« J’ai pratiqué jusqu’à seize heures de méditation par jour. Était-ce pour autant un « voyage intérieur » ? D’une certaine façon, lorsque j’étais tout à fait honnête sur ce sujet, je reconnaissais que c’était surtout relaxant et reposant. Le mythe de cette sorte de Nirvana que j’attendais des méditations intensives a pris fin un jour. J’espérais que mon « moi » encombrant se dissoudrait propre et net dans le grand Soi, mais il n’en fut rien. J’avais pourtant des « expériences » (un mot qu’on entendait dans toutes les conversations à l’époque) qui montraient que j’étais sur la bonne voie, mais rien ne semblait se stabiliser. Les prodigieuses énergies qui se déployaient au bout de plusieurs heures de méditation, les visions, les sensations de plénitude, rien n’y faisait, j’étais toujours « moi » et même parfois au pire de ce « moi ».
Les années 1990 étaient encore tout imprégnées de la croyance qu’il fallait renoncer au monde pour atteindre l’illumination spirituelle. Certains étaient même partis dans des grottes, en France ! Tous ont vécu la même confrontation à leurs illusions. J’ai dû revenir à la case « monde », celle des femmes et des préoccupations de l’incarnation brute. Et le frottement avec cette matière a été bien plus bénéfique que mes extases intérieures. Ce n’est pas une exagération pour les besoins de ma démonstration. Le déchirement était plus fort, mais je devais être déchiré pour être enseigné. Et cela a continué sans cesse depuis ce jour. »
–Thierry Vissac, Un Chemin de vie.
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