lundi 4 mars 2019

Révéler le diamant en soi

Musicienne, chanteuse, danseuse, créatrice de spectacle... À 45 ans, cette artiste spirituelle foisonnante a de nombreuses cordes à son art. Son secret : réconcilier corps et esprit pour faire jaillir la source qui est en soi. 


Je veille davantage à écouter parler mon corps, à ne plus lui imposer de se coucher à minuit pour finir un travail ou à manger n'importe quoi, à être connectée à mon ressenti. Si j'ai demandé 10 fois à mon fils de ranger sa chambre et que je sens la moutarde me chatouiller le nez... j'accueille l'énervement qui monte en moi. Au lieu de crier, j'essaie de sortir de mes réflexes et de trouver un nouveau mode de relation, qui nous respecte l'un et l'autre, comme la communication non violente nous y engage. C'est un chantier que je suis loin d'avoir terminé ! Être à l'écoute de nos vrais besoins relève d'une conversion. Alors tout change : la relation à soi, aux autres, à la terre. À mon sens, c'est ça l'écologie intégrale et c'est la condition de la paix.

Claudine Gérez
(source : La Vie)

Si vous souhaitez lire l'article en entier :
Mon appétence pour les arts a été encouragée par ma mère, artiste peintre devenue art-thérapeute. À 5 ans, en Écosse où je suis née, de parents français ayant une lointaine origine espagnole, je prenais des cours de danses écossaises. À 6 ans, j'ai commencé le piano. Je n'ai cessé de poursuivre mon exploration au fil des ans : chants grégorien et byzantin, danse contemporaine, flamenco, théâtre, sont autant de facettes épanouissant une dimension qui m'habite.
Ce fut aussi un cheminement intérieur, car le travail artistique est une porte d'entrée vers l'inconscient. Chaque discipline touche un sens en particulier. Le chant, par exemple, avec son travail de la boucle audio-phonatoire, affine la perception, apprend à donner et à recevoir, à s'écouter soi-même. L'art favorise une meilleure connexion à soi et à l'Autre, il conduit à découvrir cette Présence au plus intime de l'être. Socrate en a eu l'intuition : « Connais-toi toi-même et tu connaîtras l'Univers et les dieux. »
Or le monde actuel émousse nos sens. Nous sommes agressés dans notre sensorialité, saturés d'images trop rapides, de sons trop bruyants, d'une cuisine industrielle qui a recours à des exhausteurs de goût pour masquer sa fadeur. Le remède ? Se reconnecter à la nature. J'ai eu cette chance d'y être immergée pendant toute mon enfance, de ma campagne écossaise à la ferme de mes grands-parents agriculteurs dans la Loire, en passant par l'Indonésie où nous avons habité dans une maison sur pilotis, avec un orang-outan comme meilleur ami !





À 11 ans, j'ai vécu une conversion profonde, une rencontre intime avec Jésus qui m'a ouverte à cette double quête de compréhension de mon humanité et du divin. Cette soif, c'est le fil rouge de ma vie. Journées mondiales de la jeunesse, rencontres de Taizé, études de philosophie et de théologie, jusqu'à aujourd'hui où je suis la formation Seve de Frédéric Lenoir pour aider les enfants à développer leur intériorité.
Ma vie n'est pas indemne de bleus, de larmes et d'inconnu. On peut vivre mort en se disant chrétien. Et cela, Jésus ne le veut pas ! Au fil des années, j'ai découvert l'urgence de réconcilier le corps et l'esprit. Si souvent nous sommes coupés de ces deux dimensions, survalorisant l'une et niant l'autre ! Qu'est-ce qui brise l'unité que Dieu crée à chaque instant ? J'aime la lecture éclairante du péché originel par la théologienne orthodoxe Annick de Souzenelle. D'après moi, l'histoire de la pomme n'est pas une condamnation de la sexualité, mais elle symbolise ce fruit de la connaissance du bien et du mal. C'est notre orgueil qui juge, cloisonne et accuse, quand tout ce que crée Dieu est bon. 
Le purgatoire n'est pas absent de nos vies ; nous avons tous des purifications à vivre. L'enfer revient à rester dans mon déni, mon mensonge, alors que nous sommes faits pour le bonheur, qui devrait être notre état normal ! J'ai le choix de l'amour ou de l'accusation, là est ma liberté. Est-ce que je veux me relier à ma peur, qui engendre division et destruction, ou à mon unité qui me rend artisan de paix ? Mais choisir l'amour, depuis le péché originel qui est comme un bug dans notre information originelle, nécessite de descendre dans notre matière, afin de nous réconcilier avec ce qui est blessé. 
J'ai appris à ouvrir la porte à mon inconscient, pour découvrir de quoi est pétrie ma chair, avec ses violences, ses sentiments d'injustice, les abandons et les abus subis... En cas de traumatisme, le cerveau limbique fait un reset : par un réflexe de survie, il supprime de la mémoire pour éviter la souffrance, mais il refoule les événements douloureux dans l'inconscient, ce qui peut susciter un mal-être, des maladies. Différents outils thérapeutiques peuvent aider : la relation d'aide telle que proposée par Personnalité et relations humaines (PRH) de Carl Rogers, l'hypnose, la programmation neurolinguistique (PNL), la psychogénéalogie.





Si j'ai pu descendre en moi-même, c'est par la puissance de la vie chevillée en moi par la foi. Parce que j'étais reliée à un amour inconditionnel, main dans la main avec Jésus sauveur. La noirceur de notre matière, de notre inconscient, peut nous engloutir. Jésus est la clé, lui qui a accepté la kénose, c'est-à-dire l'abaissement, le dépouillement, lui qui a consenti à la vulnérabilité, lui le Ressuscité qui a déjà réalisé ce passage. Dans le regard de Dieu, nous existons dans notre pureté originelle. Ce regard divin révèle la plénitude de notre être, cette étincelle de vie divine ancrée dans notre matière. Elle ne transparaît pas toujours, car elle peut être enfouie sous des strates de charbon opaque. Notre mission consiste donc à devenir un diamant et à laisser passer la lumière... Ma foi dans le Ressuscité m'a permis de traverser mes tombeaux et de réinsuffler la vie, là où tout était mort.
Je veille davantage à écouter parler mon corps, à ne plus lui imposer de se coucher à minuit pour finir un travail ou à manger n'importe quoi, à être connectée à mon ressenti. Si j'ai demandé 10 fois à mon fils de ranger sa chambre et que je sens la moutarde me chatouiller le nez... j'accueille l'énervement qui monte en moi. Au lieu de crier, j'essaie de sortir de mes réflexes et de trouver un nouveau mode de relation, qui nous respecte l'un et l'autre, comme la communication non violente nous y engage. C'est un chantier que je suis loin d'avoir terminé ! Être à l'écoute de nos vrais besoins relève d'une conversion. Alors tout change : la relation à soi, aux autres, à la terre. À mon sens, c'est ça l'écologie intégrale et c'est la condition de la paix.
Retrouver sa force créatrice suppose de sortir des cadres établis, de lever les abus de pouvoir, d'avoir confiance dans ses intuitions, d'être à l'écoute de l'Esprit saint. Une joie communicative s'installe en nous, je peux en témoigner. « La fontaine de vie, c'est l'Esprit de Dieu qu'il répand dans toutes ses œuvres, écrit Hildegarde dans le Livre des œuvres divines. De même que l'eau jaillit et fait couler tout ce qui est en elle, de même l'âme, souffle de vie, n'abandonne jamais l'homme et le fait s'épancher, en quelque sorte, par la connaissance, la pensée, le langage et l'action ». Comme la Samaritaine, nous sommes appelés à devenir ces sources jaillissantes, des icônes de la victoire de la vie sur la mort, qui se donnent à voir. Sur scène, j'annonce ce que j'ai touché du Verbe de Dieu. Le chant comme la danse nourrit et unifie mon énergie vitale. Tout mon être vibre. Ma chair jubile de la présence de Dieu, elle est portée par la plénitude de vie. Ainsi, je vis le paradis dès ici-bas, puisqu'il n'est pas un lieu mais un état, qui consiste à louer Dieu en tout temps et à laisser jaillir la vie qui est en soi.

Les étapes de sa vie

12 février 1974 Naissance à Aberdeen, en Écosse.
1991-1995 Études supérieures d'art, de philosophie et de théologie.
1993 Professeure de piano.
2004 Spectacle Lorca y la música, poète espagnol fusillé en 1938.
2006 Professeure de danse flamenco.
2012 Animation de stages de développement personnel et de retraites spirituelles.
2014 Spectacle Hildegarde de Bingen, messagère de l'invisible.
2015 Diplômée de la Fédération nationale de yoga du son (FNYS).
2018 Création de la compagnie l'Incandescente.

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