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vendredi 22 septembre 2023

Du côté de l'instructeur, épisode 5

 L'IMPACT DES PROJECTIONS NEGATIVES - DU COTÉ DE L'ENSEIGNANT 

Se poser en tant qu’"ami spirituel" comme toujours équanime face à la louange comme au blâme est bel et bon, cela constitue même en pratique une condition sine qua non de l’exercice de la fonction à long terme. 

Et, selon mon expérience, cela n’enlève pas ce que j’appellerais l’impact énergétique de cette négativité qui se déverse sur le support de projections que l'enseignant est dans les faits. 

Je suis dubitatif face aux enseignants qui se proclament « indifférents », au delà de toute forme d’atteinte, en rien susceptibles de se trouver jamais un tant soit peu affectés au moins en surface. On a beau être ami spirituel, on n’en est pas moins un être humain, et heureusement ! 

Je ne sais pas ce qu’il en est du bouddha et autres illustres témoins du plus haut niveau. En ce qui me concerne, pauvre bodhisattva de quartier que je suis, je confesse volontiers me sentir parfois légèrement affecté par des projections négatives si elles sont fortes et durables. 

D’après mes observations, il s’agit avant tout d’un phénomène énergétique. Un enseignant qualifié doit être suffisamment aguerri pour ne pas entretenir refus, pensées et émotions suite à la négativité convergeant sur sa personne. 

Par contre, tout comme un organisme sera affecté par les radiations, la pollution, les allergènes et autres éléments présents dans son environnement,  il ou elle peut parfois- c'est en tout cas mon expérience-  se sentir quelque peu atteint par la négativité. 

Pour prendre des exemples me concernant, il m’est arrivé d’être sujet à une insomnie suite à une interaction délicate, non parce que j’entretenais des pensées à ce sujet - la nuit, je ne pense surtout pas, ni ne réfléchis, je dors ! - mais parce que je sentais mon organisme psycho physique encore secoué par l’intensité de ce qu’il avait du absorber. 

Il y a un certain temps j’ai reçu un courriel dans lequel un élève de longue date confronté à ses propres incohérences et évitements, probablement aussi sous l’emprise de l’alcool  ou dans les affres du sevrage, cherchait à me faire mal. Le phénomène n'est pas si fréquent. En plusieurs décennies, j’ai dû recevoir en tout et pour tout une dizaine de lettres de ce type, accablants réquisitoires faisant état de la somme de mes manquements, aveuglements et autres angles morts, parfois avec une volonté manifeste de blesser. 

Si ce courriel ne m’a, lui, pas empêché de dormir (l’insomnie est en général causée par une interaction en présence physique) il ne m’en pas moins fait un peu mal, comme on éprouve une douleur physique et même un choc psychique si l’on est l’objet d’une agression. 

Je ne m’en suis, fort heureusement, pas trouvé fondamentalement déstabilisé.  Et je me suis, comme toujours dans ces cas là, bien gardé de répliquer et de répondre quoi que ce soit - ce qui, de ma part, n’aurait été qu’indigne tentative de rééquilibrage. 

Et dire que je n’ai pas ne serait ce qu’un peu « accusé le coup » en surface serait mentir. 

J’ai parlé plus haut de « circuits internes » qu’il convient de se forger. 

Les circuits internes en question n’ont rien à voir avec une manière de se « tanner le cuir » comme le font, parait il, nombre de politiques dans le cours de leur carrière. 

Pas d’insensibilité, de bouclier ou de gilet pare - négativité ! 

Il s’agit plutôt d’une capacité peu à peu acquise à soutenir une intensité à différents niveaux, tout comme un circuit électrique capable de ne pas disjoncter à très haut voltage. 

Pour ma part ces circuits se sont pour l’essentiel forgés pendant mes années à Hauteville, durant lesquelles j'ai été objectivement soumis à un haut voltage ,aussi bien dans la sphère privée que dans le cadre de ma fonction, tout cela sous la supervision d'un ami spirituel, Arnaud, qui, dans l'intérêt de ma maturation, avait plutôt tendance de son propre aveu à augmenter la charge qu'à la faire diminuer...

Puis ces circuits « haute tension » se sont affinés avec le temps, la pratique et l’exercice de la fonction. 

Et, encore une fois, la présence de ces « circuits » n’enlève pas, fort heureusement, la sensibilité et donc la possibilité d’être quelque peu affecté en surface par la négativité lorsqu’elle pleut sur vous. 

Etre affecté, contrairement à ce qui est dit parfois, à mon sens un peu vite, n'est pas refuser. C'est juste recevoir un impact. Lequel, en lui même est "neutre". 

Si Ramana Maharshi admettait que sa santé physique ait pu être affectée par la masse de ce qui se projetait sur lui, qui sommes nous pour, justement affecter de ne jamais l'être ?

Gilles Farcet

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vendredi 15 septembre 2023

Du côté de l'instructeur, épisode 4

 GERER LA RESISTANCE CONSTANTE 

A propos de la relation élève- instructeur en TDI (voir articles précédents sur ce sujet),  j’ai parlé de « mariage » dont les vœux seraient pris très au sérieux. 

De même que, dans le cadre d’une relation à long terme et au quotidien, les partenaires vont devoir gérer la friction de la durée, de la vie en commun avec ses hauts et ses bas, bien loin des escapades de week end ou des rendez vous amoureux comme autant de parenthèses magiques, l’ami spirituel et ses élèves vont inévitablement connaitre des pics et des creux, parfois des montagnes russes, au fil de leur relation.

 Inévitables, ces hauts et bas le sont d’autant plus que le travail s’intensifie et conduit à des moments de déstabilisation. Quand survient une telle phase, la relation ami spirituel élève peut prendre des allures de couple en crise. 

La négativité dans ses formes brutes ne pleut pas constamment , fort heureusement.

La résistance, par contre, est quasiment constante. 

C’est une force considérable avec laquelle il faut compter et vis à vis de laquelle il convient de se faire des muscles, ces fameux « circuits intérieurs », encore eux, si l’on se trouve distribué dans ce rôle improbable et insensé d’ « ami spirituel »

Comment se fait il que la résistance soit, comme je l’affirme ici, quasiment constante ?  Il peut être utile de s’attarder un peu sur cette question. 

Entendons nous : personne a priori n’a « envie » de résister. Les personnes qui s’investissent un peu sérieusement dans un travail auprès d’un instructeur sont toutes sincères et motivées, même si leur motivation est inégale et varie. 

Là encore, je ne fais pas allusion au public d’une conférence , ou même aux participants d’un séminaire de week-end , même si la résistance s’y manifestera aussi très vite dés lors que le propos ne correspondra pas à l’attente. Mais les enjeux ne peuvent pas y être comparables à ceux qui prennent place dans le cadre d’une relation d’investissement à long terme. 

Personne, donc, n’entreprend volontairement d’« entrer en résistance » sur la voie. Chacun est là parce que il ou elle a été touché dans sa profondeur par ce qu’il ou elle a pu plus ou moins consciemment pressentir à travers l’instructeur, l’enseignement, le climat de la transmission …

En vérité, tout serait fort simple si cette profondeur qui a été touchée menait seul le jeu tout au long du cheminement. Seulement voilà. Il y a un hic, comme on dit, et ce hic, c’est que la surface en chacun de nous s’emploie très tôt à contrecarrer l’impulsion lancée par la profondeur. Passé l’émerveillement des débuts, la surface vient à comprendre qu’elle se trouve menacée et à partir de là met tout en œuvre pour contrecarrer l’intention de la profondeur. 

Ce n’est pas une des moindres compétences de l’instructeur accompagnant que de se forger des circuits internes aptes à soutenir le constant flux de projections , aussi bien positives, d'ailleurs , que négatives. 

La tradition parle de l’ami spirituel comme devant être « indifférent à la louange et au blâme ». 

Je l’exprimerai plutôt pour ma part en termes de non appropriation. 

Si des élèves, pour un temps, me considèrent d’un regard énamouré et paraissent momentanément fascinés par ma personne à laquelle ils trouvent toutes les qualités, je n’envisage pas un instant, et fort heureusement , que cela ait grand chose à voir avec « moi », quelles que puissent être mes caractéristiques en tant qu’être humain. Il se trouve simplement que les élèves en question sont dans la phase « amoureuse » , laquelle est susceptible de durer plus ou moins longtemps. J’ajoute que je crois m’employer à autant que possible décourager cette phase dans ce qu’elle a d’excessif, même si, tout comme la sidération amoureuse des premiers temps dans le cadre d’une relation de couple, elle a une certaine nécessité pour poser certaines fondations. Sans chercher à imiter un Lee Lozowick ou un Monsieur Gurdjieff, je sais assez bien me montrer légèrement désagréable et irritant, exagérer mes travers et faire mon possible pour agacer celles et ceux qui risqueraient de m’idéaliser. 

La gestion des projections dites négatives relève essentiellement de la même non appropriation. Tant que je demeure intègre, si un élève vient à m’en vouloir , voire à être très en colère contre « moi », ce n’est parce que je suis un monstre ou même du fait des mes inévitables  défauts, mais parce qu’il ou elle se cogne contre le mur de ses propres mécanismes que ma fonction me contraint à dresser devant lui. Ce processus durera aussi longtemps que l’élève résistera. Si il ou elle ne dépasse pas cette résistance, il y aura départ ou éloignement. Sinon, il y aura rapprochement et approfondissement.

Reste que la gestion des projections négatives ne va pas toujours de soi…

(Suite au prochain épisode)

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mercredi 13 septembre 2023

Du côté de l'instructeur par Gilles Farcet (3)

 DU COTÉ DE L'INSTRUCTEUR ÉPISODE 3

UN INSTRUCTEUR AUTHENTIQUE NE ROMPT JAMAIS LE LIEN

A partir du moment où l’instructeur vient à considérer une personne comme quelque peu investie dans le travail proposé, il ou elle se sent jusqu’à un certain point responsable de son cheminement, ce pour un temps indéfini, éventuellement 


« jusqu’à ce que la mort les sépare » - si elle les sépare, ce qui reste à vérifier- ou que l’élève lui même rompe le lien, sachant que de son côté l’instructeur de dispose pas de cette possibilité. 

Pour l’instructeur, le lien continue de toute façon, en dépit des apparences. 

Un instructeur authentique ne rompt jamais un lien avec un élève. Il arrive qu’il soit en surface vaincu par l’acharnement de l’élève à compromettre l’intégrité de ce lien et que l’instructeur s’incline dans le monde des apparences devant l’impossibilité de le poursuivre de manière juste. 

Se sentir responsable n’équivaut pas, fort heureusement, à se prendre pour un sauveur, ni à prendre les choses personnellement. Si un élève paraît progresser, ce n’est pas « grâce à l’instructeur », si ce n’est pas le cas ou même s’il s’enfonce dans le mal être, ce n’est pas non plus « à cause de l’instructeur ».  L’instructeur fait ce qu’il ou elle  je peut, ce qu’il ou elle sent demandé, voilà tout, le résultat n’étant pas entre ses mains.

Une conséquence de cet état de choses est que la dynamique ne s’interrompt jamais complètement. 

Un enseignant qui intervient dans le cadre de conférences, séminaires, etc, a bien sûr à gérer ou superviser une certaine logistique pour que les choses se fassent. Mais une fois l’atelier ou séminaire terminé, il ou elle rentre chez lui et se trouve à peu près, qu’on me passe l’expression, hors de portée des participants à qui il a eu à faire, vis à vis desquels il n’a pas d’engagement particulier. 

En ce qui concerne  un instructeur engagé vis à vis de ses élèves, le travail est plus ou moins continu. Il peut naturellement y avoir divers types de séjours, retraites, journées etc. Mais la fin de chacun de ces moments n’est pas du tout comparable à la fin d’un stage où les participants se quittent pour, sauf exception, ne plus se revoir. Une modalité prend fin, et  les uns et les autres sont appelés à se retrouver sous peu d’une manière ou d’une autre, quelques semaines ou parfois même quelques jours plus tard. 

L’énergie de transmission ne prend pas de « vacances ».

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