jeudi 17 septembre 2015

Extrait d'une interview de Guy Béart

Actualité Juive l'avait rencontré en novembre 2010... extraits :

«Pessimiste gai» : cet oxymore vous correspond-il ?


G.B. : J’ai quatre-vingts ans et aujourd’hui, je suis plutôt plein d’espérance et toujours gai. Il faut relire l’Ecclésiaste, l’un de mes livres de chevet. C’est un livre poétique qui nous montre que tout recommence interminablement. La Bible m’a appris l’amour et la foi. Mieux vaut garder l’espérance. Que recommandent les dernières pages de l’Ecclésiaste si ce n’est d’aimer la vie ?

Vous êtes né au Caire. On dit que votre nom d’origine est Béhar...

G.B. : C’est ce qui est indiqué sur Internet mais je n’en sais rien. Ma mère m’a enseigné les rituels juifs que je connais très bien. Moïse, pour moi, représente le devoir. Dans ma Bible est marqué que D’ieu dit plusieurs fois à Adam et Eve : «Croissez et multipliez». Pourquoi, me suis-je demandé, avoir utilisé deux verbes pour dire la même chose alors que la Bible cultive un style très concis ? La vraie phrase est en fait «Croissez en nombre et multipliez en sagesse», ce que m’a confirmé mon ami Raphaël Draï. Or, depuis la Mésopotamie, on a augmenté le nombre, mais on n’a pas augmenté la sagesse. Moi, j’ai peur des foules. Il y a d’ailleurs quelque part dans l’Exode : «Ne suivez pas le nombre». D’où ma chanson «Le premier qui dit la vérité...». Elle parle de «La foule sans tête», manipulée.

Quelle part de judéité avez-vous transmise à vos enfants dont la plus célèbre, Emmanuelle ?

G.B. : C'est dans mes chansons, où je pèse chaque mot, que j'exprime au mieux ma vérité. Dans «Messies, Mais si !» en 1973, je dis que l’'islam pense qu'il n'y aura pas de Messie. Le christianisme, qu'il est déjà venu, mais doit revenir. Le judaïsme, qu'il doit venir. Je pense que c'est une incitation à ce que chaque être humain se comporte en messie afin de sauver les autres. À mes enfants, j’ai parlé des rites qui, selon moi, sont ce qu’il y a de plus important. Connaissez-vous l’histoire du rabbin qui arrive dans une communauté ? Il rencontre un Juif et lui demande s’il croit en D’ieu. L’autre lui dit qu’il lui répondra une autre fois. Le lendemain, le rabbin lui pose à nouveau la question et l’homme ré- pond par la négative. «Pourquoi ne m’as-tu pas répondu hier ?» demande le rabbin. «Parce que c’était Shabbat !». J’aimerais terminer sur un Proverbe que j’aime particulièrement : «Ecoute, mon fils, les règles de ton père mais n’oublie pas la Thora de ta mère».