoir d’attraction sur l’autre : il sent qu’il peut aller vers vous, se confier. Ensuite, vous essayez de le comprendre, et même de le comprendre sans le comprendre : « Il m’a blessé mais c’est parce qu’il souffre ». Cette façon d’approcher l’autre est une préparation au sentiment d’unité qui peut surgir à tout moment.


Du lying vous dites qu’il vise à purifier l’émotion pour ouvrir le cœur à la réalité. Le lying est-il fait pour tout le monde ? L’âge peut il constituer une limite ?


D. D. : Il n’y a pas de limite d’âge mais cette méthode doit s’insérer dans une démarche intérieure. C’en est le tiers. Le lying s’avère nécessaire quand, après avoir essayé de comprendre ses comportements, on tombe sur « un os » incompréhensible : on reçoit des messages qui nous empêchent d’être nous-mêmes et de mettre en pratique l’acceptation, base de plusieurs enseignements. Si l’on ne peut pas voir véritablement ce qui est, c’est que l’on n’a pas pu accepter ce qui a été dans un passé plus ou moins lointain.
Quand on réalise que les empêchements à être heureux viennent d’une origine lointaine ignorée, de l’enfance ou d’un scénario antérieur, il s’agit de la retrouver, de bien comprendre ce qui s’est passé, de l’exprimer, et de se désidentifier de l’enfant qu’on a été ou du personnage du scénario. C’est difficile parce que nous avons des habitudes ancrées en nous (vâsanâs) qui sont notre façon de penser depuis notre enfance. Il est malaisé de se débarrasser des habitudes physiques mais encore plus des habitudes mentales du fait qu’elles nous rassurent quant à la pérennité de notre moi.
En pratiquant le fait de voir la différence, on se rapproche du but qui est de vivre dans l’équanimité, en commençant par dépasser le « j’aime/je n’aime pas », afin de parvenir à voir, sans aucun jugement, le caractère unique des êtres et des choses. Pour nous donner une approche du Brahman, Swâmiji disait : « Chaque chose est unique, chaque chose est neutre, chaque chose est Brahman ».


Vous reliez erreur et tension. Vous dites que les tensions nous empêchent d’être en contact avec la conscience. Donc, il faut se relaxer. Quelles pratiques nous conseillez-vous ?


D. D. : La tension provient le plus souvent d’une émotion, en général la peur, ou d’un conflit intérieur. On pense : « Je dois faire ceci mais j’ai envie de faire cela ». Swâmiji disait lorsqu’il évoquait l’état ultime : « Une parfaite détente de l’esprit, du corps et du cœur ».
La détente du cœur consiste à le délivrer de ses encombrements, ces nœuds dont je vous ai parlé. Pour cela le lying, ou bien d’autres thérapies sont nécessaires.
Ce qui empêche d’être détendu dans l’instant, c’est le refus des situations. Il s’agit de dire oui, d’accepter ce qui vient à nous en nous disant : « si c’est venu, c’est pour nous ». Même si c’est douloureux. C’est un oui intérieur, franc et massif, même si nous disons non à l’interlocuteur. La détente du cœur est liée à une acceptation active. Le cœur est alors ouvert à l’autre et à la situation. La non-adhésion à la situation telle qu’elle est crée le conflit et la souffrance. L’adhésion provoque la détente. « La tactique du oui » mène à la tranquillité intérieure qui permet d’être soi-même.


Quels sont les principaux obstacles sur ce chemin vers la détente et l’ouverture ?


D. D. : La culpabilité en est un. Elle est parfaitement inutile. Ce qu’on a fait dans le passé, on ne l’aurait pas fait si on avait pu agir autrement. La culpabilité est nocive parce que, jointe à l’auto-punition, elle nous empêche d’être heureux et de mettre vraiment en pratique un enseignement. Elle déforme nos rapports sentimentaux, amicaux et professionnels, du fait que nous sommes inconsciemment convaincus d’êtres indignes de ce qui nous est proposé.
L’orgueil et la vanité en sont un autre. Un des pères du désert, Évagre le Pontique, disait que l’une des plus grandes difficultés sur le chemin intérieur était d’échapper à l’orgueil.
Troisième obstacle : les désirs. Certaines traditions parlent de les supprimer. Swâmi Prajnânpad conseillait plutôt d’essayer de les combler pour arriver à une liberté relative. Une fois qu’ils sont à peu près comblés, on accède au désir essentiel. Lorsque Swâmiji me demanda : « Qu’est-ce que vous voulez ? », je voulais répondre « être libérée ». Mais l’honnêteté m’obligeait à reconnaître que j’avais encore de multiples désirs : être aimée, m’exprimer, écrire. Une fois comblé, le désir tombe. À condition qu’il soit accompli consciemment.
Il ne s’agit pas de l’accomplir en pensant : « Ah ! Je ne devrais pas ».
C’est alors que l’on peut devenir le bhokta, celui qui apprécie ce qu’il vit. Apprécier permet aux choses de se transformer peu à peu parce que, en vérité, aucun désir ne peut être réalisé complètement. La nature du désir est absolue. Or, nos désirs concernent une société et des êtres situés dans le relatif.
On n’arrive pas à abandonner ses désirs par une volonté égotique mais après avoir vu que ce que nous avons essayé nous a apporté une joie si souvent suivie de déception. Comprenant que la dualité est la loi de l’existence, on s’en sert le mieux possible. Lorsque survient le flux de l’agérable, on essaye de le vivre le plus consciemment possible et on se prépare ainsi au reflux, c’est-à-dire aux coups durs qui sont l’occasion d’un repli sur soi, d’une interrogation sur notre responsabilité dans cette difficulté. Un processus comparable au mouvement des marées.


Vous dites que connaître sa vérité intérieure n’a pas de prix. Cela vous conduit-il à jouir maintenant en permanence du bonheur d’être vous-même ?


D. D. : Je ne suis pas partie pour l’Inde à la recherche d’un super-psychanalyste mais dans un but de connaissance de moi-même. J’ai payé parfois très cher : l’introspection en profondeur a été très douloureuse. Mais je ne regrette rien, j’ai payé le prix de mon évolution. J’ai retrouvé l’origine de mes révoltes, de mes ressentiments, des difficultés relationnelles qui m’empêchaient d’entrer en contact avec ma vérité essentielle. Mes efforts ont abouti à une liberté vis à vis des réactions émotionnelles comme vis à vis des désirs les plus dérangeants.
Bien sûr, je désire que mes enfants vivent dans l’harmonie, que mes éventuels lecteurs trouvent quelque éclairage dans mes ouvrages. Il me reste le désir de transmettre ce que j’ai reçu. Bien que je ne puisse prétendre transmettre la grandeur et la qualité de ce que j’ai reçu, j’essaie d’être le canal le plus pur, le plus exact des vérités que j’ai comprises, assimilées et qui m’ont aidée à me rapprocher de plus en plus d’une tranquillité et de ce que Swâmi Prajnânpad appelait une aisance intérieure. Plusieurs traditions philosophiques considèrent d’ailleurs cette aisance comme le but de l’existence et l’atteinte du bonheur.

lundi 27 juin 2011

Rencontre avec le Dalai-Lama


À partir de 1959, le dalaï-lama parcourt le monde à la recherche d'appuis pour la libération du Tibet. En 1980, après plus de 20 ans vécu en exil, il visite le Canada. Le voyage ne revêt pas de caractère officiel, car aucune rencontre avec des membres du gouvernement canadien n'est prévue.
Au cours de son voyage, le dalaï-lama, accorde sa première entrevue canadienne à l'animateur de l'émission Man Alive, Roy Bonisteel. En février 1981, Radio-Canada diffuse une traduction de l'entretien, où le moine bouddhiste parle de spiritualité, de compassion et de paix.

Tenzin Gyatso est né en 1935 dans un petit village paysan du Tibet. À l'âge de 2 ans, il est reconnu comme candidat potentiel à la réincarnation physique du Bouddha de la compassion. En 1940, après une série de rituels et d'examens religieux, le petit Tenzin devient officiellement le 14e dalaï-lama.

En 1959, le dalaï-lama fuit le Tibet pour échapper aux autorités chinoises. Il traverse la chaîne de l'Himalaya avec sa suite pour atteindre l'Inde. Installé à Dharamsala, dans le nord du pays, il devient le chef du gouvernement tibétain en exil et proclame, en 1963, la première Constitution tibétaine.

dimanche 26 juin 2011

L'éveil à la Vérité par Alexandre Jollien

Saint Augustin prononce, dans ses Confessions, cette célèbre phrase : « Ne t’égare pas au-dehors, rentre en toi-même, c’est dans l’homme intérieur qu’habite la vérité. » Voilà qui convertit ma tendance quasi congénitale à importer de l’extérieur les opinions, la joie, le réconfort. Augustin a conscience que le but de l’effort humain, c’est le bonheur. En ce sens, il s’inscrit dans la tradition et rejoint Aristote. Il ajoute, parlant à Dieu : « Tu nous as faits pour Toi, Seigneur, et notre cœur est sans repos jusqu'à ce qu'il repose en Toi. » Ce qui me plaît chez cette âme fougueuse, c’est cet élan vers le repos. Sans concession, il chemine et progresse. Car la félicité ultime ne peut se recevoir dans l’illusion de l’extériorité. Autant dire dès lors que la vérité libère, qu’elle nous délivre de nos vaines aspirations, de la poursuite des faux biens. Dans leurs voies, nous croyons saisir le bonheur et plus nous voulons mettre la main dessus, plus il nous échappe.


La suite, nous la connaissons, c’est l’insatisfaction, l’aliénation, bref, toutes ces chaînes qui nous meurtrissent. Augustin dessine un chemin à l’écart de ces travers, travers qu’il a lui-même empruntés non sans amertume. Il sait de quoi il parle. Le suivre, c’est peut-être ne jamais s’installer hors de soi et prendre pour guide la vérité. Mais comment l’accueillir ? Comment prétendre en faire sa compagne ? Certes, il y a deux extrêmes, celui qui préfère crever plutôt que d’avoir tort et la girouette, celui qui raisonne au gré des modes et qui mendie à l’extérieur quelques convictions qu’il peine à entrevoir en lui. Comment éviter à la fois le subjectivisme total et le dogmatisme le plus frénétique ? Précisément, peut-être, en rejoignant l’intériorité, en abandonnant peu à peu la surface, en plongeant carrément au fond de son être, c’est un peu comme les sous-marins qui quittent l’eau tumultueuse des surfaces pour gagner les bas-fonds inaccessibles aux tempêtes. Pour Augustin, c’est y rencontrer le maître intérieur, l’écouter, engager un dialogue avec lui. Dialogue qui n’est que pure écoute. On est loin des débats, des inutiles discussions. Vivre dans les profondeurs, c’est éviter tout bavardage. Ainsi, quand l’émotion me gagne, lorsque par exemple la crainte me prend, je peux trouver l’audace d’entrer dans le sous-marin pour séjourner un peu plus bas, et prêter une oreille attentive aux murmures silencieux. Y a-t-il encore de la peur tout au fond ? Quel conseil se lève ? Descendre, c’est aussi désobéir un peu aux désirs qui agitent la surface pour rejoindre l’aspiration première.



Certes, bien des fois, je fais la sourde oreille. Et le maître intérieur aurait beau hurler, je ne l’entendrais guère. Augustin aurait-il vécu cette expérience lorsqu’il écrit : « L’âme donne un ordre au corps et il lui obéit. L’âme se donne des ordres à elle-même et il y a des résistances. » Le fils de sainte Monique m’invite donc à une déso­béissance intime pour rejoindre constamment un appel plus intérieur encore. La discrétion du maître intérieur m’a bien souvent fait peur. J’aurais plus d’une fois souhaité des indications, une ligne de conduite précise, des conseils clairs et nets.


Aujourd’hui, me plaît que le maître intérieur suggère plus qu’il ne somme, chuchote plus qu’il ne crie. Tout l’art est de l’écouter et de prudemment faire la part des choses. Ce puissant guide, je ne l’ai jamais vu en face, parfois je prends mes souhaits les plus égotiques comme ses encouragements. Une fois de plus, il faut savoir se taire, faire silence pour que la parole libératrice se lève. Si je ne parviens pas à percevoir cette voix qui parle en moi, comment pourrais-je vraiment prétendre entrer en communion avec l’autre ? Comment pourrais-je me prévaloir de rester disponible à la vérité ?

samedi 25 juin 2011

Les bienfaits du massage...

Le toucher est primordial et offre un échange silencieux entre les êtres. Cela dépend de la posture de la personne !

vendredi 24 juin 2011

Un cerisier a poussé... avec Christian Bobin

Christian Bobin : “Pour moi la lecture et l’écriture sont inséparable. La racine commune c’est une grande patience, une grande attente de quelque chose qu’on ne connait pas…”

Christian Bobin est né en 1951 au Creusot. Après des études de philosophie, il a exercé divers métiers, dans des bibliothèques, des musées, des librairies… Il est l’auteur de très nombreux ouvrages dont les titres s’éclairent les uns les autres comme les fragments d’un puzzle. Entre autres : Souveraineté du vide, Le Très-Bas, La part manquante, La plus que vive, La présence pure, et Une bibliothèque de nuages.
Son dernier livre, Les ruines du ciel, aux éditions Gallimard.



mercredi 22 juin 2011

Rencontre entre Matthieu Ricard et David Servan-Schreiber


David Servan-Schreiber: «Il faut s’accrocher jusqu’au bout»

RENCONTRE | Sans pathos, avec une sérénité socratique, le neuropsychiatre, auteur du best-seller Anticancer, parle de son combat contre la maladie qui le rattrape


© BOUET/SIPA/DUKAS | David Servan-Schreiber, photographié en 2004 à Paris dans l’appartement familial, en compagnie de Titus son chat abyssin

Eve Roger, Le Nouvel Observateur | 18.06.2011 | 00:01

Rendez-vous à 18 heures dans l’appartement familial des Servan-Schreiber, à Neuilly. Après quelques minutes d’attente, David entre dans le petit salon où se déroulera l’interview, accompagné de ses deux frères, Emile et Franklin. Malgré sa jambe gauche paralysée, le neuropsychiatre parvient à avancer. Franklin, derrière lui, soulève la jambe de son frère avec sa propre jambe. Belle image que ce ballet fraternel, deux hommes au même regard bleu intense, soudés comme des siamois. David Servan-Schreiber, pantalon beige, chemise et pull bleu clair, s’installe dans un fauteuil, le bras gauche immobilisé dans une écharpe. Près de lui, Emile et Franklin, ainsi que Catherine, son attachée de presse et amie depuis la publication de Guérir, en 2003.
Matthieu Ricard, moine bouddhiste et écrivain, habite au Népal dans l’Himalaya. Ce jour-là, il profite de son séjour parisien pour venir saluer David Servan-Schreiber, son ami depuis dix ans. Tous deux de formation scientifique, ils partagent la conviction que la méditation a des effets positifs sur la santé mentale et physique.
Comment allez-vous aujourd’hui? Comment vous sentez-vous?
(David Servan-Schreiber parle en chuchotant, très lentement, au rythme du stylo de l’intervieweuse sur le bloc-notes.) Je me sens bien. Je suis content d’être là, avec vous, et d’avoir cet entretien, avec le soutien de Catherine.
Comment a évolué votre état de santé depuis un an?
Il y a un an, tout allait très bien. J’acceptais des voyages, des conférences… Je jogguais encore, je jouais au squash plusieurs fois par semaine. J’allais assez souvent me promener dans Paris avec ma femme, Gwenaëlle. On préparait une semaine de vacances ensemble, au Portugal. J’avais accepté de participer à Lisbonne à une grande conférence mondiale sur la résistance au processus de vieillissement. J’y suis allé seul finalement et, pendant trois jours, j’ai pensé à la mort. C’était une espèce de séance méditative qui m’a fait du bien.
Vous pensiez à votre propre mort? Existe-t-il dans ce cas-là des pensées qui rassurent ou qui consolent?
La première idée qui console, c’est qu’il n’y a rien d’injuste dans la mort. Dans mon cas, la seule différence, c’est le moment où cela arrive, pas le fait que cela arrive ( ndlr: il a fêté ses 50 ans en avril ). La mort fait partie du processus de vie, tout le monde y passe. En soi, c’est très rassurant. On n’est pas détaché du bateau. Ce n’est pas comme si quelqu’un disait: «Toi, tu n’as plus de carte, tu ne peux plus monter.» Ce quelqu’un dit simplement: «Ta carte s’épuise, bientôt, elle ne marchera plus. Profites-en maintenant, fais les choses importantes que tu as à faire.»
Quelles sont-elles, ces choses importantes qui restent à faire?
Déjà, dire au revoir aux gens qui sont sur le bateau et qu’on aime. Ensuite, dire pardon à ceux à qui il faut dire pardon, et s’entendre dire pardon de ceux dont on a besoin qu’ils nous disent pardon.
Vous l’avez déjà fait? Ça a marché?
Pas toujours… Je peux essayer avec Catherine si vous voulez! (Elle rit.)
Pourquoi faut-il se dire au revoir?
C’est très important, même si c’est assez lourd. Il faut prendre rendez-vous avec quelqu’un en lui disant: «J’ai des choses importantes à te dire», et le moment venu, annoncer: «Il faut que je te dise au revoir.»
Dire au revoir plusieurs fois, c’est une façon de dédramatiser ce moment?
Oui, c’est une façon de ne pas donner aux autres le sentiment qu’on les attire dans un piège. Même si c’est un peu vrai…
On ne sait pas toujours comment réagir avec une personne qui vous annonce une maladie grave. Quelles sont les paroles qui sonnent juste?
Je pense que c’est beaucoup plus facile que ce que l’on se raconte. Il faut dire des choses qui manifestent que la personne est importante pour nous, qu’on a envie d’être là pour l’accompagner. Le plus simple, c’est de mettre un bras sur son épaule et dire: «Je suis désolé d’apprendre ça, vraiment, cela me fait beaucoup de peine.» Il faut que ce soit sincère. Généralement, ça l’est.
Ces paroles-là vous consolent?
Non, on ne peut pas se consoler avec cette histoire, mais ça me rassure, oui.
Pourquoi avez-vous voulu écrire ce livre?
(On sonne à la porte d’entrée.) Le plus important dans la situation que je vis maintenant, c’est de se mettre au carré. De prendre le temps de réfléchir à certaines choses: qu’est-ce qu’on se dit? Comment on se le dit? Comment on s’y prend quand on est devant le mur? Même quand on y a réfléchi comme moi depuis longtemps, même quand on l’a enseigné comme moi, même quand on a écrit dessus comme moi, cela reste une véritable épreuve.
Cela vous aide d’y avoir réfléchi avant? 
C’est incomparable. (Entre Matthieu Ricard.) Salut, Maître! (Matthieu Ricard lui caresse l’épaule et s’installe dans une chaise à côté de lui.) Bienvenue. Tu viens d’où?
Matthieu Ricard (Chuchotant à son tour.) J’étais en Corse, et avant ça, j’étais au Népal et un peu partout. Je continue…
DSS (Reprenant.) Cela m’a aidé à ne pas me sentir pris de court, c’est déjà énorme. La première fois (sa tumeur au cerveau a été diagnostiquée en 1992, il avait 31 ans), je me suis senti très démuni, j’avais le sentiment d’être à poil dans un champ, avec des chasseurs de chaque côté, prêts à tirer. (Il se tourne vers Matthieu Ricard.) Ce n’est pas une image très bouddhique. Aujourd’hui, je suis à poil dans un champ avec des tireurs de chaque côté, mais je suis plus préparé. Cela fait longtemps que je savais que ça allait arriver. Et puis j’ai accompagné des amis à travers le champ.
Bernard Giraudeau, par exemple?
Je l’ai accompagné, mais pas totalement. A la fin, il était trop loin. J’étais moi-même malade, c’était trop compliqué de garder le lien. Il y en a eu d’autres, mais il ne faut pas trop faire de pathos non plus et transformer cela en séances de Grand-Guignol!
Votre dernier livre est aussi une défense de votre méthode «Anticancer» qui insiste, à côté des traitements conventionnels, sur l’importance de l’alimentation, de l’exercice physique et du contrôle du stress dans la lutte contre la maladie…
Je ne voudrais pas que ce qui m’arrive jette un doute sur ma méthode. Je suis censé être Monsieur Anticancer qui fait tout bien – ce qui est vrai d’ailleurs –, et paf!, c’est moi qui fais une rechute. Les gens peuvent se dire: «Si même lui, il n’y arrive pas, comment est-ce que moi, je peux faire?»
Que dites-vous à ceux qui douteraient d’«Anticancer»?
Je leur dis que c’est légitime qu’ils se posent la question. Personnellement, je n’ai aucun doute sur le fait que les méthodes d’«Anticancer» ont un impact majeur pour renforcer les défenses naturelles du corps contre cette maladie, ainsi que bien d’autres d’ailleurs. La science qui soutient ça est solide. Mais il faut savoir deux choses. La première, c’est que je n’ai jamais promis de traitement miracle. Il n’y a pas de traitement miracle contre le cancer, qui est une maladie très difficile. La deuxième, c’est qu’il ne faut surtout pas arrêter les traitements conventionnels: ils ne sont pas efficaces à 100%, mais ils sont essentiels, car ils réduisent la progression de la maladie, voire la font reculer, parfois très nettement. Et ce n’est pas parce qu’on a un copain chez qui la chimio n’a pas marché qu’on va se mettre à crier partout que la chimio ne marche pas! Je leur dis enfin qu’il faut s’accrocher jusqu’au bout parce qu’il y a des traitements qui ralentissent le processus du cancer.
Le programme «Anticancer» a-t-il ralenti la progression de votre tumeur?
Si vous me le demandez, je suis convaincu qu’«Anticancer» a joué un rôle important dans le fait que je survis au cancer depuis maintenant dix-neuf ans, alors qu’au premier diagnostic mes chances n’étaient que de six ans. Je n’ai pas fait d’étude sur 1000 personnes en double aveugle avec un contrôle placebo pour prouver que cela marche. Je ne suis qu’un cas clinique. Mais même mon cancérologue a fini par aller dans mon sens. Lors d’un rendez-vous en janvier dernier, il m’a pris par le bras et m’a dit: «Ecoutez David, tout ce que vous faites à côté, c’est quasi certain que ça marche. Alors, quoi que vous entendiez, quoi qu’on vous dise, ne lâchez pas.» J’étais très fier.
Avez-vous des regrets au sujet de votre mode de vie? 
Moi, je suis passé à côté d’«Anticancer». J’ai vraiment cru que manger comme il fallait – du curcuma, des oignons… – m’autorisait à être moins vigilant sur le stress dans ma vie. Je pensais que quinze minutes de yoga et de méditation tous les matins suffisaient. Mais cela ne contrebalance pas le fait que parcourir trois villes européennes dans la même journée, avec une conférence à chaque fois, c’était trop. Je pense aujourd’hui qu’il faut commencer par maîtriser les sources incessantes de stress.
Vous avez des regrets?
Non.
C’est paradoxal…
Je dirais… ambivalent.
En quoi ce livre vous aide-t-il, vous porte-t-il?
Je suis mieux depuis que j’ai recommencé à écrire. Ecrire engage un processus incroyable: il transforme une expérience personnelle difficile et douloureuse en une contribution qui, avec un peu de chance, sera universelle et chaleureuse. L’idée que mon expérience peut aider d’autres personnes me fait beaucoup de bien. Ce n’est pas gagné, mais il y a une vraie chance, je l’espère. (Il croise les doigts.)
Vous écrivez qu’il ne faut jamais baisser les bras. Quels sont vos espoirs aujourd’hui?
L’espoir se situe clairement dans la combinaison des thérapies conventionnelles et des thérapies complémentaires. Il a été prouvé que certains traitements classiques marchent d’autant mieux qu’ils sont associés à des thérapies complémentaires.
Matthieu Ricard, quand on est au pied du mur, tout près de la mort, que dit la philosophie bouddhiste?
Matthieu Ricard Comme le disait David, la mort est tellement essentielle qu’il faut s’y préparer afin que ce ne soit pas un choc. Le fait qu’un bouddhiste réfléchisse constamment à la permanence et à la mort n’a rien de morbide. C’est au contraire une façon de donner de la valeur à chaque instant qui passe. Dans un ermitage, un ermite va retourner tous les soirs son bol comme si c’était la dernière fois qu’il l’utilisait. Ce n’est pas pour s’attrister mais pour signifier que chaque moment est de l’or fondu qui coule doucement.
Avez-vous dit au revoir à votre ami, David Servan-Schreiber?
Matthieu Ricard On peut s’épargner ça quand même, non? Je ne suis vraiment pas sentimental de ce point de vue-là. Dans le monde où je vis, dans l’Himalaya, cela se fait dans la simplicité, sans pathos! Si le moment est venu, on accompagne la personne avec des conseils spirituels, avec une présence d’amour, d’amitié. Mais faire des sentiments, «ah! mon cher ami, comme je t’ai aimé», ce n’est pas le moment! C’est le moment de trouver le calme et la sérénité. On demande notamment aux gens de ne pas pleurer, de ne pas hurler pour ne pas troubler la personne qui s’en va. Ce moment, quand il arrive, doit se faire comme un prolongement de la pratique spirituelle et pas comme un arrachement. Le monde n’est pas injuste parce que l’on meurt à un moment ou à un autre. Et puis c’est la qualité de la vie qu’on mène jusqu’au dernier moment qui compte. En fait, la mort est l’aboutissement d’une belle vie.
Vous êtes d’accord David Servan-Schreiber? On ne peut pas réussir sa mort si on n’a pas réussi sa vie?
On le peut, mais c’est plus compliqué. C’est plus simple si on a donné un sens.
On peut se dire au revoir plusieurs fois, Robert Laffont, 2011

mardi 21 juin 2011

lundi 20 juin 2011

dimanche 19 juin 2011

Aux pays des moines avec Alexandre Jollien

« Un genre de vie simple est chose difficile : il y faut beaucoup plus de réflexion et d’inventivité que n’en ont les gens, même très intelligents. » Ainsi parle Nietzsche dans le Voyageur et son ombre. Chaque année, j’ai la chance de faire quelques retraites spirituelles qui me nourrissent, me ressourcent et me recréent. À chaque fois, je suis transformé, allégé et l’existence me paraît plus simple. Cependant, force est de constater que le retour à la maison peut être plus ou moins douloureux et les effets pacifiant d’une semaine, s’essouffler à la vitesse grand V. D’où l’intérêt pour moi de tenter de bâtir un style de vie propre à ancrer dans le terreau du quotidien la pratique spirituelle.
S’il est peu de choix dans la vie, je pressens que l’on peut bâtir un tant soit peu son mode de vie. C’est pourquoi j’ai décidé d’explorer la vie monastique, modèle de régularité, exemple de rigueur au service de la grâce, école de simplicité en somme. Depuis quinze ans, je n’étais pas retourné à l’abbaye d’Hauterive. Lorsque j’ai franchi l’enceinte du monastère, j’y ai soudain croisé le même moine en train d’arroser des plantes, comme il y a quinze ans, avec le même sourire, la même délicatesse, tout entier jeté dans la contemplation dans l’action. Cette rencontre m’a d’emblée pacifié. Plus que de la routine, j’y ai vu une stabilité, une fidélité que je n’ai pas encore. La ­cloche de l’abbaye sonnait à heures fixes et je rejoignais les moines pour les sept prières du jour. Les offices sont autant de pauses, de respiration. J’y trouve un premier enseignement. Tenter d’ancrer dans la journée quelques moments de retraite, même très brefs, pour s’extirper de l’embarras et regagner l’essentiel, la paix qui nous précède. Suit le repas dans le réfectoire où je contemple dix-neuf cisterciens qui se restaurent après une journée de labeur et de prière. Je songe avec émerveillement qu’il y a des centaines d’années, en ce réfectoire, d’autres moines accomplissaient les mêmes gestes. Et voilà que je goûte déjà un peu à l’éternité. Prévenant, le jeune père abbé, dans le silence, devine et précède chacun de mes besoins. Il me tend une paille pour boire, un gobelet spécial, me coupe la nourriture. Je pense alors à une phrase de la règle de saint Augustin : « Plus vous aurez soucis du bien commun avant votre bien propre, plus vous découvrirez vos progrès. » Vivre en communauté est une école de l’amour et de la fraternité. Plus que tout, l’accueil des frères me réjouit et me nourrit. Leur joie aussi. Et je me dis que la famille pourrait d’avantage être vécue comme une communauté, une école de l’amour où l’on pratique l’obéissance et le don, où l’on s’exerce à la joie.

Saint Benoît en sa règle nous donne quelques outils : honorer tous les hommes, soulager les pauvres, consoler ceux qui souffrent, secourir ceux qui sont dans la peine, ne pas mettre sa colère à exécution, ne pas la réserver pour plus tard, ne pas abandonner la charité, ne haïr personne, ne pas aimer contester. Bref, de quoi faire… En quittant le monastère, j’emporte le souvenir lumineux du père abbé. Et je retiens surtout qu’une règle de vie peut être le terreau d’une liberté joyeuse. Le grand défi réside dans l’application de la règle, de notre règle, dans le siècle. Être une mère de famille, un ouvrier surchargé nécessite autant de force et de vertu sinon plus que pour vivre une vie de moine. Et si s’inventer une règle consistait précisément à faire excellemment son métier d’homme et de femme, à devenir chaque jour plus humain là où la vie nous donne de vivre et d’aimer.

Alexandre Jollien est un philosophe et écrivain né en 1975 à Savièse, en Suisse. Son dernier livre, le Philosophe nu, est paru au Seuil.
(Source : La Vie)

samedi 18 juin 2011

En coeur avec l'intérieur... et avec mes amis de coeur


"Vous connaissez probablement tous la parole du zen qui dit : « Si vous rencontrez le Bouddha, tuez-le ! » Je n’hésite pas à faire appel à cette parole célèbre : « Si vous rencontrez Swâmiji, tuez-le ! » Sinon, vous demeurez des esclaves et  la relation avec le gourou, aussi admirable qu’elle soit, demeure dans la dualité. Il y a moi et mon gourou – ou mon gourou et moi. Il n’y a pas un et il n’y aura jamais un. Alors, l’apparence du gourou compte exagérément. On finit par imiter même son apparence. Ce n’est pas l’apparence du gourou qui importe mais la fonction. La fonction non pas de nous amener à lui de plus en plus mais de nous ramener à nous-même de plus en plus. 
Dans beaucoup d’ashrams, toute la vie tourne autour du gourou mais, auprès de Swâmiji, tout tournait autour de chaque disciple. Je ne sais pas si cette parole qui a beaucoup de sens pour moi peut en avoir pour vous. 





La sadhana ne consiste pas à diviniser un gourou. La sadhana consiste à nous diviniser nous-même : aller jusqu’au bout de la destruction de l’ego et du mental pour trouver la Divinité en nous – pas chez Swâmi Prajnânpad. Et pourtant, vous le savez, combien de fois il m’est arrivé, en parlant de Swâmiji, de rester quelques secondes immobile et muet tant la plénitude de cette communion avec lui m’envahissait. Mais ce n’est pas au nom d’un Swâmiji extérieur que nous sommes ici. C’est au nom d’un Swâmiji vivant en moi, c’est simplement Arnaud qui, enfin, vit en moi au lieu du mental. "

ARNAUD DESJARDINS
Le vedanta et l’inconscient
À la recherche du soi III



Amour toujours

Ne perdons jamais les ailes de l'amour... La preuve avec nos amis les oiseaux !

mercredi 15 juin 2011

Disparition des abeilles... un rappel

Disparition des abeilles : une conjugaison de facteurs nuisibles


Publié le 10 mars, un nouveau rapport du PNUE (1) a rassemblé et analysé les dernières données scientifiques sur l'effondrement des colonies d'abeilles. Ont ainsi été identifiés plus d'une douzaine de facteurs pouvant être à l’origine du déclin des colonies d'abeilles observé dans de nombreuses régions du globe. Parmi ces menaces, est évoquée la migration de nouveaux types de champignons pathogènes virulents, potentiellement mortels pour les abeilles et les autres principaux insectes pollinisateurs. L'augmentation des déplacements internationaux liés à la mondialisation a favorisé ce phénomène. La possible disparition, au cours des prochaines décennies, de quelques 20 000 espèces de plantes à fleurs, dont de nombreuses espèces d'abeilles dépendent pour se nourrir, est une autre cause.
Sans surprise, l'utilisation excessive de produits chimiques dans l'agriculture est toxique pour les abeilles, d’autant plus lorsque plusieurs produits se combinent pour créer un « effet cocktail » dévastateur. A cette situation peu encourageante, les changements climatiques constituent un handicap supplémentaire, notamment en modifiant les périodes de floraison des plantes ou en déplaçant les saisons des pluies. En outre, ils pourraient également affecter la qualité et la quantité de production du nectar sur les plantes. Déjà, en janvier dernier, un rapport américain s’intéressait au syndrome d’effondrement des colonies des abeilles, dont l’apparition a entraîné des pertes de plus de 30 % par an pour le secteur apicole. Or, dépendants de notre environnement, nous le sommes aussi des services rendus par ces pollinisateurs. Selon le PNUE, sur les 100 espèces végétales qui fournissent 90 % de la production alimentaire dans le monde, plus de 70 sont pollinisées par les abeilles 
Cécile Cassier

1- Programme des Nations Unies pour l’environnement.
Plus de renseignements sur le syndrome d'effondrement

mardi 14 juin 2011

L'âme de Jules Supervielle... qui brûle en silence

L ' â m e 




Puisqu'elle tient parfois dans le bruit de la mer
Ou passe librement par le trou d'une aiguille
Aussi bien qu'elle couvre une haute montagne
Avec son tissu clair,


Puisqu'elle chante ainsi que le garçon, la fille,
Et qu'elle brille au loin aussi bien que tout près,
Tantôt bougie ou bien étoile qui grésille
Toujours sans faire exprès,


Puisqu'elle va de vous à moi, sans être vue,
Et fait en l'air son nid comme sur une plante,
Cherchons-la, sans bouger, dans cette nuit tremblante
Puisque le moindre bruit, tant qu'il dure, la tue.


(Les amis inconnus)


Jules Supervielle 1884-1960

Pour voir le tirage de carte correspondant à ce poème dans le Jeu des Miroirs


lundi 13 juin 2011

Le bonheur humain

C'est quoi le bonheur ?

Source : "6 milliards d'Autres"

Méditation et santé avec Matthieu ricard

Matthieu Ricard: "Des personnes très rationnelles reconsidèrent la méditation"
L'intérêt qu'on porte à cette discipline tient à l'engouement actuel pour les philosophies orientales, mais aussi aux travaux scientifiques récents, qui en montrent les bienfaits sur notre équilibre et notre santé. Le point avec Matthieu Ricard, moine bouddhiste, photographe, écrivain et ardent méditant.


Peut-on aujourd'hui assurer que la pratique de la méditation a des effets sur le cerveau?


La psychologie appliquée et les études cliniques ont montré de façon très précise que l'exercice de la méditation entraîne des effets bénéfiques, à court mais aussi à long terme, sur nos fonctions neuronales et, par voie de conséquence, sur notre santé. Ces recherches récentes ont concouru à donner à la méditation ses "lettres de noblesse" en Occident. Grâce à elles, des personnes très rationnelles, qui ne s'y seraient jamais intéressées, commencent à la considérer comme un élément précieux pour notre équilibre, tout comme on admet désormais les bienfaits de l'exercice physique sur la santé et la longévité.


Concrètement, quels bienfaits ont été prouvés scientifiquement?


Les expériences ont montré que vingt minutes de pratique journalière contribuent significativement à la réduction de l'anxiété, du stress, de la tendance à la colère (dont les effets néfastes sur la santé sont bien établis) et des risques de rechute en cas de dépression grave. Huit semaines de méditation, à raison de trente minutes par jour, s'accompagnent d'un renforcement notable du système immunitaire et des facultés d'attention, ainsi que d'une diminution de la tension artérielle chez les sujets hypertendus ou encore d'une accélération de la guérison de certaines maladies de peau, comme le psoriasis.


A quel rythme doit-on pratiquer pour obtenir de tels bénéfices?


Ces résultats vont de pair avec une pratique régulière. Il n'est pas nécessaire de méditer pendant très longtemps mais il faut le faire quasi quotidiennement. Si le cerveau est sollicité chaque jour, un mois environ suffit pour voir apparaître une réelle modification des fonctions neuronales. L'influence des états mentaux sur la santé, autrefois considérée comme fantaisiste, est de plus en plus considérée comme un élément clef de la recherche scientifique. Sans vouloir faire de sensationnalisme, il importe de souligner à quel point la méditation et l'"entraînement de l'esprit" peuvent changer une vie.


Pourquoi est-il si important d'améliorer notre esprit?


Parce que c'est lui qui fait l'expérience du monde et le traduit sous forme de bien-être ou de souffrance. Si nous transformons notre façon de percevoir les choses, nous transformons la qualité de notre vie. Et ce changement résulte de cet entraînement particulier de l'esprit que l'on appelle méditation. Nous trouvons normal de passer des années à apprendre à marcher, à lire, à écrire et à suivre une formation professionnelle. Nous passons des heures à nous exercer physiquement pour être en forme. Par quel mystère l'esprit échapperait-il à cette logique et pourrait-il se transformer sans le moindre effort? Chacun d'entre nous dispose du potentiel nécessaire pour s'affranchir des états mentaux qui entretiennent nos souffrances et celles des autres, pour trouver la paix intérieure et pour contribuer au bien d'autrui. Certes, il ne suffit pas de le souhaiter. Il faut s'entraîner pour cela.


Quelles sont les applications possibles de ces recherches?


Les techniques de méditation pourraient très facilement être intégrées au programme d'éducation des enfants -une sorte d'équivalent mental du cours d'éducation physique- ainsi que dans la prise en charge thérapeutique des problèmes émotionnels des adultes. Les découvertes récentes ont changé notre perception de l'évolution du cerveau au cours de la vie. Les domaines des neurosciences et de la neurosplasticité se développent. Parallèlement, les techniques d'IRM de plus en plus puissantes, d'électroencéphalogramme de plus en plus sophistiquées, conjugués à la participation de pratiquants expérimentés de la méditation, nous emmènent vers un âge d'or des "neurosciences contemplatives". Il y a beaucoup à découvrir encore.


Source : L'Express

dimanche 12 juin 2011

Découverte de Jacques Goorma


Cliquer sur le coeur



Il faut crier très fort
ou écrire vraiment


Il faut marcher très loin
et s'arrêter longtemps


Il faut le moment venu
tirer le rideau
et s'ouvrir à la nuit




Puis d'un seul mot nu
tirer le couteau
et partager le fruit.

Extrait de "Orage" de Jacques Goorma

Voir aussi l'article du blog de José Le Roy