—
XIUSHEN, littéralement «éduquer, régulariser le corps», est une notion très importante dans le confucianisme, pour lequel la notion de corps dépasse celle du corps physique, pour englober celle du corps-cœur-état d'esprit.
Le confucianisme insiste sur le travail sur soi-même et le développement individuel avant de parler de l'harmonie avec les autres et le monde.
L'objectif de XIUSHEN est de réaliser sa valeur humaine dans le monde et la société par l'ouverture du cœur et la bienveillance.
Comment réussir ma vie dans tous les plans humains : familial, relationnel, professionnel et spirituel ? Comment franchir ensuite les obstacles et composer avec les émotions pour avoir toujours la force et la volonté de se réaliser?
Une phrase de Confucius très connue en Chine indique ce chemin de la vie matérielle vers la vie spirituelle:
GEWU : analyser les choses ; ZHIZHI : arriver à la pleine connaissance ; CHENGYI : agir dans la sincérité de l'intention ; IE'G ZHENGXIN : trouver la rectitude du cœur ; XIUSHEN : raffiner son corps et son être ; QIJIA: construire la famille ; ZHIGUO : régner sur le pays ; Yl PING TIANXIA: la paix s'accomplit dans tout l'Univers.
En analysant les choses, on arrive à la pleine connaissance. En atteignant la pleine connaissance, on agit avec la sincérité de l'intention. En agissant avec la sincérité de l'intention, on trouve la rectitude du cœur. En trouvant la rectitude du cœur, on éduque son être. En raffinant son être, on harmonise la famille. En harmonisant la famille, on ordonne le pays. En ordonnant le pays, on accomplit la paix dans tout l'Univers.
Cette phrase est une notion fondamentale du confucianisme, c'est la clé de l'équilibre de l'être et donc de son bonheur. Par l'explication faite du mot SHEN, « corps », on comprend mieux le sens profond de XIUSHEN.
Le terme «corps» peut être exprimé par différents caractères en chinois. Nous avons déjà parlé du caractère XING qui indique le corps, la structure. Il existe aussi le terme TI pour exprimer la notion de corps. 
Le mot SHEN est un autre caractère utilisé pour écrire le corps humain. Le sinologue Cyrille Javary l'a bien décrit : « Dans la forme ancienne de cet idéogramme, on retrouve la silhouette de l'être humain, particularisée ici par le dessin d'un gros ventre, à l'intérieur duquel un trait précise qu'il est plein de quelque chose. Le surpoids de ce ventre gravide oblige cet humain à placer une jambe en avant pour rétablir son équilibre. D’où le sens d’origine de ce caractère qu'il garde toujours dans certaines expressions: "Être enceinte". Formé d'un tout indécomposable, le caractère SHEN ne montre plus le corps dans sa dualité concertante entre charnel et rituel, entre physique et subtil, mais dans la vitalité fondamentale qui le recentre en profondeur. Ce qu’il évoque, plus que le corps lui-même, c'est sa propension à vivre, ce sentiment diffus d'être finalement un peu toujours "enceint” de nous-même, comme la nature l'est du monde, renouvelé à chaque printemps.
Le père Claude Larre, éminent sociologue, le souligne magnifiquement:
"C'est grâce à la vitalité éphémère, mais toujours régulièrement renouvelée, qu'une permanence apparaît dans le passage des éphémères et fonde l’éphémère que je suis. Je n'ose pas dire que je possède l'existence, c'est l'existence qui me possède."
Dans cette perspective, la vie n'est plus un fardeau venu du ciel ou une pénitence héritée de la terre. Vivre devient alors une mission en soi, celle de se sentir responsable de cet éclair de vie qui à chaque moment, comme partout dans l’univers, prend naissance à l’intérieur de soi-même *. »
* Cyrille J.-D. Javary, 100 mots pour comprendre le chinois, Éditions Albin Michel.
----------------------