lundi 21 octobre 2024

Passage d'un monde à l'autre

 Voici ma recension du dernier livre de Lily Jattiot, "Apocalypse - Passage d'un monde", un ouvrage passionnant ! Bonne lecture !

Lily Jattiot est psychanalyste jungienne, proche d’Arnaud Desjardins. Elle publie ici son quatrième ouvrage aux éditions Accarias L'Originel

Dans un langage clair, elle fonde son interprétation de l’Apocalypse biblique sur ses connaissances, son cheminement intérieur et son regard lucide sur notre monde contemporain, dont elle éclaire les nœuds et les tragédies en les replaçant dans une perspective liée à l’aventure universelle de la conscience : dans ce livre passionnant, nos cataclysmes se retournent, deviennent passages à vivre, ombres ouvertes à la Lumière, marches vers l’Immense.
Le premier chapitre nous expose les trois principes fondateurs de sa pensée. Premièrement, l’être humain est fondamentalement religieux : même s’il se dit athée, il cherche toujours à se relier à une dimension transcendante, qu’il sacralise. Deuxièmement, le monde psychique fait partie de la réalité objective : il contient les images archétypiques qui reflètent le Réel lui-même (au-delà de la distinction sujet/objet, esprit/matière…), source de toute joie. Troisièmement, il existe une analogie profonde entre les réalités supérieures (la lumière, le bien, la rationalité…) et inférieures (l’ombre, le mal, la subjectivité…) : les lois sont identiques d’une extrémité à l’autre de l’univers, parce que tout réside dans l’Esprit intemporel, dont la nature est d’Être.
Le chapitre 2 invite à prêter attention aux passeurs de l’Esprit, souvent peu visibles, qui œuvrent discrètement pour la guérison du monde, même à notre époque : l’effondrement de nos repères rejoint la notion d’Apocalypse, qui signifie « révélation », laquelle ne peut s’opérer que par ces passages vers un autre monde que nous vivons au long de notre existence, entre les deux transitions les plus spectaculaires que sont notre naissance et notre mort, et dont nous avons à saisir la symbolique au moment où nous les traversons.

Le chapitre 3, le plus long, expose en détail la symbolique de l’Apocalypse, le dernier livre de la Bible de Jérusalem. Il s’agit d’un récit visionnaire et prophétique de la fin du premier siècle après J-C. C’est un message de grande Espérance, qui traverse les âges par la puissance de ses symboles. Lily Jattiot commence par nous résumer ce mystérieux récit, depuis la libération des catastrophes par l’ouverture des sept sceaux du Livre de l’Alliance jusqu’à l’avènement de la Jérusalem céleste. Ensuite, elle nous livre une interprétation, parmi d’autres possibles, précise-t-elle, des principaux éléments de ce récit :
1) Les justes, parmi lesquels on distingue les êtres célestes (les anges, dépositaires de la hiérarchie des valeurs) et terrestres (les quatre Evangélistes, témoins de l’Unité et exemples d’humanité, et la femme enceinte, symbole de la puissance du féminin dans notre monde et de l’enfantement de l’Esprit).
2) Les êtres mauvais, dont le dragon (qui représente les forces archaïques de la psyché, la libido, l’énergie vitale, la dévoration et la démesure), la Bête immonde (qui terrorise et fascine par cet instinct de mort et cet aveuglement qui sévit jusqu’en nous-mêmes), les quatre cavaliers (symboles des principales folies de l’humanité : l’esprit de conquête, la colère haineuse, le désir calculateur et la maladie) et la Grande Prostituée (celle qui fait commerce de tout, crée de faux besoins et, au fond, se méprise elle-même).
3) La source divine, incarnée par l’Agneau : la reconnaître, c’est consentir à mourir à soi-même, à faire offrande, à se sacrifier (faire sacré) en renonçant à l’inessentiel, pour gagner la Jérusalem céleste, « lieu du grand repos dans la lumière divine »
4) Les nombres, qui gouvernent le rythme de la vie universelle : certains symbolisent l’achevé (1, l’unité, 4, la solidité, 7, la totalité parfaite, 12, le cycle parfait) et d’autres, l’inachevé (2, la dualité, 6, l’insatisfaction, 666, la séparation diabolique). Le nombre 3, lui, représente les deux à la fois : c’est le nombre du paradoxe divin.
Quant au chapitre 4, il propose trois perspectives : à la nécessité de s’unifier, collectivement et individuellement, pour accéder à un plan de conscience plus vaste, fait de clairvoyance et d’amour, succèdent le recours à la spiritualité (à condition d’en percevoir les pièges, tant en Orient qu’en Occident) et ce que l’auteure appelle la « voie de la Personne ou du Sujet » : « notre capacité de dire « je » toujours relié au grand « Je » », fruit de la spiritualité occidentale.

Sabine Dewulf
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