lundi 3 mars 2025

Ne pas seulement dire, montrer.

 NE PAS SEULEMENT DIRE, MONTRER (CARNET, 2025)


Un proverbe anglo saxon dit : » tu peux amener un cheval à la rivière mais tu ne peux pas le forcer à boire"

De même, dans la fonction d’accompagnant spirituel : l’ami spirituel peut mettre une personne face à la vérité - laquelle vérité, du moins sur notre voie qui ne considère pas que voir la nature essentielle de l’esprit suffise à libérer de l’illusion, est  nécessairement relative, un « échantillon » étant entendu que le relatif réellement vu dévoile ce qui est par delà l’échantillon . 

Mais même le nez pour ainsi dire sur la vérité, la personne peut s’avérer incapable de voir.

 Elle ne le peut pas, ne le veut pas, ne le peut pas parce qu’elle ne le veut pas, n’en est pas encore rendue à le vouloir. 

L’erreur de l’accompagnant serait alors de tenter de la forcer à voir, « au nom de la vérité », « pour son bien ». Et ce serait encore un aspect de l’ego chez l’accompagnant ; un ego généreux, peut être, animé des meilleurs intentions, sans doute, ne ménageant pas sa peine, probablement, animé de ferveur, certes .. 

Mais bel et bien l’ego.  

Lucide éventuellement sur la non vision chez l’autre mais pas complètement sur son propre refus de ce qui est, à savoir  : l’autre n’est pas prêt à donner un tour de clef pour ouvrir la porte de sa prison. 

Voilà ce qui est et je suis impuissant. 

Dès que l’accompagnant cherche à passer en force, il y a bras de fer, tentative de faire plier le mental chez l’autre, lequel du coup se cabre encore davantage. 

A moins qu’il y ait aspiration plus forte que tout,  et donc honnêteté radicale. 

Cela arrive mais c’est si rare. 

Dès qu’il y a volonté contre volonté, c’est l’impasse. 

L’accompagné n’a pas à « croire » ce que l’accompagnant lui dit. 

Il a tout au plus à ne pas se fermer d’emblée à ce qui lui est dit et à chercher à voir. 

Et l’accompagnant n’a pas à se contenter de dire en espérant que sa parole fera loi, ce qui serait encore un aspect de l’ego.

 Il a à chercher à montrer. Si l’accompagné vient à voir ce qui lui est montré, c’est la résolution. 

Tant que cela ne s’avère dans les faits pas possible, l’accompagnant a à admettre son impuissance. 

Il a amené le cheval assoiffé au bord de l’eau mais ne le forcera pas à boire. 

Reste à le regarder souffrir.

Gilles Farcet 

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