lundi 27 juillet 2020

Méditer avec Matthieu Ricard (1)


Matthieu Ricard, 74 ans, a quitté son monastère de l’Himalaya fin mai pour rejoindre la France, encore bouleversée par la crise sanitaire. Depuis la Dordogne, où il a retrouvé sa mère – la peintre et nonne bouddhiste Yahne Le Toumelin, 97 ans –, le moine nous a accordé une interview.

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Que pensez-vous du boom que connaît la méditation depuis la crise ?
En confinement, les gens se sont trouvés démunis car seuls face à leur propre esprit. C’est curieux, car pour moi cette solitude est fondamentale ! En temps normal, on a affaire du matin au soir à son esprit – qui est son meilleur ou son pire ennemi. Sans le flot courant des activités, on voit plus clairement que le mode de fonctionnement de son mental n’est pas optimal. Les gens qui se sont confinés à la campagne ont redécouvert la nature, cette affinité essentielle que l’on appelle la « biophilie ». Certains, en ville, ont hélas sombré dans la totale distraction, avec Internet ou avec les jeux vidéo, dont on sait qu’ils augmentent l’agressivité et l’insatisfaction, surtout s’ils sont violents…
La méditation, qu’est-ce que c’est ? Un entraînement de l’esprit. Ce n’est pas juste essayer de se calmer. Ou s’asseoir entre deux bâtons d’encens pour se relaxer – une idée qui fait rire les Orientaux ! La méditation permet de comprendre les causes de la souffrance, de trouver des antidotes à ces toxines mentales que sont l’animosité, la jalousie, l’orgueil, le désir compulsif, etc. C’est un processus de compréhension et de libération. Si on se libère du carcan de ses pensées errantes, c’est formidable ! On peut demeurer alors dans la simplicité naturelle de l’esprit et reposer dans cet état ouvert, clair, lumineux, calme, stable. Cet état ressemble un tout petit peu à ce que les gens cherchent dans la relaxation, la clarté en plus et la somnolence en moins.


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