mardi 18 août 2020
Souvenirs d'un travail de connaissance de soi
lundi 17 août 2020
“L'opportunité est inscrite dans la crise“
Comment définiriez-vous la force de la résilience orientale face aux événements difficiles ?
Je commencerai par une anecdote. Dans les années 1990, je participais à une compétition de qi gong à l'université de Pékin. Nous étions confiants dans notre groupe français, qui comptait d'excellents pratiquants. Or, malgré une belle performance, nous avons été classés derniers. La raison invoquée par le jury : un manque de coordination et de « rythme collectif » dans le groupe. Une amie japonaise nous comparait, nous les Français, aux grappes de raisin : les grains sont ensemble mais isolés. Alors que nous sommes, dit-elle, « comme les grains de riz ou les bancs de poisson, on marche ensemble ». La force collective n'a pas besoin d'être construite face à l'événement, elle est déjà là, ancrée dans la culture, offrant la faculté immédiate de mettre ses ressources en commun pour rebondir. Une forêt résiste mieux au vent que l'arbre seul.
Où s'enracine et comment s'apprend cette faculté de résistance ?
L'idée de résilience est présente dès l'apprentissage de l'écriture. Par exemple, le mot « crise » en chinois, wei ji, se construit avec deux caractères : le caractère « danger » et le caractère « opportunité ». Alors qu'un enfant français ne connaît pas l'étymologie des mots, l'enfant chinois ou japonais intègre visuellement cette idée que l'opportunité est inscrite dans la crise. Si notre orthographe se prête à l'esprit d'analyse - une lettre après l'autre, on construit le sens -, les écritures chinoise et japonaise procèdent par globalité. Par le geste du dessin, on fait appel au cerveau droit, dit plus créatif. Cela ne passe pas par l'intellect mais par la calligraphie. Dans le mot « jour », par exemple, on retrouve le caractère « soleil ». La symbolique est immédiate, comme dans le dessin.
L'enfant chinois ou japonais intègre visuellement cette idée que l'opportunité est inscrite dans la crise.
En quoi cette globalité nous aide-t-elle à faire face à l'adversité ?
Le caractère « crise » résume à lui seul une philosophie de base. Dans l'épreuve se profile l'opportunité d'en sortir. Lorsqu'on est au fond, on peut déjà se préparer à la remontée et, de même, quand on atteint son zénith, il faut envisager la descente. Cette sagesse met en valeur une capacité à aller avec le flot, à offrir moins de résistance là où les Occidentaux ont le réflexe de se battre. Il ne s'agit pas de passivité, plutôt d'une aptitude à suivre le rythme naturel de la vie, comme celui des saisons. Dans l'art du tai-chi, on utilise la résistance de l'adversaire : il faut savoir reculer quand l'autre avance pour qu'il perde lui-même son équilibre.
Il s'agit en fait de s'ajuster à la situation ?
C'est plutôt la conscience d'un rythme naturel à épouser. De nombreux dictons chinois ou japonais vont dans ce sens. « Rien ne sert de tirer sur une plante pour la faire pousser plus vite. » Ou cette anecdote paysanne, très utilisée par les maîtres en spiritualité, sur les fluctuations de la chance (lire encadré). Ou comment d'un problème peut naître une solution. On a vu d'ailleurs, à propos du coronavirus, comment la Chine a su transformer un problème démarré sur son territoire en une opportunité de vendre des masques au monde entier, d'offrir son « expertise » et de se poser en leader de la gestion de la maladie
Plus généralement, peut-on parler d'une capacité à éviter l'impasse, à se laisser une voie ouverte ?
Plutôt celle de bien évaluer sa propre force et celle de l'adversaire, savoir quand on est en position de faiblesse, quand il faut avancer ou reculer. C'est une capacité à utiliser les circonstances, en bien comme en mal, car c'est aussi au nom de ce principe que peuvent se justifier les pires répressions. Tout cet art de l'adaptation se retrouve dans le livre du Yi Jing, dit aussi Livre des transformations, un texte taoïste fondamental de la pensée chinoise. Même Confucius, qui a articulé un ordre social très hiérarchisé face à la pensée plus libre et rebelle des premiers taoïstes, s'est imprégné du Yi Jing, qu'il a abondamment commenté.
Responsable ne veut pas dire coupable dans l'esprit des japonais. Être responsable, c'est être "capable de réponses"
Comment définir le Yi Jing ? Comme un manuel de vie ?
Le Livre des transformations est fondé sur les concepts de yin et de yang qui enseignent les lois du changement perpétuel, que la nuit devient jour et le jour devient nuit : l'extrême yin rejoint le yang, et vice versa. C'est un livre mythique vieux de 3 000 ans, dont, au fil des générations, on a à la fois extrait philosophie, sagesse, psychologie, art divinatoire, art de gouverner et même stratégie militaire dans l'Art de la guerre, de Sun Zi. Le mathématicien Leibniz a trouvé dans les hexagrammes l'inspiration du calcul binaire à la base de nos ordinateurs. Carl Jung en a retiré son concept de synchronicité, autrement dit ces causalités non linéaires que nous appelons « coïncidences » et avec lesquelles l'esprit oriental est très à l'aise pour y lire un ordre « horizontal » tout aussi important que l'ordre « vertical » de la causalité. C'est pourquoi le Yi Jing est aussi utilisé comme instrument divinatoire. C'est là aussi que l'on trouve les notions clés, dans le bouddhisme, d'impermanence et d'interdépendance. C'est un livre dont chacun connaît par coeur de nombreux aphorismes et dont les hexagrammes sont utilisés pour aider à révéler l'ordre potentiel sous-jacent au chaos des changements.
Au fond, qu'avez-vous appris de la résilience au contact de ces civilisations ?
Je remarque que, dans notre tradition judéo-chrétienne, nous nous considérons comme coupables, ou du moins nous nous cherchons un coupable. Or, au Japon, j'ai assisté à des accrochages de voitures où chacun s'excusait, endossant la responsabilité de l'accident avec force courbettes ! Cela m'a fait réfléchir. Responsable ne veut pas dire coupable dans leur esprit. Et l'étymologie nous le confirme : responsable, c'est être « capable de réponses ». Si vous êtes pris dans un événement, vous en êtes « responsable » : vous n'êtes pas coupable mais « impliqué ». La sagesse consiste à l'accepter pour mieux répondre. Cela pourrait ressembler à du fatalisme, mais c'est une forme de responsabilisation et de force. « Shikata ga nai », disent souvent les Japonais : « On n'y peut rien, c'est le destin. » Tout le contraire de notre « impossible n'est pas français ».'
dimanche 16 août 2020
Vieillir avec le coeur...

C’est leur cœur, leur capacité d’aimer, pas leur corps, qui fait que les humains sont jeunes ou vieux, et si leur cœur vieillit, c’est qu’ils le lui permettent. Comment ? En perdant leur amour pour les êtres et les choses, en perdant leur curiosité, leur intérêt pour la vie qui est là, autour d’eux, la vie de l’univers tellement riche et abondante. Mais s’ils s’efforcent de sentir cette vie, s’ils cherchent à y participer, à l’introduire en eux, ils ne vieilliront pas. »
samedi 15 août 2020
Fête du 15 août
Assomption peut ressembler à Ascension, la montée au ciel du Christ ; mais elle est un peu différente.
Ascension vient du latin « ascender » - monter, s’élever, tandis que Assomption vient de « assumere » - assumer, enlever. Cela signifie donc que, tandis que Jésus s’est élevé seul aux Cieux, Marie a été appelée, élevée, enlevée par le Seigneur pour être auprès de son fils.
La Vierge Marie n'est donc par morte comme les autres mortels. Elle n'a pas eu à attendre la résurrection finale pour rejoindre son fils, tant son amour pour lui était fort.
La fête de l’Assomption, d’abord appelée Dormition (du latin : dormitio, « sommeil, sommeil éternel, mort ») est instaurée dans l’empire byzantin au VIe siècle, à la date du 15 août ; au VIIe siècle, sous le pape Théodore, elle est introduite en Occident et prend le nom d’Assomption.
En France, c’est Louis XIII qui, en 1638, la rend « fête obligatoire » et demande processions et festivités en l’honneur de la Vierge Marie. Elle est même décrétée fête nationale, jusqu’à la fin de l’Empire.
Et, en 1802, l’Assomption, avec l’Ascension, la Toussaint et Noël, devient férié, avec la loi sur la séparation de l’Eglise et de l’Etat.
vendredi 14 août 2020
Devenir adulte
Aussi, devenir véritablement adulte, c’est être de plus en plus conscient que, dans leur complexité, tous les êtres humains sont atteints de la même maladie. C’est pourquoi un sage ne ressent que compréhension et compassion pour tous, quels que soient les actes commis, aussi graves soient-ils. Il n’est plus prisonnier de la vision bourreau-victime, il ne voit partout que des victimes d’un même mal. Sa vision est de ce fait beaucoup plus profonde : il perçoit chacun comme unique manifestation de Dieu - si nous employons un terme dualiste - ou comme unique expression de l’Absolu ou de la nature de Bouddha.
Quelques secondes d’un silence méditatif s’imposèrent sous le coup de cette réponse aussi prompte qu’imparable et qui s’adressait clairement à chacun de nous. Nous étions tous plus ou moins identifiés à cette impatience d’en découdre avec ceux qui nous excèdent. À la façon de « l’arroseur arrosé », cette inversion totale de perspective dont Arnaud avait la spécialité avait retourné la question à cent quatre-vingts degrés : vers nous-mêmes. Qu’étions-nous vraiment en mesure d’entendre à notre propre sujet alors que nous exigions que les autres entendent leurs quatre vérités ?
jeudi 13 août 2020
Honorer le désir
mercredi 12 août 2020
Réceptivité ou anesthésie ?

Dans la perspective d’un cheminement intérieur, l’enjeu principal consiste à déjouer de tels tampons et, même si la difficulté est de taille, elle n’est pas insurmontable.
... Le chemin vers une plus grande réceptivité et une plus grande vulnérabilité est long et nécessite des efforts autant précis que persévérants. Redevenir comme de petits enfants est une tâche de longue haleine, car avant de retrouver une innocence première, il faut préalablement retrouver une capacité naturelle à être ouvert aux autres et aux circonstances. Une telle ouverture passe impérativement par la réceptivité à l’égard de ce que l’on porte en soi.
mardi 11 août 2020
Larmes d'ouverture
Pour évoquer cet abîme entre les deux façons de souffrir, je reviendrai une fois de plus aux larmes. On pleure dans toutes sortes de circonstances, quand on épluche des oignons, quand on est profondément joyeux, quand on est frustrés parce que les choses ne fonctionnent pas comme on le souhaite et quand on réalise notre complète impuissance à les changer.
Au stade de la frustration, on cherche encore à modifier l’environnement et on est toujours dans le refus et la résistance. Lorsque les larmes deviennent des larmes d’impuissance, on cesse d’essayer de changer les choses. On sent très nettement la différence. Des chercheurs étudiant les larmes ont découvert que leur composition varie radicalement selon le type de pleurs. Les larmes d’impuissance sont très différentes de toutes les autres : elles sont saturées de toxines au point où, réduites à l’état de poudre, elles pourraient tuer un petit rongeur ! Cela explique d’ailleurs pourquoi, lorsque nous sommes confrontés à des circonstances difficiles, nous nous sentons si allégés après avoir pleuré. Souvent, après une crise de pleurs déchirants devant leur propre impuissance, j’ai vu avec stupéfaction mes enfants reprendre le cours de leur journée en chantonnant, plus créatifs et joyeux que jamais.
Si j’ai pris l’image des larmes, je ne voudrais pas laisser entendre que le processus du surrender implique systématiquement que nous pleurions : pas du tout ! Mais il s’agit bien de se laisser affecter, y compris par les plus petites choses de l’existence, d’éroder ainsi peu à peu l’armure sous laquelle nous nous protégeons, payant un terrible prix pour cette pseudo-sécurité : elle nous prive de la souplesse et de la spontanéité, étouffant notre vitalité et notre joie intrinsèques.
lundi 10 août 2020
"Non" est une phrase complète
dimanche 9 août 2020
Comment traverser les inévitables chocs de la vie
1. Ouvrez-vous au réel
2. Accueillez-vous avec beaucoup de bonté
3. Observez les symptômes dans votre corps
4. Identifiez votre besoin immédiat
5. Rendez grâce pour tout ce qui va bien
Source : la Vie
samedi 8 août 2020
Expérience derrière les voiles
Ce voilage qui couvrait les baies vitrées. Dans les années qui ont suivi, je suis venu souvent à Bayonne voir Marraine, parfois sans mes frères. J’y ai vécu la seule expérience mystique de ma vie - sans doute le mot n’est-il pas approprié, mais je n’en vois pas d’autre.
Jamais je ne me suis senti aussi vivant, jamais je n’ai approché d’aussi près le mystère de ma présence au monde. Cela peut paraître emphatique, j’en ai conscience, pourtant ces heures font partie des plus intenses et des plus limpides de mon existence. Je ne les ai jamais oubliées. J’y ai toujours repensé comme si elles étaient le moment d’un contact avec l’exacte vérité, l’aventure unique et définitive.
Jean-Marie Laclavetine
Une amie de la famille (chez Gallimard)