lundi 26 août 2013

Vivre la vacance... avec Cécilia Dutter

Depuis peu, je ne conçois plus les vacances comme un intervalle vide mais comme un espace privilégié permettant de me relier à l’essentiel. Loin de les craindre, elles sont devenues le lieu d’une présence attentive à moi-même, au monde et à Dieu, moment de grâce où don et offrande de la vie se confondent en une communion parfaite. C’est pourquoi, après les avoir exécrées, je les chéris désormais. 

La « mise sur pause », à condition qu’on l’accepte, implique un recentrage salutaire. Elle ouvre à cette dimension sacrée de l’existence qui, bien souvent, nous échappe au quotidien. Avez-vous constaté comme sans cesse nous quémandons notre dû ? L’époque nous incite à nous perdre dans le divertissement. Il nous faut « profiter » ! Des biens, des gens, des opportunités, de la vie que les médias nous exhortent à consommer avec rage. Et si les vacances nous apprenaient justement à ne plus rien revendiquer… Si l’on se découvrait « entier », sans le moindre manque, en prenant soudain conscience que tout est là, sous nos yeux, et que nous participons à ce tout et l’enrichissons de notre regard d’amour. 

Rilke, poète de l’intériorité par excellence, a si bien su traduire cette idée de beauté et d’unité à travers son œuvre. Magda Von Hattingberg, jeune pianiste avec laquelle il entretint une correspondance passionnée, se révèle à la hauteur de son génie. En une phrase, elle dit la béatitude d’être, de sentir la vie autour de soi et d’y prendre pleinement part : « Peut-être n’avez-vous jamais rencontré quelqu’un qui a su trouver de la richesse dans la seule béatitude d’être là (…), parce qu’il était lui-même la promesse et l’accomplissement de sa propre existence » (Lettres à une musicienne). 

Quand ­Matthieu (6,34) rapporte ces paroles de Jésus : « Ne vous inquiétez donc pas du lendemain. (…) À chaque jour suffit sa peine », ne nous incite-t-il pas, lui aussi, à déposer le fardeau du passé et du futur pour saisir l’ici et maintenant ? 

Bonne ou mauvaise, l’année s’est écoulée. À quoi bon la ressasser ? La rentrée se profile à l’horizon et avec elle, le rouleau compresseur de la routine et des tracas. Pourquoi l’anticiper ? Le présent est si doux… Faisons-le durer encore un instant.


Cécilia Dutter (la Vie 2013)