lundi 15 juin 2020

Renouons avec notre nature...


Vous écrivez que nous avons oublié notre enracinement à la terre et que cette séparation est source de souffrance. Comment celle-ci se manifeste-t-elle?


M.R. Un chercheur australien a remarqué que, dans une vallée particulièrement enlaidie et abîmée par les activités humaines, les gens allaient mal, ils étaient tristes, anxieux, fatigués, alors même que leur vie personnelle se déroulait plutôt bien. Outre la satisfaction de ses besoins primaires, l'humain a besoin de beauté, il s’en nourrit, même sans s'en rendre compte. Ces dégradations nous affectent tous, même ceux qui sont dans le déni ou dans l’absence de conscience. Car nous faisons partie de la nature, nous la constituons, comme les végétaux, les minéraux et les animaux. On le sait, les souffrances non reconnues sont à l’origine de maux bien réels, physiques, mais aussi psychiques : anxiété, addiction, dépression...


Selon vous, la pollution extérieure actuelle correspond à notre pollution intérieure.
Cela signifie-t-il que, avant de nettoyer et de soigner l’extérieur, il faudrait commencer par l’intérieur?

M.R. : En réalité, il faudrait travailler sur les deux fronts. Nous nous trouvons à un carrefour : soit nous prenons soin du lien avec les autres et avec la nature, soit nous continuons à vivre en individualistes et en matérialistes forcenés, et nous fonçons droit dans le mur. Par peur de la puissance de la nature et par avidité, nous avons choisi de la dominer plutôt que de coopérer. Nous en faisons aujourd’hui les frais : pollution, accidents climatiques, déforestations, crises alimentaires, maladies psychiques et physiques... Au lieu de consacrer notre intelligence à la seule recherche de solutions techniques pour polluer moins, ne serait-il pas profitable de réfléchir également au lien d’interdépendance qui nous unit à la chaîne du vivant? Là se trouve, me semble-t-il, la vraie nécessité : cesser de considérer la nature comme un adversaire pour redevenir partenaires, vivre une « reliance » plus grande avec elle.

Marie Romanens (extraits de Psychologies magazine)