vendredi 31 août 2018

La voie du cœur


La nature a mis à notre disposition trois instruments également nécessaires pour appréhender le réel, trois moyens de connaissance : l'intelligence de la tête, l'intelligence du corps et l'intelligence du cœur. 
L'instruction, aujourd'hui prolongée jusqu'à seize ans au moins, souvent beaucoup plus, exerce l'intellect. La gymnastique, l'athlétisme, la pratique des arts martiaux assurent ce que nous nommons culture physique. 

Mais, dans notre monde moderne, le développement du sentiment juste est presque totalement négligé. La toute-puissance des émotions : peur, jalousie, convoitise, colère, anxiété, vanité, détermine ce qu'il faudrait oser appeler la stupidité du cœur. 
Il n'est pas de voie initiatique, même les yogas techniques ou le yoga de la connaissance, qui ne fasse la part belle à la purification du cœur. C'est dans la " caverne du cœur ", disent les Upanishads, que l'absolu se révèle comme l'essence de notre être, comme notre propre " Soi ", à condition que ce cœur ne soit plus encombré par les marques d'un passé toujours présent qui se projette en craintes et en rêves sur le futur. 
C'est dans le cœur que se vit la mort du vieil homme et la naissance de l'homme nouveau. " Un cœur léger ", " le cœur en paix ", ces expressions ne sont pas mystérieuses, bien au contraire. Elles n'en sont pas moins ésotériques pour cela.


Arnaud Desjardins


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jeudi 30 août 2018

Observation rapide de la nature


La nature nous montre les autres sens de la croissance et de la richesse... A méditer !


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mercredi 29 août 2018

Trouvez son Ikigai (2)







Trois questions à Sandrine Victoire, thérapeute





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Comment définiriez-vous l'ikigaï ?
En japonais, ikigaï signifie « sel de la vie », « joie de vivre », « raison d'être ». Il s'agit de notre pulsion de vie, de notre vocation, de ce pour quoi nous sommes sur terre. Elle correspond à notre nature profonde et permet de nous réaliser dans toutes les dimensions de notre vie. Du fait de notre éducation, de notre histoire, il se peut que nous nous en soyons éloignés. Nous éprouvons alors une insatisfaction profonde, le sentiment - légitime - de ne pas être reconnus, un stress qui va crescendo.
Qu'est-ce qui nous empêche de trouver notre ikigaï ?
Souvent, le fait d'être trop centré sur des modèles externes de réussite empêche de trouver un sens à sa vie. C'est ce que l'on appelle « être en référence externe » en programmation neuro-linguistique (PNL). Un chemin s'ouvre lorsque nous nous libérons de nos barrières internes, notamment nos drivers, ces croyances limitantes qui s'enracinent dans l'enfance et nous font croire que pour être aimé, apprécié, reconnu, il faut obéir à des injonctions : être fort, parfait, performant, faire plaisir, etc. Il est aussi nécessaire de travailler son rapport à l'argent, qui peut bloquer une évolution possible.
Quelques bonnes résolutions avant la rentrée ?
Cesser de se comparer aux autres, s'affranchir de leur jugement ! Cela suppose un travail d'intériorité pour être davantage à l'écoute de ses besoins, de ses sensations, de ses appétences. Si on est relié à soi, on sera mieux en phase avec ce qu'on aime et ce qu'on sait faire, et on sera plus heureux et plus utile au monde.

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mardi 28 août 2018

Trouvez son Ikigaï (1)


Ikigai (生き甲斐?) est l'équivalent japonais de la « joie de vivre » et de la « raison d'être ».


Ça ronronne au boulot ? Vous voulez changer de voie ? Avant la reprise, un temps de réflexion peut vous aider à trouver comment être plus heureux dans votre vie et au travail.







CET ARTICLE EST RÉSERVÉ AUX ABONNÉS
Dans le sud du Japon, il est un archipel où les habitants vivent mieux et plus longtemps... Quel est le secret des centenaires des îles d'Okinawa ? Parmi les facteurs évoqués : l'hérédité, la cuisine (notamment la consommation d'une algue antioxydante), l'hygiène de vie, l'activité physique extérieure, l'humour et la vie sociale. Dans leur dialecte, le terme de « retraite » n'existe pas. Même les plus âgés exercent une activité rémunérée. Toutes ces dimensions contribuent à leur bonheur, ce fameux ikigaï, terme japonais qui n'a pas de traduction exacte. Il se compose des idéogrammes iki, qui signifie « vie » ou« être en vie », et gaï, qui veut dire « ce qui vaut la peine et a de la valeur ». Littéralement, il se traduirait par « ce pour quoi la vie mérite d'être vécue ». Autrement dit, c'est le moteur qui donne envie de se lever le matin. 
« Notre "raison d'être" évolue en fonction de la phase de vie dans laquelle nous nous trouvons, précisent Héctor García et Francesc Miralles, auteurs d'un livre sur le sujet. L'ikigaï est comparable à une radiofréquence : mieux nous nous synchronisons avec lui, plus nous aurons la sensation que notre vie a un sens. »
Sur quoi repose votre ikigaï ? Si vous envisagez la reprise du travail la mort dans l'âme, il est temps de faire le point ! Ce bilan permet de revisiter vos motivations profondes, de réveiller un talent que vous n'avez pas déployé, d'imaginer de nouvelles sources de revenus, de découvrir la manière d'être davantage utile. Lorsque vous aurez rempli chaque item (ci-contre), surlignez ce à quoi vous estimez ne pas consacrer assez de temps. Puis choisissez trois actions concrètes à réaliser dès que possible.
Cet exercice ne vous fera peut-être pas changer du jour au lendemain, mais il peut donner à votre vie un nouvel élan. Vous ne pouvez vivre financièrement de votre passion ? Nourrissez-la tout de même ; elle irriguera votre quotidien et vous aidera à adopter une distance plus juste avec les tracas professionnels. « Le secret est de devenir acteur de notre vie au lieu de rester simple spectateur », précise le duo d'auteurs. Tout un programme... À votre stylo !

Les quatre composantes de l'Ikigaï

À la croisée de ce vous aimez faire et de vos talents, s'exprime votre passion.
À la croisée de vos talents et de ce pour quoi vous pouvez être payé, émerge votre profession.
À la croisée de ce pourquoi vous pouvez être payé et ce dont le monde a besoin, se trouve votre vocation. 
À la croisée de ce dont le monde a besoin et de ce que vous aimez faire, se définit votre mission. 
Au centre est votre ikigaï, cet équilibre entre dons, rémunération, utilité, motivation qui donne sens à votre vie.

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lundi 27 août 2018

Aide toi ! Le ciel t'aidera !


La plus grande étreinte d'amour que tu ne feras jamais est de t'embrasser complètement. 
Ensuite, tu te rendras compte que tu as embrassé l'univers entier et tout le monde en lui. 

ADYASHANTI 


Mariela Garibay

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samedi 25 août 2018

Méditation de pleine attention

Vous pratiquez régulièrement la méditation de pleine attention ?

 
Alors ! Soyez attentif à ne pas pratiquer par cœur. Cela ne veut pas dire qu’il est conseillé de changer l’exercice de temps en temps. Au contraire, l’indication donnée à Graf Dürckheim par son maître Umeji Roshi « le chemin est la technique ; la technique est le chemin » signifie qu’il est important de toujours de nouveau reprendre exactement le même exercice.
Zazen est un rituel très précis; comme dans le Kyudo, la séquence des huit gestes qui permettent d’encocher une flèche pour ensuite la décocher est également un rituel très précis.

Je voudrais souligner que lorsqu’on pratique un exercice qui a ses racines dans la tradition japonaise (ou chinoise), il faut être attentif à la signification des mots employés et à la traduction qui en est faite dans notre langue.
Par exemple, le mot respiration apparait comme étant au centre de toute pratique méditative.
Notre danger est d’identifier le mot respiration à ce qu’en dit l’anatomie et la physiologie dans le cadre de la médecine occidentale. Comme le disait Graf Dürckheim, « la respiration est davantage qu’une alimentation de l’homme en oxygène ».
Le concept respiration n’existait pas dans la langue japonaise lorsque Graf Dürckheim était au Japon (1938 - 1947). Il y avait le Kanji prononcé « KoKyu ».
La traduction la plus proche qui soit de cette expression serait "InspirationExpiration" sans intervalle, sans trait d’union et sans utiliser la conjonction « ET » !
Il m’arrive, après ces cinquantes années de pratique quotidienne, de me poser la question d’une traduction plus proche encore de ce Kanji : "InspirerExpirer" sans intervalle, sans trait d’union et sans utiliser la conjonction « ET ». Bien des fois, lorsque je prononçais le mot "respiration", Graf Dürckheim m’interrompait pour me dire « La respiration, ça n’existe pas; quelqu’un respire ».
L’usage grammatical de l'intervalle, du trait d'union ou de la conjonction « ET », est dû au fait que notre approche du réel, en Occident, se réalise à travers la conscience qui objective. C’est le mental (mind) qui impose la conjonction « ET » ; d’où un point de vue dualiste sur le réel. C’est à ce point habituel et machinal que nous ne sommes pas conscients de cet usage abusif de la conscience ‘’de‘’ comme seule approche du réel.
Quelques exemples : nous disons, sans la moindre hésitation, le jour ET la nuit; le corps ET l’esprit; le conscient ET l’inconscient; le passé ET l’avenir; la cause ET l’effet; la santé ET la maladie.
C’est la conscience "de" (mind) qui oppose : l’inspiration ET l’expiration.
Mais, contrairement à notre manière de penser habituelle, la tradition japonaise n’isole pas l’un ou l’autre de ces constituants. Parce que « KoKyu » est un système oscillant, un événement ! Parce que Inspirer est la cause et l’effet de Expirer ; parce que Expirer est la cause et l’effet de Inspirer ! Parce que le jour est la cause et l’effet de la nuit; parce que la nuit est la cause et l’effet du jour !

Si la pratique de la méditation appelée zazen a un sens pour l’homme occidental c’est en premier parce que cet exercice nous invite à une rupture avec notre manière d’être habituelle, notre manière de faire habituelle, notre manière de penser habituelle; rupture avec cette identité illusoire qu’on appelle l’ego; rupture avec la conscience-ego qui me conduit à croire « que je suis ce que je pense que je suis ! ». La méditation m’apprend que mon point d’appui dans l’existence n’est pas l’ego mais ce que le maître zen appelle la vraie nature de l’être humain. Ce que Dürckheim désigne par l’expression « notre être essentiel », domaine du calme intérieur, domaine du silence intérieur, domaine de la paix intérieure.

D’accord, mais qu’est-ce que c’est ça, notre vraie nature ?
Notre vraie nature c’est … « JeSuis ! » sans intervalle, sans trait d’union, parce qu’il n’y a, ni distance ni écart de temps, entre ce que je nomme « Je » et ce que je nomme « Suis ».
Voici une indication, donnée par Graf Dürckheim lorsqu’il nous accompagnait dans la pratique de la méditation de pleine attention. Elle m’évite, chaque jour encore, de pratiquer par cœur.
« Lorsque vous méditez,
ne vous servez pas de la respiration; 
servez-la ! ».

Jacques Castermane

PS : Jacques Castermane propose une description plus détaillée de la « Méditation de pleine attention » dans l’ouvrage de Christophe André: Méditez avec nous, éd. Odile Jacob, au chapitre "Méditer Parce que c’est l’heure" (p. 193 à 223), oct. 2017
 
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vendredi 24 août 2018

Approches du shiatsu (5)


 Je vous invite à regarder la conférence très instructive de Bernard Bouheret.





Pourquoi je crois au shiatsu à l'hôpital

Le toucher est un élément important de la relation médecin-malade. En médecine orientale, le simple toucher du praticien est un élément important du traitement de nombreux symptômes. Les bénéfices à attendre de l’entrée du massage shiatsu dans le domaine de la santé sont, en premier lieu, pour les citoyens. Non seulement du bien-être, mais aussi potentiellement du bon soin. Et notamment pour les patients porteurs de maladies chroniques, qui sont au nombre de 15 millions en France. Les attentes du personnel soignant sont grandes quant à l’intégration des pratiques complémentaires au soin en milieu hospitalier. Elles peuvent compléter la panoplie des actes de soin de nombreuses catégories professionnelles : infirmiers et infirmières, kinésithérapeutes, psychologues, psychomotriciens. Le groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière -Charles-Foix (AP-HP) évalue des séances de shiatsu pour des enfants hospitalisés en pédopsychiatrie et a proposé deux protocoles de recherche portant sur l’apport du shiatsu dans le traitement de la fatigue au cours de la sclérose en plaques et de l’agitation chez les patients déments hospitalisés. Le plus important n’est-il pas, en complément des pratiques conventionnelles, la satisfaction du patient?

Pr Alain Baumelou,
néphrologue à l'hôpital de la pitié-salpêtrière, coordinateur du centre intégré de médecine traditionnelle chinoise de l'AP-HP.

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jeudi 23 août 2018

Approches du shiatsu (4)


3- Les mains
Les mains « appartiennent au Ciel » par le bout de leurs doigts en relation permanente avec lui!

Comme les pieds, elles sont des carrefours yin-yang. Les différents points de la main et de l’avant-bras, situés sur le méridien du cœur ou le méridien Maître cœur, permettent de « libérer la poitrine ». Ils permettent aussi de traiter le mental, car, dans la médecine chinoise, le cœur est le siégé de l'Esprit. Le point « Shen Men » porte de l’Esprit, situé juste au-dessus du poignet externe, dans le pli de flexion, sur le méridien du cœur c'est son 7e point), permet par exemple de lutter contre le stress, les palpitations cardiaques, les insomnies ou encore anxiété. Les mains et l’avant-bras feront particulièrement l'objet d'attention en cas de problèmes psychiques.


4- La tête   
Une séance de shiatsu se termine par la tête, pour finir de « libérer le mental ». 

Dans la médecine chinoise, le corps humain est vu comme étant inséré dans l’univers : sa tête est « ronde comme le Ciel », et sa voûte crânienne est en permanence en contact avec la voûte céleste. Un point essentiel est situé tout au sommet du crâne, en arrière de la fontanelle : son nom chinois, Bai Hui, signifie « les cent réunions ».

Il est en relation avec quelque chose qui est plus grand que nous, le « Ciel », mot derrière lequel chacun met ce qu’il veut. C’est d’ailleurs un endroit sacré dans de nombreuses religions (cette partie du crâne est « protégée » par la mitre de l’évêque, le bonnet tibétain, la kippa, etc.). À la base du crâne, au niveau de l’occiput, se trouvent aussi deux petits creux abritant des points qui doivent toujours être bien « ouverts » : c’est par ces « fenêtres » que descend l’énergie du Ciel !


La personne qui reçoit un shiatsu peut alors ressentir, à la fin d’une séance, ce sentiment de plénitude et de paix intérieure que nous recherchons tous !

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 voir mon site


 

mercredi 22 août 2018

Approches du shiatsu (3)

1 - Le dos
Un shiatsu commence souvent par le dos.

Cette zone « intérieur-extérieur » est particulièrement importante dans la médecine chinoise. Le dos présente une cartographie très fine de différents points d’acupuncture reliés à tous les organes du corps, allant des poumons, tout en haut, à la vessie, tout en bas. Ainsi, lorsque l’on touche le dos, on atteint l’intérieur du corps, et donc les organes ! Sans compter que le dos contient la colonne vertébrale, la moelle épinière et tout le système nerveux et qu’il est souvent très tendu, car nous sommes trop souvent assis (et mal !) et ne marchons pas suffisamment. Nuque, épaules, dorsales, lombaires : notre rachis souffre!

Mais travailler le dos seul ne suffit pas : les tensions risquent alors de tourner en rond, sans avoir la possibilité de sortir. Il est essentiel de libérer le dos, et donc de cheminer le long des jambes en direction des pieds. Car c’est là que se trouve la porte de sortie des tensions du dos !


2- Les pieds

Le pied est une zone d’extrémité au carrefour du yin et du yang .

Les méridiens yang « descendent » et les méridiens yin « remontent ». Dans la conception chinoise, l’énergie est vue comme un courant électrique avec une double polarité. Au carrefour, la polarité du corps change, alternant entre positif et négatif. D’un point de vue symbolique, les pieds touchent terre... quand tout va bien ! Le shiatsu permet de libérer les tensions du dos aux pieds. Mais aussi les tensions cérébrales, qui empruntent la même porte de sortie! Il n’existe qu’un seul point d’acupuncture sous le pied : le point « fontaine ou source jaillissante », « Yong Quan » en chinois (c’est le premier point du méridien du rein). Situé sous la plante du pied, dans la dépression qui se forme lorsque l’on fléchit les orteils, il est relié à la fois au dos et à la tête. Le point « fontaine jaillissante » fait « remonter » l’énergie de la terre (aspect tonifiant). Et en même temps, ce point permet d’évacuer les tensions mentales (aspect apaisant). Un autre point clé du pied se trouve sur la malléole externe. C’est le point « vaisseau de l’heure Shen »
(« Shen Mai »), le grand point des insomnies, qui permet également de « vider la tête dans les pieds » (donc d’apaiser l’esprit)...
C’est le 62e point du méridien de la vessie, qui en comprend 67.


Au cours de la séance, le praticien en shiatsu (ici, Bernard Bouheret) réalise un tour complet du corps et choisit, parmi quelque 400 " tsubos " - les points d'acupuncture de la médecine chinoise, situés sur les douze méridiens parcourant l'organisme, auxquels s'ajoutent huit « merveilleux vaisseaux » -, ceux qui lui semblent les plus appropriés à la condition de son patient.

mardi 21 août 2018

Approches du shiatsu (2)


La bienveillance au cœur du soin 

Face à une société souvent déshumanisée, dont les membres ne communiquent plus qu’à distance, où plus personne ne se touche ni ne se rencontre, le shiatsu propose la bienveillance. Les Japonais l’appellent Kokoro (« le bon cœur ») et l’évoquent depuis toujours dans leurs chansons d’amour ! Le maître Tokujiro Namikoshi disait : « Le cœur du shiatsu est comme l’amour d’une mère. » Un bon praticien de shiatsu est un homme qui accueille l’autre, essaye de se mettre à sa place et le soigne comme s’il était de sa famille. Il se met à genoux, au même niveau que lui. Ce qui, symboliquement, n’est pas anodin !

Par ses gestes très ritualisés, il est comme en prière, une prière qui dirait au grand tout : « Passe à travers moi, mon cœur est léger, mon mental est paisible, mes mains vont transmettre ton énergie. »

Le praticien cherche la non-séparation, cet état qui fait que l’on ne sait plus si c’est le corps de l’autre qui vient dans nos mains ou si ce sont nos mains qui vont dans / le corps de l’autre : c’est un toucher de cœur à cœur.

Il va sans dire que le praticien doit avoir fait un minimum de travail sur lui, parce que s’il a le cœur qui bat à l’envers ou s’il n’est pas bien ancré, cela ne marchera jamais, il n’invitera jamais le grand tout dans ses mains ! Le shiatsu est une voie spirituelle qui implique un engagement total. À une époque où les hôpitaux sont dirigés comme des entreprises, où le soignant est considéré comme un « technicien » devant se « protéger » de toute implication émotionnelle, le personnel hospitalier est en grande souffrance. C’est pour cette raison d’ailleurs que, sous convention avec les directions de plusieurs hôpitaux, nous soignons les soignants, en les aidant à libérer leur stress ou à soulager leurs maux de dos. Au fil du temps, les portes s’ouvrent ! Le praticien a pour vocation de transmettre les préceptes de sagesse qu’il incarne lui-même (faire attention aux excès, bien se nourrir, dormir suffisamment mais pas trop...) et qui permettent d’éviter l’apparition de la maladie.

Le shiatsu, comme toute la médecine asiatique, tient en effet la prévention de la maladie pour fondamentale.


De la prévention aux maladies de civilisation 


Les maladies de civilisation regroupent de nombreuses pathologies telles que les allergies, la fatigue chronique, le surpoids et l’obésité, les maladies neurodégénératives, endocriniennes, cardio-vasculaires, génétiques ou encore le cancer. Elles sont souvent la conséquence directe de notre mode de vie « moderne » avec ses rythmes effrénés, ses écrans, la mauvaise qualité de l’alimentation ou la dégradation de l’environnement par diverses pollutions... Le shiatsu utilisé à des fins thérapeutiques apporte un soulagement rapide de la douleur dans des maladies inflammatoires telles que l’asthme ou la polyarthrite rhumatoïde, ou encore au cours des chimiothérapies du cancer. Pratiqué par des professionnels qui peuvent être par ailleurs titulaires de diplômes de santé (infirmier, aide-soignant, médecin, kinésithérapeute...) et longuement formés au shiatsu thérapeutique, ce dernier ne prétend pas guérir. Mais il accompagne la maladie, toujours avec bienveillance.    

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lundi 20 août 2018

Approches du shiatsu (1)

 Cette semaine, je souhaitais vous faire partager ma pratique du shiatsu à travers l'interview de Bernard Bouheret qui permet d'entre dans le mystère du corps. Ce corps est symbole de l'instant présent et témoigne de la vérité du moment. Il est aussi le messager du passé pour, en se détendant, accueillir le futur.


Le shiatsu, pratiqué depuis des millénaires au Japon dans le cercle familial, se présente comme une technique facile d’accès : sans onguent, sans huile, sans aiguilles, n’importe où, sur une natte, sur une chaise, dedans, dehors, le praticien de shiatsu arrive avec ses mains, et c’est tout ! Ses doigts « appuient » sur les « tsubos », ces points énergétiques situés le long des méridiens, selon un rythme particulier. (C’est d’ailleurs le sens de « shiatsu » : en japonais, shi-doigt/atsu-pression). L’efficacité du shiatsu est quasi immédiate. Déjà au bout de 15 minutes, le corps entier entre en vibration : toutes les sphères (émotionnelle, mentale, spirituelle) se mettent à vibrer à l’unisson et une paix profonde s’installe...

Retour vers le centre

Le shiatsu permet de « rentrer à la maison ». Comme l’évoque cette métaphore fréquemment utilisée, c’est un recentrage corporel qui s
’opère, clé du bien-être et de la santé ! Aujourd’hui, l’homme est constamment extirpé de lui-même : il ne sait souvent plus où est son centre. Au niveau émotionnel ou psychologique, il est en permanence plus ou moins déporté par des stimuli extérieurs qui le contraignent et le font souffrir. Le vieux sage taoïste nous dit :

« Qui est au centre de lui-même est au cœur de l’univers et tout l’univers tourne autour de lui. »

Le sentiment de paix qui en découle est accessible à tous. Cette paix est inconditionnelle, ne dépendant pas des circonstances extérieures, comme avoir une belle maison, une bonne situation, une vie sentimentale réussie, une bonne santé, etc.
Qui pourrait nier que celui qui connaît cet état de plénitude détient un précieux trésor dans notre monde moderne ?

Selon un adage chinois, « l’eau qui court ne croupit jamais ». Le shiatsu libère et rétablit le grand flux de la vie. L’énergie circule à nouveau, comme une rivière courant dans un flux permanent : les poissons sont jolis, la faune, la flore et tout le monde prospèrent !

C’est un terrain favorable pour que la maladie ne puisse pas s’installer. Et quand bien même, pour que la guérison, si elle est possible, puisse advenir : on sait bien, à l’inverse, que la maladie survient plus facilement lorsque l’on est morcelé ou séparé.


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samedi 18 août 2018

L'évolution de l'idée du bonheur avec Frédéric Lenoir (4)


Vous venez d'employer le mot joie, une autre façon de parler du bonheur ? 

La joie est une incarnation concrète du bonheur. Dans certains courants spirituels, comme le christianisme ou le taoïsme, mais aussi chez Spinoza et chez Nietszche, on privilégie l'idée de joie. Les confucéens, les stoïciens ou les bouddhistes préfèrent la notion de paix intérieure, de sérénité. Ils cherchent avant tout la paix de l'âme (ataraxie), le fait de ne pas être troublé.

Avons-nous besoin de joies collectives, dont la victoire de l'équipe de France de football serait un exemple ? 

Les Français se disent à 80% heureux à titre individuel, mais déclarent à 80% que tout va mal en France ! Notre pays a une vision très négative de lui-même. Vivre une expérience de victoire collective permet de créer du bonheur ensemble. C'est excellent pour le moral du pays. On a le sentiment de partager les mêmes valeurs. On appartient à une même entité supérieure, la République. Mais cela ne dure pas...

Pourquoi l'idée du bonheur est-elle associée à l'enfance – on parle d'« âge heureux » ?

Jusqu'à 5 ans, les enfants vivent l'instant présent. Quand il vit une expérience de satisfaction, l'adulte va parasiter ce moment avec des projections du futur ou des souvenirs du passé. En outre, les enfants n'arrêtent pas de grandir, quand ils apprennent quelque chose de nouveau, ils sont dans la joie. Cela corrobore le lien que fait Spinoza entre la joie et la croissance de l'être. Enfin, les plus jeunes sont spontanés. Ils ne sont pas pris dans tous les méandres de l'ego ou du mental. L'Évangile nous dit : « Laissez venir à moi les petits enfants, parce que le royaume de Dieu appartient à ceux qui leur ressemblent » (Matthieu 19, 14). Et le royaume de Dieu, c'est la joie parfaite, c'est l'enfant qui garde la capacité de s'émerveiller et de grandir face à chaque expérience nouvelle.

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source: La Vie

vendredi 17 août 2018

L'évolution de l'idée du bonheur avec Frédéric Lenoir (3)


Dans cette société de l'individu, à force de vouloir se réaliser, on en oublie les autres, alors que justement le bonheur est lié au partage avec autrui... 

Oui, c'est le premier critère du bonheur. Que ce soit au Ghana, aux États-Unis, en France ou au Mexique, la réponse dans les études est similaire. Ce qui nous rend d'abord heureux, c'est l'amour et la qualité de la relation avec autrui. Comme le disait Aristote, l'être humain est un animal politique qui a besoin des autres pour se réaliser, et notamment de l'amitié. À ce titre, les jeunes d'aujourd'hui sont moins solitaires que ne l'étaient les générations des années 1950 ou 1960. Ils ont le sens de la tribu et du groupe. La crise économique y a contribué. Elle a permis aux jeunes générations d'être en situation d'avoir besoin des autres.


"Ce qui nous rend d'abord heureux, c'est l'amour et la qualité de la relation avec autrui. "

Existe-t-il des domaines plus propices pour être heureux, comme la création artistique, le travail intellectuel ou le sport ? 

Le bonheur peut se rattacher à la réalisation de nos aspirations, qui sont différentes pour chacun. Elles concernent le cœur, donc recouvrent la dimension affective, le corps et l'esprit. Il incombe à chacun de découvrir ce qui le met dans la joie.

Dans votre livre le Miracle Spinoza, vous rapportez que le philosophe propose d'accorder notre nature à la Nature... 

Comme en musique, notre note personnelle va s'accorder à la musique de l'univers. Il s'agit au niveau de notre corps, de notre cœur, de notre esprit de savoir choisir les bonnes rencontres. Pour le corps, c'est le plus simple à comprendre : quels aliments sont bons pour nous ? La logique est la même pour le cœur. Des rencontres nous font du bien, parce qu'elles nous permettent de grandir. Toute la philosophie de Spinoza repose sur l'idée de croissance de l'être. Chaque fois que l'individu grandit, il est dans la joie. Il faut donc orienter nos désirs – spirituels ou sensibles –, le moteur de notre existence, vers des choses ou des personnes qui s'accordent à notre nature et nous mettent dans la joie.


"Il faut orienter nos désirs vers des choses ou des personnes qui s'accordent à notre nature."

jeudi 16 août 2018

L'évolution de l'idée du bonheur avec Frédéric Lenoir (2)


Tout le monde souhaite-t-il être vraiment heureux ?

L'aspiration au bonheur est universelle. Dans toutes les cultures, on retrouve l'idée de pouvoir savourer l'existence, de chercher une satisfaction globale et durable. On en parlait déjà dans l'Épopée de Gilgamesh, un texte datant de 2600 avant Jésus-Christ ! La quête du bonheur est profondément inscrite dans l'être humain, mais elle peut prendre des modalités différentes. En Occident, certains préfèrent le plaisir intense au bonheur, la passion amoureuse à un état de sérénité amoureux, au motif que le bonheur les ennuie. En vertu d'une idée romantique, ils préfèrent vivre intensément, quitte à beaucoup souffrir. Dans certains mouvements spiritualistes, grandes religions ou courants philosophiques, le bonheur sur terre n'apparaît pas comme le but suprême. Il se trouve au ciel, dans le royaume de Dieu. Jésus renonce à son bonheur sur terre en acceptant la crucifixion, mais il sait qu'il ressuscitera. Si la finalité ultime est le bonheur dans l'au-delà, cela justifie l'idée de faire des sacrifices. C'est le pari de Pascal ou la vision de Socrate : le but de l'éthique n'est pas forcément d'être heureux, mais d'avoir une vie bonne, fondée sur la justice et le respect des autres. C'est malheureusement aussi la vision des terroristes qui pensent accéder au paradis en tuant des infidèles.


Comment évolue l'idée dans l'histoire ? 

La notion apparaît dès la Mésopotamie et l'Égypte ancienne, puis est théorisée par les penseurs grecs entre le VIe et le IIIe siècle avant notre ère. Ils nous expliquent comment atteindre cette vie heureuse. Comment bien orienter sa vie par la raison, trouver un bonheur à l'intérieur de soi. Il est en nous, par le regard que l'on pose sur la vie, et non dans l'ajustement du monde à notre désir. On retrouve la même conception de la sagesse en Orient avec le bouddhisme. Il faut travailler sur son esprit pour être heureux et ne pas dépendre des aléas de l'existence. Avec l'avènement du christianisme, le bonheur est reporté à l'au-delà. La notion de salut prend le dessus. Avec la Renaissance, le mot retrouve de sa force. On renoue avec la conception grecque. Puis retour en arrière au XIXe siècle : le romantisme associe le bonheur au confort bourgeois. La philosophie du devoir fondée sur le système de Kant vise l'éthique, pas l'état de satisfaction global. Elle revient dès la Seconde Guerre mondiale dans les sociétés occidentales à la faveur du développement de l'individualisme et de la crise des grandes idéologies collectives. Elles ont échoué à faire le bonheur de l'humanité. Les religions qui nous promettaient la félicité dans l'au-delà sont aujourd'hui en crise, comme la science. Dans ce contexte, on se recentre sur soi-même, on cherche à s'accomplir, à se réaliser. On s'intéresse à nouveau aux philosophes grecs, à Spinoza, au bouddhisme, à la psychologie, aux démarches de développement personnel.
Nous sommes dans un monde où si nous ne sommes pas heureux, nous sommes des ratés.

Aujourd'hui, l'injonction au bonheur n'est-elle pas trop forte ?

Nous sommes en effet dans un monde où si nous ne sommes pas heureux, nous sommes des ratés. Cette recherche d'accomplissement de soi, en dehors de toute contrainte collective, devient lourde à porter. Cela demande une grande exigence de connaissance de soi-même. Beaucoup se sentent écrasés. Ce sentiment est bien décrit dans le livre du sociologue Alain Ehrenberg la Fatigue d'être soi. Dépression et société (Odile Jacob, 1998). La maladie psychique dominante n'est plus, comme du temps de Freud, la névrose – le conflit entre le ça et le surmoi –, mais la dépression. Il est devenu trop difficile d'être soi, de choisir, de se réaliser. On tombe dans un état de tristesse chronique.

à suivre
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mercredi 15 août 2018

L'évolution de l'idée du bonheur avec Frédéric Lenoir (1)

À travers ses 50 livres à succès, le philosophe Frédéric Lenoir essaye de répondre à la question fondamentale : qu'est-ce qui nous rend heureux ? Son dernier ouvrage, le Miracle Spinoza (Fayard, 2017), où il raconte l'itinéraire de ce « grand penseur de la joie », n'y coupe pas. Pour La Vie, le docteur de l'École des hautes études en sciences sociales livre, avec son art de la pédagogie, quelques clés inspirées des grands philosophes.

Le bonheur est-il une addition de moments ?
C'est un état de satisfaction de l'existence. Pour comprendre ce concept, les philosophes grecs, comme Platon, Épicure ou Aristote, l'ont comparé avec un autre état, le plaisir. Celui-ci est la satisfaction donnée rapidement à un besoin ou un désir. J'ai envie de voir un ami et j'ai du plaisir lorsque j'y parviens. Je souhaite voir un film, je le vois et j'en retire du plaisir. Mais le plaisir possède des inconvénients. D'une part, il ne dure pas : dès que j'ai bu, j'ai à nouveau soif. Il dépend aussi de causes extérieures. Il faut toujours renouveler les événements qui nous procurent du plaisir, et nous savons mal le modérer. Nous avons tendance à rechercher toujours plus de plaisir. Et cela peut procurer du malheur à long terme. A contrario, le concept de bonheur n'est pas une émotion passagère, mais un état d'être global et durable. On est bien dans sa vie, dans son corps et dans sa tête. Le bonheur est un état, le plaisir est un moment.

Est-ce l'opposé du malheur ?
Beaucoup de philosophes contemporains, comme Luc Ferry, préfèrent cette approche. Pour avoir une meilleure compréhension de l'état du bonheur, qui reste une ambition assez forte, on se tourne vers l'état dans lequel on n'est pas malheureux. Cette vision me fait penser à la phrase de Jacques Prévert : « J'ai reconnu le bonheur au bruit qu'il a fait en partant. »

Être heureux est-il le fruit de la chance ou procède-t-il d'une démarche rationnelle ? 

Les deux. Si vous êtes issu d'une famille où les parents vous aiment, vous avez plus de chances d'être heureux que dans une famille maltraitante. Même chose si votre penchant naturel est plus tourné vers l'optimisme que si vous êtes doté d'un tempérament colérique ou anxieux. Et puis il y a des moments dans la vie qui conditionnent le fait d'être heureux ou non. Des études états-uniennes démontrent que le bonheur est déterminé pour moitié par notre capital génétique et les événements extérieurs et, pour l'autre moitié, par nos choix et le travail que nous avons fait sur nous.

Chercher une satisfaction globale et durable est universel.

à suivre
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mardi 14 août 2018

Auprès de mon arbre... (2)

Vénérable confident

L'arbre de l'enfance peut aussi être un arbre vénérable, exceptionnel par sa forme, sa dimension et son âge. Quand Xavier, un amoureux des végétaux les évoque, sa respiration et son débit s'accélèrent. « La relation avec eux est plus facile et la complicité, plus grande qu'avec les humains », avoue-t-il. L'arbre de son enfance se dresse dans le massif de la Sainte-Baume, où sa famille maternelle possédait une bastide et une vaste propriété. Cet arbre trapu qui ne croît plus qu'en largeur, haut de 15 m, « le grand chêne » comme les siens l'ont baptisé, matérialise le bonheur enfui : grandes tablées, lectures, siestes, jeux d'enfant et rêveries. N'est-ce pas à ses pieds que son père, récemment disparu, a été présenté à sa mère ? N'est-il pas le confident, le réceptacle des secrets, celui que l'on sent vibrer, respirer, collé à son écorce marron-gris ?
« Près de lui, je me suis toujours senti en sécurité. Sa puissance vitale est si forte. Tu peux lui parler, il te répond. Son diamètre est si grand qu'il est presque impossible d'en faire le tour, même à plusieurs en se donnant la main. Sur ses branches, on observe la sarabande des loirs. À travers son feuillage, les étoiles qui brillent », note-t-il, impressionné aussi par l'idée que sa partie souterraine égale sa partie aérienne. « Son âge nous a toujours intrigués. Mon grand-père prétendait qu'il avait 1 000 ans. Un sylviculteur l'a carotté et a établi qu'il avait 300 ans. C'est donc sans conteste le plus vieux de la Sainte-Baume », confie le quinquagénaire. L'idée que ce chêne ait vu passer plusieurs générations des siens le réjouit. Autant que la pensée qu'il lui survivra.

Un lien avec nos aïeux

Robustes, les arbres nous regardent parfois passer sur la Terre. Dans la ferme familiale, Aymeric a revu récemment le saule pleureur que son grand-père avait planté pour se reposer à l'ombre. Mais, décédé, il ne l'a pas vu s'épanouir. « Aujourd'hui, l'arbre est magnifique mais un peu inutile », regrette-t-il. Pourtant, étrangement, ce saule demeure l'arbre qui l'apaise le plus, comme un lointain écho à ses racines, un lien à la fois mystérieux et visible à son aïeul. Dans le jardin de mon enfance, mon saule pleureur est mort, mais le figuier sur lequel je m'ébattais, lui, résiste.
Sondé sur le sujet, Sami, mon fils aîné, 18 ans, cite cet arbre sur lequel il a grimpé enfant avec son frère et ses cousins. Il a grandi à Paris mais a passé la plupart de ses vacances dans le Sud ensoleillé. Il décrit la coque du bateau retourné qui sert encore de marchepied, près du tronc. « Monter sur un bateau pour grimper sur un figuier, c'est le début de l'aventure. Là-haut, le regard porte par-dessus la clôture, on peut admirer le paysage, parfois même le coucher de soleil. Parce que je l'ai escaladé, c'est l'arbre que je connais le mieux. C'est avec lui que le contact a été le plus grand. » Une relation intime et même pas gourmande : le goût des figues mûres lui est moins précieux que son odeur et son toucher. Pour Sami, ce figuier garde un parfum d'enfance, puissant et inimitable.

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lundi 13 août 2018

Auprès de mon arbre... (1)

Vénérable ou ordinaire, protecteur ou complice, l'arbre qui a marqué notre enfance est capable de la ressusciter. Chacun possède le sien, phare sentimental ou référent imaginaire, comme le montre notre journaliste Corine Chabaud.


Une armée de capricornes a eu raison de la vigueur de son tronc. Le saule pleureur de mon enfance, grignoté de l'intérieur par ces insectes, est mort il y a bien longtemps. Les autres arbres du jardin n'ont jamais autant compté. Ni l'olivier dont on négligeait de cueillir les fruits, ni l'eucalyptus odorant ni le faux poivrier à l'écorce fragile. Je me souviens des feuilles vertes légèrement dentées et des chatons de l'arbre : j'ignorais leur nom mais leur trouvais une ressemblance avec des petites chenilles, inoffensives. Je me souviens du tronc veiné de gris, creusé de galeries. L'après-midi, cette tanière se muait en une aire de jeux discrète et fraîche. Avec ma sœur, nous nous poussions à tour de rôle sur la balançoire fabriquée par notre père.

Si les arbres ont une vie secrète, comme l'a raconté avec succès Peter Wohlleben (la Vie secrète des arbres, les Arènes), bien des gens ont une relation secrète à un arbre. Avec celui qui a marqué notre enfance, le lien peut être très fort. Rattaché à des émotions intenses, il émerge de notre forêt intime et tient une place à part dans notre imaginaire, sans être forcément beau. Spécialiste de Jean Giono, guide érudit de balades littéraires sur les traces de l'écrivain, Jean-Louis garde en son coeur « un arbre modeste, le néflier, souvent tourné en dérision puisque l'expression "des nèfles" signifie "rien" ».
« Il m'est cher car, enfant, j'ai découvert la lecture à l'ombre de ses branches. Il avait poussé en bordure de ma ferme natale. Le soir, à la fraîche, mon grand-père m'y racontait des histoires merveilleuses. Il n'a pas la magnificence d'un chêne, ni le charme de l'olivier, ni l'envergure d'un conifère. Mais il possède la saveur de la nostalgie de l'enfance », confie le guide. Influence d'Elzéard Bouffier, le personnage de Giono qui a fait pousser des centaines de milliers de chênes ? Adulte, Jean-Louis a planté des dizaines d'arbres dans son jardin à partir de noyaux ou de graines rapportés de ses voyages. Sans s'y attacher autant qu'à ce néflier, dont les fruits ne perdent leur astringence et ne se mangent qu'une fois pris par le gel, l'hiver, comme les kakis du plaqueminier.

Culte personnel ou familial

Pas forcément mythologique, l'arbre surgi des brumes de l'enfance est digne d'un culte personnel ou familial. D'une incarnation divine comme chez les Grecs et les Romains. Mais il peut être ordinaire. Émue, Anne se remémore le sureau poussé dans la haie séparant le jardin de sa maison et la base de loisirs, dans les Flandres françaises. Avec ses fleurs blanches à l'odeur sucrée, sa mère confectionnait des beignets. Avec ses baies rouges, une gelée parfumée. Quand Anne déguste à présent un yaourt à la fleur de sureau, les souvenirs affluent : le sureau est sa madeleine de Proust. Elle se souvient des « goûters pharaoniques avec (sa) cousine Caroline », à l'ombre de l'arbuste.
Dans les yeux d'un enfant, les proportions de l'arbre peuvent être exagérées. « Le jardin public, c'était la forêt de Compiègne », note Pierre. Né en 1942, il a fréquenté une école maternelle de la rue Blanche, dans le IXe arrondissement de Paris. Il garde en tête l'image du marronnier de la cour, qu'il associe aux rires de la récré, quand ses marrons servaient de projectiles, ou aux punitions, quand les instituteurs se fâchaient. « Nous jouions aux Boches et aux Français, pas aux cow-boys et aux Indiens », note-t-il.

Refuge protecteur

L'arbre de l'enfance est souvent doté de vertus protectrices. À 10 ans, dans le jardin bourguignon de ses grands-parents, Stéphanie trouvait refuge sur un pommier inaccessible à ses petits frères. Indifférente à l'inconfort, elle dévorait sur ses branches quantité de romans. « Ce n'était pas un arbre nourricier, je n'ai pas le souvenir de ses pommes, dit-elle. Mais je ressens encore son écorce sous mes mains. » Vivre dans un arbre, comme le baron perché d'Italo Calvino, jeune aristocrate qui y élit domicile pour fuir les contraintes sociales ? Ou simplement s'y ressourcer, à l'écart ? « Quand j'ai cherché à acheter une maison à la campagne, un de mes critères de sélection était un arbre sur lequel mes enfants pourraient grimper », dit Stéphanie.

Olivier retrouvait ses deux chers tilleuls lors des vacances dans la maison familiale en Creuse. Plantés devant la bâtisse pour l'ombrager, ils se dressent comme des géants tutélaires sur son seuil, tours de guet sur lesquels se hissait l'enfant-vigie. Ils trônent aussi sur un tableau dans la demeure, miroir évocateur. Le repère géographique qu'ils incarnent est capital. « Quand nous arrivions de Paris en voiture, nous les guettions comme d'autres guettent la mer. Ils symbolisent la campagne, la fin du voyage, la maison d'enfance. » Aujourd'hui fatigués, ils se sont fait supplanter en beauté par des érables récents. Mais ils ne souffrent aucune concurrence sentimentale.


à suivre...
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dimanche 12 août 2018

Oublieuse mémoire...


Je n’ose plus ouvrir mes secrètes armoires
Que vient bouleverser ma confuse mémoire.
Je lui donne une branche, elle en fait un oiseau,
Je lui donne un visage, elle en fait un museau,
Et si c’est un museau, elle en fait une abeille.
Je te voulais sur terre, en l’air tu m’émerveilles.
(Jules Supervielle)

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dimanche 5 août 2018

La vie c'est quoi ?


Aldebert 
- La vie c'est quoi ?
.
C'est quoi la musique?
C'est du son qui se parfume.
C'est quoi l'émotion?
C'est l'âme qui s'allume.
C'est quoi un compliment?
Un baiser invisble.
Et la nostalgie?
Du passé comestible.
C'est quoi l'insouciance?
C'est du temps que l'on sème.
C'est quoi le bon temps?
C'est ta main dans la mienne.
C'est quoi l'enthousiasme?
C'est des rêves qui militent.
Et la bienveillance?
Des anges qui s'invitent.
Et c'est quoi l'espoir?
Du bonheur qui attend.
Et un arc-en-ciel?
Un monument au vivant.
C'est quoi grandir?
C'est fabriquer des premières fois.
Et c'est quoi l'enfance?
De la tendresse en pyjama.
Mais dis, papa,
La vie c'est quoi?
Petite, tu vois,
La vie, c'est un peu de tout ça, mais surtout c'est toi.
C'est toi.
C'est quoi le remord?
C'est un fantôme qui flâne.
Et la routine?
Les envies qui se fânent.
C'est quoi l'essentiel?
C'est de toujours y croire.
Et un souvenir?
Un dessin sur la mémoire.
C'est quoi un sourire?
C'est du vent dans les voiles.
Et la poésie?
Une épuisette à étoiles.
C'est quoi l'indifférence?
C'est la vie sans les couleurs.
Et c'est quoi le racisme?
Une infirmité du cœur.
C'est quoi l'amitié?
C'est une île au trésor.
Et l'école buissonnière?
Un croche patte à Pythagore.
C'est quoi la sagesse?
C'est Tintin au Tibet.
Et c'est quoi le bonheur?
C'est maintenant ou jamais.
Mais dis, papa,
La vie c'est quoi?
Petite, tu vois,
La vie, c'est un peu de tout ça, mais surtout c'est toi.
C'est toi
Dans tes histoires, dans tes délires, dans la fanfare de tes fous rire,
La vie est là, la vie est là
Dans notre armoire à souvenirs, dans l'espoir de te voir vieillir,
La vie est là, la vie est là
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vendredi 3 août 2018

L'arbre est déjà en nous !

 
Réalisation Marie Portefaix



Krishnamurti peut dire la vérité tous les jours dans une ville d’Occident ou dans une ville d’Orient ; Ramana Maharshi a pu la dire tous les jours sans bouger de son ashram de Tiruvanamalaï. Qui l’a vraiment entendue ? Certains ont écouté les mots, les ont répétés dans des livres, mais n’ont pas été jusqu’au bout de cette réalisation, qui est pourtant toujours à votre disposition. À aucun moment, vous n’êtes plus près, à aucun moment vous n’êtes plus loin. De ce point de vue-là, je suis bien catégorique, comme le langage de certains enseignements : Il n’y a aucune progression d’aucune sorte. 
Même les images de croissance : « la graine qui se transforme en arbre, l’arbre est déjà potentiel dans la graine », sont seulement des approches. L’arbre est déjà entier en chacun de vous. Il n’y a rien à gagner, rien à accroître, rien à chercher de plus que ce qui est là, déjà, en plénitude, chez chacun. Le progrès n’est pas une progression qui vous rend plus près de ce que vous êtes déjà. Comment voulez-vous être plus près ou plus loin de ce que vous êtes déjà ? La progression, simplement, vous rapproche du moment où vous entendrez. Et une phrase qui a frappé vos oreilles des centaines de fois vous frappera enfin pour la première fois. Vous l’entendrez. De tout votre être vous ne pourrez pas ne pas la mettre en pratique, ne pas la vivre. Et l’éveil qu’on a appelé parfois « illumination » se produira.

Arnaud Desjardins
A la recherche du Soi III

Voir le site de Marie Portefaix
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