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samedi 23 août 2025

Flux d'amour

 


« Quand nous entrons en amour, toutes les catastrophes nous guettent.

Pourquoi ? Parce que nous nous leurrons. Nous croyons que l'amour vient de nous être octroyé par la personne que nous aimons - et que cette personne détient l'amour. Or l'amour n'est aux mains de personne. Ni entre mes mains, ni entre les siennes. Il est entre nous. Il est ce qui, entre nous, s'est tissé depuis notre première rencontre, ce que l'espace insaisissable entre nous a engendré et continue d'engendrer d'instant en instant. Une œuvre fluide et perfectible à l'infini.»

Christiane Singer - N'oublie pas les chevaux écumants du passé 

Marc Chagall - Les amants bleus (1914)

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jeudi 24 juillet 2025

Rester éveillé avec Christiane Singer

 Etre en contact avec la liberté de la dimension religieuse dans l'existence.


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dimanche 1 juin 2025

La vie s'invente


 "Oui il est grand temps de révéler à nos enfants – de nous révéler à nous-mêmes – l'autre versant du monde !

Celui où jour après jour s'invente la vie – les mille gestes d'amour, de compassion, de tendresse – les multiples mains qui bénissent, caressent, plantent, sèment, rêvent, se joignent pour prier – jour après jour – sans se lasser.

Car le monde doit de tenir debout, à cette conspiration de l'amour, à cette clandestinité de la tendresse et de la louange."

Christine Singer 1943-2007

peinture: Amrita Sher-Gil 1913-1941 - tribal women 1938

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mercredi 14 mai 2025

Le jour où tout a changé



J’ai goûté, dit-elle, comme par mégarde, à la saveur d’Être. Et ce simple mot, ce mot qui pourrait glisser entre deux silences sans qu’on y prenne garde, devient ici le seuil. Non pas un événement, mais un basculement. Non pas une pensée, mais une saveur. C’est un peu comme si l’âme avait bu à la source, à peine une gorgée, mais que toute la soif du monde s’en trouvait changée.
Il est des instants où le temps s’écarte. Où l’on cesse de vouloir comprendre. Où l’on ne cherche plus à plaire, à convaincre, à blâmer. Il est des instants où l’on devient nu — comme le ciel après la pluie, comme un visage sans rôle, sans masque, sans défense. L’Être alors se donne. Non pas avec éclat, mais avec cette douceur ferme des choses essentielles : le pain, l’arbre, le regard de celui qui sait.
Quelque chose en moi, dit-elle encore, n’est pas né avec moi et ne mourra pas avec moi. Cette parole-là, on ne la dit pas sans frémir. Elle est ancienne, plus ancienne que les livres et les prières. C’est la parole du Soi, dirait Jung. Le cœur du cœur, la source d’où tout naît. C’est cette part de nous qui ne craint ni la mort ni le chaos, car elle n’y appartient pas. Elle nous habite, sans jamais nous posséder.
Et quand cette part se révèle, même pour une seconde, tout ce que l’on croyait savoir s’effondre. Il n’y a plus de plainte, plus d’accusation, plus de vouloir. L’autre cesse d’être ennemi ou allié. Il devient frère de passage. Et le monde cesse d’être un théâtre. Il devient un champ. Un jardin. Un désert sacré.
Et alors — ô miracle discret — les choses apparaissent dans leur vérité nue. Un bol devient un bol. Une main devient une main. Le vide lui-même devient lumineux.
On voudrait s’agenouiller devant cela, mais il n’y a rien devant quoi s’agenouiller. Tout est là. Rien de spectaculaire, et pourtant… tout est changé.
À ceux qui cherchent des preuves, on ne pourra rien dire. L’Être ne se démontre pas. Il se goûte. À ceux qui veulent l’atteindre, il faudra dire : il vient quand tu ne le poursuis plus. Il est timide, comme la grâce. Il est entier, comme le chagrin pur.
Et ceux qui l’ont entrevu ne le gardent pas comme un secret. Ils le vivent comme une évidence. Non pour s’en faire un blason, mais pour marcher autrement. Pour aimer un peu mieux. Pour écouter davantage. Pour parler moins.
Christiane Singer ne donne pas de méthode. Elle n’enseigne pas. Elle offre. Elle donne à voir une saveur. Et cela suffit. Car celui qui a goûté à l’Être n’a plus besoin de convaincre. Il sait. Il ne sait pas quelque chose, il est ce savoir.
Et cela — cela suffit.

Laurent Brun Lafferrere
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lundi 3 février 2025

Le quotidien à vivre


L'extrait ici de l'interview de Christiane Singer (dans l'émission Visages en 2007) est très instructive sur notre position quotidienne dans l'existence.


A écouter avec une attention neuve : juste ici


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mardi 10 décembre 2024

La construction d’un amour adulte de Christiane Singer


Qui prend aujourd’hui la peine de prévenir les jeunes couples que la traversée d’une relation d’amour est une affaire périlleuse ? L’illusion que la relation doit rester gratifiante distille un poison. Or, prendre conscience que bâtir un amour est une œuvre difficile ne constitue pas une raison de ne pas l’oser ! Tout au contraire ! Que serait une vie où l’on ne tenterait pas le plus haut, le plus ardu, sinon une esquive et un rendez-vous manqué ?Oui, « l’autre » est une aventure périlleuse. Il est là pour m’accoucher de mes démons et de mes ombres. 

Aussi court-il le risque de devenir l’écran de projection de tout mon mal-être. Il est par excellence cet « empêcheur de tourner en rond » qui m’arrache à ma ronronnante identité, à l’enfermement qui sans lui me guettait ; il va faire brèche en moi, c’est à dire me mettre en vie et en métamorphose. Le drame contemporain, c’est la fuite des couples devant toute irritation et toute crise. Dès que cesse l’agrément d’être ensemble, beaucoup prennent leurs jambes à leur cou, ignorant que le plus beau de l’aventure va tout juste commencer : la construction d’un amour adulte.

Christiane Singer

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vendredi 27 septembre 2024

Laisse donc...


"Ce qu'il y a à vivre, il va falloir le vivre.
Faire des plans d'avenir :
C'est aller à la pêche là où il n'y a pas d'eau.
Rien ne se passe jamais comme tu l'as voulu ou craint.
Laisse donc tout cela derrière toi.
La vie s'écoule
Avec la précipitation écumante
D'un torrent de montagne."
Christiane Singer
Derniers fragments d'un long voyage



peinture : Zao Wou-Ki 1921-2013


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jeudi 25 juillet 2024

Chemin qui nous retourne



 "Ce qui paraît à tant d'entre nous, dans certaines cultures, à tant d'époques, un exil sur terre, le fait d'être cousu dans ce sac de peau, prison terrible lorsque la souffrance en devient le geôlier, tout cela peut, par un retournement imprévisible, s'avérer chemin de délivrance et de lumière. "

 Christiane Singer


photos du jardin (juillet 2024)

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samedi 25 mai 2024

L'essentiel est partout


« Comme autrefois dans le ventre de notre mère le liquide amniotique où nous voguions, cet espace qui nous entoure est l’espace nourricier. L’essentiel est ENTRE. L’essentiel est dans le mouvement de navette entre les bords, entre les rives, de l’instant de la naissance à l’instant de la mort, de ma bouche à votre oreille, de votre cœur au mien, de l’aube au crépuscule. L’allée et venue entre l’homme et la femme, l’espérance et la désespérance, le monde visible et le monde invisible, le temps horizontal et l’éternité. L’essentiel respire ENTRE.

L’essentiel n’est pas dans un lieu situé dans un âge d’or qu’il s’agirait de retrouver. Il n’est de fidélité au passé que dans l’avenir, que dans cet élan vers l’avant ! Dès que l’on s’arrête dans un lieu, c’est déjà un casus belli qui s’annonce : il va falloir le préserver, le défendre. Ainsi, le tombeau du Christ : des générations entières ont cru qu’Il était là, dans ce tombeau, et qu’il fallait le défendre ! Or le tombeau du Christ n’est nulle part ailleurs que dans nos cœurs de pierre.


L’essentiel n’est pas là où notre raison, notre intellect le cherchent (bien qu’il puisse y être aussi, comme partout ailleurs). Il n’est pas dans les lieux où on l’annonce avec solennité (bien qu’il puisse y être aussi, comme partout ailleurs). Il n’est pas à la place où on l’a rencontré la dernière fois et où l’on retourne le cœur battant (bien qu’il puisse y être aussi, comme partout ailleurs).

Si l’essentiel te semble parfois n’être nulle part, c’est en fait qu’il peut être partout à tout instant.

« Quand tu fends du bois, je suis là. Quand tu soulèves une pierre, je suis sous la pierre. Ne me cherche pas ailleurs que partout. » dit l’Evangile de saint Thomas.

Si l’essentiel est partout, il ne manque plus que nos yeux pour le voir…Ouvrir les yeux, sortir de l’anesthésie féroce de nos coeurs ! Nous laisser attendrir, toucher par la gratitude d’être vivants ! Non pas des voyeurs, des (télé)spectateurs consentants de la destruction du monde, mais des témoins de la merveille du monde crée ! »

Christiane Singer

(N’oublie pas les chevaux écumants du passé)

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mardi 13 février 2024

L'entre-nous


Je n’existe pas. Tu n’existes pas.
Mais ce qui existe (…)
c’est ce qui s’est tressé entre nous,
ce qui est filé entre nos deux quenouilles,
la relation, l’entre-nous.

Lorsque je comprends que tout ce qui détermine mon existence
définit l’exact périmètre de ce qui n’est pas important
et que tout ce qui me relie à la création est le Vivant

– alors seulement la bonne existence peut commencer.

(Christiane Singer)

Recueil: Du bon usage des crises
Editions: Albin Michel
(l'arbre à lettres)

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samedi 27 janvier 2024

L'œuvre de la maturité


 "Dans l'avancée de la maturité et l'approche de la vieillesse, il est un ... phénomène qui frappe :  le rajeunissement progressif du cœur et de l'âme.

Depuis toujours, je pressentais que la nature ne pouvait pas vouloir la déchéance de l'homme.   Aujourd'hui, je le sais.

Si la deuxième moitié de l'existence ne recelait pas un projet, nous serions éliminés - comme le sont certains animaux - après le cycle de la fécondité.

Ce projet qui nous est confié est invisible à l'œil.

J'aurais la tâche légère si je me plaignais de maux de dents : même si j'étais la seule à pouvoir vérifier mes dires, personne ne douterait de ce que j'avance.   Mais si j'affirme que mon âme et mon cœur rajeunissent de jour en jour, je ne serais pas étonnée que certains n'y voient qu'une licence poétique. Ou un sujet d'agacement. Et pourtant!

Dans la jeunesse, l'âme n'est pas jeune.   Elle est percluse du rhumatisme des modes, plie sous les idéologies, les normes en vigueur.  L'Alzheimer juvénile la ronge :  l'oubli de tout ce que l'enfant savait encore sur le sens profond des choses.  La jeunesse transbahute tous les préjugés qu'on lui a inculqués, les jugements féroces, les catégories assassines. Elle est souvent dure comme le monde qui l'accueille. Sa lumière est sous le boisseau.

Ce long travail de la libération de l'intelligence, ce déminage du terrain après tant d'années d'occupation étrangère sont l'œuvre de la maturité.  Quand l'obligation de faire un avec sa génération n'est plus une question de survie, on peut enfin écarter les œillères, laisser venir la clarté. Comme dans les grandes forêts où l'automne, en dépouillant les branches, donne le ciel à voir.

"Il faut toute une vie, écrit Jean Sulivan, pour élargir son cœur, ses opinions, pour conquérir sa liberté spirituelle."

Toute une vie.

Voilà une chance à ne pas manquer."

Christiane Singer - N'oublie pas les chevaux écumants du passé

Image:  Portrait d'un vieillard, de Rembrandt

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mardi 5 décembre 2023

Traversée à deux...


 "QUI PREND AUJOURD'HUI la peine de prévenir les jeunes couples que la traversée d'une relation d'amour est une affaire périlleuse ?

L'illusion que la relation doit rester gratifiante distille un poison.

Or, prendre conscience que bâtir un amour est une œuvre difficile ne constitue pas une raison de ne pas l'oser ! Tout au contraire ! Que serait une vie où l'on ne tenterait pas le plus haut, le plus ardu, sinon une esquive et un rendez-vous manqué ?

Oui, "l'autre" est une aventure périlleuse. Il est là pour m'accoucher de mes démons et de mes ombres. Aussi court-il le risque de devenir l'écran de projection de tout mon mal-être.

Il est par excellence cet "empêcheur de tourner en rond" qui m'arrache à ma ronronnante identité, à l'enfermement qui sans lui me guettait ; il va faire brèche en moi, c'est à dire me mettre en vie et en métamorphose.

Le drame contemporain, c'est la fuite des couples devant toute irritation et toute crise. Dès que cesse l'agrément d'être ensemble, beaucoup prennent leurs jambes à leur cou, ignorant que le plus beau de l'aventure va tout juste commencer : la construction d'un amour adulte."

Christiane Singer

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dimanche 18 décembre 2022

Benoît Billot : « Arrête, où cours-tu ? »

En cette période de l’Avent 2022, le bénédictin Benoît Billot confie : « Tout m’appelle à reconnaître la Présence cachée en moi, en toi, en nous… » Et si nous en faisions notre programme de vie pour les semaines à venir en tâchant de rompre avec nos habitudes de hâte et d’avidité ? Mode d'emploi.

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Longue file devant une porte qui donne accès au parc de la préfecture ; ils étaient là depuis 5 heures du matin : des immigrés, femmes et hommes, tous en quête du sacro-saint titre de séjour. Ils en avaient tant besoin. Mais ici, calmes et silencieux, peut-être résignés, peut-être révoltés.

Certains écoutaient une quelconque musique. D’autres les yeux fermés semblaient prier. Ils savaient bien ce qu’attendre signifiait pour eux. J’avais accompagné un des frères de ma communauté, étranger lui aussi, et il était maintenant en bonne place dans la file.

À 7 heures, un petit groupe de bénévoles était apparu avec thermos de café et gobelets. Des sourires et paroles gaies les avaient accueillis lorsqu’ils avaient remonté la file. À 8 heures, agitation générale : deux vigiles s’étaient manifestés derrière la grille et l’avaient ouverte, libérant le flot qui se précipitait vers la salle des guichets. Rituel qui se répétait trois fois par semaine, avant le Covid, il y a quatre ans.

Une Présence cachée en nous

Aujourd’hui il n’y a plus de queue fatigante, mais c’est bien pire : la prise de rendez-vous se fait par informatique, avec des procédures interminables et incompréhensibles. Ces demandeurs, quel espoir insensé les a donc amenés dans notre pays ? Réponse simple pour la plupart : le désir de vivre, inscrit au plus profond d’eux-mêmes.

Pourtant, les tracasseries administratives leur font bien comprendre l’opposition de nombreux habitants de notre pays. Nous venons de le constater avec l’aventure de l’Ocean Viking. Pour répondre à ce désir, nombre d’entre eux ont affronté les pires dangers et les mers, prêts à risquer leur vie plutôt que de vivoter dans la frustration. Ils s’obstinent donc, attendent, et savent pourquoi.

Savoir quoi espérer et comment attendre ! Certes, tout être humain vit espoirs et attentes. Mais qui ira plus loin et fera l’expérience essentielle de toute vie spirituelle : ressentir qu’à la source de ces attentes se fait entendre un cri déchirant vers un Ailleurs, pourtant niché dans l’ici et maintenant ?


Et découvrir qu’il y a une Vie cachée en toute vie, une Présence au-delà de toutes les présences, un À-venir au-delà de tous les projets d’avenir. Expérience donnée comme une grâce à ceux qui s’y préparent. Thich Nhât Hanh, maître de sagesse bouddhiste, conseillait : « Arrivé dans un bouchon de la circulation, ne t’énerve pas, regarde les feux stop de la voiture qui te précède : ce sont les yeux de Bouddha qui te regardent. »

Quatre semaines pour s’exercer

Saine sagesse spirituelle du désir et de l’attente, nécessaire pour les grands insatisfaits que nous sommes, nous qui voulons avoir tout, et tout de suite. Angelus Silesius écrivait en 1675, dans le Pèlerin chérubinique : « Arrête, où cours-tu donc, le ciel est en toi : et chercher Dieu ailleurs, c’est le manquer toujours. »

Christiane Singer en avait même fait le titre d’un de ses livres. Tout m’appelle à reconnaître la Présence cachée en moi, en toi, en nous, dans nos rencontres, nos travaux, nos rêves, nos erreurs et nos impatiences. Depuis ma conception, je suis dans la file. J’y accueille avec reconnaissance la présence de mes compagnons d’attente, et la visite de celles et ceux qui viennent me soutenir. J’ai à découvrir que je suis dans la longue recherche d’un titre de séjour. Pour poser mes pieds sur le roc solide de la vie, le Royaume, qui n’est pas ailleurs, mais au fondement de ce que je suis… en attendant la naturalisation, que dans ma tradition on nomme Résurrection.

Malgré ses abominations, l’Église est bonne Mère : elle fait le cadeau de quatre semaines avant Noël pour s’y exercer ensemble. Seulement continuer la vie habituelle en la débarrassant de la hâte, de l’avidité, dans la conscience de ce « ciel en moi ». Il est là, je n’en puis douter : j’en ai eu tant de signes. Encore une parole d’Angelus Silesius : « Le Christ pourrait naître mille fois à Bethléem, s’il ne naît en ton cœur, sa naissance ne sert à rien. »


Benoît Billot est bénédictin, moine dans la ville au prieuré Saint-Benoît d’Étiolles, dans l’Essonne. Adepte du zazen, il a fondé la Maison de Tobie. Il a notamment publié Lumières dans l’ordinaire des jours et l’Énergie féconde des sacrements (Médiaspaul).

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mercredi 17 août 2022

Espace non menacé...


Ce que j'appelle amour est entier dans cette phrase d'un rabbin rescapé d'un camp de la mort : “La souffrance a tout calciné, tout consumé en moi, sauf l'amour.” Si cette phrase nous atteint de plein fouet, c'est que nous sentons bien combien nous sommes loin des représentations, du décorum de l'âme. L’amour est ce qui reste quand il ne reste plus rien. Nous avons tous cette mémoire au fond de nous quand, au-delà de nos échecs, de nos séparations, des mots auxquels nous survivons, monte du fond de la nuit comme un chant à peine audible, l'assurance qu'au-delà des désastres de nos biographies, qu'au-delà même de la joie, de la peine, de la naissance et de la mort, il existe un espace que rien ne menace, que rien jamais n’a menacé et qui n’encourt aucun risque de destruction, un espace intact, celui de l’amour qui a fondé notre être.

Où cours-tu ? Ne sais-tu pas que le ciel est en toi ? de Christiane Singer

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samedi 11 juin 2022

Faire corps avec son corps

 


Mystère de cette incarnation… 

Ce qui paraît à tant d’entre nous, dans certaines cultures, à tant d’époques, un exil sur terre, le fait d’être cousu dans ce sac de peau, 

prison terrible lorsque la souffrance en devient le geôlier, 

tout cela peut, par un retournement imprévisible, s’avérer chemin de délivrance et de lumière.

Il n’est pas d’engagement possible en amour sans le respect des corps.

Sans un saisissement devant l’énigme du corps – l’alambic de toute alchimie !

Le corps est cette œuvre d’un grand luthier qui aspire à la caresse de l’archet. 

"Tout ce qui vit aspire à la caresse du Créateur", dit Hildegarde von Bingen. 

Séparé de la résonance à laquelle aspire ce corps, séparé de la musique pour laquelle il a été créé, 

il perd sa tension, 

il s’affaisse, 

il se laisse aller, 

il se désespère. 

Nous vivons à une époque où rien ne nous dit la merveille de l’ordonnance du corps ; on croit vraiment que se laisser aller est une manière de se sentir mieux, 

personne ne nous signale : attention, ton chevalet est déplacé, ta corde est distendue, le maître ne peut pas jouer sur toi.

Ces corps inhabités de tant d’entre nous aujourd’hui, qui, à défaut d’entrer dans la résonance pour laquelle ils étaient créés, 

vont se rouiller, 

se déglinguer, 

perdre le souvenir de ce qu’ils sont. 

Pourtant, nous le savons tous, la mémoire du corps est la plus profonde.

Corps ami, 

corps connu, 

corps de la maturité, 

mon corps. 

Façonné par la longue route parcourue- l'amour, l'effort, les maternités, les empoignades, les désespoirs, les maladies, la bagarre, les délices -, je le déchiffre à livre ouvert. 

J'ai enfin cessé de rôder autour de lui pour élire en lui domicile. 

Sa force me ravit aujourd'hui, tout comme d'avance, j'acquiesce aux métamorphoses claires et sombres qu'y opérera la vieillesse. 

Notre amitié est scellée. 

Sans trahison, je l'accompagnerai jusqu'au dernier spasme. 

Désormais, je fais corps avec lui.

Christiane Singer

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mardi 21 décembre 2021

Profonde traversée

 Il devient de plus en plus difficile d’obéir à ses intuitions profondes dans une société d’humains qui les transforment aussitôt à votre place en idéologies, principes, points de vue, raisonnements et les réduisent à une étiquette qu’ils vous collent sur le front pour vous réduire à une caste où vous vous sentez vous-même étranger. 

Il faut du courage et surtout une foi inébranlable en la Vie pour continuer à lui obéir et résister aux tentacules des égrégores de toutes sortes. 

Je repense souvent à cette phrase que Christiane Singer m’a cité un jour que je lui partageais une de mes épreuves :  « Traverse noble fils, traverse , porte fièrement ta couronne et reste debout au milieu de ton désastre ! »

Cette voix résonne toujours en moi quand j’en ai besoin comme aujourd’hui……

Vincent Houba







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vendredi 26 novembre 2021

Chemin complet



"Seul celui qui a osé voir que l'enfer est en lui y découvrira le ciel enfoui" 

Christiane Singer

Gravure: M.C.Escher - Anges et démons

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lundi 8 novembre 2021

Voir autrement (conseil de l'hexagramme 20)

Hexagramme 20 : VOIR 


Une prise de conscience salutaire
En changeant de regard, il arrive souvent de découvrir des choses que jusqu’ici l’on ne voyait pas... ou que l’on ne voulait pas voir. Cesser d'avoir les yeux rivés sur son petit souci (car il est presque toujours « petit », si nous le considérons car rapport à notre vie entière, et à LA vie dans son ensemble), c’est aussi avoir le courage d’en découvrir tous les tenants et aboutissants, y compris ceux qui dérangent, sans se laisser déstabiliser pour autant. Savoir élever son point ce vue, c'est aussi être sûr de soi et avoir confiance dans ses propres facultés de jugement.


Voir ce qui n’est pas visible à première vue
L’hexagramme nous incite à mieux regarder, non seulement avec nos yeux, mais avec toutes nos facultés de perception. Tout comme la chouette qui voit dans le noir, nous pouvons appréhender ce qui est invisible ; encore faut-il avoir accès à notre « œil intérieur », que nous tendons trop souvent à mettre en veilleuse.. C’est lui qui va vous permettre de voir ce qui normalement vous échappe, d’aller au-delà des apparences en aiguisant vos facultés d’intuition.

Un regard perçu par les autres
Ceux qui savent vraiment voir ce qui les entoure et en perçoivent les aspects cachés ont souvent un regard plus brillant et plus perçant que celui des autres ; cette intensité n’échappe pas à ceux qui les entourent. Élever son point de vue traite aussi du charisme, celui d’une personnalité dont le rayonnement peut influencer l’entourage et qui se doit d’en tenir compte.

Coup de projecteur

L'hexagramme 20 nous parle d’une qualité malheureusement très rare, l'impartialité. Être capable d’envisager un problème dans sa globalité, en sortant des limites étriquées de notre vision des choses et de nos intérêts personnels, est une des choses les plus difficiles qui soient. En effet, nous sommes en quelque sorte «enfermés» à l’intérieur de nous-mêmes, ce qui nous empêche de nous voir tels que nous sommes. Cette incapacité nous porte à projeter nos propres défauts sur les autres : c’est là tout le sens du vieux proverbe de la paille et de la poutre. Élever son point de vue, c'est essayer de mieux nous «voir» en oubliant nos désirs, nos espoirs et nos craintes. C’est aussi nous démarquer par rapport à l’opinion des autres, conserver notre intégrité et rester imperturbable en toutes circonstances, même les plus difficiles.

Extrait de "Prendre les bonnes décisions avec le Yi King, de Nathalie Chassériau


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dimanche 19 septembre 2021