dimanche 23 juin 2024

Ombre et lumière


Mordom. Il s’appelait Mordom. Il était terrible. En tout cas je l’imaginais tel. Quoi qu’il eût le pouvoir de se rendre invisible (je ne l’avais jamais vu et chacun n’en parlait que pour dire son absence), il ne semblait pas appartenir à la galaxie des super-héros. J’avais épluché bien des comics, espéré tomber sur une page où il serait vaincu par Superman ou terrassé par Spiderman…

Mais pour cela, encore fallait-il offrir prise. Apparaître. Or, de Mordom, nous ne connaissions que le nom. Et cela suffisait à susciter l’effroi. Peut-être ce nom n’était-il qu’une variante, à partir de la première syllabe, de cet autre ennemi invisible, et par-là invincible, ce professeur Moriarty que jamais Watson ne verra et que Sherlock Holmes n’affronte physiquement qu’une seule fois, et encore, le jour de sa mort…

Mordom a-t-il un corps ? A-t-il toutes ses dents ? De quelle couleur sont ses cheveux ? N’est-il pas le diable lui-même, dont les noms mystérieux suffisent à inspirer la crainte : Satan, Lucifer, Belzébuth, Béelzéboul, Légion… ? À mesure que je grandissais, celui que j’imaginais comme une grosse brute au visage sombre devenait plus diaphane. Bien plus tard, je reconnus l’impression que me laissait Mordom dans les figures évanescentes et non moins terrifiantes que l’on trouve des nouvelles de Lovecraft. Il y a Cthulhu, évidemment, l’affreuse créature tentaculaire. Il y a surtout Nyarlathotep, démon à l’identité flottante, ombre qui plane, monstre dont la forme est celle que lui donnera votre propre angoisse…

Relativiser l’épreuve

Un jour, j’ai compris. J’ai compris que quand les adultes rencontrent une épreuve, ils éprouvent le besoin de la mettre en perspective, de la replacer dans un champ plus large. Bref de la relativiser. Ou bien de relativiser l’épreuve de leurs congénères, afin de n’avoir pas à s’y intéresser ou à les consoler. J’ai aussi compris que ce qui me distinguait d’un adulte était précisément ce recul qu’on acquiert face à la contrariété. Ce jour où j’ai compris, c’était avant l’école.

Ma mère revenait de la boulangerie. « Cette nuit, quelqu’un a visité notre voiture ! », nous annonce-t-elle. L’inconnu a pris un paquet de cigarettes qui traînait là et piqué la monnaie du parking dans la boîte à gants. « Bah, il n’y a pas mort d’homme. » Non pas le Mordom dont la présence aurait signifié pire que toutes les effractions. Non, seulement une façon de dire que ce n’est pas grave. Je me souviens : le pain était là, tout frais, mais il n’y avait plus de chocolat en poudre pour mettre dans mon lait. Comme il n’y a pas non plus mort d’homme, on m’a demandé de retenir mes larmes.


Sous un fond de grâce

Mordom n’est parti pas comme ça. Le pouvait-il seulement, lui qui jamais n’est venu ? Car jamais je n’entendis dire : « Il y a mort d’homme ! » Mordom m’a laissé sa leçon de sagesse. Quand il m’arrive aujourd’hui un peu plus qu’un lait chaud sans poudre chocolatée, ou qu’une visite de la boîte à gants, quand vraiment le bât me blesse, je sens avec une acuité particulière l’absence d’un mal qui fût pire.

Mordom a fait mieux. Il m’a confié une lumière pour éclairer sous un jour plus favorable mes épreuves. Relativiser l’adversité non en la maximisant par imagination peut mener à se rendre insensible. Plus sage encore est de reconnaître que l’épreuve n’a jamais lieu que sous un fond de grâce. On ne tombe malade que d’être en vie. Il n’y a de tension en famille que parce qu’il y a là une famille assez unie pour vivre les tensions. Nos disputes en couple écrivent l’histoire d’amour sans laquelle elles n’existeraient pas. Etc.

Mordom est devenu Rich. Car tout ça, n’est-ce pas, ce sont les problèmes de Rich.

 

Par Martin Steffens. 

Professeur de philosophie en classe préparatoire, il a notamment publié Petit traité de la joie. Consentir à la vie, Rien que l’amour. Repères pour le martyre qui vient, l’Amour vrai. Au seuil de l’autre (Salvator), et Faire face. Le visage de la crise sanitaire (Première Partie). Dernier ouvrage paru : Dieu, après la peur (Salvator).

source : La Vie 

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samedi 22 juin 2024

Deux cadeaux...

 Carte blanche à Jacques Arnould (ancien dominicain, chargé des questions éthiques au Centre national d'études spatiales)


source: magazine La Vie; juin 2024

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vendredi 21 juin 2024

Rêve


 « On rêve d'une minute de silence universel où le monde se tiendrait soudain immobile et muet, les yeux clos, attentif au seul respir du vent dans les arbres, au chuchotement clair d'un ruisseau, au déploiement d'une herbe dans la lumière, à l'unanime pulsation du sang dans les cœurs, une minute pour que le monde reprenne conscience et se réajuste à la seule réalité qui vaille, le pur sentiment d'exister un et multiple, entre deux néants, sur la terre perdue dans les cieux innombrables. »

Jean Pierre Siméon - La poésie sauvera le monde

peinture Charles Guilloux 1886-1946 - La rivière au crépuscule

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mercredi 19 juin 2024

Rendez-vous avec la poésie

J'y serai en bonne compagnie ce samedi et ce dimanche... avec la soif des mots...


 





  Pour compléter la Collection Coquelicot...
"Où se cache la soif" de Sabine Dewulf accompagné des très belles illustrations de Caroline François-Rubino.
Rendez-vous sur le Marché de la Poésie au stand 414 pour le découvrir.
Sabine Dewulf y sera présente le samedi 22 juin à 17h et le dimanche 23 juin à 15h pour les signatures.

Le recueil est également disponible dans toutes les librairies de France et sur notre site internet très prochainement.

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mardi 18 juin 2024

Toujours en présence

 Aujourd'hui, c'est l'anniversaire de la naissance d'Arnaud Desjardins (18 juin 1925-10 août 2011).

 

Avec toute ma gratitude...

Une sagesse incarnée,
une présence inébranlable
même dans l'obscurité
(de la nuit ou du jour).

Sabine Dewulf


Source de la photographie : http://www.legue-editions.com/arnaud-desjardins-recit.../ 

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Qu’y a-t-il dans ma tasse ?

 Intéressant. On dit d'ailleurs souvent que la coupe est pleine...



" Vous tenez une tasse de café, quelqu’un arrive et vous heurte et vous fait renverser votre café partout. Pourquoi avez-vous renversé le café ?
“Eh bien parce que quelqu’un m’a poussé, bien sûr”…
Mauvaise réponse.
VOUS avez renversé le café parce qu’il y avait du café dans votre tasse.
S’il y avait eu du thé dans la tasse, vous auriez renversé du thé.
Tout ce qui se trouve à l’intérieur de la tasse, c’est cela qui va déborder.
Par conséquent, lorsque la vie se produit et vous secoue, ce qui arrive souvent, tout ce qui est à l’intérieur de vous sortira.

Nous devons donc nous demander : “Qu’y a-t-il dans ma tasse ?”
Quand la vie devient difficile, qu’allons-nous faire déborder ?
La joie, la reconnaissance, la paix et l’humilité ?
Ou la colère, l’amertume, les mots durs et la réactivité ?
Qui choisit ?
A partir d’aujourd’hui, travaillons à remplir nos tasses de gratitude, de pardon, de joie, de paroles d’affirmation pour nous-mêmes et de gentillesse, de douceur et d’amour pour les autres.
La vie est amour, joie et bonheur.

Il faut du temps pour laver les vêtements boueux dans la machine à laver. OK ? Réveillez-vous.
Si vous voyez que quelqu’un est en colère ou vous porte de la haine ou de la jalousie, peu importe.
Donnez-leur un peu de temps pour se recentrer.
Comprenez qu’il leur faut du temps pour essuyer leur poussière intérieure.
Vous devez avancer dans la vie avec la clarté de l’esprit, la pureté dans le cœur et la sincérité dans l’action.
Détendez-vous.
Soyez à l’aise avec vous-même et avec tout le monde autour."

Sri Sri Ravi Shankar 

(auteur non vérifié)

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lundi 17 juin 2024

Etre dans de bonnes mains

 Bien qu’elles me servent beaucoup au quotidien – elles tiennent le stylo, le pinceau, le volant, le couteau à pain, la brosse à dents, elles caressent le chat, désherbent les fraisiers et tournent les pages des livres – bien qu’elles soient mes premières et précieuses auxiliaires, je ne regarde que rarement mes mains. Elles sont ce qu’un bon auxiliaire doit être : efficaces et invisibles.

De bonnes et honnêtes mains


Je ne les traite pas très bien : ayant souvent à faire avec l’encre et la peinture, je suis restée à l’écart de cet engouement pour l’onglerie qui transforme chaque doigt en griffe ou en bijou. Tout au plus les paré-je d’une demi-douzaine de bagues en argent sans lesquelles, il est vrai, je me sentirais un peu nue. Elles n’ont jamais été fichues de faire un nœud marin ni d’apprendre convenablement le piano, mais ce sont de bonnes et honnêtes mains.

La difficulté que j’ai certains matins à passer l’anneau à mon annulaire droit aurait pu m’alerter : ces jours-ci, je me suis aperçue que l’un de mes pouces accusait au niveau de l’articulation une forte bosse, un peu rouge et sensible au toucher, qui lui donnait un air tout de guingois.

Et voici que je contemple, posées sur mes genoux, les mains de ma mère et de ma grand-mère. Elles sont assez trapues, un peu noueuses ; les articulations forcissent, la peau en est moins ferme : mes mains ont 50 ans. Ce demi-siècle que je n’ai pas vraiment conscience d’avoir traversé, j’en lis les stigmates dans chaque phalange un peu tordue ; le froid de l’hiver passé s’est chargé de rajouter à tout cela, en guise de pense-bête, une douleur légère mais tenace.

Mes mains ont 50 ans et quand je les regarde, ce sont les mains déformées, fripées, toujours affairées de mes aïeules que je vois. Des mains aux ongles taillés court, jamais en repos, qui équeutaient les haricots, essoraient la lessive et tricotaient des brassières. Mes mains ont 50 ans et moi aussi. J’ai perdu ma vue perçante et le pas léger de mes 20 ans ; mon corps s’alourdit, s’alentit. Mon corps n’a pas l’âge que je crois avoir et c’est un défi de chaque jour que d’habiter ce décalage.

Doucement, insensiblement, je recule


Je n’aime pas ça, bien sûr. Cela ne fait ni envie ni plaisir. Mais je suis reconnaissante à mes mains de me rappeler qui je suis – aussi : une femme qui fait son temps. Dans cette confusion du monde qu’il nous faut bien habiter, la jeunesse est le critère absolu et l’âge une malédiction à combattre par tous les moyens – je suis la première à mener une guerre opiniâtre et coûteuse contre les cheveux blancs. Mais je n’occupe pas seulement un morceau d’espace : j’habite un morceau du temps. Comme les saisons, comme les moissons, je passe.

Lentement, mais je passe. Je pousse comme un arbre et mon écorce se fait rugueuse, et mes rameaux un peu se tordent. J’aime à croire que c’est en solidité que je gagne, à tendre ainsi chaque printemps davantage mes branches vers le ciel. J’aime à croire que sous mon ombre il fait bon se poser. Que mes fruits ne sont pas que pour moi, qu’ils nourrissent les petits animaux et les oiseaux du ciel. Que cette ramure convenablement entretenue offre une protection aux jeunes pousses plus tard venues, aux arbres en devenir.

Mes mains de 50 ans, les mains des femmes à l’ombre de qui j’ai grandi, ce soir je les masserai d’un peu de crème douce, pour la souplesse et pour la gratitude ; en les remerciant de ces années dont elles portent la trace ; en soignant, à travers elles, tous les gestes qu’il me reste à accomplir, demain, après-demain et jusqu’à la fin de mes saisons. 


Anne Le Maître, autrice et aquarelliste, géographe de formation, vit en Bourgogne et enseigne aux jeunes et aux adultes. Elle a publié Un si grand désir de silence (Cerf), qui a reçu le prix littéraire de la Liberté intérieure 2023, et le Jardin nu (Bayard).

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dimanche 16 juin 2024

Se la jouer...

 (extrait du "Carnet")



J’ai de plus en plus souvent l’impression intime  de me trouver « au taquet », au ras de l’essentiel , par terre avec les yeux juste ouverts pour voir les choses au plus près de ce qu’elle sont.
Cela suppose d'arrêter de  "se la jouer" - une expression populaire que je trouve très parlante-  ce qui n’est pas si évident, hein …
Se la jouer.
Tous nos grands et gros mots...
Nos théories, nos théologies, nos "enseignement"s dès qu’on s'en gargarise, nos prétentions inconscientes, tout ce qu’on arrive si aisément à se faire croire ... au moins tant qu’on a la santé de surface )- quand on la perd c'est une autre histoire- tout ce dont on est bouffi.

L’éveil, la spiritualité, Dieu, non Dieu, le Vide, le Sans forme, la liberté, et bla bla bla. Toutes choses dont on s'autorise à parler avec l'autorité que nous confère notre prétention saupoudrée de miettes de savoir et, oui, même, parfois d'expériences nécessairement parcellaires car comment le fini appréhenderait-il l'infini ?
Vu depuis le ras de ce qui est, tout ça ressemble à du bluff.
Au ras de ce qui est, tout devient basique, élémentaire, vital.
Aimer. C’est à dire cesser de refuser, cesser de se regarder soi, cesser d’exiger de l’autre, de tous les autres y compris le monde entier (!)  qu’il se positionne en fonction de moi, cesser de réagir selon ce que dicte ce moi obsédé de lui même … �
Ou ne pas aimer.
Et éventuellement habiller cette posture de grandes phrases, de  concepts vertigineux, de sophismes ronflants, et allons-y et vas-y que je pontifie étant entendu qu'il n'y a personne pour pontifier
Échafaudages pseudo théologiques, constructions, déconstructions, gloses, non gloses, affirmations , récusations, caquètements dans un vide en lequel nous flottons tels des pantins hors sol  ..  
Pour ne pas se sentir au taquet, acculé à la simplicité , celle qui mutile le moi égocentrique (pléonasme qui ne désigne pas la personne).
Aimer. Ne pas aimer.
Au final , au "jugement dernier » , plus que ça, rien que ça.
Le reste, des postures, des attitudes, même si d’aucunes ont un peu de gueule.

Gilles Farcet 

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samedi 15 juin 2024

Claire conscience

 


"Pour savoir si on est sur le bon chemin, l’esprit doit être extrêmement détendu, spacieux mais absolument posé, éveillé et vif. 

La conscience doit être très claire, comme si vous vous éveilliez pour la première fois. 

Mais si vous vous sentez simplement très paisible, dans un état de béatitude où tout est flou, alors ce n’est pas juste et il faut vous en sortir en vous éveillant le plus vite possible. 

L’autre extrême, c’est de s’efforcer d’être parfait, en essayant de voir chaque pensée, en essayant de réussir : la on devient extrêmement tendu. 

Détendez-vous mais soyez très clair."

 

Tenzin Palmo "Trois enseignements" ---------------- 


vendredi 14 juin 2024

Un point après l'autre : en avant !


 « Au tennis, la perfection est impossible. Sur les 1526 matches de ma carrière, j’ai gagné presque 80% de ces matches. J’ai une question pour vous : Quel pourcentage de points gagnés pensez-vous que j’ai lors de ces matches ? Seulement 54%. En d’autres termes, même les meilleurs joueurs du monde gagnent à peine un peu plus de la moitié des points qu’ils jouent.

Vous apprenez à vous dire : Je fais une double faute, c’est juste un point. Je suis venu au filet et je me suis encore fait passer. C’est juste un point. Même un coup superbe, un smash de revers qui finit dans le Top 10 d’ESPN. Ça aussi, c’est juste un point. Voilà pourquoi je vous raconte cela : quand vous jouez un point, cela doit être la chose la plus importante du monde. Mais quand le point est derrière vous, il est derrière vous. Cet état d’esprit est vraiment crucial car il vous permet d’être totalement impliqué dans le prochain et dans les suivants avec intensité, clarté et concentration.

Dans la vie, peu importe le jeu que vous allez jouer, parfois, vous allez perdre. Un point, un match, une saison, un travail, ce sont les montagnes russes avec beaucoup de hauts et de bas et c’est normal de douter de soi quand on est en bas et d’être désolé pour soi. Mais votre adversaire doute aussi de lui également. N’oubliez jamais cela. Mais de l’énergie négative est de l’énergie gâchée. 

Devenir un maître pour surpasser les mauvais moments est pour moi le signe d’un champion. Les meilleurs du monde ne sont pas les meilleurs car ils gagnent tous les points mais car ils savent qu’ils vont perdre encore et encore et ils ont appris à le gérer. Vous l’acceptez, vous pleurez si vous en avez besoin, puis vous vous forcer à sourire. Vous avancez sans relâche, vous grandissez, vous travaillez plus dur, plus intelligemment. N’oubliez pas : travaillez intelligemment ! »

Roger Federer lors de son discours de remise des diplômes à l'Université de Dartmouth.

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jeudi 13 juin 2024

mercredi 12 juin 2024

Débrouille

 

DEBROUILLE
le temps n’existe pas
le temps passe
je m’en débrouille
tout est écrit
tout est possible
je m’en débrouille
tout est dérisoire
tout est important
je m’en débrouille
je ne peux rien
je dois agir
je m’en débrouille
personne n’est coupable
chacun est responsable
je m’en débrouille
pas de but
un chemin
je m’en débrouille
pas de moi
un je
je m’en débrouille
pas de libre arbitre
un choix
je m’en débrouille
ne rien attendre
tout espérer
je m’en débrouille
la tragédie
la merveille
je m’en débrouille
tout est obscur
tout est limpide
je m’en débrouille
le nirvana est le samsara
le samsara est le nirvana
je m’en débrouille
car n’est ce pas
dans la vie
il s’agit d’apprendre à se débrouiller
 
Gilles Farcet 
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mardi 11 juin 2024

Vigilance aux émotions

 Tenzin Palmo, Reflection on a mountain lake (Snow Lion Ed) .


"Une autre manière de travailler avec les émotions négatives, une fois que nous avons développé une grande vigilance, consiste à voir les pensées et les émotions dans leur nature essentielle dès qu'elles surgissent, au lieu de sauter dessus et de se laisser emporter par elles . Lorsque nous regardons à l'intérieur des pensées et des émotions, nous voyons qu'elles n'ont rien de solide. Elles sont transparentes et fluides. Leur nature est vide. Si nous pouvons voir cela au moment même où les pensées et les émotions se présentent, alors, sur le champ, nous les transformons en une énergie extraordinairement claire. 
Des moments comme ceux-là nous amènent à une très grande acuité de vision. À leur source toutes les émotions négatives sont des formes de l'énergie de sagesse. Elles sont de l'énergie de sagesse qui a été déformée. C'est pour cette raison que dans le Mahayana et en particulier dans le Vajrayana, les émotions négatives ne sont pas déracinées. Elles sont simplement comprises et vues dans leur vraie nature. Cela donne accès à des niveaux très profonds d'énergie pure. Mais cela présuppose un très haut degré de vigilance. Si nous avons ce haut degré de vigilance, quelle que soit l'émotion qui se présente, celle-ci est instantanément libérée. Il n'y a alors plus de problème."
 
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lundi 10 juin 2024

Nihilisme

 Les valeur et le sens établissent des limites bienveillantes à nos actions

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dimanche 9 juin 2024

Sans mesure

 

Au terme de mes jours
je ne retiendrai rien
d’autre que la lumière
aux lignes inlassables
son œuvre sans mesure
où se diluent
les horizons blessés
l’éblouissante éclaboussure 

 
"Près du surgissement", poèmes de Sabine Dewulf et photographies de Stéphane Delecroix, 
Editions Pourquoi viens-tu si tard ?, 2024
 
 
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samedi 8 juin 2024

Impossible repos

 


À quoi reconnaît-on les gens fatigués ? À ce qu'ils font des choses sans arrêt. À ce qu'ils rendent impossible l'entrée en eux d'un repos, d'un silence, d'un amour. Les gens fatigués font des affaires, bâtissent des maisons, suivent une carrière. 
C'est pour fuir la fatigue qu'ils font toutes ces choses, et c'est en fuyant qu'ils s'y soumettent. Le temps manque à leur temps. Ce qu'ils font de plus en plus, ils le font de moins en moins. La vie manque à leur vie. 
Entre eux-mêmes et eux-mêmes, il y a une vitre. Ils longent la vitre sans arrêt. La fatigue se voit sur leurs traits, dans leurs mains, sous leurs mots.
La fatigue est en eux comme une nostalgie, un désir impossible...
~ Christian Bobin
Une petite robe de fête
 
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vendredi 7 juin 2024

Espace de perception


 L'essentiel est de ne pas mettre l'accent sur la perception, mais sur l'espace dans lequel la perception s'exprime.

Le travail corporel est l'une des multiples expressions de ce regard libre.

Cela peut vous aider à vous rendre compte  de la constante  réactivité dans laquelle vous vivez.

Avec une grande sensibilité corporelle, vous allez immédiatement percevoir votre réaction, votre défense.

Il y aura un déplacement de l'énergie.

Au lieu de vous situer dans la réaction, vous allez vous situer dans cet espace.

Votre réaction vue et acceptée comme telle, va s'effondrer par manque de carburant, dans votre écoute libre de toute attente.

Eric Baret - le yoga tantrique du cachemire 

Peinture : Gérard Beaulet

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jeudi 6 juin 2024

Au cœur du chaos

 Mes chers amis,


La méditation, telle que je la partage avec vous a deux facettes, qui sont 2 faces de la même pièce.

La pratique de base de la méditation est la pacification mentale, shiné (en tibétain) ou shamatha (en sanskrit) et l'intention profonde est la vision profonde, lakhtong (en tibétain) ou vipassana (en sanskrit).

Nous essayons d'abord de poser notre attention en un point (par exemple sur la respiration) afin que notre esprit ne poursuive pas toutes les pensées qui surgissent. Le fait de poser notre attention en un point permet de prendre conscience du chaos qui existe dans notre esprit, ce surgissement permanent de pensées que nous avons l'habitude de poursuivre en y réagissant par d'autres pensées dans un processus sans fin.

Le but n'est pas de stopper les pensées, ni d'arriver à un état particulier.

L'intention est juste d'expérimenter ce qui est là, dans l'immobilité du corps, ce qui est une source de distraction en moins.

Cette expérimentation peut être plaisante jusqu'à l'extase ou déplaisante jusqu'à l'abandon de la méditation. L'important est juste de traverser l'expérimentation de l'instant.

Quand nous sommes juste dans l'expérimentation de l'instant, notre véritable nature, cet esprit clair et connaissant, se dévoile car nous sommes sortis de l'attachement et de l'aversion liés à la saisie d'un moi réellement existant, à la saisie de l'égo.


Cela est la vision profonde qui est l'autre facette de la méditation. La réalité commence à être vue telle qu'elle est. Nous nous sommes mis en chemin vers nous-mêmes et nous réalisons que nous y sommes, nous sommes en ce non-lieu que nous n'avons jamais quitté, nous réalisons que tous les phénomènes, toutes nos perceptions, ne sont que des mouvements de notre esprit..

La réalisation de cela permet à nos qualités inhérentes de se manifester : l'amour, la compassion, la joie et l'équanimité.

Nous n'avons pas de chemin à parcourir car notre véritable nature, notre nature de bouddha, le Christ en nous, ont toujours été là, mais étaient voilés par notre ignorance, notre vue erronée sur nous-mêmes et sur le monde.

Nous pouvons commencer par lakhtong ou par shiné, mais la vision directe de notre véritable nature, sans avoir habitué son esprit à se poser en un point, risque d'être très vite voilée par des émotions perturbatrices liées à nos attachements et nos aversions.

La pratique de shiné me semble à ce jour incontournable pour arriver à vraiment se libérer de la souffrance. Mais shiné peut aussi se faire dans le mouvement, c'est pourquoi j'ai inclus dans la pratique d'hier de la marche méditative.

Je vous présente ici en quelques mots l'essentiel de la méditation, mais cela nécessite bien sûr de beaucoup plus longs développements et surtout une pratique contemplative.

Je vous souhaite  à tous une belle journée, libres de trouver cette paix toujours présente au cœur du chaos.

Philippe Fabri

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mercredi 5 juin 2024

Se libérer du mental

 


  • Écoutez aussi souvent que possible cette voix dans votre tête. Prêtez particulièrement attention aux schémas de pensée répétitifs, à ces vieux disques qui jouent et rejouent les mêmes chansons peut-être depuis des années. C’est ce que j’entends quand je vous suggère « d’observer le penseur ». C’est une autre façon de vous dire d’écouter cette voix dans votre tête, d’être la présence qui joue le rôle de témoin.

  • Lorsque vous écoutez cette voix, faites-le objectivement, c’est-à dire sans juger.

  • Ne condamnez pas ce que vous entendez, car si vous le faites, cela signifie que cette même voix est revenue par la porte de service. Vous prendrez bientôt conscience qu’il y a la voix (Le mental) et qu’il y a quelqu’un qui l’écoute et qui l’observe qu'on appelle la conscience.

  • Cette prise de conscience que quelqu’un surveille, ce sens de votre propre présence, n’est pas une pensée. Cette réalisation trouve son origine au-delà du « mental ».


    (Le pouvoir du moment présent - Eckhart Tolle)
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