dimanche 20 avril 2025

Passage vers le Royaume

 De tout temps, l’homme a craint la mort. L’angoisse existentielle face à sa finitude s’inscrit dans son cœur dès qu’il sort de l’enfance, l’âge de raison signant l’ouverture de sa conscience au néant qui l’attend au bout de sa trajectoire. L’adolescent puis l’adulte auront à apprivoiser l’idée de la mort comme faisant partie intégrante de la vie afin d’accepter cette donnée inhérente à la condition humaine.

Cependant, là où nos ancêtres vivaient avec le sentiment prégnant qu’à chaque instant ils pouvaient quitter ce monde, l’espérance de vie d’antan étant beaucoup plus courte et aléatoire que la nôtre, les progrès techniques et médicaux permettent aujourd’hui de reculer toujours davantage le terme de notre parcours terrestre, incitant l’homme moderne à refuser l’ultime échéance et même à nourrir un rêve d’immortalité.

Dans cette lignée, à l’heure de l’intelligence artificielle, savez-vous qu’il est possible de « ressusciter » numériquement une personne disparue ? En Chine, aux États-Unis, au Japon, en Espagne, des entreprises, s’emparant de ce fantasme, proposent de recréer les caractéristiques d’un défunt (voix, apparence physique et tempérament) pour permettre à des particuliers de discuter virtuellement avec cet avatar post mortem.

Le réalisme de cette conversation apparaît aussi troublant que contestable sur le plan éthique. Si certains de nos contemporains peuvent être tentés de chercher un réconfort en recréant le dialogue avec un double informatique, est-il moralement et psychologiquement souhaitable de s’accrocher à une représentation artificielle d’un individu, forcément réductrice, aucun algorithme n’étant capable de copier la complexité d’une personnalité ?


Outre la question du respect de la volonté du défunt qui, par définition, ne peut consentir à ce que dit son fantôme virtuel, l’échange avec ce dernier risque de fabriquer une fausse relation et de faux souvenirs avec la personne disparue et d’exacerber le chagrin de la perte, en empêchant le nécessaire et salutaire travail de deuil.

La suprême Bonne Nouvelle

Aux antipodes du business de la « résurrection » numérique, l’espérance chrétienne nous invite à changer radicalement notre regard sur le sens de la finitude humaine. « C’est moi qui suis la résurrection et la vie. Celui qui croit en moi, même s’il vient à mourir, vivra. Le vivant, celui qui croit en moi, ne mourra pas pour toujours » (Jean 11, 25-26), répond Jésus à Marthe, alors que cette dernière lui reproche de n’être pas venu secourir à temps son ami Lazare et de l’avoir laissé mourir.

La Pâque illustre de façon magistrale que la mort n’est pas pur néant mais marque le passage vers le royaume de Dieu, qu’à l’image du Christ, nous irons rejoindre. La résurrection du Fils nous ouvre grands les bras du Père, voilà la suprême Bonne Nouvelle ! De cette foi, naît une confiance inédite dans le processus de transmutation et de renaissance à l’œuvre en toute chose, reflet de la puissance céleste, auquel la mort participe. Riche de l’instant dont est fait le présent où s’illustre l’éternité de Dieu, l’existence se dévoile alors à nous dans sa majestueuse splendeur.

Loin de vivre dans la crainte de mourir, le Christ nous appelle à nous inscrire sereinement dans l’élan universel gouvernant le monde, qui nous emmène sans cesse vers la nouveauté du devenir et nous fait entrer en Vie dès ici-bas en cocréant avec le Créateur à travers l’expérience incandescente de son Amour. 

Cécilia Dutter

Écrivaine et critique littéraire, elle a publié des romans, dont À toi, ma fille (Cerf), ainsi que des essais, dont Etty Hillesum, une voix dans la nuit (Robert Laffont) et Aimer d’un cœur de femme (Cerf).

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2 commentaires:

Anonyme a dit…

Bonnes Fêtes de Pâques Éric, ainsi qu'à toute ta famille puis à nos Âmi(e)s du blog.
Amitié
Brigitte (Marseille)

Acouphene a dit…

Merci Brigitte. Bon lundi de Pâques !