mercredi 31 août 2016

La colère n'est pas dangereuse, la violence oui...



Mon enfance a baigné dans la violence. Mes quatre frères, mes quatre grands-parents et la quasi-totalité du reste de ma famille ont été déportés et tués par les nazis. C’est d’ailleurs ce qui a orienté mes choix professionnels : j’ai décidé de consacrer ma vie à la lutte contre la violence, en particulier en mettant au point cet outil qu’est la thérapie sociale.

Il nous faut reconnaître la colère. L’institut que je dirige forme les gens à la transformation de la violence. Au cours de ces sessions, ils apprennent à admettre qu’elle existe aussi en eux, ce qui leur permet d’améliorer leurs relations avec les autres. Je n’ai jamais rencontré qui que ce soit qui n’ait pas subi de violence. Nous en sommes tous victimes. Alors, pour parvenir à bloquer le processus, il nous faut réaliser comment nous avons été blessés. En comprenant nos souffrances, nous pouvons réussir à les utiliser de manière positive. 

 Charles Rojzman
source : Psychologies Magazine
adresse de l'institut

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mardi 30 août 2016

Les hommes accèdent à l’unité avec Cyrille Javary

“Yang le matin, yin le soir ”

Dans la culture occidentale, on associe traditionnellement le concept chinois de yang au masculin et celui de yin au féminin. C’est une erreur. Chaque sexe porte en lui les deux principes.

Il n’y a pas de genre dans la langue chinoise, pas de masculin ni de féminin. Les critères esthétiques sont assez proches pour les deux sexes. En revanche, les places des hommes et des femmes dans la société y sont très précisément assignées. Et la sujétion des femmes comme le machisme des hommes y sont une réalité millénaire. Toutefois, les concepts de féminin et de masculin n’existent pas dans les courants philosophiques chinois. Yin et yang ne sont pas des états, des attributs, des sexes ; ce sont des stratégies, des manières d’agir, des vecteurs du changement. Yang regroupe les mouvements centrifuges, dirigés vers l’extérieur, et yin les courants orientés vers l’intériorité. Voilà pourquoi les garçons sont souvent plus sensibles aux stratégies yang, et les filles, aux stratégies yin.

L’âme chinoise a deux versants. Un versant solaire, social, extérieur, masculin, au cœur du confucianisme ; un versant intérieur, lunaire, féminin, mystérieux, au cœur du taoïsme. Un Chinois sera confucéen dans la journée, au bureau : et le soir, taoïste, poète, lunaire.


Les idéogrammes yin et yang ont une partie commune évoquant une colline : l’idée est qu’il est impossible de les isoler car ils sont les deux versants de la même montagne, comme en témoigne leur sens propre : ubac (yin) et adret (yang). 
Chaque être, chaque chose vivante est en même temps et successivement yin et yang. Un jour entier est toujours un jour et une nuit. Cette approche bat en brèche le fameux mythe d’Aristophane, selon lequel homme et femme seraient chacun des moitiés séparées ayant chacune besoin de l’autre pour être complets. “Ces deux moitiés sont en nous et c'est en nous seuls que nous pouvons trouver l’unité, et réaliser nous-mêmes notre plénitude, pour reprendre l’expression de Simon Leys (1). A partir du moment où nous l’avons atteinte, nous n’avons pas besoin d’ajouter ou de retirer quelque chose à l’autre sexe. Nous pouvons l’accueillir tel qu’il est."

1. Simon Leys, sinologue, auteur des Habits neufs du président Mao (Ivrea, 2009). 

Cyrille Javary, sinologue,
est l’auteur de La Souplesse du dragon (Albin Michel, 2014).

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lundi 29 août 2016

Au cœur de l'océan...




Le cœur de l'homme est semblable à la mer, il en a les marées, il en a les tempêtes il a sa profondeur. II a aussi ses perles.

Van Gogh

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dimanche 28 août 2016

L’expir, Verbe créateur avec Annick de Souzenelle


S’il ignore ce qu’il est, l’homme est aliéné, par rapport à son potentiel vital ; il ne vit qu’à la superficie de lui-même, ne respire donc qu’à la superficie de lui-même, survit en redoutant la mort qu’il crée d’autant plus et plus vite qu’elle devient en fin de compte, inconsciemment, son seul objectif. Je ne pense pas que nous puissions prendre délibérément et consciemment pour objectif la vie sans l’objectiver au plus haut niveau de conscience, c’est-à-dire sans avoir l’audace de plonger dans son mystère oublié, mais dont nos mythes traditionnels sont la mémoire.
Je vous invite à cette audace en ouvrant ensemble le livre de la Genèse dont la tradition hébraïque nous dit qu’il est tout entier contenu dans le premier chapitre, lui-même dans le premier verset, celui-là dans le premier mot — Bereshit — et ce premier mot dans la première lettre, le Beith. Obtenant du « Saint-Béni-Soit-Il », selon le Zohar, de présider à la création du monde, la lettre Beith fait présider avec elle le nombre 2, l’altérité, le « toi ». Dieu crie : « Toi, ma bien-aimée » dans un dire-expir-orgasme archétypiel, et la Création est.
« Dire-expir-orgasme » sont inséparables l’un de l’autre. Les sept jours de la Création sont une coulée de cet expir-verbe divin. Les six premiers jours, un ordonnancement de l’énergie ainsi écoulée. Le septième jour, le Shabat, fond de l’expir, rétention du souffle créateur, préparation de l’inspir divin dans lequel toute la création est emportée. Cet inspir est l’histoire, notre histoire, celle de l’humanité, celle de chacun de nous. Dans le Shabat, l’étincelle de vie est déposée au cœur de chacun de nous, amorçant notre propre respiration dont le rythme à deux temps à l’image du rythme divin, s’inscrit dans l’inspir archétypiel. C’est l’histoire du 2 dans son retour à l’un.
Bereshit, le premier mot de la Genèse, en contient deux : Bara – crée ; Shit, se pose dans un fondement. Dans le premier verset : « Bara shit Bara Elohim eth Hashamaim Veet Ha-aretz », le rythme à 2 temps saisit toute l’œuvre ; tout respire : diastole, systole ; le jour, la nuit ; lumière, ténèbre ; été, hiver ; flux et reflux des mers ; le rire et les larmes ; la naissance et la mort. Un immense cœur bat.
Mais avant même que le premier jour fasse éclater la lumière, « le souffle de Dieu plane sur la face des eaux » – « Ve Roua’h Elohim Mera’hephet al Pne Hamaïm ». Une pneumatologie grandiose s’instaure.
Le verbe « planer » ne rend pas compte de la force pénétrante en même temps que réchauffante et ouvrante du terme «Méra’hephet » : le souffle de Dieu, en même temps qu’un expir, est verbe. Il est une pénétration mâle et amoureuse des eaux qui alors éclatent et se séparent. C’est à la rupture des eaux que naît le Beith. Et le Beith lui-même est constitué, dit le 1er verset, de « Shamaîm » et « Aretz », « cieux et terre » qui plus tard seront appelés « humide et sec ». Je dirai aussi « inaccompli et accompli » qui sont les deux seuls réels temps du verbe hébraïque, car il appert que la respiration de l’homme lui est donnée pour s’accomplir et que son accomplissement constitue l’inspir divin.
Dans cette perspective, à l’image archétypielle, l’expir de l’homme est verbe, verbe créateur. Mais depuis le drame de la chute, il se diversifie en verbe créateur, sa fonction ontologique, et organe procréateur, fonction temporaire qui lui est donnée en attente de son retour aux normes ontologiques. Ce qui fait que le bloc urogénital de l’homme n’est qu’une diversification du bloc cardiorespiratoire et phonatoire...

(Revue Énergie Vitale. No 11. Mai-Juin 1982)
pour lire la suite...

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samedi 27 août 2016

Auto-bienveillance avec Christophe André


"De nos maladies, la plus sauvage c'est de mépriser notre être." 
 Montaigne 

L’auto-bienveillance, c’est simplement faire preuve de respect pour soi, de douceur avec soi, notamment lorsque l’on souffre. Lorsque nous sommes blessés, d’abord nous consoler, nous apaiser, nous réparer, avant même de vouloir nous corriger ou nous sermonner. Et ne jamais nous faire de mal, jamais.




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vendredi 26 août 2016

Rencontre avec le peti-fils de Gandhi : Arun Gandhi


Adolescent à Durban, en Afrique du Sud, j’ai été agressé, battu, insulté parce que j’avais la peau sombre. Cela a entraîné beaucoup de violence en moi, c’est la raison pour laquelle mes parents ont voulu que nous allions vivre avec mon grand-père, en Inde....

Seule l’éducation peut améliorer cela. Malheureusement, elle nous apprend à obtenir des succès, pas à devenir meilleurs. Les enfants d’aujourd’hui grandissent sans connaître leur part d’humanité, sans savoir comment la développer. Ils apprennent à devenir de bons scientifiques ou financiers, mais n’ont aucune idée de la manière d’établir de bonnes relations avec les autres. Commençons par modifier une chose simple : la violence de notre langage. Soyons attentifs à nos comportements, soyons plus compréhensifs. Mon grand-père m’expliquait la différence entre la violence passive et la violence physique. Il m’a encouragé à faire mon examen intérieur chaque soir. Qu’ai-je fait qui puisse être utile aux autres ? Qu’ai-je fait de mauvais? Il m’a demandé d’afficher un papier sur lequel je devais noter mes actes de violence passive et active. Peu à peu, cela m’a aidé à me connaître et à voir ce que je devais changer en moi...

La non-violence est un idéal qui peut et qui doit fonctionner chaque jour, parce qu’elle est fondée sur l’amour, la compréhension et le respect. Nous chérissons ces valeurs, et pourtant tout le monde dit aujourd’hui qu’elles sont dépourvues de sens. Mais en pensant ainsi, nous devenons une partie de ce processus. C’est vrai, nous sommes modelés par la culture de la violence... J’ai retenu de mon grand-père que nous devons nous changer nous-mêmes pour entrer dans une culture non violente...

Dans le passé, nous parlions surtout de non-violence physique, en réaction aux guerres, aux mauvais traitements... Aujourd’hui, la violence passive est devenue plus puissante que la violence physique. Elle réside dans les discriminations, le pillage des ressources, l’exploitation des peuples. Elle n’utilise pas la force mais elle laisse les victimes en colère, qui utilisent à leur tour la violence pour obtenir justice. Et nous nous faisons subir à nous-mêmes des violences passives comme le stress, l’angoisse. 
La vraie non-violence réside dans une transformation de nous-mêmes. 
A nous, par exemple, de prendre conscience de la violence passive que nous faisons subir autour de nous : ne pas considérer une personne parce que nous la pensons inférieure, ou parce qu’elle est noire ou musulmane ou pauvre... La pire chose est le nationalisme, lorsque nous pensons pouvoir être fiers de notre pays en excluant le reste du monde. Nous devons avoir une vision générale, nous devons créer une globalisation des esprits, une globalisation philosophique, bien plus importante que la globalisation économique...


Extraits de Psychologies magazine de déc. 2015

jeudi 25 août 2016

Porter attention au vivant !


Ne manquez pas le spectacle ! 
malgré le hamster intérieur !

avec Serge Marquis
(Son livre est vraiment intéressant.)




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mercredi 24 août 2016

Voies d'Air avec Pierre Dhainaut


Voici un extrait du nouveau recueil de Pierre Dhainaut qu'il nous a offert aujourd'hui et cela m'a touché. 
La poésie de Pierre Dhainaut fera partie du nouveau livre-jeu de Sabine Dewulf qui paraîtra fin septembre.




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mardi 23 août 2016

Un homme remarquable, Swami Prajnanpad


 Extraits de "Portrait d'un homme remarquable" de Frédérick Leboyer



Le génie de Swâmi Prajnânpad était de nous offrir une possibilité – certes pas « bon marché » –, de nous libérer en quelques années de désirs qui paraissent tout-puissants et non pas en dizaines et dizaines d’existences.

Arnaud Desjardins



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lundi 22 août 2016

Le luxe de s'asseoir avec Christiane Singer



Ces longues enclaves que je me ménage depuis quelques années et ou je m'assois pour ne me préoccuper de rien - où je lâche leur bride à mes pensées pour les laisser brouter plus loin - sont désormais le plus grand luxe de ma vie, le seul. (Car peut-on parler de luxe quand il s'agit d'acquérir des choses qui s'achètent! Dérision suprême de ce luxe là!) Pourquoi même ne pas oser dire que je me coule entière dans une matrice - mieux, dans un moule qui tient ensemble la cire fondante que je suis, lui donne forme. - Oui je prends une posture. "Attitude particulière du corps (surtout lorsqu'elle est peu naturelle et peu convenable)", dit le Robert. Je (re)trouve - malgré le Robert - une forme qui m'est devenue naturelle et me convient, un ordre originel, la colonne vertébrale droite et fichée dans la coque du bassin comme un mat portant l'ample voilure des poumons qu'enflent l'inspir et l'expir. Elle court sur les flots, ma superbe frégate, quand la respiration est devenue le seul horizon que je fixe, la seule merveille où reposent mes yeux mi-clos.

Alors il m'arrive parfois - une seconde? dix secondes? - d'être en mesure de contempler le vide. Si vraiment un moment, aucune image ne se faufile par mes yeux entrouverts, aucune sensation porteuse d'un nom aucun message passé en fraude - si je suis un moment TOUTE vigilance, tous les sens en alerte comme chien de garde - alors dans cet espace que j'ai vidé de ma présence, le Réel se déploie et j'ai le goût de Dieu sur la langue. Un instant j'ai alors reflété ce qui EST. Ou plutôt ce qui EST à trouvé en mon absence où se refléter. Un instant il n'y a eu personne pour troubler l'eau. Un instant, je n'ai pas occupé tout l'espace du miroir. Un instant, j'ai su de quel infini j'étais le frémissement ténu.
Christiane Singer.

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dimanche 21 août 2016

Sur le chemin avec Christophe Massin

Gratitude 

Comment l’homme méfiant et critique que j’étais a-t-il pu s’ouvrir à la confiance ? 
Sans discussion possible, je dois ce trésor aux rencontres qui ont jalonné ma vie. 

Arnaud Desjardins m’a fait découvrir le monde de la sagesse orientale et tout particulièrement l’enseignement de son maître Swami Prajnanpad. Ce cheminement m’a donné les clés indispensables pour me connaître, me comprendre et m’accepter avec mes forces et mes failles. Plusieurs grandes figures spirituelles m’ont laissé une marque inoubliable, en particulier la joie pétillante, débordant d’amour de Kangyur Rinpoché, le regard ouvert sur l’infini de Mâ Ananda Moyî... 
L’évidence de leur rayonnement a chassé le doute de mon esprit, me prouvant la réalité d’une dimension sacrée dans l’existence. La direction m’était montrée ! Il restait le travail patient de fourmi... Arnaud à deux reprises m’a accordé sa confiance pour des choix importants qui l’engageaient, inscrivant ainsi en moi que j’en étais digne. Outre son accompagnement j’ai reçu des aides précieuses de plusieurs personnes : Denise Desjardins, par son engagement sans réserve m’a communiqué le goût de la ténacité pour dépasser ma peur fondamentale ; Josette Martel m’a fait expérimenter une écoute totalement ouverte, tranquille qui me laissait l’espace pour me déployer en toute confiance ; Michel Argod avec ses mains si intelligentes et sensibles a libéré les tensions profondes inscrites par la peur dans mon corps ; Daniel Morin m’a montré que tout était là, dans l’instant, qu’il n’y avait pas à chercher plus loin pour me détendre en confiance ; Lee Lozowick m'a poussé dans mes retranchements en mettant en cause mes conditionnements et mes rigidités, ce qui m’a encouragé à prendre des risques ; j’ai pu expérimenter, grâce aux séminaires de Jacques de Panafieu, une qualité de confiance d’une extrême simplicité qui a touché le cœur de mon être. Toutes ces relations et tant d’autres belles rencontres ont contribué à développer la confiance en moi, en l'autre et en la vie. Quant à la confiance absolue, les germes plantés dans mon cœur au contact des sages que j’ai pu approcher croissent et m’emplissent de plus en plus. 
Ils se nourrissent de la pratique de l’acceptation, du questionnement intérieur dont j’ai découvert toute la valeur...


Christophe Massin
Une vie en confiance p.169




vendredi 19 août 2016

Citations de Ramana Maharshi






extraits du livre :
Coeur est Ton Nom, ô Seigneur





Les murs en nous sont ils mûrs ?


Je hais les haies
qui sont des murs.
Je hais les haies
et les muriers
qui font la haie
le long des murs.
Je hais les haies
qui sont de houx.
Je hais les haies
qu'elles soient de mûres
qu'elles soient de houx !
Je hais les murs
qu'ils soient en dur
qu'ils soient en mou !
Je hais les haies qui nous emmurent.
Je hais les murs
qui sont en nous !


Raymond DEVOS
(1922 - 2006) 


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mercredi 17 août 2016

Le désert en soi....



La spiritualité du désert c'est aussi la spiritualité de l'enfance ; poser sur tout ce qui est un regard innocent, délivré de jugements et d'opinions, voir les choses telles quelles sont sans surimpositions de mémoires sans projection, cela suppose un certain anéantissement du moi et un renoncement au vouloir s'anéantir, car qui veut être délivré de l'ego si ce n'est l'ego ? 

Jean-Yves Leloup 
 L'empreinte du désert


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mardi 16 août 2016

Un pétale de seconde...

"Nous n’avons pas besoin de beaucoup de temps. 

Une fraction de seconde suffit pour revenir à la vie, parce qu’être vivant c’est être là, dans le moment présent, dans l’ici et le maintenant ; 

et cela est possible avec une seule respiration consciente... 

Respire, tu es vivant..". 


Thich Nhat Hanh.


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lundi 15 août 2016

Une approche de la Bible avec Annick de Souzenelle


Publié sur le blog en 2007, il n'y pas une ride à ce nouveau visage de la Bible...

 
"Il y a urgence pour l’homme à retrouver son identité !"

Pour en savoir plus sur Annick de Souzenelle, 
un site et une interview du journal "Nouvelles Clés"...

Mais le mieux, c'est de l'écouter dans une émission de la radio suisse romande (en 5 morceaux)

"1-Revisiter la bible du fond du coeur"

"2-Le pari d'une lecture symbolique de la bible"

"3-Le récit des commencements du monde, son Principe"

"4-Le jour Un de la création"

"5-Devenir le fruit de l'arbre de la connaissance"



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dimanche 14 août 2016

Une approche de l'enseignement d'Arnaud Desjardins

Déjà publié en 2007, mais toujours bon à réécouter !


Pour en savoir plus sur Arnaud Desjardins, voici l'adresse suivante : http://supervielle.univers.free.fr/Arnaud_Desjardins/desjardins.htm
Pour mieux le connaître, une interview issue de la radio suisse romande, fin 2005 (en 5 morceaux)

"1-Personne ne vit dans le monde"




"2-Pour une croissance harmonieuse de l'ego"




"3-Les émotions sources de confusion"




"4-Dire oui à ce qui est"




"5-Une approche spirituelle ouverte à toutes les religions"






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samedi 13 août 2016

Un rappel : lâcher prise avec Arnaud Desjardins


Arnaud Desjardins : Le lâcher-prise est un geste intérieur qui interfère avec notre manière habituelle de réagir. Certains lâcher-prise nécessitent une grande force de conviction, d’autres sont plus aisés à opérer. Puis vient un jour où nous constatons que le fait de lâcher est devenu permanent. On pourrait même dire que le lâcher-prise est devenu inutile car il n’y a plus de prise, plus d’appropriation de la réalité.
Une détente s’est établie, nous sommes en contact avec la réalité, instant après instant, sans projections sur le futur, ce qui nous permet d’accomplir les actions qui nous paraissent justes et appropriées, dans le relatif. 
L’action est toujours relative, d’une part parce qu’elle s’insère dans un ensemble de chaînes de causes et d’effets que nous ne maîtrisons pas, ou très partiellement, et d’autre part parce que nous-mêmes avons des capacités relatives. Toute action engendre des conséquences, certaines que nous pourrons prévoir, d’autres que nous ne pourrons pas prévoir. La pratique consiste donc aussi dans unlâcher-prise avant l’action. Un événement se produit, une situation se présente, qui peut être extérieure à nous ou intérieure (comme un vertige, un mal au ventre, une angoisse diffuse). L’essentiel, c’est la manière dont chacun se situe face à ce vécu intime que l’existence produit en lui. Nous avons la possibilité d’accueillir cette réaction, parce que c’est la vérité de l’instant, mais sans nous l’approprier. Celui dont j’ai été l’élève, Swâmi Prajnânpad, disait à ce sujet : « La plaque photographique prend, le miroir accueille mais ne prend pas. » Les événements, quels qu’ils soient, produisent en nous des émotions en tous genres, heureuses ou malheureuses, plus ou moins intenses. Si nous apprenons peu à peu cette attitude de lâcher-prise, celle-ci finit par imprégner tout l’existence et crée en nous une grande détente : l’événement se présente, mais la réaction mécanique ne se produit plus. Les émotions font place à l’équanimité !

Nouvelles Clés : Vous voulez dire que même la réaction physique ne se fait plus ? Je m'explique : si l'on a une angoisse, on peut en effet déconnecter son mental de celle-ci, mais qu'en est-il de la boule au ventre qu'elle a, par exemple, occasionnée ?

A. D. : À la place de la réaction habituelle de l'ego, du “ça j'aime ou ça je n'aime pas”, il y a un sentiment qui devient stable d'ouverture du cœur. Les aspects mentaux, émotionnels et physiologiques sont interconnectés et, peu à peu, cet effort de lâcher-prise va contredire la force d'inertie des habitudes qui font que nous sommes tout le temps en réaction face aux événements. Et petit à petit, nous allons ainsi vers l'équanimité. Mais il est évident que, pendant longtemps, l'existence aura encore le pouvoir de produire en nous des réactions : oh oui ! et une émotion heureuse, oh non ! et une émotion malheureuse, douloureuse, réactions dont nous faisons une affaire personnelle. Il faut en fait sans cesse se poser la question de savoir comment nous nous situons par rapport à ces réactions physiques, émotionnelles et mentales ? Comment lâchons-nous prise face à ces moments heureux ou malheureux, quand nous sommes de bonne ou de mauvaise humeur ?
La pratique de ce lâcher-prise met en fait immédiatement en cause l'égocentrisme. Elle amène un abandon de notre vouloir personnel et cet abandon produit une détente. C'est à partir de celle-ci que notre action va à présent s'accomplir, et non à partir d'une réaction épidermique et mécanique fondée sur nos anciens schémas de fonctionnement. C'est la soumission à ce qui est et non à ce qui devrait être, chère à tous les grands maîtres zen, soufis, hindous ou chrétiens, c'est le célèbre : « Que Ta volonté soit faite et non la mienne. » 
À ce moment-là il n'y a plus la séparation, de dualité, entre moi et la réalité du moment.

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vendredi 12 août 2016

Uni vers soi...



Vous pouvez avec certitude améliorer un seul petit coin de l'univers :vous-même. 



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 Aldous Huxley

jeudi 11 août 2016

Chandra Swami parle d'Yvan Amar

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Question du 15/09/1999 à Chandra Swami :
Swamiji , Vous nous avez dit qu'un chercheur, lorsqu'il a réalisé la Vérité, peux quitter ce monde. Quel est le sens alors de la mort d'Yvan Amar ? Il aurait pu aider encore beaucoup plus de chercheurs… 
Chandra Swami : 
Yvan (Ananda) peux aider beaucoup de chercheurs à présent. Il est à même de travailler et de guider plus encore les chercheurs, mais ce de façon invisible.
Le corps physique est une limitation pour l'Esprit. 
Qu'en pensez-vous et qu'avez-vous remarqué : Le Christ a-t'il guidé plus de gens lorsqu'il était dans un corps physique ou guide t 'il plus de personne aujourd'hui ?
Il n'avait seulement que quelques disciples lorsqu'il était dans un corps physique, aujourd'hui il inspire à travers l'Invisible des milliers et des milliers de fidèles.
Il ne pouvait travailler que dans le Moyen Orient. Aujourd'hui son Esprit guide et inspire des chercheurs dans le monde entier.
N'êtes vous jamais allé à Hiroshima au Japon ?
Si vous allez dans ce lieu, vous pourrez encore ressentir le désastre causé par la bombe atomique. Vous pourrez encore le ressentir même 55 ans après.
Ainsi, au moment et à l'endroit où une âme se libère vous pouvez ressentir l'impact de cet évènement même 100 ans après. 
Une très grande énergie est émise à l'endroit et au moment ou la fission d'un atome se produit.
Au moment et à l'endroit ou une individualité est brisée (c'est ce que signifie la libération de l'âme) cela émet une telle énergie spirituelle que vous pouvez, 100 ans après, en ressentir l'impact.
Une forme lorsqu'elle a été crée ne peut pas être détruite. Elle devient une empreinte dans l'éther. Elle perdure autant que le cycle du monde perdure ; autant que l'éther perdure.
A l'heure actuelle les scientifiques essayent d'entendre par des méthodes scientifiques ce que Lord Krishna a dit à Arjuna ou ce que Jésus a énoncé il y a 2000 ans. Ces mots ne sont pas perdus. Ils sont encore dans l'éther sous forme de vibrations. Ces mots peuvent être entendus, même maintenant, par un chercheur à condition que son mental soit très pénétrant et pur.
De la même manière, les formes qui ont existé des milliers d'années auparavant peuvent être vu encore aujourd'hui. Elles ne sont pas perdues.

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Ananda
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Photos : Bernard Boullet ( Gordes : samedi 20 juin 2009 )

Je ne peux penser à Chandra Swami sans penser aussi à son premier disciple français, Yvan Amar. C'est par Yvan que j'ai connu Guruji. Et je suis certain que la gratitude de beaucoup d'entre nous, Français, à l'égard de Chandra Swami, va aussi vers celui-ci parce qu'il a été l'initiateur et le père spirituel d'Yvan dont la présence et les paroles ont été une bénédiction pour tant de ceux qui l'ont approché.
Arnaud Desjardins



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mercredi 10 août 2016

Le départ d’Arnaud par Sundarî


Quelques précisions :
Mâ Anandamayî, rencontrée dans mon jeune âge, entre 1977 et 1980, est ma mère spirituelle. Elle a établi d’emblée un lien avec moi de nature spirituelle. Ayant peu connu la Mâ « humaine » mais, par une grâce stupéfiante de Sa part, percevant très bien la Mâ « divine », je n’ai jamais souffert du fait qu’elle ait quitté son corps, puisque ce lien divin est un lien permanent, qui m’a toujours permis de La sentir présente en moi, n’importe quel jour depuis lors. Et je ne pouvais pas regretter une dimension humaine que je n’avais pas connue, alors même que j’étais tellement comblée et inspirée pas Sa dimension divine. Il en va tout autrement de ma relation avec Arnaud Desjardins. Arnaud a bien voulu assumer pour moi la fonction de Maître spirituel depuis plus de 26 ans... Sans faire partie de ceux ou celles qui l’ont côtoyé au quotidien, j’ai eu la chance d’être engagée dans une relation personnelle avec lui bien réelle, et, outre l’enseignement libérateur qu’il m’a prodigué, il a influencé tous les grands choix existentiels de ma vie (profession, mariage, etc.) J’ai choisi de raconter ce je sais des circonstances de sa mort sans m’exclure du récit, parce qu’ainsi, cela permet de montrer de façon plus vivante l’interaction entre le Maître et l’élève... Il me semble que parler de façon trop convenue, en évitant de parler de soi, amène à un récit « historique » et objectif, certes, mais pas très utile pour ceux ou celles qui, se sentant engagés dans un chemin d’évolution, sont à l’affût d’illustrations concrètes capables de les aider sur leur propre chemin. J’ai donc préféré le témoignage, plus impliqué, et plus impliquant pour celle ou celui qui le reçoit. Je le signe, par contre, de mon nom indien, qui me permet de témoigner tout en restant dans l’anonymat. Je vous souhaite bonne route à toutes et à tous, du fond du cœur...
GURU KRIPA KEVALA !....


Le lundi suivant, le 4 juillet, j’étais allée le saluer car mon séjour se terminait. C’est la seule fois de ma vie où je suis allée le saluer seule. Là encore, je ne disais rien, je restais ouverte à ce qu’il allait dire ou faire, lui. Il était debout et non pas assis comme habituellement pour les au revoir. Il a commencé par me prendre dans ses bras avec un amour vraiment extraordinaire. Jamais je n’ai senti, même avec lui, une telle profondeur d’amour. Une sorte de velours lumineux, de suavité chargée de Sens, de Grâce infinie... Rien que cela -une telle qualité d’amour est vraiment indescriptible- est certainement son dernier enseignement, le plus profond, sa transmission la plus significative. Il m’a redonné brièvement quelques instructions, fait certains commentaires... Puis il m’a prise à nouveau dans ses bras, en me chantant : « OM, SHANTI SHANTI SHANTI...» Je l’ai remercié du fond du coeur et suis partie.
… . Au cours de ce dernier entretien que j’ai eu avec lui le lundi 4 juillet, il m’a donné repères et instructions par rapport à mon évolution future la plus profonde. Il devait percevoir sa fin prochaine, car il m’a recommandé son livre, La Paix Toujours Présente, en me précisant que ce serait le dernier et qu’il s’agissait vraiment de son testament spirituel, de son enseignement le plus abouti. Et puis, lorsqu’il a conclu l’entretien, il a ajouté ceci : « Tant que je n’aurai pas des tuyaux partout, je serai là, pour vous aider à atteindre l’Autre Rive... » 
Dix neuf jours plus tard, en effet, les tuyaux étaient entrés en scène...

Durant ces 21 jours, je sais Arnaud étendu sur un lit d’hôpital, la cage thoracique ouverte puis refermée, le sternum scié, avec des difficultés à simplement respirer... Avec surtout des difficultés à respirer. Il a, d’instant en instant, l’impression qu’il n’aura pas la force de supporter l’effort que représente le malaise de la respiration suivante... La respiration est un point d’appui capital pour tout pratiquant du yoga... C’est elle qui, justement, permet d’endurer la souffrance, de la traverser... Et justement, il en est privé. Le point d’appui physique principal est justement le lieu du principal malaise... Je ne peux pas ne pas faire le lien entre tout se qui se passe dans mon existence, les mises en situations édifiantes qui se succèdent à grande vitesse, l’énergie incroyable qui s’est mise spontanément en oeuvre pour tout clarifier et tout remettre en ordre depuis qu’il est entre la vie et la mort, et ce qu’endure Arnaud. Je ne veux pas dire que Arnaud, délibérément, a choisi de souffrir pour nous libérer de nos entraves. Je suis convaincue qu’il a accepté de supporter l'insupportable afin de pouvoir continuer à rester dans ce monde, afin de nous aider NOUS... Lui peut évidemment partir à tout moment dans la lumière et la béatitude. C’est uniquement pour nous qu’il reste. Une telle compassion me touche au plus profond. Mais je crois aussi qu’à un autre niveau, réellement, à travers cette souffrance qu’il ne mérite certes pas, Arnaud brûle le karma de certains de ses disciples. Véronique, son épouse, qui a reçu différents témoignages, a pu remarquer que pour un certain nombre d’entre nous, le Travail s’est mis à accélérer, avec des mises en situation très particulières. Durant cette période, peu à peu, mon énergie, de réceptive à son égard, s’est mise, au moins à certains moments, à s’inverser : j’éprouvais le besoin de lui donner, de transmettre de l’aide à son corps physique. Je me disais que cela préfigurait certainement ce qui allait suivre lorsqu’il mourrait : nous aurons tous à donner, à restituer tout ce que nous avons reçu de lui afin que cela fleurisse dans le monde, et en particulier, dans notre entourage. Nous avons tant reçu... Nous aurons beaucoup à redonner. Pourtant, à cette époque, j’étais convaincue qu’il allait survivre à son opération. Il avait, de temps à autre, fait allusion au fait qu’il finirait sa vie en silence, en mauna. J’étais donc convaincue qu’il nous reviendrait, assumant une présence silencieuse, mais radieuse encore quelques années durant... Peut-être avait-il en fait renoncé à rester silencieux parmi nous, devant l’immense demande dont nous faisions tous la démonstration, sacrifiant sa précieuse énergie pour nous. La compassion d’Arnaud est tellement grande. Toujours est-il que du fait de ces allusions, je n’ai prêté aucune attention à certains signaux avertisseurs : sa sépulture qu’on avait commencé à construire en avril, par exemple et certaines phrases de l’entretien...

Au cours de son séjour à l'hôpital, Arnaud s’est trouvé plusieurs fois en détresse respiratoire, au risque de mourir en étouffant. Il a été intubé, et -pour utiliser le terme hospitalier- sédatisé : être intubé est tellement pénible et douloureux qu’on balance des sédatifs puissants, qui entraînent aussitôt l’inconscience totale... Le Guru plongé dans l’inconscience par un corps médical à la fois hyper compétent, et plutôt autoritaire... A la suite de cette expérience, il a été décidé avec Arnaud que l’on ne recommencerait pas. Au fur et à mesure que les jours passaient, l’énergie physique d’Arnaud diminuait, ses poumons ne pouvant pas s'adapter aux suites opératoires. Un matin, le médecin a prévenu : son taux de gaz carbonique augmente, si on ne fait rien, il mourra ce soir. Renseignements pris, il s’agit d’une mort douce... On a demandé son avis à Arnaud qui, estimant qu’il ne fallait pas confondre soins post opératoires et acharnement thérapeutique, et percevant mieux que personne combien son corps s’épuisait, a préféré quitter tranquillement le corps physique ! Un Maître n’a évidemment aucune peur de la mort, mais s’il peut ne pas trop souffrir, il va évidemment choisir la solution la plus humaine pour lui. Quoique Véronique nous a dit, les larmes aux yeux, qu’Arnaud n’imposait rien, même concernant les circonstances de sa mort. Il était vraiment prêt à vivre ce qu’il aurait à vivre, quelque forme que cela puisse prendre, y compris une agonie terrifiante. Différents membres de sa famille se relayaient à son chevet... A partir du moment où il a su qu’il allait mourir (puisqu’en fait on arrêtait les soins), Arnaud a demandé que l’on pose une photo de Mâ sur lui, et il est mort ainsi, s'unissant à Mâ, très paisiblement. Véronique lui tenait une main, Emmanuel, son fils, l’autre, Fabienne, sa belle-fille était assise à ses pieds. Ils l’ont accompagné en lui chantant des mantras qu’il aimait, en particulier celui de Ram... Je suis sûre qu’ils se sont tous installés dans un profond amour, tous unis dans le même recueillement, le même lâcher-prise, dépassant leur chagrin autant qu’ils le pouvaient, lui transmettant toute leur affection et leurs plus purs sentiments. Il n’y avait, probablement, en cet instant, plus qu’un seul Coeur.

Arnaud est donc mort paisiblement le mercredi 10 août à 23H00, après 21 jours très difficiles. Mon père, en 1967, est mort le... 10 août, à 23H15... Quelle coïncidence incroyable... Comme cela m’a touchée... Lorsque je l’ai appris, le lendemain matin, j’ai eu le sentiment qu’Arnaud, en entrant en Maha Samadhî le même jour et à la même heures que mon père (mort au contraire d’une mort brutale et empêtré dans des émotions violentes), inondait de lumière et de Paix tout ce vieux passé familial si sombre et si loin de toute spiritualité... Surtout, la grâce divine me redisait, à travers ce symbole si fort, combien Arnaud est mon père véritable... C’est vrai que c’est lui qui m’a réellement formée, construite humainement, et pas seulement enseignée spirituellement... Il est véritablement mon père chéri, humainement parlant, et je ne suis pas la seule... Le jeudi 11 au matin, en me levant, je suis étonnée : la veilleuse que j’ai allumée à 2 heures du matin (j’ai regardé l’heure) brûle encore... Au lieu de 4 heures, elle va brûler 8 heures et demie... Je n’ai pourtant pas remarqué que la mèche soit anormalement courte. Après m’être recueillie le plus clair de la journée du jeudi, puisque justement je ne travaille pas étant en vacances, le vendredi, je pars à l’ashram, pensant qu’il y aura besoin d’aide à la cuisine pour recevoir les personnes qui ne vont pas tarder à affluer. Avertie par un mail qu’il faut apporter de la nourriture, j’achète en chemin un brie entier et un immense saucisson qui offre plus de 100 tranches !!!

L’ashram est calme. Pas de têtes d’enterrement, pas de sanglots, pas de mines ravagées par les larmes. Bien sûr, il y a de la tristesse, et je croise parfois des visages montrant que bien des larmes ont été versées dans la nuit, mais vraiment, personne ne donne dans le pathos. On a installé le corps d’Arnaud dans la pièce où il donnait ses entretiens et nous disait au revoir. Son corps est étendu, recouvert du châle de cachemire blanc qu’il portait lorsqu’il transmettait l’Enseignement, son visage est découvert et paisible, mais dans l’immobilité de la mort. La photo de Mâ, tout emplie de grâce et de lumière est posée tout près de son visage, entourée de roses blanches... Les mêmes roses qui poussaient à Noël en Inde, à l’ashram de Mâ, à Naimisharanya, lorsque j’ai passé une semaine avec Elle à l’âge de 23 ans. Il est vrai que le blanc est vraiment la couleur de Mataji. Avec une profonde générosité, la famille d’Arnaud a accepté que nous, simples élèves, puissions aller nous recueillir près de lui... Nous pouvons y aller par petits groupes de 6 ou 8 personnes, et ce plusieurs fois dans la mesure où il n’y a pas trop de monde. Simplement, nous ne devons pas rester au delà d’un quart d’heure. Le corps d’Arnaud ne subit aucun traitement chimique, il ne repose pas sur un lit réfrigérant, la température de la pièce est un peu refroidie par un appareil, sans plus. Du coup, personne n’est gêné, comme souvent dans les chambres funéraires où on ne peut pas rester à cause du froid trop intense. Quel recueillement tranquille sur la plupart des visages. Parfois d’émouvants sourires au milieu des larmes. La beauté d’un long regard qu’une disciple pose sur Arnaud me restera longtemps... Pour ma part, je suis allée 4 fois me recueillir dans la petite pièce. La première fois, il y a eu le choc de voir le corps de cet homme que j’aime si profondément et que je vénère, dans l’immobilité de la mort... J’avais besoin de constater sa mort de mes propres yeux - cela aide à l’accepter plus facilement. Le vendredi, il y a eu un moment où je suis restée seule en présence d’Arnaud... Cela m’a énormément touchée, cette intimité miraculeuse quand on sait le nombre d’élèves qui gravitent autour de lui. Puisque j’étais seule et comme je regrettais de ne jamais lui avoir demandé de bénir mon mala (ni aucun objet d’ailleurs, ce n’est pas dans la ligne d’Hauteville), au bout d’un moment, je l’ai ôté et mis légèrement en contact avec son châle, puis remis autour de mon cou. (Ce mala, acheté à Khankhal au samadhî de Mâ, et gardé une dizaine de minutes dans les mains de Vijayananda en signe de bénédiction, ne me quitte pas, je le porte nuit et jour depuis mars 2010. Je l’utilise tous les jours depuis que je le porte pour réciter une variante du mantra de Ram.) A peine remis le mala autour de mon cou, d’autres personnes sont arrivées... Comme chacun se rend à son rythme auprès d’Arnaud et qu’il n’y a pas de barrières de protocole, chacun peut se recueillir, mélangé à des disciples de longue date, des débutants ou des membres de la famille d’Arnaud, comme Denise, sa première épouse. Cela aussi m’a beaucoup touchée.

Le samedi, c’est Muriel, fille d’Arnaud et son mari, Christophe, ainsi que leurs enfants (qui n’ont pas parlé mais étaient présents) qui ont animé la réunion. (Muriel et Christophe étaient présents en Inde auprès de Mâ en même temps que moi, il y a 34 ans, à Naimisharanya, n’est-ce pas étonnant ?... C’est en voyant combien sa fille était sérieuse et recueillie que j’avais eu envie de rencontrer Arnaud, me disant : si la fille est si bien, son père l’est certainement aussi !) Muriel nous raconte que, lorsque Arnaud retrouvait un peu de souffle pour parler, c’était assez souvent pour... raconter des plaisanteries. C’est ainsi qu’à un moment, Arnaud dit à sa fille : « Tu connais l’histoire du patriarche juif en train de mourir ?» « Oui » répond précipitamment Muriel, pour lui éviter de la raconter, ne voulant surtout pas qu’il s’épuise inutilement.  « Oui, oui, je la connais, tu n’as pas besoin de me la redire !» Mais Arnaud continue, et voici l’histoire : le vieux patriarche est sur son lit de mort. Il demande : « Est-ce que Sarah, ma fidèle épouse, est là ? Oui, répond sa famille. Et mon fils aîné, Jacob ? Oui. Et Myriam ? Et Samuel, Rebecca ? » Il cite ainsi chacun des noms de ses nombreux enfants. Chaque fois, on lui répond oui. « Ainsi, vous êtes tous là, alors, autour de moi ?» « Oui !» « Mais alors, qui garde la boutique ?» s’exclame-t-il, le souffle court.... Muriel commente : « Tout de même, Arnaud nous racontait l’histoire d’un homme en train de mourir, c’était sa façon d’annoncer son départ. »
Dans la journée du samedi, le corps d’Arnaud est mis en bière, c’est à dire déposé dans son cercueil. Ses fils les plus proches le portent de la petite pièce où il se trouvait jusqu’au dojo, salle assez grande, où nous avons l’habitude de méditer. Ses fils les plus proches, c’est à dire Emmanuel, bien sûr, son fils de sang, disciple et collaborateur, Christophe, son gendre et disciple, son petit fils, Axel, jeune homme au beau regard lumineux, et ses fils spirituels : Yves et Thierry, collaborateurs, Geoffroy, qui l’a servi toute sa vie... J’espère que je n’oublie personne, pardon si c’est le cas, j’ai vécu tout cela dans un tel bouleversement intérieur. La sangha s’est assemblée tout le long du parcours, à l’intérieur de l’ashram autant qu’à l’extérieur. Véronique nous annonce alors que nous allons faire une veillée tous ensemble dans le dojo, autour d’Arnaud, et merveille des merveilles, que ceux ou celles d’entre nous qui le souhaitent peuvent dormir dans la grande salle où se tiennent habituellement les sessions d’enseignement, de sorte qu’ils puissent se recueillir tard et même se relever au milieu de la nuit pour retourner dans le dojo, veiller leur Maître bien aimé...

Le soir, le dojo est recouvert de coussin, zafus et tapis de sols, de telle sorte que chacun puisse s’asseoir de façon confortable. Là encore, nous sommes serrés les uns contre les autres. Beau symbole. Puissions nous, en effet, rester à l’avenir extrêmement proches les uns des autres... Je crois réellement que de ma vie, c’est la plus belle soirée que j’ai passée. Certainement parce que c’est celle qui a eu le plus de sens, de profondeur. Comment décrire la beauté du recueillement, la ferveur sobre mais profonde, les larmes et les sourires... Comment ne pas être touché par la beauté des chants qui se succèdent, et qui, pénétrant nos coeurs, nous transforment à certains moments en fontaines silencieuses... La qualité artistique est au rendez vous. Alternent des mantras dédiés à Ram, Mâ, mais aussi Swamiji (Swami Prajnanpad) et ô bonheur, Arnaud... accompagnés au sîtar... et repris par l’assemblée. C’est très inhabituel à Hauteville, car nous ne sommes pas une voie dévotionnelle. Nous pratiquons le yoga de la connaissance, et la dévotion au Maître, -en fait très réelle- reste la plupart du temps cachée. Une jeune fille française formée au chant karnatique (qui est connue et appréciée en Inde devant certaines artistes hindoues) nous chante un chant dévotionnel, accompagnée au sitar par son père : c’est sublime. Nos coeurs s’épanchent, touchés par la beauté du chant, et de nouvelles fontaines s’écoulent doucement... Comment ne pas verser de larmes ? Beaucoup sont intériorisés dans la dévotion ou la méditation. Pascal chante l'alléluia de Léonard Cohen, en s’accompagnant à la guitare, doucement, très intériorisé. Il l’a beaucoup chanté, cet alléluia... mais là, son coeur à la fois brisé et paisible est dans chaque note de musique. De quoi être remué au fond de l’âme. Et puis dans cette veillée terrible et merveilleuse, il y a aussi l’intervention de Nour... Nour est une jeune femme soufi qui assume une fonction de Maître spirituel. Elle chante le dhikr, avec deux autres compagnes musulmanes. Le dhikr est un chant ésotérique qui vise à mettre celui qui le pratique en état d’ouverture au divin... Là aussi, comme pour les mantras, nous reprenons en choeur : « La ilaha illa 'llah...» Chacune des trois femmes musulmanes, à tour de rôle, tournera aussi sur elle-même comme le font les derviches. Ce qui est frappant, c’est de voir combien elles le font à partir de leur coeur. Tout le mouvement semble y prendre son origine. Nour nous parle quelques minutes et ses paroles sont aussi très justes, fermes, courageuses. Pas de sensiblerie... D’abord assise tout au fond, je me suis approchée peu à peu, à mesure que les personnes partent, ayant des obligations envers leurs hôtels respectifs ou étant fatiguées. Finalement, je me retrouve très près du cercueil. Il est en pin clair, et embaume la résine... La photo de Mâ rayonne au milieu des fleurs blanches... Peu à peu, ne reste qu’un petit groupe de personnes rassemblées près du corps du Maître, très recueillies... Toute l’atmosphère de cette veillée est envoûtante, tout emplie de douceur, de dévotion, de pudeur aussi. Vers une heures 30 du matin, j’émigre dans la grande salle, non sans être allée chercher un duvet dans ma voiture. Une vingtaine de personnes sont déjà allongées, certaines simplement enroulées dans leur châle de méditation, d’autres ayant disposé un tapis de sol... Tout est calme... les dormeurs font attention dans leur sommeil de bouger doucement... Certains se relèveront au milieu de la nuit pour retourner encore dans le dojo. Je me relève aussi, médite encore un peu, mais force m’est de constater que mon cerveau reste relativement endormi... Cela ne fait rien. Je me recouche un peu plus pénétrée de l’ambiance de prière et de vénération, et me rendors aussitôt. L’intérêt de dormir sur place, c’est qu’on ne perd aucun temps... A 7H20, je retourne au dojo pour une longue méditation très recueillie, facilitée par la veillée... Vrai petit miracle, mon dos, habituellement si susceptible, supporte ce sur-régime (seva intensif dans la cuisine et le reste) sans aucun problème... Tant il est vrai que, dans l’ascèse, chaque fois que nous avons vraiment quelque chose à faire, il nous est donné la capacité de le réaliser. Quelle heureuse idée, cette longue veillée, et ce couchage dans la grande salle...

Lundi 15 août : C’est le jour choisi pour l’enterrement. Arnaud, étant d’origine protestante, a la possibilité de se faire enterrer sur le lieu de son habitation... Donc, à Hauteville et non pas dans un cimetière, comme pour les catholiques. Et comme Hauteville ne dépend pas de professionnels (qui ne travaillent pas les jours fériés), le 15 août, jour de l’Assomption, est la date choisie. Beau symbole... (Vijayananda est mort le lundi de Pâques en 2010, et en pleine Khumba-méla... « Very auspicious », « De très bon augure », dirait-on en Inde !)

Le 15 août, la cérémonie commence à 11 heures et va durer environ 4 heures. Cette fois ci, il y a vraiment beaucoup de monde. Je ne saurais dire que très approximativement le nombre, environ 1200 personnes ? Comment sont-elles venues ? Uniquement le « téléphone arabe », le réseau amical des disciples ? Nous sommes dehors, au soleil, dont la chaleur, au bout d’une heure ou deux, sera tempérée par quelques nuages légers et bienvenus. Une estrade a été aménagée. A droite, la famille d’Arnaud. A gauche, les invités, qui représentent tous une forme de travail spirituel particulier : Voies bouddhiste, hindoue, chrétienne, musulmane (soufi), amérindienne... et bien sûr, des représentantes de la sangha de Lee Lozowick, inclassable mais prodigieuse, avec laquelle Hauteville a des liens particulièrement proches. Au centre, assis sur l’herbe, les élèves d’Arnaud. Et bien sûr, sur l’estrade, les personnes qui sont au coeur de la transmission spirituelle dans la lignée d’Arnaud et de Swami Prajnanpad. Je ne détaillerai par les différentes prises de paroles. Il y est bien sûr question d’hommages à Arnaud et du futur de notre travail spirituel, qui bien évidemment, continue... et même, nous l’espérons va s’intensifier. Jacques Vigne, présent par le coeur, organise en Inde, au bord du Gange, une puja à Khankhal, à quelques mètres du samadhî de Mâ Anandamayî. Il résume bien les choses dans cette courte phrase, qu’il a entendu de son propre Maître, Vijayananda : « La parole du Guru ne meurt pas. » D’autres cérémonies sont organisées en d’autres points du globe... Beaucoup ont tout lâché toutes affaires cessantes, sautant dans le premier avion pour débarquer du Canada, des Etats Unis, du Mexique, d’Angleterre, de Suisse, d’Inde... Les différentes interventions ont toutes certains points communs : elles sont totalement sincères, sobres, profondes.

Ce n’est qu’à 18h30, lorsque tout est pratiquement rangé et la plupart des participants repartis au quatre coins de France (ou du monde) que je décide d’aller découvrir le samadhî d’Arnaud. Le voici, en pleine forêt, au milieu des chants d’oiseaux... Il jouxte le jardin de méditation, avec son petit bassin tranquille rempli de poissons d’or... Des cèdres, un bel eucalyptus, et des pins entourent l’enceinte du samadhi délimité par un petit muret clair. Du gazon frais a été posé tout autour de la tombe. A l’avant, un amoncellement de brins de buis : chacune des personnes entrant dans le samadhî en a déposé un... La tombe est recouverte de fleurs blanches.
Il y a quelques années, Emmanuel avait demandé à son père ce qu’il aimerait avoir comme inscription sur sa tombe, le moment venu. Arnaud avait répondu par une boutade... Il avait répondu qu’on pourrait inscrire : « C’était un chic type... et... pour la Libération, c’est possible, mais ce n’est pas de la tarte !!!» Rien n’est inscrit sur sa tombe, sinon notre amour à tous, invisible et pourtant tangible. Dans la lumière dorée du soleil déclinant, la photo de Mâ rayonne paisiblement, au milieu d’un mélange de roses jaunes, blanches, roses et d’une plante de couleur vert tendre... Comme c’est beau.... Quelle harmonie... Au bout d’un moment, je prends conscience qu’une grâce surnaturelle émane de la photo de Mâ, des fleurs qui l’entourent et aussi de la tombe d’Arnaud : C’est à la fois doux et puissant, cela évolue et devient de plus en plus large. Le Disciple a rejoint sa Mère divine... Arnaud, disciple de Swami Prajnanpad, avait parfois dit qu’au moment de mourir, il se confierait à Mâ. Devant certains disciples étonnés, il avait précisé : Swamiji, c’est le Guru, c’est lui qui concentrait toutes les influences, les bénédictions reçues par Arnaud, et c’est à lui que j’obéissais en toutes circonstances. Mais Mâ, elle est vraiment divine....» Arnaud, si proche de Mâ par le coeur... Arnaud qui s’est trouvé parfois tout seul avec Elle... peut-être lors des jours bénis de la retraite de Vyndiachal, tout petit ashram de Mâ perché sur une colline. Arnaud écrivait, au sujet de Vyndiachal, dans Ashrams:
« Plus de cérémonie, plus de règles pour approcher Mataji. Nous allons librement dans sa chambre, nous nous promenons avec elle dans les bois. Aucune distance entre elle et nous, seulement l’intimité et la familiarité (...) Au loin, la rivière dessine son ruban scintillant au soleil qui décline. Tout est amour et recueillement. Dans le silence, un de ses disciples lit doucement. Mâ ne dit rien. Nous ne disons rien. Elle nous regarde. Nous la regardons. Et tandis qu’avec la nuit descend sur nous la Paix qui dépasse toute compréhension, nous voyons briller dans ses yeux la lumière de la Vie véritable, l’annonce que l’éveil peut venir nous arracher à notre monde de sommeil ».1

Arnaud a pratiqué de façon suffisamment intense pour réaliser la promesse que recelait le regard de Mâ. Bien des fois, j’ai lu à mon tour dans les yeux d’Arnaud la splendeur de l’éveil, une telle splendeur que son regard ressemblait à un rayonnement doré. J’ai senti, comme bien d’autres, un amour merveilleux littéralement jaillir de ses yeux, de son corps, de ses gestes et me bouleverser dans l’intime de mon être. Et là, devant sa tombe claire, dans la lumière dorée du soir, m’est donnée cette perception, très tangible, indubitable : Arnaud et Mâ, à présent sont complètement unis dans ananda, la splendeur et aussi la douceur de l’amour divin. Cela rayonne du visage de Mâ, des fleurs qui entourent sa photo, cela émane de la tombe d’Arnaud dans une grâce indicible. C’est si fort, si beau, que je reste encore et encore... D’autres personnes arrivent, s’asseyent un instant, repartent tranquillement. Tout est amour et recueillement. Au loin, l’Eyrieux dessine son ruban scintillant au soleil qui décline... (mais on ne voit pas la rivière pourtant proche de l’ashram.) Dans l’or oblique du soir, un homme très proche d’Arnaud vient avec ses 2 petits enfants, qui, tout contents, déposent joyeusement leur petit brin de buis. Leur père les regarde paisiblement, avec amour... La vie continue. Guru kripa kevala... Tout est la grâce du Guru. Chaque évènement, dans chacune de nos existences, petit ou grand, est la grâce du Guru à l’oeuvre. Puissions nous nous en souvenir. A présent qu’Arnaud a quitté son corps, sa présence immatérielle est partout, et pour ceux d’entre nous qui lui ouvriront leur coeur, il ne nous quittera jamais plus. Puissions nous ne jamais le quitter. Puissions nous, à travers sa Grâce et notre pratique, Etre UN avec la sérénité et l’amour qui n’ont pas de contraire... Puissent la Paix qui dépasse toute compréhension, la lumière de la Vie véritable descendre sur nous...
Toutefois, étant humaine et faillible, je pourrais aussi chanter, avec notre ami Jerry, la chanson Comanche : « Maintenant que tu es parti pour le grand voyage, et comme je t’aime si profondément, tu vas me manquer...»

Sundarî



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