mardi 19 avril 2016

La grande aventure initiatique - Siddhârtha aujourd'hui


DOMINIQUE SCHMIDT
LA  GRANDE AVENTURE  INITIATIQUE

SIDDHÂRTHA AUJOURD’HUI
(chez Accarias L'Originel)


Voici un livre particulièrement intéressant. Le titre en est volontairement ambigu : on pourrait s’attendre à y découvrir une nouvelle biographie du Bouddha historique ou encore des réflexions à son sujet. Il n’en est rien, puisqu’il s’agit du héros du roman philosophique bien connu de Hermann Hesse intitulé Siddhârtha, paru en langue allemande en 1922. D’ailleurs, on y rencontre Siddhârtha Gautama, mais d’une manière furtive et très différente des approches habituelles du fondateur du bouddhisme.

 Le livre mérite de retenir l’attention du lecteur pour plusieurs raisons. D’abord, il fait connaître ou remet en mémoire un roman dont on ne parle peut-être pas suffisamment. Ensuite, il est écrit d’une manière accessible et se lit aisément. Surtout, il interpelle le lecteur sur la question de son rapport à la pratique spirituelle.

Il en est même dérangeant puisqu’il interroge et remet en question la relation au maître spirituel, quelle qu’en soit la tradition, fût-il le Bouddha lui-même, le moins dogmatique de tous les maîtres. Il pose aussi la question de la progression spirituelle : le chemin de Siddhârtha n’épouse pas la progression initiatique telle qu’on se la représente d’ordinaire ; l’ascèse spirituelle du héros est ainsi suivie d’une sorte de rechute dans le monde le plus trivial qui soit, au regard de l’homme ordinaire. Une chute nécessaire dans la matérialité du monde.

Ainsi l’ascension vers la sagesse est-elle présentée comme inséparable d’une plongée dans la multiplicité toujours changeante et bien vivante des choses et des êtres. L’universalité ne s’obtient que par l’acceptation totale de l’individualité. La paix intérieure s’établit en harmonie avec le tumulte des passions à traverser. Les deux plans – spirituel et matériel – sont indissociables. Il ne s’agit pas seulement de se libérer de l’ego par une pratique régulière ou par de longues retraites méditatives, mais de revivifier la nature même de l’être humain et de recréer une conscience nouvelle de l’Humanité, qui prenne en compte les deux dimensions de l’existence que l’on oppose artificiellement.

Finalement, le seul maître digne de ce nom se révèle être un élément de l’univers : le fleuve, qui est l’image même de la vie. C’est par sa contemplation  que le héros se place sur le chemin de la libération. Autrement dit, le véritable maître de Siddhârtha n’est rien d’autre que le cours même de son existence, avec ses rencontres les plus anodines en apparence.

Ce livre a le mérite de pointer du doigt les dangers de toute intellectualisation de la pratique spirituelle et du dogmatisme, même le plus subtil. Et, sans nul doute, ce sont là des pièges qui sont tendus à chaque pas du chercheur spirituel.


   On peut néanmoins ajouter ou préciser que tout maître digne de ce nom est précisément là pour nous permettre d’éviter ces pièges. Un maître vivant et authentique ne dirait pas autre chose que ce livre ! Pourquoi donc faudrait-il se priver d’un tel maître ?

                                                      Sabine Dewulf


1 commentaire:

Lise a dit…

" Et, sans nul doute, ce sont là des pièges qui sont tendus à chaque pas du chercheur spirituel."

Ces pièges ne sont ils pas le chemin,comme une course d'obstacle ?
Celui qui court agile et souple ne peut partager que l'élan en lui avec l'élan en nous, à chacun ses propres obstacles en ce qui encombre son pas nécéssitant la confrontation vers la traversée.

Sur le fleuve de la Vie, le Maître ce jour fut Montaigne venant à mon secours en ces mots :

"la forme la plus évidente et le signe le plus apparent de la véritable sagesse est une réjouissance constante et spontanée "

Quelque chose en moi le traduit ainsi " en la fluidité de l'absence de témoin, tout Témoigne " et c'est un nid d'oiseau qui est venu se poser en travers du chemin m'obligeant à contourner " je suis ".