samedi 12 mars 2022

Le Bonheur

 LE BONHEUR ? (extrait d'un livre à paraître le 21 mars


Il se vivait tel ce personnage de l’histoire zen qui, tombé de la falaise , s’est rattrapé à une branche qu’il sent craquer sous son poids tandis que de son autre main il cueille des fraises sauvages poussées dans le creux de la roche et s’émerveille de leur goût.
Il était au courant.
Tout ne tenait qu’à un fil.
Le corps que la vie lui avait prêté fonctionnait pour le moment sans accroc, comme un avion dans un ciel pur, à la merci d’une météo soudain impraticable, d’un missile égaré, d’une défaillance imprévisible du réacteur, d’un gros oiseau , d’un contrôleur aérien cinglé ou d’un pirate déterminé.
Chaque instant était un miracle, chaque respiration un don inouï, chaque petit plaisir une bénédiction.
Rien n’était dû, jamais.
Tout était accordé par une sidérante grâce.
Il était heureux et il n’en revenait pas.
Il n’avait aucune intention d’en revenir.
Il s’éveillait chaque nuit et titubait vers les toilettes bluffé d’être encore en vie, de ne pas être malade, d’être là où il était et d’être qui il était et aussi avec qui il était. Avec le Tout et avec l’amour dans le train duquel il était monté à son passage en ville.

Gilles Farcet

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3 commentaires:

Anonyme a dit…

Eric
En ouvrant l'ordi ce matin,après avoir écouté à la radio les nouvelles de notre monde en difficulté, j'ai été très touchée par cette réalité à géométrie variable. Elle m'a mis le compteur à zéro et donné du punch pour être fidèle à moi-même ! ! ! Merci à toi, à Gilles Farcet...
Et je vais me retrousser les manches pour faire ma modeste part, à mon niveau.
Gratitude
Nicole de St Zach.

Suzanne a dit…

Beau texte de Gilles Farcet qui rappelle que tout est donné par grâce.
En avoir de la gratitude, et apprendre à continuer à la cultiver quand les "accrocs"arrivent...
Merci, Eric, de ces choix de textes toujours vivifiants.

Fifi a dit…

Ce petit conte avait été rapporté il y a des années.....par Jean Sulivan dans la revue Panorama, dans un billet intitulé "Parole du passant". Ce petit conte m'est resté en mémoire. Étant trop jeune probablement, pour accepter la décontraction du héros et le peu de cas qu'il semblait faire de sa vie.
Des années plus tard, la "petite fraise des bois" a pris tout son sens :-)
Comme dit plus haut par Nicole :"Gratitude" !