Envol vers l’azur. Des fleurs d’amandier s’élancent vers le ciel. Rien d’autre que le blanc des pétales et le bleu de l’azur. Comme une incarnation du bonheur : fort et fragile comme la vie. Dans un raccourci magnifique et fulgurant, épuisé par le chaos intérieur et sa lutte contre la maladie psychique, Van Gogh se concentre sur l’essentiel : l’élan de la vie vers la transcendance et les cieux. Il a peint le tableau tête levée vers le ciel, sans rien voir d’autre autour de lui. Il en a écarté toute forme de paysage ou d’information annexe, jusqu’au tronc de l’arbre, pour se concentrer sur l’union de ces extrêmes : les fleurs et le ciel, le bleu et le blanc, le périssable et l’éternel, le terrien et le céleste... Comme il a écarté, sans les effacer, ses souffrances du moment, pour nous transmettre à tout jamais son bonheur face aux fleurs de l’amandier. [...]
Vincent Van Gogh (1853 - 1890) Rameau d'amandier en fleur, 1890 |
Le bonheur tout entier prend naissance dans de tels instants de grâce.
S’arrêter, se taire. Regarder, écouter, respirer, admirer”
LA LEÇON DE VAN GOGH : REGARDER VERS LE CIEL
Pour les psychologues évolutionnistes, beaucoup de nos comportements et de nos attirances sont les vestiges de nos anciens besoins animaux : si les humains apprécient tant le spectacle d’une belle nature - une rivière bordée d’arbres, un littoral sous le soleil -, c'est qu’ils y voient la promesse de ressources pour leur survie, de quoi manger, se reposer, se réparer... Pourtant, au-delà du plaisir ressenti s’éveille aussi un obscur et profond sentiment d’appartenance à un ordre qui nous englobe et nous dépasse. C’est pourquoi nous ne faisons pas qu’observer la nature, ou même l’admirer. En réalité, nous entrons en connivence avec elle, nous nous rapprochons de notre identité la plus élémentaire : celle des vivants.
Nous ne faisons que nous immerger dans la nature, revenir à elle. Lorsque nous contemplons un arbre en fleur. Lorsque nous sommes absorbés par le mouvement des vagues ou des nuages... Chaque fois que nous respirons l'odeur des champs ou de la forêt, c’est l’écho lointain du bonheur de ces « retrouvailles biologiques » qui se fait entendre en nous. Ces rencontres avec la nature font plus que nourrir notre bonheur : elles lui sont indispensables... Le tableau de Van Gogh aurait pu s'appeler Naissance du bonheur car tout est là, de l'éclosion des bonheurs humains : la fragilité et la force, l’enracinement dans la vie et l’élan vers la transcendance. Ces bonheurs naissants sont les plus importants, mais aussi les plus vulnérables. Rien de plus facile que de les piétiner ou de les négliger.
Cette peinture nous ouvre les yeux sur leur beauté, leur fragilité. Et sur leur nécessité absolue pour notre existence.
Christophe André
Psychologies
--------------------
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire