mercredi 29 janvier 2025

Nourritures

 


Depuis notre naissance, une seule chose guide nos vies : la nourriture. Ou plutôt, les nourritures.

Freud a bien identifié le stade oral du début de la vie. Mais au fond, en sortons nous vraiment ?

Pas sûr.

Dans nos premiers mois nous dépendons directement du lait, nutriment extérieur. Nourriture tangible, mesurable. Mais dès les premiers stades, cette nourriture est inséparable de l'affect de la personne qui nous nourrit. Ce lien entre nourriture et affect est indissociablement établi au plus profond de notre psychisme.

Plus tard, ce seront peut-être les jeux qui nous nourriront. Et avec qui on joue. Ou pas.

Les lectures. Les écrans. Les passions. Le sexe. Le saut à l'élastique. L'alcool. La spiritualité. Les dramas.

Peu importe, pourvu que l'on soit stimulés et que nous recevions ou ressentions de l'énergie et de l'attention.

Au fond, toute notre vie, nous recherchons des nourritures.

La seule chose qui différentie quelqu'un qui s'est déployé de quelqu'un qui n'y arrive pas c'est simplement le niveau de subtilité des besoins en nourriture.

Ce n'est pas une question de domaine. On n'est pas plus évolué en renonçant à certains domaines. La plupart du temps on ne fait que se frustrer.

On évolue et on grandit en espace intérieur en nous réjouissant de capter des nourritures de plus en plus subtiles, peu importe le domaine. 

Car oui, le plaisir et l'affect restent au centre de l'attrait pour les nourritures. Seule la subtilité de la nourriture change quand on élargit notre espace intérieur et notre présence. 

Et le subtil, le tout petit, le frémissant, est partout. Il est accolé au Beau. À notre dignité intrinsèque. Dans tous les domaines.

Saurons nous lâcher le trapèze du grossièrement stimulant qui cache l'appui indéfectible du subtil et de sa nourriture d'immortalité ?

C'est tellement difficile...

Fabrice Jordan


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