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lundi 6 janvier 2025

La voie rapide

Il y a quelques semaines, je vous avais promis une recension précise du dernier livre - tout à fait remarquable - que l'éditeur Jean-Louis Accarias consacre au sage indien Râmana Mahârshi : La voie rapide – Aphorismes et satsang. La voici donc : je vous en souhaite une bonne lecture !
Originel-Accarias
Chacun des livres qui transmettent l’enseignement de Ramana Maharshi est un trésor authentique, qui mérite à ce titre notre attention la plus vive. Celui-ci est le onzième de l’éditeur, toujours traduit et commenté par Patrick Mandala. Lire un tel ouvrage, c'est se replonger au cœur de cet essentiel que nous fuyons sans cesse, dispersés, éparpillés, écartelés par nos pensées.
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Ce livre fondamental se divise en trois grandes sections, dont voici le contenu...
La première comporte des « Instructions spirituelles », datant de 1912 et numérotées de 1 à 19. Elle nous présente la version la plus ancienne des enseignements du Maharshi. Elle est subdivisée en différents thèmes, ce qui permet d’y trouver plus facilement des repères : 1. Les doutes. 2. Le rejet des pensées. 3. L’investigation et la grâce. 4. Le guru. 5. Le Soi intérieur. 6. L’investigation non intellectuelle. 7. Le non-agir. 8. Les samâdhi. 9. L’Absolu. 10. La demeure du Soi. 11. La question « qui suis-je ? ». 12. Le lieu secret du Soi. 13. La réalisation et l’expérience du corps. 14. Les pouvoirs supranormaux. 15. L’abandon à Dieu. 16. Les périodes de la vie et les règles sociales. 17. La société et l’humanité. 18. L’équanimité. 19. Les liens entre Shakti et shakta.
Extraits :
« Ce qui se passe quand on fait une quête sérieuse du Soi, c’est que la pensée-je en tant que « pensée » disparaît, quelque chose d’autre venu des profondeurs vous envahit et cela n’est pas le « je » qui commence cette recherche. »
« […] il n’y a pas de véritable recherche sans grâce […] ».
« Tout d’abord, demeurez dans votre soi qui est situé dans le corps et découvrez-le. Ensuite, vous pouvez penser à Brahman, la Toute-Présence. »
« Le Cœur est toujours ouvert si vous voulez y entrer, soutenant toujours tous vos mouvements même si vous l’ignorez. »
« […] votre vie devient telle une aiguille attirée par une énorme masse d’aimant, et à mesure que vous allez de plus en plus profond, vous devenez un simple centre et puis, même pas cela, vous devenez une simple conscience, il n’y a plus ici aucune pensée ni aucun souci – ils ont été détruits à la racine ; c’est un raz-de-marée, vous n’êtes plus qu’une paille, un roseau brisé ; vous êtes absorbé, brisé, avalé vivant, mais ce sont là autant de sensations agréables et délicieuses ; vous devenez la chose même qui vous absorbe entièrement. »
« Que pouvez-vous apporter à la société ou au pays quand vous êtes faible et tourmenté ? Tout d’abord, il vous faut être fort. Mais je vous dirai que la réalisation du Soi est la force suprême. »
« La force appartient au Seigneur. »
« Vous êtes un membre de la société. Celle-ci est le corps, les individus sont ses membres. […] chacun doit s’unir aux autres pour être utile à tous par la pensée, la parole et l’action. »
« En vérité, il n’y a pas d’absolue création ou d’absolue destruction. Les deux sont en mouvement constant, et cela est éternel. »
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La seconde section est constituée de 100 aphorismes intitulés « La guirlande des Paroles du Guru ». Ces aphorismes ont été recueillis, compilés et traduits en tamoul par son très proche disciple, Srî Muruganâr. Ils sont tous été relus et corrigés par le maître, puis, à la demande de celui-ci, classés par sujets par Sâdhu Natânanda, érudit et proche disciple. Ils ont ensuite été traduits en sanskrit et en anglais. La première partie concerne la « Recherche » et se trouve subdivisée en ces petits chapitres : « Dévotion » / « Guru » / « Recherche du Soi » / « Conduite du chercheur ». Cette quête engage l’être tout entier. La seconde évoque la « Pratique » ou « La vérité sur la servitude », et traite de « L’attachement ». La troisième, « Réalisation », expose l’expérience de la libération : « Non-dualité » / « Conscience » / « Le Soi » / « Le silence » / « Le libéré » / « Libération ».
Extraits :
« Cette propice et immortelle Réalité
- Laquelle demeure toujours en tant que résidu,
quand le faux soi est consumé dans le feu de
l’Illumination –
cette Réalité est le véritable sens de la « cendre
sacrée », vibuhûti.
[tous les désirs sont réduits en cendre]
« Seuls les Sages sont vertueux, non les ignorants.
C’est pourquoi, afin d’obtenir la libération,
on cultivera la compagnie des Sages [satsang],
de ceux qui sont libérés du mensonge. »
« Comme l’oubli du vrai Soi est la mort en elle-même,
le seul accomplissement engageant le chercheur du
Soi
est de veiller à ne pas oublier,
et rien d’autre. »
« Comme l’humidité, la douceur et la fraîcheur
sont en réalité de l’eau,
et non trois entités différentes,
de même, dans l’expérience du Soi,
Réalité, Conscience et extase ne sont que le vrai Soi. »
« L’état de libération peut être décrit comme sommeil
éternel,
Ou comme éveil non interrompu par le sommeil. »
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Quant à la troisième section, elle contient des réponses, extrêmement précises, du sage à des questions posées successivement par Swâmi Madhavatirtha, érudit et grand spécialiste du Vedânta qui avait pris les vœux de renoncement du sannyâsa en 1928, K. S. Narayanaswami Iyer, Ganapati Muni, proche disciple de Râmana, et B. R. Narasimha Svâmi, l’un de ses biographes.
Extrait :
« Viveka est la discrimination du réel et de l’irréel, […] qui nous aide à pratiquer le détachement, vairâgya, des émotions telles que la joie ou la peine, lesquelles perturbent l’équanimité de l’esprit. Ainsi vivka s’avère être une préparationutile et nécessaire pour atteindre cette entrée dans le Soi. Toutefois, la connaissance du réel que procure viveka n’est pas la même que le jnâna ou Connaissance du Soi. […] Le pratiquant (viveki) intellectuel du premier état connaît et raisonne à travers un médium, à travers les sens (paroksha). Celui du second, l’intuitif jnânî, fait l’expérience du réel directement et sans un médium (aparoksha). Il ne voit pas le monde comme irréel ou différent de lui-même, comme le pratiquant intellectuel. »

Sabine Dewulf

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mercredi 27 mars 2024

La conscience éveillée

 Article rédigé par Sabine Dewulf

Je viens d’achever la lecture du tout nouveau livre des éditions Accarias-L’Originel : Râmana Mahârshi et J. Krishnamurti, « La conscience éveillée – Instructions spirituelles, entretiens, témoignages inédits », Présentation, traduction et notes de Patrick Mandala, éditions Accarias L’Originel, 2024, 155 pages, 16 €. Et je partage avec plaisir ma recension de cet ouvrage.


Pour tous ceux qu’intéressent ces deux sages, voici un livre particulièrement intéressant, pour différentes raisons. D’abord, comme tous les livres de cet éditeur, il s’agit d’un ouvrage très précisément documenté. En outre, il met leurs enseignements respectifs en perspective, l’un par rapport à l’autre. Enfin, il apporte également des éléments relatifs à chacun d’eux, envisagé séparément. Notons que tout cela s’organise sans provoquer de lassitude : les comparaisons comme les présentations séparées alternent avec souplesse ; elles sont d’ailleurs écrites par différents témoins ou spécialistes et occupent des espaces assez brefs, pour une lecture très agréable…
Dans les deux premières sections du livre, les articles de divers auteurs tracent des parallèles entre le Mahârshi et Krishnamurti, sans négliger leurs divergences : Douglas Harding (un sage anglais dont l’enseignement fut des plus précieux) expose des « différences et rencontres sur le fond » ; puis Patrick Mandala nous propose des « Regards croisés » entre le « questionnement » de Krishnamurti et l’« investigation » de Râmana Mahârshi et leurs « méthodes d’enseignement ». Plus loin, grâce à Robert Powell, l’un des pionniers de la transmission des enseignements non-duels en Occident, nous découvrons un chapitre consacré aux divergences et convergences des conceptions de « la conscience éveillée » chez ces deux maîtres. Plus loin encore, le petit-neveu de Râmana Mahârshi, Swâmi V. Ganesan, explore leur approche de l’« investigation » et de l’« identité ».
Quant à la troisième partie, elle est entièrement consacrée à Krishnamurti, à travers une discussion que le sage mena avec des philosophes et des scientifiques, un entretien qu’il eut avec un journal de New York, aujourd’hui disparu, puis des textes littéraires très rafraîchissants : un poème datant de 1928 et cinq extraits des « Petites pièces » écrites spontanément, sans subir de retouches.
Dans la deuxième partie du livre, Krishnamurti est encore présent, à travers deux articles : l’un est écrit par Maurice Frydman, devenu Swâmi Bharantânanda, et dont l’un des intérêts est de pointer du doigt certaines similitudes avec l’enseignement d’un autre grand sage, Swâmi Prajnânpad, dont Arnaud Desjardins fut le disciple ; l’autre est de la main du Dr. Susunaga Weeraperuma, son biographe. En ce qui concerne Râmana Mahârshi, une part de son enseignement est disponible sous la forme d’un Satsang décomposé en 19 questions-réponses qui occupent une vingtaine de pages, dans cette même deuxième section.
Pour ma part, j’ai été frappée par les convergences qui relient ces deux enseignements, même si Krishnamurti est présenté comme un sage moins constant, avec des moments de retour à notre condition duelle, que le Mahârshi. Mais j’ai aussi été intriguée par une divergence majeure, perceptible à travers les deux définitions que nous offre Robert Powel du terme « conscience » tel qu’il est employé par les deux hommes. En effet, pour Krishnamurti, « la conscience est le sens du « je suis », de l’Êtreté – l’Être ou la Conscience universelle -, résultant de la transcendance de l’observateur psychologique ou du « je » ». Pour Râmana Mahârshi, en revanche, ce mot semble désigner le stade ultime de la réalisation dans la mesure où « la conscience est identique au Soi ou à l’Absolu, qui est réalisé lorsque, à terme, le « Je suis », ou la Conscience Universelle est transcendé. » (p. 61-62)
Pour terminer, voici deux citations de ces sages qui ont retenu mon attention.
« Vous ne pouvez pas atteindre le Soi puisque vous l’êtes déjà !
Le changement n’est qu’une pensée. Dès l’instant où apparaît la pensée « je » toutes les autres pensées se manifestent. Aussi, voyez bien à « qui » elles se présentent. Dès l’instant où vous les transcendez et demeurez à la Source, elles disparaissent, c’est-à-dire qu’en remontant à la Source de la pensée « je », le Moi parfait est réalisé. « Moi », c’est le nom du Soi. »
(Râmana Mahârshi, p. 42)
« Immobiles étaient mes membres,
Détendus et en paix.
Une joie d’une profondeur insondable
Remplissait mon cœur.
Ouvert et vif était l’esprit – concentré.
Oublieux du monde transitoire,
Une force tout entière me pénétrait.
Comme la brise d’Orient,
Qui soudain surgit,
Et apaise le monde fatigué
Là, devant moi,
Assis, jambes croisées, tel que le monde le connaît,
Dans ses robes jaunes, simples et magnifiques,
Se tenait le Maître des Maîtres. »
(Krishnamurti, extrait du poème intitulé « L’Ami immortel », p. 138-139.)

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lundi 27 février 2023

Instructions spirituelles

 


Voici un nouveau livre au contenu très impressionnant, paru aux éditions ACCARIAS-L'ORIGINEL.  Il concerne les « Instructions spirituelles » d’un maître hindou assez méconnu en France, Krishna Menon, devenu Srî Âtmânanda (1883-1959). Et pourtant, il s’agit de l’un des trois grands sages unanimement reconnus en Inde, avec Râmana Mahârshi et Nisargadatta Mahârâj. 

Ces instructions ont été rapportées par Nitya Tripta, l’un de ses plus proches disciples, qui recueillit ses paroles de 1950 à 1959. Elles ont toutes été relues et approuvées par le maître avant d’être rendues publiques. 

C’est la première fois que cet enseignement est traduit en français. Le traducteur en est Patrick Mandala, qui a également présenté et annoté cet ouvrage de 190 pages. Ces instructions, précise le traducteur, ne sont pas sans parenté avec celles de cet autre grand  maître de l’Advaïta, Swâmi Prajnânpad, dont Arnaud Desjardins fut le disciple, dans la mesure où l’égo n’y est pas considéré comme un ennemi mais au contraire comme un point d’appui dans la quête de la réalisation ultime.

Le style des paroles ici retranscrites est particulier : les propos sont denses, précis et concis, presque abrupts. J’y ai noté la récurrence du verbe « prouver » : ce maître se situe d’emblée sur le plan de l’Absolu, il parle depuis un espace intérieur où règne une évidence radicale. Nitya Tripta nous précise même ceci dans son introduction : « Il n’aborderait jamais un problème d’un point de vue inférieur à la Vérité ultime, et ferait toujours en sorte que le disciple qui l’écoute fasse l’expérience de sa vraie nature plusieurs fois au cours de chaque conversation. » (p. 17) Aussi certaines de ses phrases peuvent-elles apparaître comme un raccourci de pensée, l’expression d’une clarté si éblouissante et transcendante qu’elle passe par une forme verbale ramassée sur elle-même. 

Ce livre est divisé en de très nombreux chapitres thématiques (plus de 100), de l’« Absence » au « Yoga », en passant par l’« Arrière-plan », « Le corps », « Faiseur, jouisseur et connaisseur », « Science », « Autolumineux », etc. Ces brèves sections sont elles-mêmes subdivisées en paragraphes numérotés de 1 à 269. L’ensemble est suivi d’un glossaire très utile, qui définit avec précision chacun des termes sanscrits utilisés par le maître. 

Pour tous ceux qui s’intéressent de près aux questions spirituelles, cet ouvrage me semble plus que précieux : incontournable.


Extraits : 

« Le monde est parfait. Mais il semble imparfait parce que vous utilisez des instruments fallacieux des organes sensoriels et de l’esprit, ainsi qu’une mauvaise perspective de la relation sujet-objet. Débarrassez-vous d’eux d’abord. Saisissez le Principe immuable de la Conscience en vous, puis examinez le monde. Alors vous trouverez ce monde parfait et entièrement différent de ce qu’il apparaît maintenant. » (N° 86 : « Quelle est la nature du monde ? », p. 64)

« Au niveau de l’esprit, nous devons considérer que le témoin regarde en silence des évènements et transmet ensuite l’information à l’esprit. L’esprit, à son tour, s’identifie au témoin pour le moment, et se pose comme s’il était présent lors de l’acte passé auquel il est fait référence. Mais lorsque l’esprit est engagé dans une pensée, il ne lui est jamais possible d’être témoin de cette même pensée simultanément. » (N° 118 : « Qu’est-ce que la mémoire (au niveau de l’esprit) ? », p. 82)

« La pensée que certaines choses sont des obstacles est le premier obstacle pour vous. La meilleure façon de les supprimer est de les regarder et de les examiner. Ce que vous considérez comme un obstacle se compose de la partie matérielle et de la partie Conscience ou Réalité. Dirigez votre attention uniquement sur la partie Réalité et ignorez la partie matérielle. Alors la chose cesse d’être un obstacle et devient une aide. » (N° 142 : « Quels sont les obstacles à la spiritualité et comment les supprimer ? », p. 95)

« Autolumineux signifie ce qui n’a pas besoin de l’aide d’une autre lumière pour se manifester ou prouver son existence. Vous savez que vous existez. Ainsi, seul le Principe du « Je » est autolumineux. Le monde n’est que matière morte. Vous ne pouvez pas dire qu’il existe tant que vous n’avez pas prêté la lumière de votre propre Soi pour le manifester. Il ne peut briller que par votre propre lumière. En d’autres termes, le monde n’a qu’une existence empruntée. Seul le Principe du « Je » a une existence originelle ou indépendante. Tout ce qui n’est pas autolumineux ne peut avoir qu’une existence d’emprunt. » (N° 206 : « Que signifie autolumineux ? », pp. 127-128)

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mardi 11 septembre 2018

Un certain niveau d'éveil !


Extrait du livre "Libre de toutes pensées" par Patrick Mandala aux éditions Accarias L'Originel


C. : Celui qui est en sahaja samâdhi sent-il la douleur physique d’une piqûre, d’une coupure ?

Râmana : Toutes les douleurs, même physiques, sont du domaine mental. Tout le monde sent la douleur d’une coupure ou d’une piqûre, mais le jnâni, dont l’esprit est plongé dans la béatitude, la ressent comme dans un rêve. 

Cet état d’unicité ressemble à celui des deux amoureux de l’histoire qui, bien que torturés ensemble, ne ressentaient pas la douleur car leur esprit était plongé dans l'extase en se regardant l'un l'autre.







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