Certainement à cause de l’âge, je suis entouré de personnes ayant des problèmes de santé. Et je ne suis pas exclu. Mais que de manières différentes de vivre avec ces dysfonctionnements ! Que de façons variées d’aborder la douleur !
Il y a ceux qui ont mal par peur d’avoir mal. L’idée de la souffrance leur est insupportable. Souvent ils n’ont pas eu précédemment de gros soucis avec leur corps si bien qu’ils craignent que ce soit terrible. C’est la douleur avant la douleur. Elle rend difficilement gérable l’arrivée effective des soins.
Il y a ceux qui interprètent au pire les premiers signes. Ils imaginent un affreux cancer là où il n’y a que broutilles.
Et ceux qui pour une blessure plus sérieuse ressentent des douleurs insurmontables. Ils ont du mal à se contrôler et hurlent sans retenue. Au pire ils accusent le personnel médical de les persécuter.
Il y a les taiseux qui accusent le coup mais se rongent de l’intérieur.
Il y a ceux qui acceptent ce qui leur arrive. Alors la part psychique se réduit considérablement. Les souffrances sont constituées d’une part objective : la douleur provoquée par le dysfonctionnement corporel, et la part psychique – la plus importante – nous rajoutons. Celle-ci est liée à notre histoire et détermine notre comportement. Ceux qui acceptent ce qui leur arrive diminuent considérablement le processus psychique.
Un cran au-dessus, certains considèrent que ce qui arrive est une épreuve pour grandir intérieurement, c’est-à-dire progresser en conscience, en amour. Alors la douleur physique, objective, devient supportable. Ils ne visent pas la guérison du corps mais le gain pour leur âme. Ainsi ils supportent avec le sourire les soins médicaux et chirurgicaux sans se plaindre.
Cela m’évoque les martyrs religieux qui n’appréhendent pas les tortures, voire les réclament. Ils me rappellent que la mort est la condition, le passage pour la vie éternelle dans l’amour divin, infini. Notre corps est un magnifique outil qui nous est prêté un temps pour nous accomplir en servant la vie.
L’ange des Dialogues avec l’ange1 de Gitta Mallasz, le dit nettement :
Le cadavre reste toujours mort.
Le vivant reste toujours vivant,
Mais ils sont reliés entre naissance et mort.
Ce que vous appelez Vie,
C’est la tâche active.
Active – la mort la sert,
passive – la mort est son maître.
Christian Rœsch
1. Dialogues avec l’ange, entretien 43 (jour de Pâques), éd. Aubier-Flammarion
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