samedi 14 décembre 2024

Méditation et visualisation


 Comme il est difficile pour un méditant débutant de rester en pleine présence, il est utile de focaliser mon attention sur mon souffle pour apprendre à la fixer, à ne pas fuir dans les pensées. Puis, progressivement, je pourrai passer de l’attention focalisée à la présence ouverte, quitte à revenir de temps en temps à ma respiration si mes pensées vagabondent.

Lorsque je commence à méditer, je peux avoir le sentiment d’être assailli par un flot ininterrompu de pensées. Cet état est celui dans lequel nous sommes habituellement sans en avoir conscience, mais comme la méditation nous rend attentifs à ce qui se passe dans notre esprit, nous devenons alors conscients du flux incessant de nos pensées. Il est vain de vouloir les arrêter. Méditer consiste à les observer et à les laisser passer sans s’y attacher, sans les analyser, sans les suivre. Un peu comme lorsque je regarde défiler un paysage dans un train : je vois une vache ou un clocher, mais je ne vais pas m'interroger sur cette vache et ce clocher : les images se succèdent et je ne fais que les observer sans m’y attarder.

J’aime d’ailleurs particulièrement méditer en fixant mon attention sur quelque chose qui bouge : la flamme d’une chandelle, la mer, les nuages, le paysage qui défile à travers la fenêtre d’un train, le va-et-vient de ma respiration, une fleur agitée par le vent. Cet objet en mouvement m’aide à laisser passer les pensées et à maintenir mon attention mieux que n’importe quel objet immobile, et l’attention focalisée devient très vite présence ouverte, ouverture totale à ce qui est, sans fixation de l’esprit sur une sensation ou une idée particulière.

...


On peut aussi imaginer un événement futur et porter toute son attention dessus. Par exemple, nous visualiser en pleine santé si nous sommes malades, réussir un examen, retrouver l’harmonie dans une relation abîmée, etc. Cette méditation sur un événement futur peut présenter un effet apaisant dans le présent et aussi avoir un impact positif sur notre vie, lorsqu’on sait à quel point nos pensées sont puissantes.

Deux parachutistes de haut niveau ont récemment réussi une première mondiale : entrer dans un avion en vol alors que leur parachute était encore fermé. Ils m’ont dit avoir longtemps échoué jusqu’à ce qu’ils fassent chaque jour, assis les yeux fermés, des exercices de visualisation dans lesquels ils se voyaient réussir à pénétrer dans l’avion par la petite porte latérale. Et ça a parfaitement marché ! On imagine difficilement la puissance des pensées et la force de l’esprit sur le corps.

J’ai aussi été très frappé de ce qui est arrivé à mon père lorsque, âgé de quatre-vingt-quatre ans, il a été hospitalisé d’urgence pour un problème cardiaque. Le diagnostic est tombé : l’aorte fissurée allait rompre d’un moment à l’autre. Vu son âge et ses problèmes cardiaques récurrents, aucune intervention chirurgicale n’était possible. Les médecins lui ont donné tout au plus un ou deux jours d’espérance de vie avant d’être terrassé par une hémorragie interne foudroyante. Mon père, serein, était entouré de ses enfants, dont ma sœur aînée, Bénédicte, qui est hypnothérapeute. Connaissant la puissante capacité de concentration de notre père, elle lui a appris à visualiser son aorte en train de cicatriser. N’ayant plus rien à perdre, il a passé des heures à le faire. Toujours en vie une semaine plus tard, il a fait l’étonnement des médecins qui ont refait des examens de l’aorte : ils ont constaté alors avec stupéfaction qu’elle était en cours de cicatrisation ! Mon père a continué pendant quelques semaines ses visualisations quotidiennes et a vécu presque sept années de plus, sans doute parmi les plus heureuses de son existence. (Précisons toutefois que si l’hypnose ou la méditation peuvent favoriser une guérison, il ne suffit évidemment pas de méditer sur ses métastases pour guérir d’un cancer.)

Lorsque je suis confronté à une situation stressante, il m’arrive de méditer en visualisant soit un lieu où je me sens parfaitement en paix, soit d’imaginer une résolution positive de la situation. Très rapidement, en étant attentif à mon souffle pendant ces exercices de visualisation, je sens une paix intérieure revenir.


Extrait de "Méditer à coeur ouvert" de Frédéric Lenoir

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vendredi 13 décembre 2024

Pointe de flamme

 JULES SUPERVIELLE – Poète et écrivain français -1884 - 1960


POINTE DE FLAMME
Tout le long de sa vie
Il avait aimé à lire
Avec une bougie
Et souvent il passait
La main dessus la flamme
Pour se persuader
Qu'il vivait,
Qu'il vivait.
Depuis le jour de sa mort
Il tient à côté de lui
Une bougie allumée
Mais garde les mains cachées.
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(Extrait de Le miroir des morts in Gravitations, Gallimard, 1966)
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chandelle, tableau de Andrew Hemingway (peintre américain né en 1955)

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jeudi 12 décembre 2024

Prendre conscience...


 Phrases extraites de "La stratégie du Oui" de Denise Desjardins

Consoler l'enfant perdu que nous avons été, ce n'est pas le dorloter, nourrir son obstination, en revivre obsessionnellement les souffrances.

Donner à l'enfant toute permission de s'exprimer, certes pour qu'il puisse grandir, évoluer. Nous portons cet enfant en nous, mais nous ne le sommes plus.

Travail de désidentification à faire ;

Réflexion sur le plan de la compréhension de nos comportements, jamais sur celui des "excuses". Evitons cette erreur puérile.

Nous sommes programmés par notre mémoire, comme un ordinateur doté de "mémoires" différentes selon les questions que l'on souhaite lui poser.

Prendre conscience de ce que nous sommes, de ce qui nous régente de loin : le passé. Ce passé, avec ses impressions restées toutes puissantes, invisibles, qui nous manœuvrent à notre insu comme une marionnette dont il tire les ficelles.

Principe incontournable : ce qui vient, vient pour partir : états de conscience provisoires, pensées instables, émotions changeantes ; notre psychisme entier est transitoire.

Comment pourrait-on être en paix avec autrui si on ne l'est avec soi-même.

Nous avons perdu le souvenir de notre implacable sensibilité d'enfant. Toute les sensations s'enregistrent chez lui comme une plaque ultra-sensible où s'amplifient le moindre son, le plus léger choc.

Un geste agressif, et il se sent tué. Il désire tuer à son tour immédiatement. L'enfant ne croit qu'à l'agréable et à sa permanence. Au moindre désagrément, il est perdu ; s'il subit un violent traumatisme, pas de nuances, le ressentiment sera long à passer.

Du ressentiment à la compréhension jusqu'à la réconciliation.

Qu'est-ce que comprendre l'autre sinon voir sa souffrance, son irresponsabilité, essayer de se mettre à sa place.

La mémoire : alors que chaque sensation, chaque perception est unique et qu’il n'y a pas de continuité, la mémoire s'immisce et nous incite à juger, comparer, en ramenant sans cesse des impressions anciennes. Elle établit des ponts, relie l'impression actuelle à celle du passé et ce lien donne l'illusion de la continuité. Quelque chose semble persister, devient insensiblement un "je" qui se développe et convaincu de sa propre permanence, se gonfle d'importance. C'est à travers la mémoire que se vomissent les émotions douloureuses du passé sur celles du présent, elle qui les dramatise et les fait dérailler. 

La mémoire est neutre, c'est un instrument, que l’on emploie à sa guise.

Pourquoi ? Le "pourquoi" : je questionne lucidement, et je quitte le plan du mental pour celui de la buddhi ; l'intelligence discriminative.

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mercredi 11 décembre 2024

Méditation en silence

 


Mais la forme la plus juste de la méditation serait – j’utilise le conditionnel parce qu’elle ne vous est peut-être pas accessible tout de suite – de rechercher simplement l’immobilité et le silence intérieurs. Une approche qui se retrouve à peu près dans toutes les traditions consiste non pas à décider de ne plus avoir, au moins pendant une heure, de distractions et d’associations d’idées mais au contraire à les accepter et à voir ce jeu des pensées, puisque vous ne pouvez, en fait, les éviter. Il va donc falloir composer avec elles. Par exemple, ne vous y trompez pas, l’immobilité du zazen recouvre pendant longtemps des tempêtes intérieures. Des paroles du genre : « Ne pensez à rien, faites le vide en vous! » sont absurdes parce qu’elles demandent l’impossible.

Arnaud Desjardins - Approches de la méditation

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mardi 10 décembre 2024

La construction d’un amour adulte de Christiane Singer


Qui prend aujourd’hui la peine de prévenir les jeunes couples que la traversée d’une relation d’amour est une affaire périlleuse ? L’illusion que la relation doit rester gratifiante distille un poison. Or, prendre conscience que bâtir un amour est une œuvre difficile ne constitue pas une raison de ne pas l’oser ! Tout au contraire ! Que serait une vie où l’on ne tenterait pas le plus haut, le plus ardu, sinon une esquive et un rendez-vous manqué ?Oui, « l’autre » est une aventure périlleuse. Il est là pour m’accoucher de mes démons et de mes ombres. 

Aussi court-il le risque de devenir l’écran de projection de tout mon mal-être. Il est par excellence cet « empêcheur de tourner en rond » qui m’arrache à ma ronronnante identité, à l’enfermement qui sans lui me guettait ; il va faire brèche en moi, c’est à dire me mettre en vie et en métamorphose. Le drame contemporain, c’est la fuite des couples devant toute irritation et toute crise. Dès que cesse l’agrément d’être ensemble, beaucoup prennent leurs jambes à leur cou, ignorant que le plus beau de l’aventure va tout juste commencer : la construction d’un amour adulte.

Christiane Singer

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lundi 9 décembre 2024

Se préparer à l'amour


 Avant de succomber aux bras de l'amour, prends le temps de t'assurer que ton cœur est prêt à l'accueillir. Libère-toi des chaînes de ce qui t’a abandonné, referme les blessures du passé, répare les fragments épars de ton âme et apprends à te tenir debout seul, fier et complet. Laisse les ombres de la solitude derrière toi, car elle ne doit jamais dicter tes choix ni te conduire dans les bras de quelqu'un par désespoir.

Souvent, l'amour frappe à ta porte, mais ne s'y attarde pas. Pourquoi ? Parce que ton regard reste rivé sur le passé, parce que tes plaies restent béantes, parce que tes insécurités et tes habitudes nuisibles l’étouffent. Et personne ne devrait porter ce poids à ta place. Une relation saine n’est pas un hasard : elle exige de toi un travail sur ton être, un abandon des illusions et une maturité sincère. Tu ne peux prétendre à un amour équilibré si tu te laisses emporter par l’orgueil, si tu te noies dans tes peurs, si tu refuses de fixer des limites ou si tu tolères l’inacceptable.

L’amour, c’est une alchimie fragile et sublime. Il ne fleurit que dans la liberté, jamais sous la contrainte ou la mendicité. Il éclot quand, blessé, tu apprends et évolues. Quand, après avoir blessé, tu t’excuses et t’améliores. Quand il te pousse à devenir meilleur, quand il est un soutien, une croissance, une lumière. Mais surtout, l’amour véritable naît dans la réciprocité : il ne s’épanouit que si les deux âmes engagées sont prêtes à se choisir, à se construire et à avancer ensemble.

Alors, avant que ton cœur ne s’éprenne, sois sage. Prépare-toi. Choisis avec soin celui ou celle qui partagera ton chemin, et assure-toi que vous êtes deux à vouloir bâtir, non à réparer.

– Emmanuel Zavala.

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dimanche 8 décembre 2024

Etre là, en lien...



Je voudrais être là,
simplement,
sans jeter d'images.
Sans avoir à frapper
aux portes du langage.
Simplement m'éprendre.
Ne froisser,
à aucun prix,
la robe des choses tues.
Jean-Christophe Ribeyre - La relève
Accompagné d'œuvres de Marie Alloy
Éditions L'Ail des ours

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Écrire sans nier, en laissant se remplir.

S'absorbe le surplus
comme lie dont s'enivrent
les vers de vase.
Un flot d'herbes s'égraine :
d'arbre en arbre,
la promesse du lien.

Sabine Dewulf - Où se cache la soif
Peintures : Caroline François-Rubino
Éditions L'Ail des ours

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samedi 7 décembre 2024

Bonté originelle

 Mes chers amis,

J'ai reçu ce matin la pensée de la semaine de Mathieu Ricard. Je voulais la partager avec vous car elle me semble particulièrement d'actualité :


La "vision pure" pourrait donc être comparée à une "bonté originelle"; en elle repose l'idée que la nature ultime de notre esprit n'est pas modifiée par les poisons mentaux qui peuvent l'envahir pour un temps et qu'il est possible de neutraliser. Le contraire de la vision pure est donc la croyance que le monde et les humains sont fondamentalement mauvais. Cette tendance mène à condamner en bloc l'ensemble d'une communauté humaine du fait que certains individus se comportent de manière abjecte. [...] En essence, la réponse aux atrocités trop souvent commises par le genre humain passe par la transformation et la bienveillance, non par la haine et la vengeance.

Matthieu Ricard

C'est par cette attitude que nous arriverons à nous détendre et nous souhaitons tous être détendus.

La haine, la colère, le jugement qui condamne, la malveillance n'amènent jamais à une vraie détente.

Il est bon de réaliser que fondamentalement, nous avons tous en nous cette "bonté originelle" qui malheureusement est parfois recouverte de voiles très épais. Ces voiles sont les émotions qui nous perturbent, qui nous agitent, qui nous mettent en tension. Elles s'appellent essentiellement colère, haine, peur et avidité.

Avec ma profonde amitié pour vous tous.

Philippe Fabri

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vendredi 6 décembre 2024

Illusions impardonnables


« Les gens peuvent être très injustes, ils peuvent haïr la personne qui les amène à voir ce qu’ils préféreraient ne pas voir, qui fait chuter les idoles et expose leurs pieds d’argile. Ils lui reprochent  la vérité et la responsabilité qu’elle nous donne. 

On ne pardonne pas souvent à ceux qui détruisent nos illusions. »


Anne Perry ( autrice d’excellents romans policiers situés au 19 eme siècle à Londres dans lesquels elle expose notamment l’hypocrisie de la bonne société victorienne )

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jeudi 5 décembre 2024

La voie : un déséquilibre progressif et délibéré


Vient bien un point de maturation dans le travail où, d’identification lâchée en crispation détendue, on s’approche de la crispation fondamentale, à savoir du noyau même de l’ego, d’ailleurs dangereusement proche du fameux « noyau psychotique ».
A ce stade, en effet, la traversée de ce noyau s’avère telle le chameau passant par le trou de l’aiguille. Cette traversée propulse dans un en deçà des identifications. Mais attention : d’une part, elles sont susceptibles de longtemps repointer leur nez (Arnaud Desjardins parlait « du ventilateur débranché dont les pales continuent pourtant de tourner » ) ; d’autre part et encore une fois, prétendre passer directement à ce stade sans maturation préalable est, soit impossible, soit très dangereux.
C’est là qu’intervient la perte d’équilibre progressive et délibérée qui constitue une grande part du travail sur la voie.

Si l’on admet que le chemin participe de la désidentification progressive du complexe ego mental, il s’ensuit que la voie consiste en une lente et raisonnée perturbation de nos équilibres.
Non pas relatifs mais psycho émotionnels. Il n’est pas en soi nécessaire à la personne financièrement aisée, voire riche, de devenir pauvre (contrairement à ce que laisse supposer une interprétation littérale du message évangélique ) mais de ne s’identifier de moins en moins, jusqu’à plus du tout à son argent et au statut qu’il lui confère. Sachant cependant que, parfois, pas toujours, la désidentification ne peut dans les faits survenir qu’à travers un choc qui peut consister en une perte objective dans le relatif.
Le fait est que pour certains d’entre nous, tel ou tel domaine d’identification ne « lâchera » que par la perte. Telle être humain très identifié à son apparence physique ne mûrira que par le vieillissement ou la maladie qui détruit la beauté, tel autre très identifié à son statut social et professionnel ne mûrira qu’en le perdant , telle personne identifiée à une relation amoureuse ne mûrira qu’en se retrouvant seul …
Dans le principe, donc, il n’est pas intrinsèquement nécessaire de passer par la perte relative.
Reste que, d’une part, nulle existence humaine ne peut faire l’économie d’une certaine expérience de la perte ; et que, souvent, seule la perte est à même de faire trembler le sol que nous voulons croire ferme.
Notons que la plupart des humains , s’ils expérimentent bien diverses formes de perte, n’en mûrissent pas pour autant. Ce n’est pour eux que catastrophe, « naufrage de la vieillesse », faillite …
La perte ne se suffit pas à elle même en tant que facteur de maturation.
Pour être déclencheur alchimique, la perte présuppose un travail, on y revient sans cesse.

Gilles Farcet
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mercredi 4 décembre 2024

Révolution pacifique

 


Qui a dit : « tu » ne tueras pas ?

Quelle femme ? Quel homme ? Quel Dieu ?

Seul un « je » peut dire « tu » et « tu » ne tueras pas.

Quel est ce « je » origine d’une telle conscience et d’une telle loi ?

Le « je » d’Abraham, de Moïse, de Yeshoua ? Le « je » de chacun de nous, quand nous sommes en bonne santé et de bonne humeur ?

Aujourd’hui, il paraît qu’il n’y a plus de « je », seulement des « on » qui se déclarent la guerre et se terrifient les uns les autres, avec leurs machines efficaces, leurs engrenages et agrégats de violence, de peur, de colère, de plainte qui emportent le « je » loin de lui-même, loin du beau « Je suis » calme et silencieux dont on a fini de rêver.

Pourquoi parlons-nous de « révolutions » et de « gardiens de la révolution », qu’elle soit islamique, française, sioniste, américaine et autres, toutes ces « révolutions » se font dans le sang ?

La véritable révolution qui littéralement veut dire « revenir à soi », « être de retour », revenir à « je », à « Je suis » ne semble pas encore née.

N’est-ce pas faire « un pas de plus », (ultreïa disaient les pèlerins) ? N’est-ce pas aller au-delà de tous ces « on » belliqueux et de toutes ces mémoires orgueilleuses et vengeresses pour découvrir un « je » libre, capable de dire : « je » ne tuerai pas et si « tu » le veux toi aussi, « tu » ne tueras pas ; toi aussi, tu seras libre, libre d’exister sans crainte ni convoitise.

Tant que « je » n’est pas en paix, « on » ne sera jamais en paix.

Encore une évidence que tout le monde sait et que personne ne fait.

Il faut un « je » pour le faire, « on » ne le fera pas à notre place.

 Jean-Yves Leloup, Décembre 2024

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mardi 3 décembre 2024

Ligne courbe

- Oui, l’Occident a développé la raison, qui a façonné un mode de pensée dit cartésien, basé sur la
séparation de tous les composants. En cela il néglige le vivant qui englobe tout. Il y a du lien partout, et le lien est porteur d’information, même s’il n’est pas visible. Chaque espèce vivante est porteuse d’information qui se transmet, cela la rend créative en puissance.

L’ajout de deux éléments crée un tout plus vaste que la simple addition des deux initiaux séparés. Plus on laisse le silence nous envahir, plus on peut vérifier la subtilité et le mystère de la vie. La vie n’est pas une ligne droite qui se termine. C’est un cycle. Tout est cyclique : le jour, la nuit, les saisons. Rien ne meurt, tout se transforme. Où est la ligne droite dans la nature ? La vie est courbe, souple, car elle vient de l’eau. Regardez les formations nuageuses, les dépressions, les courants marins, les traces des astres, la formation des continents… La souplesse d’un bébé, d’une tige avec son bourgeon, et la raideur de ce qui s’apprête à mourir. Celui qui vérifie cela s’entraîne à garder l’esprit souple, léger. L’homme est fait pour évoluer à travers le cycle des vies et des renaissances. Il est partie intégrante d’un tout dont il ne soupçonne pas l’intelligence.

Extrait du livre à paraître "L'évidence retrouvée" de Yannick David

Pour renseignement : https://www.simply-crowd.com/produit/levidence-retrouvee/

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lundi 2 décembre 2024

L’Homme est son corps !

La place du corps sur la Voie tracée par K.G. Dürckheim ?

" La place que je donne au corps ? C'est la place qui est la sienne : la première !"

Graf Dürckheim n'est pas le seul à promouvoir l'importance de l'identité corporelle de l'être humain et son investissement dans des pratiques et des techniques permettant à chacun de vivre de façon plus juste et mieux intégrée.

Arnaud Desjardins : "Pour réaliser la conscience libre des limitations il faut accomplir d'abord tout un travail sur le corps".


Eckhart Tolle : "Ne fixez pas votre attention ailleurs que sur le corps lorsque vous cherchez la vérité car vous ne la trouverez nulle part ailleurs".

André Comte-Sponville : "Le corps ! Un peu de matière organisée, et spécialement celle qui nous constitue : ce serait l'objet dont je suis le sujet. Mais— si l'âme et le corps sont une seule et même chose — comme dit Spinoza, le corps est à lui-même son propre sujet ; le moi ne le dirige qu'autant qu'il en résulte ".

Spinoza : "Si nous opposons ce qu'on appelle le corps à ce qu'on appelle l'esprit, c'est parce que nous n'avons pas une connaissance suffisante du corps".

LE CORPS !

De quel corps s'agit-il ?

Habituellement nous pensons et disons : j'ai un corps. Comme si le corps était une – chose - possédée par un - moi -.

Est-ce le corps-objectivé dans le domaine des science médicales ; est-ce le corps-outil engagé dans un travail ; est-ce le corps-machine auquel Descartes fait référence en le comparant aux horloges ; est-ce le corps-idéalisé qui fait la une des magazines ; est-ce le corps-tatoué qui préfère l'apparence à la réalité ; est-ce le corps-divisé restreint aux mains de l’artisan, aux jambes du marathonien, au souffle du trompettiste, au poignet du chef d'orchestre ou à la musculature fabriquée de l'adepte du body-building ?

À peine étais-je arrivé à Rütte que Graf Dürckheim m'a fait une remarque qui m'a embarrassé.

"Il est clair que vous faites preuve d'un savoir discursif assez large sur ce que j'appelle — le corps que l'homme A —, mais je dois vous dire que vous ne savez encore rien concernant ce que j'appelle — le corps que l'homme EST —


Après six années d'étude centrées sur le corps considéré comme étant la somme des éléments qui le composent, j'étais décontenancé. Au point d'avouer, immédiatement, que je ne comprenais pas cette différence. En souriant, Graf Dürckheim me dit " Il est normal que vous ne comprenez pas, parce que ce n'est pas à comprendre. Il suffit de VOIR ce qui distingue ce que dans la langue allemande nous désignons par le mot -Kôrper- et ce que nous désignons par le mot -Leib-."

Graf Dürckheim tend un bras et m'invite à regarder sa main." Voilà la main que j'ai ! Elle a plus de soixante-dix ans d'où, privilège de l'âge, de l'arthrose à chaque articulation. Vous savez mieux que moi que la main est composée de phalanges qui prolongent la paume et est constituée d'os, de muscles, de nerfs, d'artères, de veines... mais maintenant regardez !"

Ensuite, il tend les mains, comme on peut le voir sur la photo ci-dessus, et me dit : "Ce que vous voyez est une action qui engage le corps vivant que je suis dans sa globalité et son unité.

Pour le corps que nous sommes, la main n'est pas quelque chose qui prolonge le bras.

La main ? C'est l'homme qui donne ! La main ? C'est l'homme qui reçoit ! La main ? C'est l'homme qui touche, qui caresse, qui empoigne, qui étreint."

Leib ! c'est aussi et fondamentalement le corps qui exprime et révèle les valeurs de l'être : le calme intérieur, le silence intérieur, la sérénité, la confiance, la simple joie d'être.

En pensant j'ai un corps (Körper), l'homme se coupe de sa vraie nature, de son être essentiel.

Les premiers exercices que nous proposons au Centre permettent à chacun de passer de l'idée illusoire : j'ai un corps, à l'expérience immédiate que : corps je suis. Les séances individuelles de Leibtherapie, - cette autre moitié de la thérapie qui ouvre sur l'expérience d'une réalité trop souvent ignorée, notre propre essence - peuvent changer la manière de voir, de pratiquer et d'enseigner des techniques comme le Yoga, le Tai-Chi ou les arts martiaux issus de la tradition japonaise.


Jacques Castermane

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