jeudi 8 août 2019

Zazen ? Agir sans agir!


L’exercice appelé zazen, à ne pas confondre avec l’exercice appelé méditation, n’est pas un moment d’inaction. Au contraire, zazen, comme l’exercice du tir à l’arc (Kyudo), ou l’exercice de la calligraphie, est action. Quelle action ? La réponse du maître zen a de quoi bousculer notre entendement, « Agir sans agir est le mode d’action juste ».

Il ne s’agit pas d’agir dans le but d’avancer consciemment vers un but pré-médité ; ce qui caractérise l’exercice appelé méditation. Il s’agit de se soumettre à un agir absolu qui n’est pas du ressort du Moi, lequel du matin au soir, fait mille choses.
Exemple d’un agir absolu : « En ce moment je inspire, et moi je n’y suis pour rien ».
Cette action vitale, irrépressible, jaillit selon le vouloir de l’être, de notre vraie nature. Action spontanée, irréfléchie, qui se réalise ou - plus précisément - aimerait se réaliser dans la liberté de l’être.

En ce moment je inspire (je expire) et Moi je n’y suis pour rien.
La conscience de cette expérience est pré-mentale. Je ne pense pas que je inspire ; je sens que je inspire.
Je sens, grâce à la conscience sensitive qui est antérieure à la conscience qui objective. Zazen, comme la plupart des exercices qui ont leurs racines en Orient et en Extrême-Orient, est l’occasion d’une rencontre sensorielle avec soi-même.
Toute personne qui pratique zazen est invitée à s’ouvrir à ce champ sensoriel qu’est le corps : « Leib, le tout corps-vivant dans sa globalité et son unité ». Ce qui requière l’usage de l’attention (processus propre au corps-vivant) à ne pas confondre avec la conscience ‘’de‘’ (engagée par le mental).
L’attention est pré-mentale.

Zazen, le tir à l’arc, l’art de la préparation du thé, exercices auxquels nous pouvons ajouter la pratique du Yoga, du Taï-Chi, des arts martiaux, peuvent être envisagés comme étant des chemins de libération de notre vraie nature.
La vraie nature de l’être humain, son fondement, est « Je Suis » qui est antérieur à « Je suis Moi ; Moi je suis ».
Il n’y a pas deux réalités : « Je suis » et « Je suis Moi ». Le drame de l’être humain est l’usage dénaturant de « Je suis » ordonné, agencé, par « Moi ».
Identifié à « ce cher petit Moi », ma vraie nature est trahie, exploitée. D’où cette souffrance propre à l’être humain : ne pas être celui qu’il est à l’origine, au commencement de son existence. Le Moi conditionné dénature notre nature innée, notre être essentiel comme l’appelle Dürckheim.
Zazen ? Préparer les conditions d’une concordance avec l’inné. Concordance qui se révèle dans une manière d’être au monde calme, sereine.

« Ce qui m’a touché, dès mon arrivée au Japon, est de voir qu’un maître, quel que soit l’exercice qu’il enseigne a toujours infiniment de temps intérieur. Lorsque j’ai demandé à mon maître de tir à l’arc: - Que doit-on faire pour être calme ? Il me répondit, avec un sourire malicieux: - Simplement laisser sortir le calme qui est en soi ! » (K. G. Dürckheim).
Jacques Castermane
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