mercredi 1 mai 2019

Libération, éveil, réalisation...


Daniel Morin
Eclats de silence – éditions Acarias L’ORIGINEL


J’ai observé chez beaucoup de chercheurs une idéalisation de l'éveil, une confusion entre une recherche authentique d’unicité et une recherche personnelle. Je me rappelle avoir moi-même caché, derrière une recherche sincère, une demande non consciente de validation, de reconnaissance, d’invulnérabilité
permanente, et une envie d’assurer ma continuité en accédant à des mondes invisibles, merveilleux, magiques.
0r, tout ce qui est vécu humainement relève d'expériences partielles, changeantes, impermanentes.
Aucune personne ne pourra trouver quelque chose de permanent. Le permanent ne peut pas rentrer dans la connaissance. Il est inconnaissable.
Toute recherche s'inscrit dans la relativité, dans le concept du temps, de la causalité. Or, la Totalité est acausale. La seule liberté possible est d’expérimenter en tant que partie l`inséparabilité et la simultanéité des éléments.
L’absence d’émotion n`est pas un critère obligatoire de sagesse, puisque les médicaments ou la pratique physique peuvent avoir cet effet-là.
Pour moi, la non-discussion absolue de ce qui est déjà là, manifesté, est une expérience qui peut être appelée éveil, libération. Certains êtres humains, arrivés à la limite de ce qu'il est possible d’expérimenter, voyant que le relatif et l'absolu sont indissociables, laissent le jeu de la vie se faire à travers eux.
Ce but, supposé perma
nent, ne pourra jamais être saisi par un corps qui est, lui, impermanent. Il est impossible même au plus grand sage de faire l`expérience du permanent. Par contre, il peut être habité par l'évidence de l’inséparabilité, de l’unicité. De ce fait il perd sa faculté apparente de choix, et les actions s’imposent en lui. Il vit l’obligation.
Il n’y a rien à gagner et rien à perdre personnellement.
Je ne suis pas en train de dire qu'il n’y a pas de différence dans la manifestation entre un sage et un criminel ! Du fait de cette vision d`unicité et d'inséparabilité chez certains témoins de sagesse, certaines qualités humaines vont se révéler : absence de méchanceté, respect profond du vivant, et si j'ose employer un mot galvaudé, amour. Ils ne voient plus la limite qui permet la distinction des formes comme étant séparatrice, mais ils la voient comme étant un lien vivant entre les différences. L’acceptation de la limite fait obligatoirement accepter le sans limite puisqu’une limite relie deux parties inséparables. Elle n'appartient ni à l’un ni à l`autre, elle est le lien vivant, elle est la preuve de l’inséparabilité.

Pouvons-nous concevoir que du point de vue de l'Être nous sommes ce que nous étions avant notre naissance ? Quand nous dormons d'un sommeil sans rêves, ou bien pendant une anesthésie générale, où se trouvent notre histoire, nos problèmes ? Quelle conscience avons-nous d’être ? Et pourtant nous ne mettons pas en doute le fait d’une apparente continuité d’être à notre réveil, et nous retrouvons notre histoire. .et nos problèmes.


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