samedi 15 janvier 2011

Eloge de la gratitude (3)

Philosophe et écrivain, ce père de trois enfants s'est battu pour donner sens à sa vie avec le handicap. Son dernier livre, le Philosophe nu (Seuil), est un traité plein d'humour sur l'art du détachement.
Merci aux trois regards qui m'accueillent tel que je suis...

UNE EPREUVE. Vivre un handicap au jour le jour peut devenir un lieu de progrès spirituel. Je tremble en disant cela. car je ne veux pas tomber dans le dolorisme. Ce n'est pas la souffrance qui grandit, mais ce que l'on en fait. Pour nourrir une ascèse, tenter de vivre la joie là où elle se donne et oser un peu l'abandon. Les bons jours, je dis merci à cette épreuve. Parfois, je la maudis presque. La gratitude ne nie pas le tragique de l'existence, mais aide à trouver au cœur des tourments matière à progresser et même à se réjouir. Elle ouvre à l'autre et nous décentre. Si la douleur nous replie sur nous-mêmes, s'exercer à la reconnaissance révèle tout ce qu'on reçoit de bien d'autrui, de l'existence et même de l'épreuve. En ce sens, je suis lié à l'autre. Mon foyer surtout, ces quatre visages, ces regards qui m'accueillent tel que je suis, avec mes hauts et mes bas. Ma gratitude consiste à faire du quotidien mon miel, garder le cœur ouvert sur ce que chaque jour me donne.