dimanche 31 mai 2015

Un lendemain de fête... des mères...


"Les mères ne sont pas toujours telles que nous les souhaitions. Et je leur accorde le droit d'être plus femmes que mères, et mieux je le comprends parfaitement. Ces mères n'ont pas souvent eu des gestes ou pensées tendres. Ces mères ont fait attendre leurs enfants seuls dans la nuit...Ces mères ont pu abandonner, se choisir avant de choisir l'enfant. Elles ne sont pas toutes lumière , mais il n'est pas permis de les juger. Aujourd'hui je ne pense pas aux mères idéalisées en général, mais à la femme aux cent facettes qu'elles sont, et à celles qui ont marqué ma vie. 

A toutes ces femmes pleines de sève de vie, qu'elles transmettent, car elles sont la source . Ma mère de coeur, ma mère de sang, toutes les femmes que j'ai admiré, celles que j'ai aimé, celles que j'ai vénéré et m'ont montré le chemin. Les femmes que j'aime. Je suis Elles, un peu de la lune, un peu du soleil, courage et détermination. Avec des larmes et des rires, toujours dans l'émotion. Belle journée dans la joie, à toutes ces femmes, humaines, imparfaites, idéales, présences fortes même dans l'absence". 

Christine Cipriani





Fabuleuses mamans avec Hélène Bonhomme


Que cherchez-vous à transmettre ?
Selon Florence Servan-Schreiber, le bonheur c'est « créer, contribuer et transmettre ». Créer consiste à inventer, apporter soi-même aux autres, aider les autres à accomplir leur propre mission de vie. J'ai voulu « équiper » les mamans dans leur identité. Le terme anglais qui me vient à l'esprit c'est « empower ». Il s'agit de faire de ce temps au foyer un atout, voir ce quotidien en positif. Je vais gagner en maturité, découvrir qui je suis, profiter de ce tournant de ma vie pour réfléchir à ce que je veux devenir, acquérir des compétences qui me serviront toute ma vie. Je repense à un coup de fil professionnel que j'ai osé passer, tandis que mes enfants balançaient des œufs par terre dans la cuisine... J'ai respiré un grand coup et choisi de voir ça comme une opportunité pour me perfectionner dans la gestion de conflit ! 

Un vœu pour les mères que nous fêtons dimanche ?
Devenez vous-même, rayonnez là où vous êtes, comme vous êtes. Dans votre foyer, au bureau, dans une association... Je crois que la première mission d'une femme (mais c'est aussi valable pour les hommes, en fait !) c'est d'être heureuse. Choisir de faire ce qu'on aime, assumer ses convictions personnelles, être capable de trouver son bonheur dans un quotidien même s'il n'est pas exempt de galères ni de frustrations. Dans un avion, un cas d'accident, l'adulte doit commencer par poser son masque à oxygène avant de s'occuper de son enfant, au risque que tous les deux périssent. De la même façon, une maman qui ne prend pas soin de se connecter à sa source ne peut plus alimenter les autres. 


Personnellement, qu'est-ce qui vous ressource justement ?
Je suis croyante, je viens d'un milieu protestant. Je puise dans la Bible les conseils que j'applique à ma famille : le pardon, la gratitude, le don... Je n'aime pas le terme de « valeurs » parce qu'il implique un jugement et donne l'impression que certains font bien, d'autres mal. Je lui préfère le terme de sagesse, au sens où « ça marche ou ça ne marche pas ». Je puise dans ma foi la grâce dont on a tous besoin, surtout dans une famille ! La grâce est ce cadeau immérité qui me donne de continuer malgré mes erreurs et mes ratés. Je ne suis pas parfaite, ni excellente, mais ce que je suis est précieux aux yeux de Dieu. Et c'est valable pour chacun de nous.






samedi 30 mai 2015

Cuisiner et s’alimenter, c’est faire un choix de société par Isabelle Filliozat

D’après Isabelle Filliozat, psychologue clinicienne, psychothérapeute depuis plus de 30 ans et auteure d’une quinzaine d’ouvrages dont les best-sellers Au cœur des émotions de l’enfant et l’Intelligence du cœur (Marabout), c’est en apportant plus de « conscience » en cuisine, ce lieu de métamorphose des aliments, que l’on se transforme aussi soi-même et dans notre relation à autrui.

D’après vous, cuisiner et manger « en conscience » nous mène à l’écologie…
Une simple pomme contient l’univers tout entier : graine, soleil, pluie, terre, abeilles, pommier, verger et main experte du paysan qui l’a cueillie, déposée dans un panier, transportée puis vendue avec fierté. Si c’est une pomme issue de culture intensive, ayant subi plus de 30 traitements chimiques et cueillie par une machine, mise en cageot en usine puis négociée à bas prix en supermarché, on a plutôt envie d’oublier ! Pourtant peut-on vraiment se nourrir sans prêter attention à sa nourriture ? Qu’est-ce que j’ingère quand je mange ? À quoi est-ce que je participe ? Quel homme, quelle terre derrière les étiquettes ? Il n’est pas congruent de déplorer la pauvreté et l’injustice sociale, de désirer une autre économie et de se faire complice du monde de l’argent en cherchant à payer toujours moins cher.

Manger serait donc un acte politique ?
Oui tout comme cuisiner. Cuisiner soi-même ou acheter des produits transformés, c’est faire un choix de société. Se fournir sur un marché de petits producteurs ou dans un supermarché aussi. Les sols deviennent stériles, les abeilles meurent, les poules élevées en batteries aussi, les commerces de proximité disparaissent… Nous savons tout cela, mais nous nous empressons bien vite d’oublier au moment d’acheter notre steak au supermarché, car nous n’avons pas envie de nous sentir responsables de ces drames. S’en souvenir et agir demande du courage, mais cette responsabilité d’être aidants pour l’homme et la planète, nous apporte aussi bien plus de bonheur que l’impuissance. C’est en soi un vrai acte politique !

La nourriture peut-elle avoir aussi un impact sur nos comportements ?
Mon métier m’a amenée à m’interroger sur l’influence de la nourriture sur notre psychisme. J’ai découvert combien des aliments comme les gâteaux, le sucre, l’alcool que nous utilisons comme antistress, stressent au contraire notre organisme. J’ai aussi constaté combien la nourriture industrielle peut affecter notre psychisme. Face à des troubles du comportement des enfants ou des adultes (hyper­activité, agressivité, problèmes de concentration, dépression…), je conseille de se poser systématiquement la question des aliments. On sait par exemple aujourd’hui que le sucre stimule la production d’opioïdes naturels dans notre cerveau (d’où les réactions de dépendance ou de manque), que certains additifs comme le benzoate de sodium (E211) augmentent le comportement hyperactif des enfants ou diminuent leurs capacités d’attention et que l’équilibre entre oméga-3 et oméga-6 est fondamental au bon fonctionnement cognitif. Enfin l’intolérance au gluten ou aux produits laitiers est une réalité qu’il ne faut pas ignorer. Chez certaines personnes l’éviction de ces aliments peut donner des résultats spectaculaires en quelques jours sur le comportement (concentration, énervement…).

Que pouvons-nous apprendre sur nous-même ou partager avec l’autre en cuisinant ?
Avoir vu quelqu’un faire la cuisine n’est pas suffisant pour savoir cuisiner. On peut ne pas « oser » cuisiner parce que nos premières expériences ont été moquées. Or cuisiner c’est d’abord échouer beaucoup et chaque erreur nous rapproche de la perfection. Après un essai raté en cuisine, plutôt que de se décourager (je suis nul, c’est trop compliqué), ou de déduire une croyance (c’est pas pour moi, c’est pour les femmes au foyer), de minimiser (c’est pas grave, c’est mangeable), d’accuser autrui (tu ne m’as pas dit de remuer !), il s’agit d’écouter ce que l’échec nous dit : « Pourquoi cela n’a-t-il pas marché ? La prochaine fois je pourrai faire comme cela… » La cuisine est un lieu parfait pour lâcher les croyances qui limitent la créativité (c’est ainsi qu’il faut faire, ceci se marie avec cela, etc.). C’est aussi un lieu de vie, propice aux confidences avec les enfants et adolescents notamment. Vous remarquerez qu’ils se confient bien plus volontiers à nous lorsque l’on a les mains occupées que lorsque l’on reste les yeux dans les yeux !

Que conseillez-vous à ceux qui n’aiment pas cuisiner ?
Notre goût pour la cuisine est forgé par nos souvenirs d’enfance. Des sentiments apparents comme l’ennui couvrent souvent d’autres émotions inconscientes telles que la colère réprimée (« ma mère m’interdisait de rentrer dans la cuisine », par exemple). Pour aimer cuisiner, nous avons besoin d’en avoir reçu la permission ou d’avoir su transgresser l’interdit (souvent de la fille envers la mère). Parfois, le refus de cuisiner est lié au parent cuisinier auquel on ne veut surtout pas ressembler ! Si par exemple on a eu une mère cuisinière qui se positionnait en victime, on n’a pas tellement envie de se mettre aux fourneaux ! Ou si enfant, des réprimandes régulières ont eu pour cadre la cuisine, une fois adulte c’est un lieu qu’on évitera. Aussi lorsque ne pas aimer cuisiner est lié à notre histoire, il est important d’en prendre conscience afin de s’en libérer et de restaurer le contact avec la préparation du repas ainsi qu’avec soi-même. Ne pas prendre plaisir à cuisiner, c’est un choix mais c’est aussi se couper d’une part importante de notre dimension humaine : être créateur et acteur plutôt que simple consommateur.

> À lire : Un zeste de conscience dans la cuisine, d’Isabelle Filliozat (Marabout). Par des exercices pratiques pour méditer en préparant les repas, l’auteure nous interroge sur nos sentiments en cuisine, l’impact des aliments sur notre santé et nous livre ses meilleures recettes.


jeudi 28 mai 2015

Sur le chemin de Karlfried Graf Durckheim...


« Sur le chemin spirituel, il ne faut rien chercher qui serait extraordinaire. L'extraordinaire est dans la profondeur de l'ordinaire.»
Extrait de L'Esprit guide

« Le son de l'Être est toujours là. Et il dépend de l'homme de s'accorder lui-même en tant qu'instrument afin que résonne, en lui, le son de l'Être. »
Extrait du Centre de l'être.

« Nous devons savoir que le chemin commence avec une expérience dans laquelle l'homme a senti quelque chose qui non seulement libère, mais en même temps représente un appel. Le chemin commence là où nous sommes attentifs à ce que notre profondeur demande et exige. Ensuite le chemin est fidélité à l'exercice. »
Extrait du Centre de l'être.



À lire
Pratique de la voie intérieure, le quotidien comme exercice de Karlfried Graf Dürckheim
Partant de l'idée que tout ce qui est vivant doit se développer en vue d'une réalisation, l'auteur explique quelle est la vocation de l'homme : celui-ci atteint son Être authentique lorsqu'il prend conscience qu'il est un aspect de l'Être divin et qu'il en témoigne au quotidien à sa façon.
Le Courrier du Livre, 15 EUR.

Le centre de l'être de Karlfried Graf Dürckheim
Ces propos rapportés par Jacques Castermane, psychothérapeute de formation, élève de Karlfried Graf Dürckheim, permettent de découvrir la pensée de ce maître spirituel notamment ce qu'il nomme, dans la notion de transcendance, « l'expérience religieuse au-delà des religions » et sur l'importance de l'amour dans la quête spirituelle.
Albin Michel (Spiritualités vivantes), 8,50 EUR.

Méditer, Pourquoi et comment de Karlfried Graf Dürckheim
La méditation est présentée ici comme exercice initiatique tendant vers la percée de l'Être. L'auteur situe dans un premier temps la méditation comme exercice initiatique, puis présente dans une seconde partie l'exercice propre de cette voie spirituelle, par le zazen, la pratique artistique, et plus globalement la vie tout entière.
Le Courrier du Livre, 17 EUR.



mercredi 27 mai 2015

Graf Dürckheim par Marie -Edith Laval


En 1947, à son retour du Japon, Karlfried Graf Dürckheim écrit : « Face au zen deux attitudes sont possibles : on peut soit se convertir au bouddhisme, soit accueillir et réaliser ce qu’il renferme d’universellement humain. Seule m’importe la seconde attitude. » Dix ans durant, ce docteur en psychologie et en philosophie s’est plongé dans le monde du zen, pour, au final, l’importer en Europe, ignorante de cette pratique méditative.

Né en 1896 à Munich, Karlfried Graf Dürckheim montre très tôt un vif intérêt pour la vie mystique. Ses 18 mois de front durant la guerre de 1914-1918 le marquent profondément. Se dirigeant vers des études de psychologie et de philosophie, le jeune homme découvre un grand nombre de maîtres spirituels, dont Eckhart, « mon maître, le maître. » Professeur de psychologie à Breslau puis à Kiel, Dürckheim part ensuite au Japon, de 1937 à 1947, pour étudier l’éducationjaponaise d’un point de vue spirituel. Il tirera de cette expérience en terre nippone la majeure partie de tout son enseignement. De retour en Allemagne, il fonde, accompagné de l’analyste jungienne Maria Hippius, un Centre de formation et de rencontres de psychologie existentielle à Todtmoos-Rütte, en Forêt-Noire. C’est là-bas qu’il s’éteindra, en 1988.

Nous ne devons pas chercher Dieu seulement avec notre intellect et notre volonté mais aussi avec tout notre corps, voilà ce que Graf Dürckheim m’a appris. Faire l’expérience de l’Être est au cœur de son enseignement : ne pas chercher à savoir ce qu’est l’Être essentiel en utilisant la pensée, mais en faire l’expérience dans la réalité que je suis. L’Être ne peut se réaliser qu’en s’incarnant dans un corps, socle, au même titre que l’esprit, de la vie spirituelle.




mardi 26 mai 2015

Les conseils de Marie-Edith Laval pour une vie « orientée »

1. Émerveillez-vous
Les sens en éveil, laissez place à la fraîcheur de la perception. Brisez la banalité de l'habitude, du déjà-vu en percevant le monde avec des sens neufs, en faisant du banal un motif d'éblouissement envers toute chose et chacun : je ne vois pas un arbre, mais un geste de la vie. « Tout ce qui est visible est un invisible élevé dans un état de mystère », a dit le poète Novalis. Derrière l'émerveillement se trouve la splendeur de l'essentiel.

2. Soyez plein de gratitude
Remerciez, la célébration dans le cœur et la louange sur les lèvres. Louer le ciel, c'est porter un autre regard sur la vie, une nouvelle façon d'être au monde. Rien n'est dû, tout est pur don, la vie se donne. Vivez pleinement et ne vous contentez pas d'exister.

3. Cultivez la pleine présence
Soyez attentif, en pleine conscience, à la tâche en cours. Ne désertez pas le présent par des ressassements stériles ou des anticipations anxieuses, mais demeurez dans l'Être là, dans la simplicité et la fraîcheur de l'instant présent. Pour cela, libérez-vous de vos attentes et veillez à ne pas faire de vos visions d'avenir une condition de votre bonheur. Est-ce que je prends la décision de vivre ma vie ici et maintenant ou est-ce que je vais continuer à penser et rêver mon existence ?.


4. Enthousiasmez-vous
À chaque réveil, enthousiasmez-vous de participer à ce nouveau jour : voyez le miracle à l'oeuvre en tout, en tous, en chaque instant, en prenant conscience du fait vertigineux d'exister. Chaque nouvelle aurore est comme une aventure, parée de neuf.

5. Méditez... priez
Régulièrement, mettez-vous à l'écoute de votre « petite voix ». L'expérience spirituelle est à l'image d'un feu qui risque de s'éteindre si on ne l'alimente pas, alors maintenez et cultivez la flamme du divin quotidiennement (prière, méditation, art dans une dimension sacrée). Chaque matin, durant 20 minutes, je pratique la méditation en assise silencieuse, dans l'ouverture et l'immobilité. Je m'offre ainsi un temps d'accueil à la grande présence qui m'habite et oeuvre en secret.





lundi 25 mai 2015

Pèlerinage avec Marie-Edith Laval (2)


21 août 2013. Dernier jour à Shikoku. Le soleil éclatant perce un ciel azur. À quelques mètres de moi, s'élève, majestueux, le temple numéro 1, celui-là même dans lequel j'ai pénétré il y a tout juste 52 jours. Entre-temps, mes pieds ont arpenté 1 200 km sur l'île nippone, à la rencontre de ses 88 temples bouddhistes. Tel un mandala, ce chemin circulaire est symbole d'infini, de perfection, d'absolu, de divin. Serait-ce parfois en tournant en rond que l'on avancerait le plus ? Ce 21 août 2013, c'est à la fois une autre personne qui clôture cette boucle, et la même, profondément elle-même, tutoyant la dimension sacrée de son Être. Rentrée à Paris, je suis habitée par une force sereine, une paix puissante. Non sans émotion, j'insère ma clé dans la porte de mon appartement. Cette clé, je l'avais égarée, tel un acte manqué, le premier jour de mon voyage, puis retrouvée à sa toute fin, en pénétrant sur le territoire du « Nirvana ». À travers elle, la vie semble me chuchoter : « Voilà la clé de ta transformation, substantielle. Le paradis, c'est ici et maintenant ! Ce paradis n'est pas dans une destination lointaine, mais, tout simplement, dans le pas que tu fais en ce moment, où que tu sois. Il n'est pas dans les mirages illusoires mais dans l'ordinaire de ton existence. »



En marchant plein ouest, vers Compostelle, l'été 2012, j'avais eu l'impression que l'ancien mourait en moi, avec ce désagréable sentiment d'avoir du mal à retrouver le nord à mon retour. En m'engageant plein est, au pays du Soleil-Levant, c'est comme si une nouvelle aurore avait pointé en mon for intérieur. Le principe bouddhique de l'« impermanence » nous apprend d'ailleurs que nous ne cessons de mourir pour renaître à nouveau. Je suis en perpétuelle évolution, en éternel devenir. Rien n'est jamais figé.

Cette aventure a été comme un réveil pour l'ensommeillée que j'étais, une invitation à rentrer dans la danse de la vie, qui est là et partout. Jour après jour, il m'est apparu de manière limpide que la réponse à cette soif se trouvait là où s'était formée la question : à l'intérieur de moi. « Où cours-tu ? Ne sais-tu pas que le ciel est en toi ? » dit Angelus Silesius, mystique allemand du XVIIe siècle. M'ouvrant peu à peu au mystère de l'infini au creux de mon Être, j'ai cheminé vers une source, que je pourrais nommer noyau divin, lumière, Être, Dieu.

Ce voyage a suscité en moi l'envie de retourner à l'Église, avec une nouvelle qualité de présence, plus d'intériorité. Quelle révélation lorsque j'appris que la méditation était déjà présente chez les Pères du désert ! J'ai découvert aussi l'hésychasme, pratique spirituelle dans la tradition chrétienne orientale, la « quies », le repos en Dieu, cher à saint Bruno et aux Chartreux... Puisque ma propre tradition détient de vrais trésors pourquoi irais-je chercher ailleurs ? Depuis, Dieu a pris un autre visage : j'ai rencontré un Jésus proche et touchant de par son humanité, un Dieu accessible, une figure du Christ incarnée.



Un livre et une conférence 
Pour un premier ouvrage, c'est une réussite. Avec talent, Marie-Édith Laval partage au fil de ces 300 pages son chemin initiatique en terre nippone, sous la forme d'un journal de bord. Jour après jour, le lecteur est emporté par cette escapade où le concret côtoie le spirituel, où l'horizontalité semble ne faire qu'un avec la verticalité. 
L'auteure donnera une conférence sur le pèlerinage de Shikoku, le 28 mai au Forum 104 (104 rue de Vaugirard, Paris VIe), de 20 h à 22 h 15. Dès 19 h, elle se tiendra disponible pour échanger sur son expérience. 
Comme une feuille de thé à Shikoku. Sur les chemins sacrés du Japon, de Marie-Édith Laval. 
Le Passeur Éditeur, 19,50 EUR.

'source : La Vie)

dimanche 24 mai 2015

Pèlerinage avec Marie-Edith Laval (1)

En 2013, cette jeune femme a effectué le pèlerinage de Shikoku, surnommé le « Compostelle japonais ». Une aventure initiatique en terre nippone et bouddhiste qui l'a révélée à elle-même et à son christianisme.

Tel un pont, l'approche du bouddhisme durant 50 jours de pèlerinage dans l'île de Shikoku (Japon) m'a fait revenir à ma source chrétienne, enrichie d'un autre regard. Depuis quelque temps, déjà, je m'étais éloignée du catholicisme, dans lequel je ne me retrouvais plus, que ce soit dans les dogmes ou la liturgie. Je percevais cette religion comme déconnectée du quotidien et n'étais aucunement attirée par un conformisme moutonnier. Ma quête était celle d'une expérience personnelle et libre, enracinée au plus profond de mon moi véritable. Grâce au bouddhisme, j'ai redécouvert avec une autre grille de lecture la profondeur du message chrétien. Cette longue marche m'a aussi confirmé qu'au-delà des chemins empruntés par chaque religion le sommet, l'Un, est le même, qu'il se trouve sur la cime d'une montagne ou bien dans les profondeurs de la grotte intérieure, de la source en nous où s'abreuve toute vie. Chemins qui, parfois même, s'épousent en cours de route : j'ai profondément ressenti, lors des cultes, qu'une même aspiration pour la transcendance nous aimantait les uns aux autres.

L'idée d'un pèlerinage à Shikoku sur les pas de Kukai, un moine bouddhiste Shingon, a germé à l'été 2012, alors que je me trouvais sur les chemins de Compostelle. C'est un marcheur japonais, croisé sur la route, qui m'invita à le découvrir. Rentrée à Paris, cette idée m'apparut comme une évidence, malgré mon ignorance du bouddhisme et du Japon. Évidence face à la sensation d'oppression qui m'étreignait dans ce quotidien parisien et dont l'étroitesse étouffait mes aspirations profondes. Ma soif inassouvie cherchait continuellement à s'abreuver dans l'ailleurs, l'autrement. Depuis quelques années déjà, seuls les voyages m'offraient de goûter l'instant présent et de me sentir pleinement vivante.

Un an après, me voilà en chemin, à la rencontre des 88 temples bouddhistes. Tout au long de cette première partie du pèlerinage, nommée « Éveil », mon regard neuf me permet peu à peu de voir l'« extra » dans l'ordinaire. Puis vient l'« Ascèse », deuxième étape, dont le dénivelé me coûte physiquement. Chaque phase du pèlerinage - les deux suivantes étant appelées l'« Illumination » puis le « Nirvana » - correspond à un cheminement personnel. La topographie de l'île fait ainsi écho à la géographie intérieure du pèlerin, à ses vallonnements intimes. Sous un soleil de plomb, longeant la côte Pacifique, je vis l'Ascèse comme une étape de désencombrement : je me décharge de tout ce qui n'est pas moi, de mes conditionnements et identifications en tout genre, pour aller davantage vers mon Être profond.

Ma rencontre avec Tsui-dje, pèlerine enracinée dans la culture animiste shinto, me touche infiniment. Je suis émerveillée par son attitude de respect, d'humilité, de déférence face à la nature. Les mains jointes, le buste penché, cette jeune femme va jusqu'à remercier le rocher qui l'a accueillie, le temps d'une halte. Cette notion du sacré, je la perçois aussi dans les rapports humains : s'incliner devant l'autre pour le saluer me fait prendre conscience que nous avons, chacun, une part sacrée, unique, nous reliant les uns aux autres. Je découvre à Shikoku une recherche d'harmonie comme trait d'union avec le divin : une simple cérémonie du thé élève vers une autre dimension, où souffle l'Esprit. J'apprendrai d'ailleurs que, d'après Kukai, toute personne peut atteindre l'Illumination au cours de sa vie terrestre en intégrant les actes du quotidien, même les plus banals, comme moyen d'édification. Quel enseignement !

...

samedi 23 mai 2015

Vigilance avec Arnaud Desjardins


Si vous pouviez parler longuement à de vrais disciples dans des voies dualistes comme la Trappe et des voies non-dualistes comme le bouddhisme, vous verriez que l’expérience est la même.
Et, si vous tentiez l’expérience dans les deux chemins, aidés par des guides des deux chemins, vous verriez que, finalement, la réalisation est la même.

Cette attention, cette vigilance est le chemin en lui-même et tout le reste tourne et gravite autour de cette conscience : éliminer les obstacles à cette conscience, éliminer les forces de distraction et d’éparpillement dans les choses extérieures. C’est la vraie prière, c’est la vraie méditation. 
On a demandé à Swâmiji : « Quelle est l’importance de la vigilance sur le chemin ? » 
Swâmiji a répondu « La vigilance c’est le chemin lui-même. C’est tout. »

A la recherche du Soi - II




vendredi 22 mai 2015

A la recherche du Père... avec Alexandre Jollien


Nous sommes invités à mettre toutes les chances de notre côté quand il s’agit de tenter le saut fatidique : perdre un à un nos conditionnements, mourir chaque jour à nous-mêmes et nous donner toujours plus intensément. Car la pratique spirituelle ne tolère ni amateurisme ni improvisation. J’ai donc tout abandonné pour venir en famille à Séoul. J’ai eu besoin d’un maître, et d’un costaud vu l’étendue des dégâts : sévère insatisfaction, difficulté à vivre un vrai abandon, vie déconnectée du corps. Depuis presque dix ans, je me lève et la vieille rengaine reprend : « J’en ai marre. » Sans compter que je suis encore très loin du pur amour désintéressé…

J’ai cherché éperdument un père spirituel. Je l’ai trouvé en Extrême-Orient. S’il avait habité Abidjan, Jérusalem, Fès ou n’importe où sous le soleil, nous ne serions certainement pas aujourd’hui au sommet de cette tour de quinze étages à Mapo.

Mon cœur a tout de suite senti que celui qui pouvait m’aider sur la voie devait être d’une immense bonté et d’une sagesse abyssale : être à la fois un prêtre catholique et un maître zen. Autant dire que de tels guides ne courent pas les rues. La foi en Dieu, qui ne m’a jamais quitté, a trouvé dans la rencontre avec le bouddhisme un puissant élan et j’ai désiré approfondir le dialogue. 
Le zen me ramène chaque jour au corps, au silence, à la paix, à une existence plus simple et moins automatique.

C’est en Belgique, à l’occasion d’une retraite sur la méditation et les Évangiles, que j’ai fait la connaissance de celui qui allait devenir mon maître. Depuis, j’ai commencé une véritable ascèse et je me suis engagé dans un itinéraire de libération. La pratique que j’ai choisie se méfie des mots. Le philosophe a donc dû apprendre à se taire et à renoncer à ses théories pour descendre au fond du fond, dans l’intériorité. Le père m’a conseillé de pratiquer zazen chaque jour, de nourrir une profonde vie de prière et de fréquenter les Évangiles. 

Alors commença la grande aventure, âpre, désertique même. Il s’agissait de raboter, de décaper, de perdre les repères et cette fausse sécurité, bref de me dégager des soucis sans sauter à pieds joints dans l’insouciance. Sur la route, aucune extase, pas de satori, mais un appel toujours plus vif à laisser passer les peurs, l’agitation. Et une invitation quotidienne à me jeter davantage en Dieu.


Extrait de "Vivre Sans Pourquoi "
(Prologue)

jeudi 21 mai 2015

Un peu de Victor Hugo...


Le Mot

Braves gens, prenez garde aux choses que vous dites !
Tout peut sortir d'un mot qu'en passant vous perdîtes ;
Tout, la haine et le deuil !
Et ne m'objectez pas que vos amis sont sûrs et que vous parlez bas.
Écoutez bien ceci :
Tête à tête, en pantoufles,
Portes closes, chez‑vous, sans un témoin qui souffle,
Vous dites à l'oreille du plus mystérieux de vos amis de coeur
ou si vous aimez mieux,
Vous murmurez tout seul, croyant presque vous taire,
Dans le fond d'une cave à trente pieds sous terre,
Un mot désagréable à quelque individu.
Ce mot ‑ que vous croyez que l'on n'a pas entendu,
que vous disiez si bas dans un lieu sourd,
Court à peine lâché, part, bondit, sort de l'ombre.
Tenez, il est dehors!
Il connaît son chemin ;
Il marche, il a deux pieds, un bâton à la main,
De bons souliers ferrés, un passeport en règle ;
Au besoin il prendrait des ailes comme l'aigle !
Il vous échappe, il fuit, rien ne l'arrêtera;
Il suit le quai, franchit la place, et caetera
Passe l'eau sans bateau dans la saison des crues ;
Et va tout à travers un dédale de rues,
Droit chez le citoyen dont vous avez parlé.
Il sait le numéro, l'étage; il a la clef,
Il monte l'escalier, ouvre la porte, passe, entre, arrive,
Et railleur, regardant l'homme en face dit;
« Me voilà! Je sors de la bouche d'untel »
Et c'est fait.
Vous avez un ennemi mortel!


Victor Hugo



mercredi 20 mai 2015

Un regard poétique sur la maladie avec Eve Ricard (3)





Elle vient de publier "Une étoile qui danse avec les mots" où elle témoigne de sa vie avec la maladie. Un livre poétique, émouvant, incarné dont le titre s'inspire d'une phrase de Nietzsche: "Il faut beaucoup de chaos en soi pour accoucher d'une étoile qui danse". 

Partie 3 (20 min.)
Tremblements autour de la maladie...
 




mardi 19 mai 2015

Un regard poétique sur la maladie avec Eve Ricard (2)


"Le chaos c'est ce qui révolutionne la vie, l'esprit. Sans mouvement il n'y a pas de possibilité d'évoluer." Pour Eve Ricard la maladie lui a ouvert les portes de la compréhension, notamment vis à vis des enfants qu'elle reçoit en consultation. Il y a eu un avant et un après l'apparition de la maladie: "J'ai pu comprendre que la différence était une richesse", dit-elle.

 Partie 2 (12 min.)
 



lundi 18 mai 2015

Un regard poétique sur la maladie avec Eve Ricard (1)



Pendant près de 40 ans, Eve Ricard a été orthophoniste auprès d'enfants en grande souffrance psychologique, sociale ou familiale. Elle les a aidés à mettre des mots sur leurs maux. 
Elle leur a appris à faire ce qu'elle aimait faire: danser avec ces mots. 
Depuis 23 ans, atteinte de la maladie de Parkinson, "la dame des mots", comme l'appelaient ses petits patients, ne danse plus avec son corps, mais son esprit n'a peut-être jamais autant dansé.


Partie 1 (19 min.)
 
source : RCF



dimanche 17 mai 2015

L'évidence pour Eve Ricard

« Toute petite, je vivais à la campagne dans un monde merveilleux. Je ne quittais pas ma mère qui était peintre. Je la voyais comme une fée qui d’un geste pouvait tout transformer. Sa peinture était alors surréaliste. Sous sa main évoluait un monde étrange fait de corps humains avec des têtes d’animaux. Ma mère était tantôt fusionnelle, tantôt complètement indisponible, aussi ai-je grandi entre le trop et le pas assez d’amour.

À 7 ans, je dus commencer l’école. La perte de la protection absolue de la fée signa l’effondrement de mon monde. Heureusement, pour m’y rendre, je devais arpenter les prés et chaque jour j’étais séduite par la poésie de la nature et attentive à cette vie secrète et magique.

Mes parents étaient deux personnalités fortes, toujours en opposition. De guerre lasse, ils se sont séparés. Je n’ai jamais vraiment eu de conversation avec mon père, qui ne me prenait pas très au sérieux. Ma mère, issue d’une famille de grande indépendance spirituelle – elle était la sœur de Jacques-Yves Le Toumelin, le premier des navigateurs en solitaire –, plaçait la barre très haut.

J’AIME LES GENS QUI CHERCHENT L’AMOUR 
Quant à mon frère Matthieu (1), brillant élève, il était plutôt sauvage et déjà très ascète.
Contrairement à eux trois, je ne suis pas une intellectuelle, j’aime les gens qui cherchent l’amour et plus particulièrement les enfants qui en manquent. C’est pourquoi, dans mon métier d’orthophoniste, je me suis si longtemps occupée des enfants d’immigrés, que leurs parents, trop démunis, ne pouvaient pas aider.

J’étais une jeune femme romanesque, mais le péril de la maladie m’a imposé un autre regard, comme s’il donnait raison à ma mère qui a toujours vu en moi un corps malade. Pour comprendre ce qui avait fait de moi une candidate à la maladie de Parkinson, j’ai suivi une longue analyse. Cela m’a permis d’évacuer la colère et tous ces sentiments négatifs qui vous étouffent et vous enferment. À mon père et à ma mère, je laisse les ombres du soir et je garde l’extravagant, qui a parsemé mon histoire de magie et de beauté !

MA MÈRE EST DEVENUE UNE NONNE BOUDDHISTE 
Ma mère ne m’a jamais regardée comme une personne autonome, séparée d’elle. D’ailleurs, elle aurait bien aimé que je la suive au Népal. J’étais âgée de 18 ans lorsqu’elle est partie en Inde. Au bout de longs mois, je suis venue la chercher à l’aéroport. Je la guettais le cœur battant, angoissée parce que je ne la voyais pas quand, tout à coup, elle se planta devant moi, drapée de rouge, les pieds nus, le crâne entièrement rasé. Ma mère était devenue une nonne bouddhiste ! Alors que, stupéfaite, je m’approchais pour l’embrasser, elle recula en me disant :”On n’embrasse pas le clergé.”

Le choc fut d’autant plus brutal qu’il était inattendu. Son engagement même redéfinissait nos relations mère-fille. Ma mère avait choisi de fuir ainsi sa souffrance de femme délaissée. Elle avait alors 43 ans. Et moi, coïncidence ? C’est à 43 ans que s’est annoncée furtivement, puis de manière implacable, la maladie. Mais c’est aussi à ce moment-là que j’ai rencontré Yann avec qui je vis aujourd’hui. Grâce à lui je comprends intimement ce que l’on dit quand on parle d’un amour plus fort que la mort.

LA FOI M’ACCOMPAGNE, ELLE EST POUR MOI UNE ÉVIDENCE 
Si je suis atteinte par la maladie, je ne me sens pas parkinsonienne. J’ai toujours refusé que la maladie empiète sur la vie de mes enfants et de mes petits-enfants. J’aide mon corps à trouver chaque jour des ajustements. La foi m’accompagne. Elle est pour moi une évidence, je ne pourrais vivre sans elle. Mais pour faire un chemin spirituel il faut d’abord ”se nettoyer”. Ce livre (2), c’est une façon de dire que, si on ne peut pas changer les faits, notre vison du monde, elle, peut changer et que l’on peut repousser les murs de la maladie. La vraie maladie, c’est de perdre le goût du monde. »

Fille de Jean-François Revel et de Yahne Le Toumelin, Eve Ricard vient de publier "Une étoile qui danse sur le chaos" (Albin Michel), un livre dans lequel elle évoque la relation avec ses parents et son frère Matthieu, le moine bouddhiste.
(1)Le moine bouddhiste Matthieu Ricard. 
(2) Une étoile qui danse sur le chaos (Albin Michel, 2015, 128 p., 13,50 €), préfacé par Matthieu qui écrit que sa sœur a su tirer de son expérience « une mélodie émouvante et sublime ».

lundi 11 mai 2015

Un amour de BD

Voici une BD que j'affectionne pour son humour et je vous partage quelques extraits.
C'est Pico Bogue et sa soeur Ana Ana.









dimanche 10 mai 2015

Les soins du corps avec Alexandre Jollien


Depuis que je vis à Séoul, j’ose une autre approche du corps, pour m’apercevoir une nouvelle fois qu’un art de vivre, une hygiène de vie impeccables sont le berceau de la joie, de l’amour et de la paix, ces lumineux dons de la vie dans l’esprit. La vie dans l’esprit justement commence aussi par l’attention au corps. Celui-ci détendu, l’esprit se crispe moins, ne se ratatine plus et peut enfin être grand et large. Travailler à être une femme ou un homme libre, c’est se dégager des passions tristes, se sortir de l’affaire des projections, des illusions, des désirs désordonnés, de la mauvaise humeur pour avancer main dans la main avec les autres.

Je n’ai jamais autant transpiré qu’ici, en Corée du Sud. Un ami dans le bien m’a dit un jour : « Arrête de m’envoyer des SMS avec des citations philosophiques. Va plutôt faire du sport et deviens un homme ! » Puis il a imité ma démarche et m’a promis que si je faisais quelques exercices, je pourrais marcher beaucoup mieux. Et bien soit ! Tous les jours, je fonce à la salle de gymnastique la plus proche, quitte tous mes vêtements et arbore la tenue officielle. Je me suis inscrit dans un fitness, lieu que mon esprit méprisait cordialement. Et pourtant, depuis que je m’y rends quotidiennement, les progrès, les enseignements et la liberté fleurissent. Trente minutes durant, je commence par piquer un sprint sur un tapis roulant, un casque sur les oreilles avec de la musique à plein tube. Leçon magistrale : quand j’écoute un morceau entraînant, je cours presque sans effort, mais dès qu’une rengaine assommante vient à entrer dans mes oreilles, une chape de plomb s’abat sur mes jambes et je m’époumone. On ne dira jamais assez l’importance du mental et combien nous sommes influencés par les 1 000 pensées qui traversent un esprit.

Quel air mon mental me joue chaque matin ? Est-ce une musique qui me porte à la joie, ou un brouhaha cauchemardesque qui ne m’incline qu’à la tristesse et au pessimisme ? Le mental, c’est également lui qui m’éloigne du corps et qui me fait souvent lorgner les athlètes qui s’exercent autour de moi. « Tiens, cette belle fille court trois fois plus vite que moi, je vais passer à la vitesse maximum du tapis roulant… » Et ça ne manque pas, je glisse et je finis dans le décor. Tandis que si je me concentre et fais un pas après l’autre, je peux avancer dans l’allégresse. Mais dès que mes yeux se braquent sur le compteur kilométrique, je me décourage devant son affligeante lenteur.


La vie spirituelle n’est pas coupée des sens et du physique. Précisément, elle doit faire corps avec la chair. Depuis peu, j’essaie de constituer une sorte de petit décalogue pour une vie plus saine. Par exemple : Au lit tôt, tu iras ; Avec plaisir et sobriété, tu mangeras. Peu à peu, pierre par pierre, je construis un art pour mieux habiter le temple de l’esprit.
En Corée, il y a une institution qui m’est chère, les bains publics. Après l’effort, je m’y rends avec mon fils. À chaque fois, je suis étonné de voir combien les habitués consacrent de temps à se nettoyer. Comme si le corps devait être purifié. Des pères lavent leur enfant, des fils lavent leur père. Augustin, mon fils, m’a dit un jour : « Papa, regarde les épaules des gens, il y en a peu qui sont totalement détendues. Pourtant, on va tous au même endroit ! »

Depuis, j’essaie de ralentir, de f aire exactement les mêmes choses qu’avant, mais avec détente. Le corps est un sacré don, l’idolâtrer est un vice, le négliger, un grave tort. Tandis que je me lavais nu sur un tabouret, comme c’est l’usage ici, un vieux monsieur est venu avec une éponge et m’a frotté vigoureu sement de la tête aux pieds. Soudain, un commandement de mes entrailles a fusé : de ton cœur et de ton corps, tu prendras grand soin !

source : La Vie


samedi 9 mai 2015

La crise avec Eckhart Tolle


La crise economique est-elle une bonne nouvelle? 
 Cela fait maintenant 4 ans qu'une crise financière mondiale sans précédent à de plus en plus d'impact dans notre quotidien. Comment faire pour vivre l'instant présent de façon sereine quand tout ce que nous connaissons semble être sur le point de s'écrouler ? 
Eckhart Tolle nous parle des raisons de la crise économique actuelle, il nous décrit les mécanismes de l'éveil spirituel et nous invite à réaliser qu'en fait ici et maintenant tout va pour le mieux.


Voir la vidéo





jeudi 7 mai 2015

Alexandre Jollien... Vivre sans pourquoi



Écoutez ci-dessous le prologue du CD qui accompagne le dernier livre d’Alexandre Jollien, « Vivre sans pourquoi » : 




mardi 5 mai 2015

Une visite au Mont Sainte-Odile

De retour d'un week-end au Mont Sainte-Odile, où la brume humide a entouré la colline, une phrase résonne encore...

« Si tu pleures trop parce que tu as perdu ton soleil, 

tes larmes t'empêcheront de voir les étoiles. » 


Le nom d'Odile signifie « fille de Lumière ou soleil de Dieu ». 
Ses attributs : les yeux ouverts et la source rejoignent le sens du mot hébreux « Ayïn » qui signifie l'œil ou la source; l'œil qui permet de voir les merveilles de la création, le regard intérieur qui voit l'invisible et contemple la lumière; la source qui jaillit pour guérir l'homme et étancher sa soif d’Amour. 
 Odile accueille les pauvres, les malades, les pécheurs et comme un Moïse alsacien les guide des ténèbres vers la lumière. Elle frappe le rocher de notre égo, de notre cœur de pierre, pour en faire jaillir le source d'Amour cachée au fond de chacun, elle ouvre nos yeux aux merveilles et à la Lumière de Dieu.




lundi 4 mai 2015

Déchirement... avec Christian Bobin

Garder sa vie dans le sentiment neuf de la vie, c'est une des choses les plus difficiles qui soient, les plus souvent escamotées. Cela vient sans doute du fait que cette nouveauté de chaque jour ne peut être reçue que dans la proximité de sa mort à soi, rien qu'à soi. Je pense chaque jour à la mort voisine. Ce n'est pas une pensée du futur, c'est une pensée du présent. 
C'est la pensée la moins morbide qui soit. 
Cette proximité de vivre avec l'ombre portée de mourir, je peux la résumer en un mot, en une attitude de fond: rire. La vie me bouleverse comme un papier de soie si fin qu'un regard trop pesant suffirait à le déchirer. La vie me comble d'être aussi parfaitement menacée. 
Le déchirement me donne joie et rire.

Christian Bobin
L'épuisement, éditions Gallimard, 2015, p.55

Cette citation phrase de Christian Bobin m'a rappelé cette vidéo d'enfant...

dimanche 3 mai 2015

Sur le chemin spirituel de Marc Lavoine (2)

D’avoir souffert de surpoids et ressemblé à une fille quand j’étais petit a réveillé chez moi une palette sentimentale que je n’aurais sans doute pas connue si j’avais été dans la norme. Face à une situation familiale compliquée, j’ai appris à me taire, pour éviter de juger ceux que j’aimais ou de prendre parti. Face aux combats relationnels, passionnels entre mon père et ma mère, je m’efforçais de m’échapper dans un autre monde. Couchés sur le papier, mes poèmes traduisaient une vie intérieure enfouie. Malgré ça, j’ai réussi à me faufiler entre les chagrins des autres, avec un bonheur extraordinaire. Tous mes complexes de jeune garçon m’ont permis de développer d’autres choses.

Des années plus tard, alors que j’étais dans un bus, je me suis trouvé nez à nez avec des enfants autistes. Je fus comme aimanté. Ces personnes me rappelaient le petit garçon que j’étais lorsque, blotti le soir dans ma chambre, je balançais mon corps dans un mouvement similaire au leur pour m’apaiser. Depuis, je n’ai cessé de m’investir auprès d’eux, notamment par le biais du journal Le Papotin, que nous concevons ensemble. La foi, c’est aussi se battre en faveur de causes. Quelqu’un a dit que Jésus était le premier communiste. J’aime cette idée.

Plus le temps passe, plus je prends de la distance dans ma vie personnelle et professionnelle. Je deviens assez minimaliste dans mes fréquentations. Alors qu’avant je faisais pulser mon être dans la guitare, les studios et les pellicules, j’ai maintenant besoin de lire, d’écrire en long format ; de m’affranchir d’une machine à fabriquer des vedettes. Cette période d’absence, sorte de retraite que je m’impose et que j’impose aux autres, n’est pas facile, et pourtant essentielle. Je sens que je suis à un tournant de ma vie. J’ai 52 ans, j’ai perdu mes parents, mon producteur est parti. Je ne suis pas un impatient de la fin, je fais le point. Il me faut traverser ce désert et cesser de me raccrocher à des protections infantiles. J’expérimente aussi le paradoxe de la solitude malgré la présence des autres. Dieu, lui, habite cette béance. Il marche à côté de moi, du moins devant.

Je suis encore un adolescent, un débutant dans la foi. Il me faut accepter cette immaturité, c’est elle qui peut aboutir à une forme d’épanouissement. Ignorant, j’ai l’impression de démarrer une carrière dans ce domaine, me menant vers une nouvelle culture. Lorsque vient le Notre Père à la messe, je scrute les lèvres pour suivre. Je suis un enfant répétant naïvement les paroles. Jusqu’alors, il ne me paraissait pas important de connaître la langue religieuse. Je réalise qu’en l’apprenant j’emprunterai un chemin où chaque pas me fera découvrir ce qui se niche derrière les mots, le discours. Et fera écho, je l’espère, à ma propre existence.

J’ai reçu un appel à l’âge de 5 ans ; j’ai toujours 5 ans aujourd’hui. L’appel ne vieillit pas. Je tente ma chance, tout en prenant mon temps. Je ne sais pas quel est ce lien avec celui que l’on appelle Dieu. Est-ce mon rôle de le dire ? Est-ce que les mots suffisent ? Ne serait-ce pas simplement le silence sans le vide ? Ne serait-ce pas une succession répétitive d’actes et de dons de soi, sans rien attendre en retour ? Ne serait-ce pas simplement ce désir de faire le bien sans se demander pourquoi ?


samedi 2 mai 2015

Sur le chemin spirituel de Marc Lavoine (1)

Depuis son plus jeune âge, le chanteur et acteur entretient un lien intime et discret avec Dieu. À 52 ans, Marc Lavoine désire s’ouvrir davantage à la culture religieuse, jusque-là laissée de côté en faveur d’une foi innocente et spontanée.

J’aime pousser les lourdes portes des églises parisiennes, baignées de silence, contempler mon verger, tapissé de 4 000 jonquilles, allumer une bougie dans la pénombre d’une chapelle, murmurer les mots pauvres d’une prière ingénue, naïve. C’est là que je trouve Dieu. Ma foi est cette vie débordante, que je ne vois pas, mais que je sens. Telle une ­ignorance délicieuse, elle est éclairante, mais pas éblouissante. Elle ne rend aucun compte et n’exige aucune dictature de pensée.

J’ai reçu un appel à l’âge de 5 ans. Bien loin d’un saisissement foudroyant, ce fut très délicat, d’une grande simplicité : un beau jour, je me suis senti en vie, là. À cette présence au monde s’entremêlait la conscience de ma finitude : mon existence pouvait s’arrêter d’un instant à l’autre. Sans faire de la métaphysique, je réalisai que le fait même de vivre relevait du miracle, d’une loterie inouïe, organisée par un forain dont je m’imaginais un visage, une voix, un regard. À partir de là s’est posée la question du « Pourquoi ? Pour quoi ? ». N’ayant pas de réponse satisfaisante, j’ai commencé à cheminer. Chemin comme course vitale. Vie comme toutes ces choses plus grandes que nous-mêmes. Ma foi est un combat contre mes mauvais penchants, contre mon incapacité à être à la hauteur de ce qu’on m’a offert ou prêté.

Je crois en Dieu parce que cela s’est imposé à moi. Aucun conditionnement n’a permis cela. Mon père, communiste, misait tout sur la science et la médecine. Les calottes lui faisaient horreur. Ma mère, elle, croyait malgré l’adversité. Malgré son époux, malgré ce curé qui un jour lui a dit « Votre fils n’est pas baptisé, c’est un sac de linge sale ». Malgré Brassens et les poètes révoltés qui berçaient notre nid familial. Tel un torrent la dépassant, la foi était plus forte qu’elle, que tout. Je pense que mon chemin n’aurait pas été le même si j’avais été élevé dans une famille complètement catholique : d’avoir à vivre les choses personnellement m’a poussé à réfléchir, à ne pas m’installer ; à m’ouvrir aussi.

Ce sont des rencontres qui m’ont peu à peu constitué. L’une d’elles, avec un prêtre de la paroisse de Saint-Thomas-d’Aquin, à Paris, fut fondatrice. Lorsqu’il me dit que je chantais par désir d’aimer, je réalisai qu’il avait tout compris. Alors que petit j’étais effacé et timide, j’ai voulu aller vers ceux qui, n’osant pas se lever, attendent que l’on s’adresse à eux. En me lançant dans ce métier de chanteur, c’était comme les prendre sur mes genoux et leur souffler des mots à l’oreille.

J’ai commencé à l’Olympia comme petite main. J’y pénétrais comme dans un lieu de culte, où la culture était nourriture. Les gens vivaient là en communion. Religieusement, j’enfilais mon costume, puis j’installais les gens, je vendais des glaces, j’aidais à la régie… Toute cette vie grouillante, affairée autour du spectacle m’émerveillait. Ce sont les artistes qui m’ont aidé à discerner le monde et à trouver une forme de place. Eux qui m’ont montré avec un temps d’avance ce que je ne saisissais pas encore.

...