lundi 25 mai 2015

Pèlerinage avec Marie-Edith Laval (2)


21 août 2013. Dernier jour à Shikoku. Le soleil éclatant perce un ciel azur. À quelques mètres de moi, s'élève, majestueux, le temple numéro 1, celui-là même dans lequel j'ai pénétré il y a tout juste 52 jours. Entre-temps, mes pieds ont arpenté 1 200 km sur l'île nippone, à la rencontre de ses 88 temples bouddhistes. Tel un mandala, ce chemin circulaire est symbole d'infini, de perfection, d'absolu, de divin. Serait-ce parfois en tournant en rond que l'on avancerait le plus ? Ce 21 août 2013, c'est à la fois une autre personne qui clôture cette boucle, et la même, profondément elle-même, tutoyant la dimension sacrée de son Être. Rentrée à Paris, je suis habitée par une force sereine, une paix puissante. Non sans émotion, j'insère ma clé dans la porte de mon appartement. Cette clé, je l'avais égarée, tel un acte manqué, le premier jour de mon voyage, puis retrouvée à sa toute fin, en pénétrant sur le territoire du « Nirvana ». À travers elle, la vie semble me chuchoter : « Voilà la clé de ta transformation, substantielle. Le paradis, c'est ici et maintenant ! Ce paradis n'est pas dans une destination lointaine, mais, tout simplement, dans le pas que tu fais en ce moment, où que tu sois. Il n'est pas dans les mirages illusoires mais dans l'ordinaire de ton existence. »



En marchant plein ouest, vers Compostelle, l'été 2012, j'avais eu l'impression que l'ancien mourait en moi, avec ce désagréable sentiment d'avoir du mal à retrouver le nord à mon retour. En m'engageant plein est, au pays du Soleil-Levant, c'est comme si une nouvelle aurore avait pointé en mon for intérieur. Le principe bouddhique de l'« impermanence » nous apprend d'ailleurs que nous ne cessons de mourir pour renaître à nouveau. Je suis en perpétuelle évolution, en éternel devenir. Rien n'est jamais figé.

Cette aventure a été comme un réveil pour l'ensommeillée que j'étais, une invitation à rentrer dans la danse de la vie, qui est là et partout. Jour après jour, il m'est apparu de manière limpide que la réponse à cette soif se trouvait là où s'était formée la question : à l'intérieur de moi. « Où cours-tu ? Ne sais-tu pas que le ciel est en toi ? » dit Angelus Silesius, mystique allemand du XVIIe siècle. M'ouvrant peu à peu au mystère de l'infini au creux de mon Être, j'ai cheminé vers une source, que je pourrais nommer noyau divin, lumière, Être, Dieu.

Ce voyage a suscité en moi l'envie de retourner à l'Église, avec une nouvelle qualité de présence, plus d'intériorité. Quelle révélation lorsque j'appris que la méditation était déjà présente chez les Pères du désert ! J'ai découvert aussi l'hésychasme, pratique spirituelle dans la tradition chrétienne orientale, la « quies », le repos en Dieu, cher à saint Bruno et aux Chartreux... Puisque ma propre tradition détient de vrais trésors pourquoi irais-je chercher ailleurs ? Depuis, Dieu a pris un autre visage : j'ai rencontré un Jésus proche et touchant de par son humanité, un Dieu accessible, une figure du Christ incarnée.



Un livre et une conférence 
Pour un premier ouvrage, c'est une réussite. Avec talent, Marie-Édith Laval partage au fil de ces 300 pages son chemin initiatique en terre nippone, sous la forme d'un journal de bord. Jour après jour, le lecteur est emporté par cette escapade où le concret côtoie le spirituel, où l'horizontalité semble ne faire qu'un avec la verticalité. 
L'auteure donnera une conférence sur le pèlerinage de Shikoku, le 28 mai au Forum 104 (104 rue de Vaugirard, Paris VIe), de 20 h à 22 h 15. Dès 19 h, elle se tiendra disponible pour échanger sur son expérience. 
Comme une feuille de thé à Shikoku. Sur les chemins sacrés du Japon, de Marie-Édith Laval. 
Le Passeur Éditeur, 19,50 EUR.

'source : La Vie)

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