Le goût des autres et des mots, la mémoire de l’enfance et de l’Afrique, font le « sel de la vie » de cette grande anthropologue, malgré la maladie et la douleur :
« Il faut savoir écouter la vie en soi...
La curiosité, tous les enfants l’ont. Mais ensuite les parents l’entretiennent ou l’éteignent. Je l’ai conservée, c’est vrai...
...je ne reconnais aucun mérite à la douleur, qui amoindrit la perso
nne. Ce que j’essaie simplement de montrer, c’est que l’appétit pour la vie peut vous aider à surmonter les pires douleurs, celles qui vous font blêmir, jusqu’à tomber dans le coma. Je m’en sors souvent en décalant un peu le regard et la perception. La dernière fois que j’ai vécu une crise intense, j’ai réussi à la dominer partiellement parce que c’était une belle nuit de pleine lune. J’ai fixé l’astre très lumineux par la fenêtre de ma chambre d’hôpital. Je continuais à souffrir bien sûr, mais la beauté de ce spectacle rendait la situation plus supportable...
...C’est aussi vrai des bois sacrés africains que des cathédrales : ce sont des lieux qui portent l’élévation de l’âme, la paix de l’esprit, grâce à leur lumière, leur silence, leur architecture. La disposition des pierres ou celles des arbres fait que lorsque l’on pénètre dans le cercle magique, on est saisi par une forme d’émotion. Et je suis sensible à ce quelque chose qui me fait sentir tout à la fois vulnérable, ouverte et attentive. Ce que les gens religieux désignent comme la spiritualité, moi, je nomme plutôt cela la grâce, la légèreté d’exister et de sentir la vie en soi.
Mais au quotidien, on ne se donne pas assez la permission de ce bonheur-là. On ne se donne pas le temps. Il est vrai que j’ai aujourd’hui une forme de solitude – que j’aime, tout comme j’aime les autres – qui me permet de m’octroyer ce plaisir de la remémoration.
Françoise Héritier
source : La Vie
...C’est aussi vrai des bois sacrés africains que des cathédrales : ce sont des lieux qui portent l’élévation de l’âme, la paix de l’esprit, grâce à leur lumière, leur silence, leur architecture. La disposition des pierres ou celles des arbres fait que lorsque l’on pénètre dans le cercle magique, on est saisi par une forme d’émotion. Et je suis sensible à ce quelque chose qui me fait sentir tout à la fois vulnérable, ouverte et attentive. Ce que les gens religieux désignent comme la spiritualité, moi, je nomme plutôt cela la grâce, la légèreté d’exister et de sentir la vie en soi.
Mais au quotidien, on ne se donne pas assez la permission de ce bonheur-là. On ne se donne pas le temps. Il est vrai que j’ai aujourd’hui une forme de solitude – que j’aime, tout comme j’aime les autres – qui me permet de m’octroyer ce plaisir de la remémoration.
Françoise Héritier
source : La Vie
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Sel de la vie (Le)
Auteur(s) : FRANÇOISE HÉRITIER
Date de parution : 26/01/2012
Nombre de page : 96 pages
Format : 140 x 205 mm
ISBN : 9782738127549
7.00 €
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« Il y a une forme de légèreté et de grâce dans le simple fait d’exister, au-delà des occupations, au-delà des sentiments forts, au-delà des engagements, et c’est de cela que j’ai voulu rendre compte. De ce petit plus qui nous est donné à tous : le sel de la vie. » F. H.
Dans cette méditation tout en intimité et en sensualité, l’anthropologue Françoise Héritier traque ces choses
agréables auxquelles notre être profond aspire, ces images et ces émotions, ces moments empreints de souvenirs qui font le goût de notre existence, qui la rendent plus riche, plus intéressante que ce que nous croyons souvent et dont rien, jamais, ne pourra être enlevé à chacun.
Auteur notamment des Deux Sœurs et leur mère et de Masculin/Féminin, Françoise Héritier est professeur honoraire au Collège de France, où elle a dirigé le Laboratoire d’anthropologie sociale. Elle a été directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales et présidente du Conseil national du sida.
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