jeudi 31 octobre 2019

Des étiquettes de pensées...



Le mental vient à exister quand vous projetez votre petit moi sur les autres. Voyez les autres comme ils sont. La différence entre voir et penser est énorme. On pense avec le mental tandis qu’on voit avec la faculté de perception. Le mental est le moyen à travers lequel le petit moi est projeté sur tout le reste. Au lieu de voir l’objet comme il est, le « je » se projette dessus et l’objet est comme supprimé par la pensée. Cessez de penser, car penser déforme votre vision et vous empêche de voir les choses comme elles sont. Au lieu de voir le réel sous sa vraie forme, nous voyons ce que nous voulons voir et nous sommes déçus parce que la réalité n’est pas conforme à nos idées. 
En pensant, nous la jugeons et lui collons des étiquettes : « c’est bon, ou mauvais », « c’est faux ou c’est juste ».



Svâmi Prajnanpad
Le but de la vie : Un été plein de sagesse

mercredi 30 octobre 2019

Se prendre en main...


« CELUI QUI TRAVAILLE AVEC SES MAINS EST UN OUVRIER MANUEL. CELUI QUI TRAVAILLE AVEC SES MAINS ET SA TÊTE EST UN ARTISAN. CELUI QUI TRAVAILLE AVEC SES MAINS, SA TÊTE ET SON CŒUR EST UN ARTISTE. »
Saint François d’Assise



Bernard Bouheret :

"Le monde ne bougera pas sans nous et nous devons devenir ce que nous voudrions que le monde soit comme le disait si bien le Mahatma Gandhi en son temps. Pour nous, les mains du Shiatsu peuvent retisser un bout de monde, redonner une pulsation de bienveillance dans un univers tourné vers la performance.
Je finirai mon propos par un texte Taoïste qui donnera le juste ton.
« Si vous voulez réveiller l’humanité dans sa totalité alors réveillez-vous entièrement. Si vous voulez éloigner du monde la souffrance, alors éliminez tout ce qui est sombre et négatif en vous. En vérité le plus grand cadeau que vous puissiez donner au monde est votre propre transformation. »
Hua Hu ching"


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mardi 29 octobre 2019

Se prendre en main


« Moi, mon moteur, c’est les possibles. On me dit souvent que je suis pleine d’enthousiasme. Eh oui, c’est vrai, parce que j’ai toujours les yeux rivés sur ce qu’il est possible de faire dans une vie, dans une communauté. Cela dit, il faut être prudent avec les possibles. Ce n’est pas parce que c’est possible que ça t’est dû. Et si un projet ne fonctionne pas, il ne faut surtout pas se décourager. Il y a plein d’autres possibles ailleurs ! »

« Quand il m’arrive quelque chose de merveilleux, je regarde vers le haut et je dis merci. Je suis pleine de reconnaissance. Quand ça va mal, je regarde ce qu’il y a devant moi. J’essaie des choses, j’occupe mon esprit, j’agis plutôt que de laisser l’angoisse prendre le dessus. Et c’est comme un cercle vertueux, on dirait. Se prendre en main, ça génère de nouveaux possibles. De nouveaux possibles, ça permet de se prendre en main… »

Fernande Ouellet
Source : Lapresse.ca

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lundi 28 octobre 2019

Faire connaissance avec Karlfried G. Dürckheim


Voici le début et la fin du film sur Karlfried G. Dürckheim – Le geste à la parole 


Karlfried G. Dürckheim a 91 ans quand le réalisateur Patrice Chagnard lui consacre ce documentaire. Il mourra quelques mois plus tard, le 28 décembre 1988.





Pour voir la vidéo en entier

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samedi 26 octobre 2019

La présence éveillée

Limpidité, clarté, transparence, c'est la présence éveillée, quelque soit le nom qu'on lui donne. Elle est toujours là quoiqu'il arrive, qu'on la remarque ou non. Toujours présente, qu'il y ait peu de pensées, beaucoup de pensées. Cette présence ouverte, cette présence illimitée est toujours là.

Et on pourrait dire qu'à mesure, soit que les pensées se décantent, soit qu'on devient plus habile, expérimenté, familier, on a la capacité de voir en permanence cette faculté lumineuse de l'esprit qui est derrière toute cette agitation mentale, qui apparaît plus clairement quand les pensées se calment momentanément, comme après un orage quand le ciel se dégage, on remarque d'autant plus le ciel immaculée de l'espace.

À mesure où on apprend à reconnaître cela, à se reposer dans cela, à laisser les pensées survenir et se défaire sans effort; comme un oiseau qui passe dans le ciel sans laisser de traces. On laisse les pensées reposer dans leur état naturel, comme une feuille qui tombe et qui se pose.

Cette présence éveillée est toujours là. Pour le contemplatif, c'est une expérience extrêmement riche en potentiel.

En effet, si les travers de l'esprit humain qui se mélangent parfois à la lumière, et qui parfois se réifient sous la forme de haine, d'obsessions, d'intolérance, si cela faisait vraiment partie de manière solide, intrinsèque de ce qu'Alexandre Jollien appelle le "fond du fond", c'est-à-dire cette présence éveillée qui est toujours présente, à ce moment là ce serait totalement sans espoir d'essayer peu à peu de laisser ces toxines mentales s'évanouir du flot notre conscience.



Mais si effectivement, comme tout le reste, ce ne sont que des constructions qui résultent de facteurs, de conditions, et de causes multiples, qui sont impermanentes et fluctuantes par nature, alors, dans ce cas là, on comprend que tout cela est le résultat d'un nombre incalculables de constructions mentales, mais qu'aucune d'entre elles n'est intrinsèque à cette présence éveillée, qui est la réalité ultime du contemplatif, pas plus que la plante médicinale ou un poison dans l'eau ne font partie intrinsèquement de l'eau, qui n'est pas modifié par là.

Alors on se relie à cela ; c'est une manière de retrouver la réalité de l'expérience pure. Cette présence éveillée permet de donner de la valeur à chaque instant qui passe.

Matthieu Ricard, conférence donnée à Bruxelles dans le cadre des rencontres « Émergences » 2019.

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vendredi 25 octobre 2019

La clef des champs


J'ai trouvé, l'an dernier, dans une brocante, une statue de saint Pierre en granite rose tenant, dans ses mains épaisses de pêcheur, la clé immense du Paradis. Tout avait attiré mon attention dans cette statue semble-t-il bretonne. La chevelure, la barbe et la longue tunique de saint Pierre qui ondoyaient au vent de mer. Ses deux yeux grands ouverts et sa tête légèrement penchée de côté qui invitaient à la méditation comme à un échange de paroles. Cette immense clé qui faisait la moitié de sa hauteur d'homme. Et puis, surtout, cette alliance et cet alliage de chair et de pierre.

L'accès à l'infini 

Au début de l'automne, j'ai surpris le grain de cette statue de granite rose prendre la lumière rasante du soleil de fin d'après-midi. Un moment bref, mais magique. Un mont Thabor. Depuis, saint Pierre et sa clé m'accompagnent. C'est face à cette statue que j'aime m'asseoir pour prendre mes temps de repos et me ressourcer. Elle creuse en moi une interrogation sur le mystère de la chair et de ce roc de pierre sur lequel nous pouvons fonder notre vie, et plus encore sur le mystère de la lumière et de la clé du Paradis. Cette clé serait-elle une clé des champs qui donne accès à l'infini et à la liberté ? La vie spirituelle est faite en effet d'instants de grande ouverture à soi, à la vie, à l'univers, à Dieu, suivis de renfermements tout aussi précieux. Comme les fleurs, nous nous ouvrons à nos heures, et nous nous refermons. Nous ouvrons la porte du Ciel, nous en franchissons le seuil, nous entrons dans l'écoute, dans le silence, dans la prière, nous y demeurons en amour, puis nous reprenons le cours de notre vie. Nous accostons sur des îles, pour nous laisser reprendre par le vent de mer du quotidien qui souffle là où il veut. À nous de garder la clé de ces instants et de laisser vivre en nous ces îles bienheureuses. Je crois que ma clé du Paradis à moi, c'est précisément la lumière. Peut-être parce que je suis une fleur d'ombre, que je suis née dans un nid de poussière, dans un grenier familial envahi de toiles d'araignées et de vieux meubles, où il m'a fallu faire la lumière. Les chats m'ont appris à voir dans la nuit, à ouvrir et dilater mes pupilles pour percevoir la moindre source de lumière et distinguer les ombres dans l'ombre. Les arbres m'ont appris à me nourrir et à me gorger de lumière, à en faire surtout une nourriture et un souffle de vie pour moi et pour tous. Guidée par la lumière, je me suis convertie à la vie.

L'enveloppe obscure 

Si nos chemins sont faits de jours de lumière, de jours sombres, voire ténébreux, et de jours de clair-obscur, notre erreur est de vivre peut-être trop souvent en enfants lune. La peau sensible, nous nous cachons du soleil, et du « soleil véritable », pour ne sortir qu'à la nuit tombée. Nous nous détournons de la lumière de la vie, nous éclairant seulement à des artifices humains. N'osant vivre la pleine lumière, nous créons notre propre nuit et nos aveuglements. Pourtant il suffit d'un regard d'amour et d'une lumière posée sur soi pour percer cette enveloppe obscure qui parfois nous recouvre et nous cache.
Alors pourquoi ne pas nous offrir les uns aux autres cette clé des champs vers l'infini et la liberté, qu'est la lumière ? Si, demain, la nuit tombe sur la Terre et sur l'humanité, notre nuit sera illuminée par les hommes et les femmes habités par la lumière. Ces personnes lumineuses passent inaperçues en plein jour mais, quand se fait l'obscurité, leur lumière se révèle aux regards. En vierges sages, elles s'illuminent et elles éclairent. Aussi n'hésitons pas à laisser notre chair prendre la lumière, comme la statue de saint Pierre le soleil d'automne. La lumière nourrit, et elle enseigne. Elle délivre, et elle « amorise ».
Charlotte Jousseaume
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jeudi 24 octobre 2019

Pour ne pas se prendre la tête

Circulation crânienne
Crochetez les doigts et placez les mains sur le crâne, puis effectuez une série de frictions grattées en mini aller-retours sur toute la surface du crâne. Effectuez cette manœuvre durant une minute.
Ma leçon d'automassage, Hélène Campan (éd. Eyrolles)
Insomnies

L'institut national du sommeil et de la vigilance (INSV) préconise d’effectuer trente minutes d’activité physique par jour, et de s’exposer au moins une heure à la lumière naturelle quotidiennement, afin de faciliter le sommeil. Autre bon usage : éteindre les écrans au moins une heure avant d’aller se coucher. Si cela ne suffit pas, quelques techniques d’automassage pourront vous aider à plonger dans les bras de Morphée.
Le pilier céleste proche de l’étang du vent
Cette manœuvre stimule Feng Chi qui signifie "l’étang du vent" et Tian Zhu "le pilier céleste", respectivement 20ème point du méridien d’énergie de la vésicule biliaire et 10ème point de celui de la vessie.
Basculez votre tête en avant de quelques millimètres pour plus d’aisance dans la réalisation de cette manœuvre. Puis placez vos doigts à la base de la nuque, en espaçant vos index et vos majeurs très légèrement, et effectuez une pression longue d’une quinzaine de secondes. Relâchez la pression et recommencez cette digipression à plusieurs reprises.
N’hésitez pas à effectuer cette manœuvre plusieurs fois dans la soirée, afin de lutter contre les insomnies, puis une dernière fois au moment du coucher afin de relâcher la pression et d’évacuer les soucis quotidiens.
Pilier céleste proche de l'étang du vent - Ma leçon d'automassage, Hélène Campan 
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mardi 22 octobre 2019

Remerciements


Je me suis autorisé à demander un nouvel ordinateur...
J'ai perdu de nombreux documents mais vos témoignages les remplacent précieusement !
Merci pour vos messages !
Que la vibration et le feu continuent !




Un nouveau livre guérisseur...

(Sur le père de Yogeshvar)

Une autre anecdote illustre bien les valeurs que voulait lui transmettre son père. Un jour, ce dernier lui demande: « Suppose que le village prenne feu et que le feu s’étende à ta maison et jusqu'à la maison de ton voisin, que ferais-tu ? N'essaierais-tu pas d'éteindre le feu ?
- Oh ! Oui, bien sûr... J'irais voir les autres et je leur dirais que notre maison est en train de prendre feu et je leur demanderais de l'eau pour éteindre l'incendie. »

Et son père de se lancer dans une longue explication sur le bénéfice qu'on peut retirer à venir d'abord en aide aux autres :

« Oui, effectivement, tu demanderais aux autres de t'aider à porter de l'eau pour éteindre le feu de ta maison. Mais suppose que, n'ayant pas d'eau pour éteindre le feu de ta maison, tu ailles voir ton voisin et que celui-ci t'explique que, justement, il ne peut pas t'aider parce que sa maison aussi est en feu. Tu trouverais qu'il a raison. Comment pourrait-il laisser sa propre maison brûler pour aller s’occuper de celle de son voisin ? C'est certainement un argument valable. Mais suppose que tu aides ton voisin, que diraient les autres ? « Oh ! Oh ! Il a laissé sa propre maison pour nous venir en aide. Nous aussi allons-y allons l'aider à éteindre le feu dans sa maison." En agissant ainsi, tu rendras les autres personnes désireuses de venir t'aider à éteindre le feu dans ta maison. Mais si tu t'occupes seulement de ta propre maison, les autres diront « Oh ! Oh ! Il ne s'occupe que de sa maison, laissons-le se débrouiller tout seul." Et personne ne viendra t'aider alors que tu es dans le besoin.

Quelle attitude convient-il d'avoir alors ? Ne rechercher son propre intérêt, mais prendre soin de l'intérêt des autres.

Cette anecdote montre que faire passer l'intérêt des autres avant le sien est une évidence pour le père de Yogeshvar, il n’y a pas d'autres options envisageables. Et il est intéressant de remarquer comment il le justifie. Dans cette anecdote, l'amour du prochain n’émane pas d'une morale évoquant des notions abstraites de devoir, de culpabilité, de sacrifice : « il faut » ou « je devrais » (être moins égoïste, faire passer les autres avant moi-même...). Le père de Swâmi Prajnânpad aborde les choses sous l'angle de la connaissance, en termes de cause et d'effet : si tu te comportes de telle façon, voici ce qu'il se passera; et si tu te comportes d'une autre façon, voilà ce qu'il se passera. L'amour des autres est le moyen d'instaurer des règles d'échange et de réciprocité dont tout le monde bénéficie: prendre soin des autres, c'est donc prendre soin de soi Le non égoisme n'est pas seulement une attitude moralement bonne en soi, c'est aussi une façon plus intelligente de vivre. Si tu es toi-même aimant, tu seras plus aimé et plus heureux.


Vivre 
La guérison spirituelle selon swami Prajnanpad 
Emmanuel Desjardins

lundi 21 octobre 2019

Premier pas vers la détente


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En parlant d'acceptation, mon ordinateur et l'un des disques durs m'ont laché. 
Je continue mais c'est plus dur. Et il y a de moins en moins de personnes qui vont sur ce blog.
Il est peut-être temps de passer à autre chose. A suivre...

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dimanche 20 octobre 2019

Un seul regard !



"Parfois, nous nous sentons prisonniers de nos activités, coincés dans nos pensées, à l'étroit dans notre vie.

Stressés et angoissés.

Aucune solution ne parait à l'horizon, et le ciel est bas et lourd

Pourtant...

Pourtant, il suffit d'un seul regard pour retrouver notre liberté native.

Un seul regard dans l'immense espace de la vacuité.

D'un coup d’œil, comme l'oiseau s'envole d'un coup d'aile, nous pouvons retrouver la liberté infinie de notre vraie nature.

Peu importe que nous n'ayons pas fait attention à notre vraie nature depuis plusieurs heures ou plusieurs jours...

Peu importe que nous ayons oublié l'espace de notre vraie nature parce que nos activités quotidiennes nous ont happés,

ou que nos pensées ont pris le dessus...

En un instant, si nous le voulons, nous pouvons prendre conscience de l'ouverture de la conscience

et basculer dans l'immensité du ciel de l'être.

Notre vraie nature est toujours disponible, toujours libre, toujours patiente

au-delà du temps et de l'espace,

attendant que le gout de la joie et du mystère nous ramène à Elle.

Là maintenant,

je m'espacifie, je me dilate, et mon cœur se réjouit à nouveau comme lors de retrouvailles avec un ami qu'on n'espérait plus...

Nous ne sommes alors plus un individu coincé dans sa vie mais nous nous éveillons à la Présence ouverte qui accueille toute la vie en Elle.

D'un coup d’œil."

José Leroy

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samedi 19 octobre 2019

Les 3 lois de l'Adhyatma Yoga (3)


La loi d'interdépendance -ou d'action-réaction- : S'habituer enfin à repérer l'interdépendance de tous les phénomènes, c'est ne jamais attribuer de valeur absolue à l'action et à ses conséquences. C'est ouvrir la porte à un bonheur qui ne dépend plus des circonstances extérieures mais qui résulte de la simple reconnaissance de la perfection de l'instant présent. C'est se rendre compte qu'on ne pourra jamais être plus heureux qu'ici et maintenant, parce que seul le présent est réel et que rien ne peut jamais diminuer ou augmenter la réalité de ce présent...

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source : Centre de Yoga de La Bertais

vendredi 18 octobre 2019

Les 3 lois de l'Adhyatma Yoga (2)


La loi du changement : De la même façon, intégrer véritablement la notion de changement dans la vision que l'on a du monde permet de se libérer du sentiment d'insécurité et des attachements matériels et psychologiques qui en découlent. Puisque tout change tout le temps, il est vain de s'accrocher à quelque chose (situations, objets, personnes). Mieux vaut s'ouvrir au renouvellement incessant de la vie, à cette "fête de la nouveauté" comme aimait à l'appeler Swâmiji, et ainsi faire corps avec le jeu même de la Vie...

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jeudi 17 octobre 2019

Les 3 lois de l'Adhyatma Yoga (1)


Le premier axe de travail propre à l'Adhyâtma Yoga consiste donc à se familiariser avec ces trois lois jusqu'à réussir à les incorporer dans notre vision du monde, de façon à être à même d'en tirer spontanément toutes les conséquences pratiques.
La loi de la différence : Une familiarisation suffisante avec cette première loi permet très concrètement de se libérer des mécanismes de la comparaison, du jugement et de l'attente. Si chaque être est différent, il est unique et donc -sur le plan des valeurs- incomparable. On ne peut donc ni juger autrui ni même se juger soi-même. Seule subsiste la bienveillance à l'égard de ce qui est, situation, objet ou personne. Une fois reconnue à l'autre le droit à la différence, voilà aussi qui libère de l'attente : si l'autre a le droit d'être différent de moi, je n'ai pas -sous peine de contradiction- à attendre de lui qu'il se conforme à mes désirs... Et si je n'attends plus de l'autre qu'il se conforme à mes désirs, je ne souffrirai pas quand, effectivement, il fera d'autres choix que ceux qui m'auraient subjectivement arrangé...

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lundi 14 octobre 2019

Ebauche d'Univers

Tu gardes les cœurs de connaître

Que l'univers n'est qu'un défaut

Dans la pureté du Non-Être.


Paul Valéry

"Ébauche d'un serpent"

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dimanche 13 octobre 2019

au-delà de l’expérience de l’ego : l’être et la liberté !

Dans Moins d’ego, plus de joie ! Un chemin de liberté (Points Vivre), le psychiatre Christophe Massin se raconte et livre à partir de son expérience personnelle et de thérapeute, son aventure intérieure sur le chemin de la spiritualité et nous montre pas à pas comment passer du particulier à l’universel, en toute liberté.

Vous avez découvert l’hindouisme et le bouddhisme très jeune. Quel a été l’impact sur votre vie, votre orientation et le choix de la psychiatrie ?

J’avais vingt ans, effectivement, et j’étais déjà étudiant en médecine. Ma voie semblait tracée, stable, mais je me sentais intérieurement assez perdu, je souffrais de blocages psychologiques qui entravaient notamment ma vie amoureuse. Dans ce contexte, j’ai entrepris un voyage en Inde et je suis parti avec les livres d’Arnaud Desjardins que j’ai lus, pour ne pas dire dévorés, sur place. Je découvrais, à travers eux, une spiritualité qui n’était pas fondée sur la croyance, mais sur la rencontre avec des maîtres qui transmettent leur expérience. J’avais déjà un intérêt latent pour la spiritualité, mais j’étais plutôt dans le rejet d’un héritage catholique culpabilisant. D’un autre côté, je m’interrogeais également sur les mystères de l’inconscient et là, dans les livres d’Arnaud Desjardins, j’ai trouvé des réponses sur les deux tableaux. Mon voyage a alors sensiblement changé de sens et mon itinéraire s’en est trouvé bien modifié. J’ai fait cap sur Dharamsala, au nord de l’Inde, pour rejoindre la communauté tibétaine, puis sur Darjeeling à l’Est, où résidait Kangyour Rinpoché. Cette rencontre m’a beaucoup marqué et, si je ne me suis pas vu devenir son disciple, j’ai été convaincu par ce rayonnement spirituel qu’évoquaient mes lectures. Arnaud Desjardins venait justement de séjourner auprès de lui. J’ai appris qu’il devait ouvrir un ashram en France et j’ai voulu le rencontrer à mon retour, pour mieux connaître la pensée de son maître indien, Swami Prajnanpad. Cette révolution intérieure a eu des conséquences dans mon parcours de jeune médecin et je me suis engagé, sans hésitation, vers la psychiatrie. Autre manière de comprendre l’esprit, les émotions, l’inconscient…

En tant que pratiquant et soignant, comment avez-vous dépassé la contradiction entre la nécessité d’avoir un ego solide pour être en bonne santé psychique et celle de renoncer à cet ego ?

On découvre vite, à travers les enseignements d’Arnaud Desjardins et de Swami Prajnanpad, qu’il n’y a pas de contradiction. Un cadre éducatif rassurant et aimant, pendant l’enfance, crée les fondations d’un ego solide. Et si nous n’avons pas bénéficié d’une telle sécurité affective, notre ego garde des failles. Il a ensuite besoin de se soigner et de se fortifier. Cela nous permet alors d’avoir suffisamment confiance en nous pour tisser des relations harmonieuses, faire des choix, construire notre vie… C’est une étape essentielle pour ne pas réprimer des blessures et des frustrations. Puis, avec le temps, nous découvrons qu’en nous identifiant à lui, nous sommes prisonniers de ses peurs et de ses exigences, et que c’est la cause de notre souffrance. Cette découverte n’est pas forcément facile à intégrer et pour ma part, au moment même où je pensais être devenu quelqu’un dans la société, par mes études, mon statut de médecin, je me suis rendu compte que cette conviction était illusoire : au fond, il n’y a personne, l’ego n’est bâti sur rien de solide. Et pourtant, nous ne pouvons pas faire l’économie de l’identification à l’ego, c’est un passage obligé.

Le déconstruire n’est donc pas sans risque…

On ne peut pas le faire à n’importe quel prix. Si j’étais enthousiasmé par ma démarche spirituelle au début, au point d’imaginer m’en inspirer dans mon approche thérapeutique, j’ai vite compris qu’il fallait être très prudent avec des patients fragiles, traumatisés ou en proie à des psychoses graves et des délires. Ils avaient d’abord besoin d’être ramenés au contact de la réalité et de se structurer. La santé psychique est une fondation essentielle et primordiale, avant de s’aventurer dans une voie spirituelle. Vouloir introduire cette dimension était tout à fait inadapté dans un cadre hospitalier ni même ensuite en cabinet, lorsque les troubles psychiques étaient trop perturbants. Un gros travail de reconstruction, de réassurance et de maîtrise des émotions est nécessaire au préalable. Cela peut prendre plusieurs années.

Vous arrive-t-il d’évoquer un possible travail sur l’ego, et d’une manière générale, une démarche spirituelle en thérapie ?

J’ai publié des ouvrages qui abordent ces points, mes patients sont donc souvent au courant. Je ne m’en cache pas et je le signale dès le premier rendez-vous pour qu’ils sachent à qui ils ont à faire. Certains ne se sentent pas concernés, recherchant simplement un échange thérapeutique plus classique et curatif d’abord.
« Que reste-t-il si je cesse de m’identifier à cet ego, à ce corps, ces pensées, ces émotions, cette mémoire ? Rien que je puisse définir, mais pas le néant non plus. On commence alors à ressentir simplement une présence plus libre et joyeuse, en réalisant que l’ego n’est pas un ennemi à abattre. Il suffit de le voir venir pour échapper à son emprise. C’est aussi le meilleur moyen de laisser la place en soi pour autrui. »
D’autres y viennent à un moment donné, souvent lorsque leurs difficultés deviennent gérables et cessent d’être envahissantes. Ils ont pu travailler sur la source de leurs tensions, sur des émotions débordantes, sur la culpabilité de ne pas correspondre à leur idéal. Plus stables en eux-mêmes, ils deviennent disponibles et désireux de s’aventurer au-delà des frontières de la thérapie occidentale. Je peux échanger avec eux sur le bénéfice d’une pratique spirituelle telle que l’acceptation inconditionnelle, mais cela leur appartient. Je reste toujours prudent et surtout attentif à respecter la demande de la personne et son besoin spécifique, m’inspirant en cela de Swami Prajnanpad : chacun, à chaque moment précis, a besoin d’une réponse particulière.

Quand l’équilibre personnel le permet, comment se libérer de l’ego pour aller vers plus de joie, en paraphrasant le titre de votre livre ?

J’ai trouvé intéressant de prendre le contre-pied de la démarche orientale, bouddhiste ou hindouiste, qui part du principe que l’ego est le problème, et qu’en outre il est une illusion. C’est trop contre-intuitif pour notre pensée occidentale qui a sacralisé l’individu. Mon axiome de départ a été inverse : oui, je suis convaincu de la réalité de mon Moi. J’ai le sentiment d’être pleinement la somme de mon corps, de mes pensées, de mes émotions, de ma conscience, de ma mémoire… Mais il faut vérifier la validité de cette conviction. Partant de là, j’encourage tout un chacun à se livrer à un travail d’observation et de questionnement. Suis-je véritablement réduit à tous ces paramètres ? Que puis-je trouver en moi de permanent ? Les émotions s’émoussent, les souvenirs s’effacent, les pensées changent… Je ne suis ni cette colère qui passe ni ce reflet dans le miroir qui s’abîme au fil des années. Heureusement ! Mais que reste-t-il si je cesse de m’identifier à cet ego, à ce corps, ces pensées, ces émotions, cette mémoire ? Rien que je puisse définir, mais pas le néant non plus. On commence alors à ressentir simplement une présence plus libre et joyeuse, en réalisant que l’ego n’est pas un ennemi à abattre. Il suffit de le voir venir pour échapper à son emprise. C’est aussi le meilleur moyen de laisser la place en soi pour autrui.

Pas facile d’avancer sur cette voie quand les proches ne prennent pas le même chemin et s’accrochent à leur ego…

Au contraire ! L’entourage est un excellent révélateur des progrès, comme des résistances de notre ego, avec la peur et la colère associées. Combien de fois suis-je sorti d’une merveilleuse retraite en me croyant libéré, avant d’être rattrapé par toutes mes émotions, une fois replongé dans le quotidien familial et professionnel. On s’agace comme avant… Tant que l’ego resurgit au contact d’autrui, c’est que nous n’en avons pas fini avec lui. Preuve qu’on ne peut se passer des autres sur la voie.


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Par Sophie Viguier-Vinson Journaliste

vendredi 11 octobre 2019

Maîtres de l'existence...


Un proverbe ancien dit : « Quand l’élève est prêt, le maître apparaît. » Faut-il croire qu’un grand nombre d’entre nous sont aujourd’hui prêts… ou est-ce l’urgence de la situation qui pousse des foules d’humains à suivre les conseils spirituels de toutes sortes de maîtres ? Quels maîtres ? Les yogis indiens ont un mot étonnant, « uppa guru », pour exprimer l’idée que toutes sortes d’êtres ou d’entités peuvent jouer un rôle de maître. Si vous savez le respecter, l’observer et l’aimer, un enfant peut vous enseigner beaucoup. Un animal aussi. Ou un arbre… De nos jours, beaucoup de conseils nous arrivent par les médias ou les réseaux sociaux – où l’important est de savoir faire la différence entre les torchons et les serviettes, entre les bonimenteurs, escrocs ou manipulateurs, et les vrais instructeurs.


 Certaines radios font, de ce point de vue, du très bon travail. Par exemple, en laissant régulièrement l’antenne à des gens comme Christophe André, Fabrice Midal ou Frédéric Lenoir. Vous n’avez évidemment pas besoin de les considérer comme des « maîtres » pour faire bon usage de leurs conseils. Le plus commun de ces conseils est sans doute leur invitation à se mettre à la méditation. Certains esprits moqueurs, ou acides, prennent la généralisation de cette pratique pour une mode plus ou moins superficielle, qui ne saurait que rapidement s’épuiser. Il y a fort à parier que, bien au contraire, nous avons à faire à un phénomène profond, très intéressant, qui pourrait correspondre à un besoin ressenti par un nombre croissant de femmes et d’hommes, à une réponse collective.

 À quoi ? Aux déséquilibres de notre temps à l’accélération folle, à la désorientation, à la perte de sens. Comment mieux ralentir, retrouver son axe, redonner du sens à sa vie, et la joie qui va avec, sinon en laissant remonter les réponses du fond de soi-même ? 

source : Nouvelles Clés 

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mercredi 9 octobre 2019

Vigilance (8)


Donc, la première constatation que fait le disciple, c’est son manque de vigilance, sa distraction. Dans cet état de sommeil, il n’est pas possible de « faire la volonté de Dieu ». On fait ce qu’on a appelé sa volonté propre, celle de l’ego, ou, dans un autre langage, la volonté de Satan. Cette volonté de l’ego peut être une volonté non violente, généreuse, mais ce n’est pas la liberté ou l’éveil. Parfois les hommes généreux en arrivent à s’opposer ensemble : protestants contre catholiques, catholiques contre orthodoxes, chrétiens contre musulmans, hindous contre bouddhistes, tout ça au nom de l’amour du prochain. Vous pensez si le Malin sourit et se frotte les mains. 


Chacun, voyez en quoi cela vous concerne. Vous pouvez entendre la vérité apparemment terrible dont je parle aujourd’hui, parce qu’il y a une possibilité d’y échapper. Mais vous n’y échapperez que si vous êtes d’abord convaincus que ce que je dis est vrai, si vous vous rendez compte que ces mécanismes, ces chaînes de causes et d’effets sont toutes-puissantes sur vous et vous ordonnent des actions qui ne sont que des réactions. Comme un sujet hypnotisé vous les faites, comme un sujet hypnotisé vous êtes convaincus de les faire librement, comme un sujet hypnotisé vous les justifiez. Ce n’est pas une vie. Ce n’est en tout cas pas une vie dans laquelle vous êtes tout le temps en paix avec vous-même, tout le temps en paix avec les autres et tout le temps en état d’amour. Alors regardez comment va le monde. Regardez, c’est si simple. Tant de bonnes volontés et tant de violence. Tous les hommes rêvent d’un monde meilleur. Les chrétiens intégristes, les chrétiens de gauche, les communistes, les maoïstes anti-soviétiques, tout le monde rêve d’un monde meilleur. 

Chacun, au plus profond de soi, porte une nostalgie de beauté, de tendresse, d’harmonie, de générosité. Il n’y a pas un cœur endurci qui ne versera une larme le jour où on lui parlera du sacrifice d’une mère pour son enfant. Tant de nostalgie de paix, d’amour, et tant d’agressivité dans les faits. La violence est partout. Est-ce librement que les guerres se déclarent, que les persécutions se déchaînent ? Est-ce librement que les gens se rendent si malheureux et rendent les autres malheureux ? 

Allons. C’est à cause de ce sommeil hypnotique dans lequel vit l’humanité. Vous pouvez entendre ce langage ancien. Il vous concerne bien plus vitalement et directement que le langage de Marx, de Mao Tsé-toung ou de Jean-Paul Sartre. C’est la plus grande vérité, la plus unanimement et universellement admise dans les différents enseignements ésotériques. Mais vous ne pouvez être libres que si vous vous éveillez. L’éveil est la condition de la liberté et, pour s’éveiller, il faut lutter pour s’éveiller. 

 Arnaud Desjardins
Le vedanta et l’inconscient
À la recherche du soi III

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mardi 8 octobre 2019

Vigilance (7)


On a une fois demandé au Bouddha s’il pouvait résumer tout son enseignement en un seul mot et le mot qu’il a employé est le mot que nous traduisons par vigilance. Cette veille est une attitude intérieure bien connue à laquelle se sont exercés tous les moines, qu’ils soient chrétiens, zen, hindous et tous les soufis.
Si un être humain veille, est en état de vigilance, l’hypnotiseur ne peut plus rien sur lui. Les ordres sont là, mais il n’est plus tenu de les exécuter, ils n’ont plus prise sur lui, parce qu’il est, au moins momentanément, éveillé. Puis, s’il retombe dans son sommeil, de nouveau l’hypnotiseur peut donner ses ordres ; et ces ordres, l’homme les reprend à son compte et en fait une illusion de liberté. Combien de gens dans l’existence vous disent : « Je ne sais pas ce qui m’a pris ! C’est vraiment trop bête. Je n’aurais pas dû le faire. Maintenant il faut que je répare le tort que j’ai fait. Pourquoi... », sans compter les cas graves où on se retrouve devant un tribunal. 

C’est à cause du manque de vigilance que tout le reste est possible. Les grandes difficultés sur le chemin de la sagesse, la violence, la jalousie, la convoitise, la peur, l’orgueil, tous ces obstacles ne sont possibles qu’à cause de ce manque de vigilance fondamental. Les chaînes de causes et d’effets ou d’actions et de réactions ont les pleins pouvoirs sur vous, à travers des mécanismes biologiques, physiologiques, hormonaux, nerveux, à travers des mécanismes psychologiques, sociaux, économiques, politiques, atmosphériques, météorologiques, tout ce que les sciences étudient. C’est un ensemble de lois, donc de déterminismes. 

Et ce que les « sciences humaines » étudient, c’est la façon dont ces lois et ces déterminismes s’appliquent à un être humain. Certaines sciences nous enseignent que nous sommes déterminés biologiquement ; d’autres nous montrent comment les phénomènes physiologiques se produisent en nous, comment l’absorption de telle substance produira tel résultat. 
La psychologie, la sociologie nous montrent comment le milieu culturel, les influences familiales, les idées prévalant dans une société à un moment donné, et même l’appropriation des moyens de production selon l’explication marxiste de l’homme, comment tous ces facteurs nous conditionnent. Et ensuite, on continue à se croire libre. La façon la plus forte dont on puisse entendre cette vérité, c’est le langage du sommeil dans lequel on a été plongé par un hypnotiseur qui peut ensuite nous donner les instructions qu’il veut et nous obliger à les exécuter. 

Il faut qu’un jour – aujourd’hui, pourquoi pas ? – vous entendiez ce langage comme vous concernant directement. Cela donne un choc. Et ce qui peut vous rassurer, vous aider à supporter ce choc, c’est de penser que vous n’êtes pas les seuls, que tous les enseignements en parlent, que c’est la règle du jeu, que c’est la condition humaine... 

 Arnaud Desjardins
Le vedanta et l’inconscient
À la recherche du soi III

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lundi 7 octobre 2019

Vigilance (6)



... D’abord, si vous vous exercez à la vigilance, à la présence à soi-même, vous verrez combien cette vigilance vous échappe, combien il est difficile d’être présent à soi-même, combien l’on est vite emporté par les activités extérieures. Des expressions françaises comme « se reprendre, se ressaisir, se retrouver soi-même, se recueillir » sont révélatrices. Et d’autre part, ce n’est pas un sommeil dans lequel on reste couché sur son lit sans bouger. C’est un sommeil dans lequel on agit, et on n’agit pas comme un somnambule dont le comportement est assez inoffensif. On agit comme quelqu’un qui a été endormi par un hypnotiseur et qui, grâce à cette mise en sommeil hypnotique, reçoit des ordres et se trouve obligé de les exécuter. Cela mérite d’être bien entendu parce que vous pourrez tout de suite voir comment cela s’applique à vous. 
Par contre, si l’on peut se tenir éveillé par la « vigilance », apparaît une liberté parce que ces influences que je compare à celle d’un hypnotiseur ne peuvent plus s’exercer. 

Arnaud Desjardins
Le vedanta et l’inconscient
À la recherche du soi III

dimanche 6 octobre 2019

Pratique


Un participant, à la pause de l'un de nos séminaires : "Ah si je pouvais toujours être comme maintenant !"
Évidemment, ça fait plaisir à l'enseignant, mais c'est justement pile à ce moment qu'il devrait intervenir.
Oui, c'est cool de se sentir bien, et autant identifier les environnements, relations et processus qui nous font du bien.
Pourtant, une pratique se cache toujours derrière les réactions immédiates.
En l'occurrence, pour un pratiquant spirituel, cette phrase devrait être remplacé par "Ah, si je pouvais toujours adhérer parfaitement à ce que je suis", qui n'empêche en rien de se dire en même temps "et putain ce que j'apprécie embrasser ce moment".
Mais plus que la couleur du moment, c'est plutôt le geste d'embrasser le moment qui doit être reconnu et mémorisé. Parce que quand il s'agira d'embrasser notre prochaine chute, douleur, faux pas ou maladie, ce geste sera beaucoup plus difficile à faire.
Il n'y a pas de pause pour les pratiquants. Sauf s'il y a du cake au chocolat et du café.
Fabrice Jordan 
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jeudi 3 octobre 2019

Ni distance... ni écart de temps... *


 Faire zazen pour juste faire zazen, sans itinéraire tracé. Cette assertion, tout à la fois rétrécit le champ d'action et l'ouvre, car il nous faut explorer l'absence de distance entre soi-même et la pratique. Il n'y a plus que zazen, rien que zazen, c'est-à-dire l'unité totale entre le sujet, l'action et l'objectif de cette action. Nous voilà coupés de toute possibilité de nous étirer dans le temps, de croire que nous allons y arriver en faisant beaucoup d'efforts. En quelque sorte, c'est un empêchement majeur à la procrastination. Ce qu'il faut faire, il nous faut le réaliser immédiatement. 
Pas de tiédeur, pas de demi-mesure, c'est maintenant. 

Nous basculons dans un domaine inattendu et inexploré par le moi, lui qui a par habitude de se projeter vers l'avant, les réalisations à venir, les acquisitions envisagées. Notre difficulté : nous tenir à l'étroitesse de ce champ d'action ; comme si nous devions nous maintenir sur une crête. Nous voilà en relation avec la simple assise qui devient tout à la fois moyen, chemin, but. Dans cette injonction à aller chercher dans le très étroit, là où il n'y a rien à voir et justement rien à devenir, se révèle une certaine vigueur inattendue, méconnue, qui nous maintient dans l'instantanéité du geste : s'assoir. Ce geste nous révèle à nous-mêmes d'instant en instant. 

 Cette absence d'écart fait qu'on ne peut plus se distancier de la verticalité, de l'immobilité ; on ne penche plus ni en avant ni en arrière, ni à gauche ni à droite. On ne sait plus trop si la verticalité est le fruit d'une nécessité ou si la verticalité engendre une certaine efficience qui nous éclaire de l'intérieur. Peu importe où est la cause, où est l'effet, on ne sait plus trop qui commande quoi. La cause est un effet, l'effet est une cause. Demeurer sur ce point d'interrogation est un renversement de notre pensée ordinaire. Il ne s'agit plus de prendre position sur un fait établi qui nous donne l'illusion de maintenir une vérité ; il y a juste cette crête incertaine et vertigineuse qui nous tient en suspend à l'instant. 

L'assise, le zazen, nous plonge dans une forme d'indistinction entre ce que l'on nomme le moyen et ce que l'on nomme la preuve. Le zazen n'est pas l'acquisition d'une technique qui va permettre la mise en lumière d'une évidence. Le zazen est l'évidence, est la preuve, très précisément lorsque le méditant ne se contente pas de se tenir assis passivement, mais lorsqu'il réduit cet écart et qu'instant après instant il démontre que zazen est la preuve et que la preuve est zazen. De quoi nous imposer une exigence qui ne souffre pas d'après. Tant que l'écart demeure, il n'y a pas zazen, il y a un semblant de zazen. Il ne peut pas y avoir un zazen tiède. Cela est ou cela n'est pas. Nous devons cesser de nous alanguir dans de vagues projets d'une réalisation future, il y a une activité à fournir en ce moment, qui ne doit jamais nous lâcher. C'est à cette seule condition que le moi peut prétendre s'arracher à son conditionnement. Ce n'est pas le chemin qui est long, c'est l'ego qui persiste dans ses attachements qui donnent l'illusion d'un long parcours. Notre réalisation est immédiate lorsqu'il n'y a plus que zazen et que le moi accepte de ne plus rien attendre. 

Conjointement, s'effectue une désappropriation du moi à l'égard du corps qu'il « pense » avoir. L'absence d'écart n'autorise plus la moindre distance entre celui qui agit et ce qui se fait. Seul persiste : être corps, être zazen. Faire zazen rien que pour faire zazen implique l'abandon du « corps outil », du corps objet, du corps qu'on a. 

Lorsqu'aucun écart ne se glisse entre le sujet et l'action, un grand bouleversement s'opère, non seulement parce que tout se passe dans un avoir lieu immédiat, mais aussi parce que les notions d'usage et d'utilité s'en trouvent bouleversées. L'attention se réoriente vers l'inutile et l'invisible, ce qui annule toutes les formes d'asservissement de la pratique à des fins personnelles.

 Dominique Durand 

* Certains l'auront reconnu, il s'agit d'un propos de Jacques Castermane, fréquemment repris dans les introductions à l'assise. Revenir, encore revenir sur des mots mille fois entendus et que l'on imaginait « compris »... Puis s'efforcer d'aller au-delà des mots, laisser la pratique nous en révéler la véritable portée, c'est ainsi que l'enseignement prend toute sa valeur. 

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mercredi 2 octobre 2019

Zazen ? La culture du calme !


 Que signifie l’expression de la langue japonaise zazen ?

 Hirano Katsufumi Roshi répond : « Za signifie : ASSIS ; Zen signifie : CALME ». 
La traduction du kanji zen par le mot calme est inusitée. La traduction habituelle de cet idéogramme est le concept « méditation ». Il arrive qu’un mot manque son objet; il semble que ce soit le cas lorsqu’on associe zen et méditation. Lorsque Hirano Roshi nous a proposé cette traduction — zen signifie calme — il était évident qu’il ne s’agissait pas d’une traduction … au figuré; au contraire le mot calme répond au sens concret qu’évoque l’idéogramme japonais zen. Au 7ème siècle, lorsqu’on lui demande en quoi consiste sa méthode, Hui-Neng répond : « Ma méthode est le calme et la sagesse ». Il ajoute : « Là où est le calme est la sagesse ; là où est la sagesse est le calme ; ce ne sont pas deux choses différentes ». Au 13ème siècle, aux moines qui pratiquent zazen, le fondateur de l’Ecole Sôtô, Eihei Dogen, pose cette question : « Si tu ne trouves pas le calme ici et maintenant, tu le trouveras où ? Tu le trouveras quand ? ». Très souvent, lorsqu’il nous accompagnait dans la pratique de zazen, Graf Dürckheim disait : « Zazen ! être là, assis, parfaitement immobile et embrasser calmement ce qui se présente à travers le sentir d’instant en instant ». 

Quant au Maître zen Ryokan, il attire notre attention sur le fait que « Zazen n’est pas un moyen; zazen est une preuve ! ». 
Voilà de quoi éviter l’amalgame qui est fait actuellement entre l’exercice appelé zazen et l’exercice appelé méditation. 

La méditation est une activité orientée, elle a un but. Pour preuve, la liste des cent (100) bienfaits promis à celles et ceux qui pratiquent cette méditation dite moderne : la méditation de pleine conscience. On médite quelque chose ou on médite sur quelque chose. 
Le mot méditation suggère une activité mentale (mind). Aujourd’hui phagocytée par les spécialistes dans l’étude du cerveau, les effets éventuels de la méditation sont soumis à des mesures quantitatives (scanner, IRM). 

Zazen est une activité non orientée, libre de toute finalité. Zazen est un exercice indissociablement corporel et spirituel au cours duquel le mental est momentanément mis hors jeu. La pratique appelée zazen est sans but. 
Ce qui ne signifie pas qu’elle soit sans effet. 
Quel effet ? Par exemple: le calme; le grand calme, symptôme de l’état de santé fondamental de l’être humain. Il ne s’agit pas du calme qui suit la tempête; ce calme relatif, perçu comme étant le contraire de l’agitation. Ce calme extérieur, que nous pouvons observer lorsqu’on vit au bord de l’océan. Zen, c’est le calme qui règne en profondeur. Chacun, qui est en plongée sous le domaine des vagues, en fait l’expérience. Il ne s’agit plus d’un calme extérieur mais du calme senti de l’intérieur. Un habitué de la plongée me disait : « Il n’y a plus moi et quelque chose le calme … Je suis calme. Il n’y a plus moi et quelque chose le silence … Je suis silence ! ». Expérience qui élève l’homme au-dessus de sa prétendue puissance en tant qu’ego. L’ego, cette représentation mentale que nous avons de nous-même, n’est pas notre vrai point d’appui dans l’existence. 
Notre vrai point d’appui est notre vraie nature, dit le maître zen ; notre vrai point d’appui est notre être essentiel, dit Dürckheim. 
C’est quoi notre vraie nature ? C’est quoi notre être essentiel ? Je-ne-sais-pas ! Ce que je sais, c’est que lorsque je suis saisi, enveloppé, porté par le grand calme, je ne me pose plus cette question : parce que, à ce moment-là … je suis la réponse. 

Jacques Castermane 

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