mardi 9 mars 2021

François-Xavier Moronval, à l'épreuve de la fragilité

 

Toujours en première ligne pour les autres, cet urgentiste a un jour basculé du côté des patients. C'est dans la présence diffuse de Dieu et dans les réseaux sociaux qu'il a puisé les ressources pour vivre cette épreuve.


Aux urgences, depuis plus de 10 ans, j'ai vu le pire, des pendus, des blessés par balles, des mutilés, des bébés secoués... Je suis confronté aux drames humains, sans filtre. C'est souvent très difficile d'affronter toute cette fragilité, mais je suis fait pour ça. Dans les couloirs de l'hôpital où j'exerce, dans les Vosges, j'ai le sentiment que je peux vraiment être utile. Et pourtant, vous allez peut-être trouver cela étrange, mais j'ai longtemps eu très peur du sang !

À la vue de l'hémoglobine, pendant mes études, je sortais de l'amphithéâtre, en plein cours, et faisais un malaise vagal dans les toilettes. En stage de chirurgie, au bloc opératoire, je devais tenir les écarteurs et hop ! je tombais dans les pommes. On appelle cela de l'hématophobie, une affection qui, selon l'Organisation mondiale de la santé, arrive au troisième rang des phobies les plus répandues après la peur des animaux et celle du vide.

« Ma vocation médicale est plus forte que tout »

Quand j'étais petit, j'étais fasciné par Il était une fois la vie. Ce dessin animé très bien fait est sans doute à l'origine de ma vocation. Quand j'ai dit à mes parents que je voulais devenir médecin, ils ont tenté de me dissuader. Ils travaillent tous les deux dans le soin : ma mère est kinésithérapeute, mon père, orthopédiste. Eux savaient bien que je ne tenais pas le coup devant une plaie. Et, pourtant, j'ai surmonté cette phobie avec beaucoup d'efforts et de patience.

Je tentais de me dissocier intellectuellement du moment présent pour affronter la vue du sang. Ma vocation médicale est plus forte que tout. Ce sont les urgences pédiatriques qui m'ont donné le goût pour la médecine d'urgence. C'est très compliqué de voir des enfants en souffrance.

Progressivement, sans même m'en rendre compte, je faisais moins de malaises, j'éprouvais une joie intense à aider et soulager les petits. Je suis également formé en médecine de catastrophe, capable de prendre en charge de très nombreuses victimes en même temps, en cas d'accident chimique, nucléaire, de séisme ou d'attaque terroriste.

Un accident extrêmement grave

Un matin de la fin du mois de juillet 2019, quand mon téléphone a sonné, alors que je dormais très profondément après 24 heures de garde, je ne me doutais pas de l'épreuve à laquelle j'allais bientôt devoir faire face. Au bout du fil, une voix de femme, inconnue, m'a prévenu : « Votre épouse va bien mais elle a eu un accident de la route, un accident sérieux, il faut venir. » J'ai demandé comment était la voiture, par réflexe. « Mais il n'y a plus de voiture ! », s'est-elle exclamée.

J'ai tout de suite compris que c'était extrêmement grave et, en tant que soignant, je sais parfaitement que l'on ne donne jamais d'information inquiétante au téléphone. J'ai roulé de manière automatique vers le lieu qu'on m'avait indiqué, à 10 km de chez nous. Mes mains étaient tétanisées sur le volant. En garant ma voiture avant le virage, j'ai même fait un bref malaise et j'ai dû m'allonger.


« Elle s'est vue mourir »

Ce jour-là, je suis passé de l'autre côté du miroir. De médecin, je suis devenu victime. Un buggy de collection, pourtant homologué, s'était déporté sur la route et avait tapé de plein fouet l'automobile que conduisait Tiphaine, alors enceinte de sept mois de notre premier enfant. Le conducteur en face est décédé sur le coup. Quant à notre voiture, elle a pris feu.

Mon épouse s'est retrouvée prisonnière de l'habitacle déformé par la collision et les flammes. Elle ne parvenait pas à ouvrir la portière et s'est vue mourir. Finalement, elle a pu s'extraire et se laisser tomber à terre. Elle ne pouvait pas se relever ni marcher, alors elle s'est traînée au sol. Les témoins n'osaient pas s'approcher d'elle et de son gros ventre, car les pneus, à proximité, explosaient. Ils craignaient un embrasement général.

Quand j'ai retrouvé ma femme à ce moment-là, sous une couverture de survie, j'ai vu qu'elle ne présentait pas de lésions apparentes, cela m'a un peu rassuré. Mais elle m'a soufflé : « Je ne sens pas le bébé. » J'ai eu terriblement peur qu'il soit mort et que la situation de Tiphaine ne dégénère après coup, ce qui arrive fréquemment dans ce genre d'accident. Elle a effectué une batterie d'examens, des scanners, des échographies qui ont fini par me rassurer. La petite était bien vivante, mon épouse ne présentait aucune lésion interne. Elle souffrait toutefois de graves fractures aux vertèbres.

« Nous étions vivants et ensemble ! »

Ce n'était que le début de notre épreuve. Elle a dû rester allongée à plat dos, à l'hôpital, jusqu'à l'accouchement qui a été pratiqué sous anesthésie générale à la fin du mois d'août. Puis elle a dû être opérée dans la foulée et placée en soins intensifs. Les premiers mois de la vie d'Iris ont donc été particuliers, avec une maman en convalescence et amoindrie.

Tiphaine ne pouvait pas la porter ni la changer mais elle restait à côté de moi pour tous les soins que je prodiguais. Nous étions vivants et ensemble ! Nous avions vécu de si belles choses depuis notre rencontre dans une soirée étudiante en 2008, à commencer par notre mariage dans le Grand Canyon, après avoir survolé l'Arizona en hélicoptère depuis Las Vegas.

Dieu... et Twitter !

Dans les semaines qui ont suivi l'accident, je me suis surpris à adresser quelques prières à Dieu afin que tout aille bien pour ma femme et notre bébé. C'était non codifié, un peu flou. Mais j'ai quand même fait toute ma scolarité à Saint-Sigisbert, un établissement catholique de Nancy, et mes deux parents, croyants et pratiquants, nous ont élevés, ma sœur et moi, dans la foi. Au milieu de cette épreuve, je cherchais des ressources et parmi celles-ci, il y avait Dieu… et Twitter !

Ce réseau social est souvent décrié pour la présence de trolls et pour la méchanceté de certains commentaires. Je m'en suis servi pour témoigner de ce que nous traversions. Je peux dire que cela m'a sauvé tout comme m'a beaucoup aidé une séance d'hypnose que j'ai faite pour tenter d'évacuer le traumatisme de l'accident.

En effet, j'ai revécu ces heures-là et modifié un détail de la scène pour la rendre plus acceptable : j'ai remplacé mentalement le médecin qui m'a accueilli, sur les lieux de l'accident, par une collègue que je considère comme ma grande sœur. Cela me permet de faire face au souvenir plus facilement. D'ailleurs, je me forme désormais à l'hypnose pour aider mes patients blessés ou endeuillés.

Un compte qui a explosé avec la crise sanitaire

« Je suis papa, nous avons l'immense bonheur de vous annoncer la naissance de Cacahouète ce matin à 10 h 37 ! Elle se prénomme Iris. Elle est magnifique et adorable ! Elle restera sous surveillance durant les 24 prochaines heures. Nous l'aimons déjà énormément. » Le tweet tout simple que j'ai écrit pour la naissance d'Iris le 23 août 2019 a affiché plus d'un million de vues et a été classé dans le top des tendances en France ce jour-là ! Je n'en reviens toujours pas ! Mon compte @FXMoronval est désormais suivi par 24 000 abonnés. Il a explosé avec la crise sanitaire.

Après l'épreuve familiale, nous devons désormais affronter la pandémie de Covid-19. Ma femme étant infirmière dans un service de réanimation, nous sommes tous les deux en première ligne. Depuis mars dernier, je suis au front tout le temps, dans la crainte d'une saturation des lits et surtout des respirateurs, donc la peur de devoir sélectionner entre un patient de 40 ans et un autre de 60 ans.


Donner des informations fiables sur le coronavirus

Mentalement, je suis fatigué comme tous les Français. Cette maladie est complexe avec des symptômes variés et parfois atypiques. Elle complique les procédures à l'hôpital. Sur Twitter, et au sein du collectif Du côté de la science, cofondé avec des amis médecins qui écrivent également sur ce réseau, je lutte contre les fausses informations qui peuvent induire des comportements à risque chez les gens. Il me tient à coeur de divulguer des informations fiables et vérifiées sur le coronavirus.

Je ne me considère pas dans un combat. Je tiens à garder une posture toujours bienveillante dans l'exercice de la médecine et sur les réseaux sociaux. D'ailleurs, je bloque tous ceux qui ont des mots déplacés ou violents. J'envisage mon travail comme une mission. L'accident de mon épouse m'a aidé dans ma pratique quotidienne : j'ai plus d'empathie qu'avant, je me mets davantage à la place des gens. Il a aussi renforcé notre couple. Nous savourons chaque instant que nous offre la vie. Je pense souvent à la famille du conducteur du buggy, qui est mort dans ce terrible accident. Écrivez-le, c'est important pour moi : nous ne l'oublions pas.


Les étapes de sa vie

21 juin 1984 : Naissance à Nancy.
Mars 2008 : Stage aux urgences de l'hôpital de Nancy.
28 septembre 2012 : Soutenance de sa thèse sur la formation des médecins en gestes techniques.
21 juin 2015 : Mariage avec Tiphaine.
1er septembre 2016 : Responsable de l'école du Samu (Cesu) pour les Vosges.
Mars 2019 : Début d'une formation à l'hypnose.
Fin juillet 2019 : Accident de la route de son épouse alors enceinte de sept mois.
23 août 2019 : Naissance d'Iris.

source : La Vie Magazine

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Les étapes classiques des voies spirituelles...et leur but.


Toutes les voies spirituelles éprouvées et qui sont restées vivantes, c’est-à-dire qui ont réussi à garder des pratiques efficaces, et non seulement des croyances, comportent des paliers de progression.
Je sais, il est de bon ton aujourd’hui de confondre Eveil, au grand sens traditionnel du terme, et état de conscience modifié. Le risque de croire à son propre éveil (et donc de s’imaginer sur une voie dite « directe », c’est-à-dire soudaine et sans étapes) est d’autant plus grand que le chemin se fait de manière autonome, hors de toute école et hors de tout peer-review. Mais laissons cela au niveau narcissico-phallique du développement personnel pour décrire plutôt comment est construite la progression dans une voie spirituelle.


Premier palier : la personne arrive en général avec tout un arrière-plan d’insatisfactions, qui est d’ailleurs la base nécessaire pour envisager un changement. Cet historique a eu un impact souvent significatif sur la vitalité de la personne. Parfois, elle ne sait même plus qui elle est vraiment, ni ce qu’elle veut. Il y a donc souvent dévitalisation couplée à une forme de désorientation.
Bien entendu, il ne s’agit le plus souvent pas de niveaux suffisants pour entrer dans le domaine de la pathologie franche ou de la classification psychiatrique du DSM V. Mais il n’empêche que cette base vitale, et l’axe intérieur qui en émerge normalement sont souvent affaiblis.
Le premier palier consiste donc le plus souvent à rétablir une vitalité normale, c’est-à-dire à reconstituer un capital énergétique. Nous sommes là dans un problème d’abord quantitatif.
Dans un deuxième temps, il va également s’agir de changer la qualité énergétique du pratiquant ou de la pratiquante pour que sa « fréquence » puisse changer. J’utilise une analogie qui vaut ce qu’elle vaut, mais imaginez que vous viviez des événements répétitifs, mimant une boucle dont vous voulez sortir. Dans ce cas, on se retrouve un peu comme quelqu’un qui écoute sans cesse la même station de radio, alors même qu’on souhaiterait changer de programme.
Pour cela, il faut changer de fréquence. Si on ne travaille que sur le quantitatif, alors nous pouvons aller jusqu’à couper éventuellement le son, mais nous nous retrouvons alors sans énergie, comme éteints. Ce n’est pas une bonne solution.
Le deuxième temps va donc consister à changer la qualité énergétique (informationnelle, pourrait-on dire) de la personne qui pratique. C'est à ce stade qu'on trouve les pratiques de cleaning.
Comment ? Les traditions regorgent de techniques à ce propos : en changeant un peu son alimentation, en utilisant des visualisations, des pratiques corporelles ou symboliques. Une psychothérapie bien conduite peut d’ailleurs faire office de pratique utile à ce moment-là. Dans le taoïsme, on dit que le pratiquant travaille sur la 5ème dimension.
Le troisième temps consiste à consolider les deux premiers paliers en mettant en place des pratiques de protection subtiles, d’une part pour éviter de nouvelles fuites énergétiques, d’autre part pour éviter de retomber dans des plans de fréquences trop bas (nos anciens schémas).

Le quatrième temps peut s’apparenter au deuxième, mais il va plus loin : il s’agit à ce stade d’incorporer une forme de lumière. Ça peut paraître un peu étrange, car il ne s’agit pas d’une lumière visible la plupart du temps, mais de lumière dans son aspect subtil et mystérieux. À ce stade, le pratiquant travaille sur la 6ème dimension (la dimension des Gui/fantômes, ou de l’ombre selon Jung).
Il est d’ailleurs intéressant de voir qu’on ne travaille pas sur l’ombre en ressassant sans cesse de vieux démons, mais en amenant de la « lumière » pour faire disparaître la pénombre. Un peu comme si on décidait de s’occuper à fond des plus belles fleurs de notre jardin, sans trop insister sur les mauvaises herbes, qui resteront à leur place si elles sont contenues par un écosystème par ailleurs sain et vigoureux.
La cinquième étape consiste à affiner la lumière : le pratiquant travaille alors la 7ème dimension. Et par la suite, la 8ème, s’il continue son travail.
Enfin, la dernière étape consiste à fusionner avec le Réel ultime ou à arriver sur son seuil. Evidemment, à ce stade, aucun témoignage n’est possible pour la simple raison que nous ne pouvons en ramener aucun souvenir. Comme dans le sommeil profond, on sait qu’on y était lorsque l’on en revient, profondément régénéré.
Car nous devons revenir. Ce qui signifie que nous sommes plus insérés dans des cycles de pratique que dans une évolution linéaire. On pourrait plutôt comparer la progression spirituelle à un mouvement spiralé, où l’on repasse fréquemment au même endroit, sans être jamais exactement au même niveau.
Oui, c’est bien beau tout ça, mais à quoi ça sert au fond ?

A deux choses principalement :
La première, c’est qu’avec le temps, les choses qui nous nourrissent changent de nature si nous restons en mouvement. Cela signifie qu’en avançant en âge, la nourriture dont nous avons besoin devient plus subtile. Les choses qui nous nourrissaient antérieurement, même considérées comme positives sur un plan humain (un bon job, une bonne entente avec ses enfants, une relation amoureuse harmonieuse) se révèlent soudain insuffisantes à nous satisfaire profondément.
La nature nous force à approfondir notre relation au Réel, et à passer du grossier au subtil, car au fond elle vise à la fusion ultime avec nous. C’est un peu chiant, parce qu’elle ne nous fout pas la paix, mais c’est comme ça. Donc soit on évolue, soit on s’étiole.
La deuxième c’est que ce travail nous oblige à investir la partie en nous qui ne flétrit pas avec le temps, mais au contraire se déploie. Notre essence, notre âme. Nous ne pouvons pas compter indéfiniment sur nos atouts physiques pour obtenir satisfaction. Le narcissisme physique fonctionne, chez certains d’entre nous, plutôt bien jusque vers 40 ans. Passé cette étape, nous ne pouvons plus compter uniquement sur ces atouts pour avancer dans la vie.
Pire : au-delà d’un certain âge, si c’est la seule chose que nous avons investi, nous nous exposons à une sérieuse déconfiture et à une fin de vie bien triste. Ce lâcher prise du plan physique ne peut se faire que si nous disposons d’une alternative réelle et éprouvée par chacune de nos cellules. On ne lâche pas un trapèze sans en tenir un autre dans la main. Sentir la partie immortelle en nous, notre âme, notre esprit (peu importe le nom qu’on lui donne), cela S’ENTRAINE.
Et comme pour tout entraînement, il vaut mieux s’entraîner quand tout va bien qu’en situation d’urgence ou de crise. Lors de la crise, nous bénéficions de notre entraînement, mais ce n’est pas à ce moment que nous le faisons. Eventuellement, oui, cela peut se présenter comme un ultime et dernier grand entraînement, mais d’ici là, entraînons-nous tant que nos dispositions sont bonnes, ou en tout cas pas trop mauvaises.
Car oui, le travail spirituel est un entraînement à la mort. Est-ce morbide ? Pas du tout, au contraire. Cela nous fait sentir chaque jour à quel point la vie est précieuse et belle et mérite d’être vécue entièrement, en nous exprimant au plus proche de notre nature profonde. Et en créant, surtout. N’importe quoi, mais en créant. Et en même temps, nous développons un espace intérieur de plus en plus riche, qui lui ne s’étiole pas, mais au contraire croît avec le temps, tout comme notre liberté profonde.
Citons Dürckheim pour terminer ce petit texte: « Si un adulte de plus de 40 ans ne pense pas au moins une fois par jour à la mort, c’est qu’il manque de maturité ».
Bonne pratique !
Fabrice Jordan