« Le corps, ce champ où l'être
oeuvre en secret » (K.G.
Dürckheim)
Paris, mercredi 4 avril. Assis à une terrasse de café, je regarde
passer ces femmes, ces hommes qui courent, semblant oublier qu’il est
aussi possible de ... marcher.
Constat immédiat : la plupart
d’entre eux se situent dans la tête, dans les pensées. Quant à ce qu’on appelle
le corps, il ne semble pas mériter la moindre attention. Pourquoi s’en soucier ?
Il sera bien temps de lui accorder toute notre attention quand une douleur
signalera que quelque chose ne va pas.
Je me disais que j’ai beaucoup de
chance de pratiquer la méditation et la marche méditative
!Le déséquilibre intérieur, dont nous souffrons, a ses racines dans
une activité mentale incessante. La pensée est une merveilleuse fonction de
notre esprit humain. Mais lorsque les pensées deviennent autonomes, erratiques,
et semblent n’avoir d’autre but que de se nourrir d’elles-mêmes, elles polluent
notre vraie nature. Le résultat est l’homme soucieux, inquiet, agité,
stressé, fatigué.
C’est dommage, parce que, en son essence,
l’être humain est en paix. C’est pourquoi la pratique méditative est
un acte de santé ; un moment au cours duquel chacun peut s’établir dans
son propre être, son « être essentiel » dit Dürckheim.
Je me réjouis
chaque jour, depuis plus de trente ans, de pouvoir accompagner les personnes
qui, de plus en plus nombreuses, désirent se mettre en accord avec la vie
profonde qui les anime. Ce qui les étonne, au début de cette démarche qualifiée
comme étant spirituelle ou philosophique, c’est l’importance donnée au
corps, au vécu corporel. « LeibWeg » ! Un chemin spirituel qui nous
invite à prendre au sérieux l’enseignement qui nous est donné par notre propre
corps.
Dans la tradition du zen, le corps n’est pas pensé comme étant un
objet matériel opposé à l’esprit.
Le corps est un champ d’action, un
champ d’expérience, un champ de conscience. Et toute personne qui pratique
régulièrement l’exercice de la méditation peut faire l’expérience que le corps
est le domaine du calme, alors que le mental est le domaine de
l’agitation. Faire l’expérience que le corps est le domaine du moment
présent, alors que le mental est domaine de l’éparpillement maladif dans un
passé (qui n’est plus) ou dans un futur (qui n’est pas encore).
« Le
corps, ce champ où l’être œuvre en secret », disait Dürckheim. Il serait
dommage d’emporter ce secret dans la tombe et, jusque-là, de vivre sous le règne
du mental.
Jacques Castermane |
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