mercredi 15 octobre 2025

Chemin de Vie

Ces jours-ci, je me trouve complètement désintéressé par les « enseignements spirituels. ”

Pas parce que je suis devenu cynique ou arrogant ou perdu la foi, mais parce que je n'en ai tout simplement plus besoin. C'est la vérité honnête. Les enseignements spirituels parlaient autrefois à une douleur profonde en moi - la recherche de la paix, de la vérité absolue, de quelque chose de sacré et transcendant au-delà du bruit de la vie quotidienne.

Mais maintenant, ce désir a complètement changé de forme. S'est transformé en quelque chose de radicalement différent.

Plus je deviens présent, moins j'ai envie d'idées de présence.

Plus je vis, moins j'ai besoin d'apprendre à vivre.

La vie elle-même m'enseigne, chaque jour.

Pendant des années, j'ai utilisé la spiritualité pour échapper à l'être humain - le désordre, les relations, les routines domestiques, la beauté ordinaire de la vie quotidienne. Je pensais que l'illumination était quelque part au-delà de tout ça.

Mais maintenant, les vrais enseignements spirituels sont ici - non pas dans aucun livre sacré, mais dans le son du rire de ma fille, dans l'odeur du dîner, dans la sortie des poubelles, ou dans la promenade dans le parc au coucher du soleil.

Les anciens enseignements parlaient de « lâcher prise » des attachements à ce royaume terrestre.

Non. La vie m'apprend à devenir plus intime avec cette terre - à la rencontrer pleinement, à l'aimer farouchement, à trouver le sacré et le transcendant juste ici, où que je sois, quoi que je fasse, avec qui je suis.

Je n'ai plus besoin de chemin.

La vie EST le chemin.

- Jeff Foster

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mardi 14 octobre 2025

Le club des jeunes hommes riches

« Affligé de cette parole, cet homme s’en alla tout triste car il avait de grands biens »
Evangile selon Marc
Dieu merci
il n’a pas été dans mon destin
de faire la guerre
celle
sans cesse recommencée
de siècle en siècle
de contrée en contrée
de chef en chef
de peuple en peuple
matière des livres dits d’histoire
mécanique de mort
en mode éternel retour
Dieu merci
il a été dans mon destin
d’en faire une autre
bien moins connue
pas moins récurrente
mais touchant moins d’appelés
la guerre invisible
celle
dont les livres d’histoire ne disent mot
de siècle en siècle
de contrée en contrée
d’ami spirituel en ami spirituel
d’élève en élève
matière de récits obscurs
inintelligibles à la plupart
dynamique de la grâce
de cette guerre
entamée comme toutes les guerres
fleur au fusil
illusions en berne
rêves de gloire
et de hauts faits
de cette guerre
qui comme toutes les guerres
s’est avérée âpre
romantisme fracassé
sur la cruauté de la bataille
de cette autre guerre
pour mon plus grand bien
je suis sorti
sinon anéanti,
du moins proprement défait
bel uniforme en lambeaux
démarche hésitante
quelques séquelles
et souvenirs incommunicables
cependant neuf
reconnaissant
d’avoir été acculé à la reddition
au terme d’une résistance pied à pied
défense d’un ordre ancien
de toutes façons condamné
vieux soldat désormais
je savoure une paix balbutiante
ici et là traversée de résurgences
de combats
périmés
mais si tenaces
en leur volonté
de se perpétuer dans le vide
depuis ma retraite
mes médailles remisées
de mon œil amène
mais à qui on ne la fait pas
j’observe les recrues d’aujourd’hui
beaucoup se contentent
d’observer de loin la bataille
parfois fournissent ravitaillement
acclamations et harangues
d’aucuns se rapprochent
rôdent aux confins des combats
au risque de prendre une balle perdue
ou d’être assourdi par le grondement du canon
quelques uns
dont c’était le destin
n’ont pu faire autrement
que d’avancer en première ligne
je les vois charger
ici et là reculer
pour repartir à l’assaut
je reconnais sur leurs visages la foi
la peine
la rage
parfois l’effroi
à ceux là je dis
il n’est plus temps de reculer
même si dans cette guerre là
les apparences donnent à croire
qu’il serait facile
à tout moment de se retirer
ramasser son paquetage
regagner sans trop de dommages
son petit carré tranquille
d’aucuns le font
tels le jeune homme riche de l’Evangile
ils tournent les talons
à jamais tristes en profondeur
en surface soulagés
s’ils s’en vont
c’est qu’ils ont de trop grands biens
dont le plus précieux à leurs yeux
leur image
ce récit
qu’ils dévident à l’envi
rarissimes
ceux qui confessent
leur simple trouille
déserteurs, eux ?
tout au contraire se récrient ils
peaufinant leur narratif
eux combattants plus lucides
que les vieux officiers
dont il est entendu qu’ils se sont égarés
et de vivre désormais
peinards
autant que hantés
eux qui, oui, ont donné
observé tous les commandements
Si je déplore
qu’ils terminent ainsi mi cuits
je ne m’octroie pas licence de juger
chacun n’a t-il pas droit
à son camp retranché ?

Gilles Farcet

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lundi 13 octobre 2025

C'est moi qui m'éloigne...

Le très beau Fanal bleu de Colette, l'une de ses toutes dernières œuvres, moins connue que d'autres mais non moins intéressante (tout comme l'Etoile Vesper).


 « Que nos précieux sens s'émoussent par l'effet de l'âge, il ne faut pas nous en effrayer plus que de raison. J'écris "nous" mais c'est moi que je prêche. Ô découvertes, et toujours découvertes ! Il n'y a qu'à attendre pour que tout s'éclaire. 

Au lieu d'aborder des îles, je vogue donc vers ce large où ne parvient que le bruit solitaire du cœur, pareil à celui du ressac ? Rien ne dépérit, c'est moi qui m'éloigne, rassurons-nous. Le large, mais non le désert. Découvrir qu'il n'y a pas de désert : c'est assez pour que je triomphe de ce qui m'assiège. »

Colette - Le Fanal bleu, 1949


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dimanche 12 octobre 2025

« L’estime… ne va pas de soi »

 « L’estime… ne va pas de soi »

Louise Groux - Lion

« Maman, regarde mon beau dessin ! » Parfois, je cherche encore l’approbation des autres, comme la petite fille attend derrière la porte de recevoir son bisou. Vivre de mon travail exige une certaine reconnaissance – expositions, ventes, etc. Comment trouver l’équilibre entre estime de soi et orgueil, doute et humilité ? Face à mes premiers tableaux, maman me challenge : « Ce n’est pas abouti, ma chérie ! » Quant à mon père, je me tue à attirer son attention. Comme seule victoire sur son indifférence, j’obtiens : « Tu es ma fille, donc tu te dois d’être géniale. » À peine écrasant. J’ai arrêté de brûler mes œuvres quand j’ai identifié les blessures dans mon enfance et expérimenté la tendresse infinie de Dieu, destinée à chacun. Je suis désirée et digne d’amour. Je n’ai plus besoin d’une reconnaissance à tous crins. Quand je doute, désormais, je prie. Une de mes plus grandes joies réside dans les moments où je vis l’humilité en vérité. 

L. Groux - N.D. de Paris

Un jour, je devais peindre un retable pour une commande privée, une scène de crucifixion. J’y allais la fleur au fusil, confiante, déterminée, persuadée de mener les choses rondement. J’ai été submergée par ce sujet insondable. La technique ? Les proportions ? Le souffle ? Quelque chose m’agressait. J’ai compris que deux sujets coexistaient : le temporel et le spirituel. Pour la technique, je m’étais préparée comme un soldat va au front. Un plan de bataille bien carré. Pour l’essence, j’ai dû finir à genoux et lâcher prise. Mon travail ne m’appartient pas. Je peins afin de donner à contempler beaucoup plus grand que moi-même. Pour combattre l’orgueil, rien de tel que d’avoir des enfants. Des phrases comme : « Maman, c’est quoi ton travail, en fait ? Tu dessines toute la journée ? » ou encore « Mamaaaaan, y a plus de papier toilette ! » font vite redescendre sur terre !


Louise Groux

Voir son site

Source : La Vie

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samedi 11 octobre 2025

Dépression...

 La dépression est un bon signe.

C'est la vie qui frappe à la porte en geignant. Elle nous dit que cette existence ne lui va pas et que nous courons à notre perte. La dépression est le sursaut paradoxal de la santé.
C'est comme une lettre que nous nous écrivons à nous même, mais dont ne réussissons pas encore à ouvrir l'enveloppe craignant qu'elle contienne de mauvaises nouvelles. On croit que ça ne va pas alors qu'en réalité on est entré dans une sorte de rébellion douce par rapport à ce qui nous entoure et qui nous fait souffrir.
La dépression c'est la résistance dans les catacombes.

C. Bobin.
Entretien avec P Van Eersel - A la recherche de la vie intérieure


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vendredi 10 octobre 2025

Eux

 C'est Eux ? nous dit Abd Al Malik...


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jeudi 9 octobre 2025

Poème de Lao tseu


Il existe un tunnel obscur dans la Lumière Infinie.
On l’appelle «Temps».
Lorsqu’un humain entre dans ce tunnel,
On appelle cela «naître».
Lorsqu’un humain marche au long de ce tunnel,
On appelle cela «vivre».
Lorsqu’un humain sort de ce tunnel,
On appelle cela «mourir».
Considérer que vivre se réduit à évoluer au long de ce tunnel obscur,
Cela s’appelle «illusion».
Percer des trous dans ce tunnel obscur
Cela s’appelle «science».
Savoir que la Lumière est autour du tunnel,
Cela s’appelle «Foi».
Voir la Lumière dans le tunnel obscur,
Cela s’appelle «Amour».
Voir la Lumière à travers le Tunnel obscur,
Cela s’appelle «Sagesse».
Eclairer le tunnel obscur de sa propre Lumière,
Cela s’appelle «Sainteté».
Confondre la Lumière et le Tunnel obscur,
Cela est au-delà des mots.
Source : Peinture de Kim En Joong

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mercredi 8 octobre 2025

Eclaircie poétique

 Haïkus de la clarté, Pierre Dhainaut dans Progrès d'une éclaircie, Faï fioc, 2015.


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Un colloque avec et sur Pierre Dhainaut est organisé prochainement 
par Sabine Dewulf et Sabine Zuberek

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mardi 7 octobre 2025

Potentiel d'harmonie

 « Je pense que l’empathie est vraiment importante, et je pense que ce n’est que lorsque notre cerveau intelligent et notre cœur humain travaillent ensemble en harmonie que nous pouvons réaliser notre plein potentiel. »

Jane Goodall



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lundi 6 octobre 2025

Une part vivante !


"L'ère du détachement hautain, de toute forme de distanciation et de cynisme est close. Nous savons désormais (ou alors il serait temps que le message de la physique quantique après plus d'un siècle nous parvienne !) que nous sommes chacun part vivante de cet univers, cellule d'un seul corps, et que chacune de ces cellules porte l'entière information de la vie. Une responsabilité immense et émouvante à la fois nous incombe, à chacun. Chacun de nous est l'univers en miniature !

Certains croient encore pouvoir se protéger, se mettre à l'abri, se sauver seuls ! Pure aberration. Lorsque je m'autodétruis, c'est la création que je détruis et que j'insulte. Lorsque j'honore ce monde et en prends soin, je le sauve ! Ce que savent depuis le début des temps les poètes et les mystiques, ce sont les scientifiques aujourd'hui qui nous le confirment.

Aussi la vocation de l'homme d'aujourd'hui est-elle cette conscience agrandie. Attention, néanmoins, de ne pas entrer dans le découragement devant l'immensité de la tâche : je n'ai charge que de la petite part du monde qui m'est confiée - et pas de tout à la fois bien sûr ! Et si je fais vivre et rayonner cette enclave, il y a contagion ! De plus, ce n'est pas la réussite qui importe le plus, mais la générosité de la tentative, la persévérance, l'ouverture du cœur. "

Christiane Singer - "Montre-toi vivant: en dialogue avec Christiane Singer"

Christiane Singer et Léonard Appel / Peinture: Pablo Picasso 1881-1973

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dimanche 5 octobre 2025

Révélation


 « Émerveillée par la beauté qui m'entourait, j'ai dû entrer dans un état de conscience accrue. Il est difficile, voire impossible, de décrire avec des mots le moment de vérité qui m'a soudainement envahie. Même les mystiques sont incapables de décrire leurs brefs éclairs d'extase spirituelle. En essayant ensuite de me remémorer cette expérience, il m'a semblé que le moi était totalement absent : moi, les chimpanzés, la terre, les arbres et l'air semblaient fusionner, ne faire qu'un avec la puissance spirituelle de la vie elle-même. L'air était rempli d'une symphonie ailée, le chant du soir des oiseaux. J'ai entendu de nouvelles fréquences dans leur musique et aussi dans le chant des insectes – des notes si aiguës et si douces que j'en ai été émerveillée. Je n'avais jamais été aussi intensément consciente de la forme, de la couleur de chaque feuille, des motifs variés des nervures qui rendaient chacune d'elles unique. Les odeurs étaient également claires, facilement identifiables : fruits fermentés et trop mûrs, terre détrempée, écorce froide et humide, odeur humide des poils des chimpanzés, et oui, des miens aussi. Et le parfum aromatique des jeunes feuilles écrasées était presque irrésistible.

Cet après-midi-là, c'était comme si une main invisible avait tiré un rideau et, pendant un bref instant, j'avais vu à travers une telle fenêtre. En un éclair de « vision extérieure », j'avais connu l'intemporalité et une extase tranquille, j'avais perçu une vérité dont la science traditionnelle n'est qu'une infime partie. Et j'ai su que cette révélation m'accompagnerait pour le reste de ma vie, imparfaitement mémorisée, mais toujours présente en moi. Une source de force sur laquelle je pourrais puiser lorsque la vie me semblerait dure, cruelle ou désespérée. »

Jane Goodall vient de nous quitter à 91 ans, sa lumière continue de briller. 💚

(Image : avec l'aimable autorisation du Jane Goodall Institute)

source FB et donc incertaine

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samedi 4 octobre 2025

Riche rencontre.

 


"La rencontre est le but et le sens d'une vie humaine. Elle permet qu'on ne la traverse pas en somnambule. Quand mes yeux se fermeront, ils le feront sur une immense bibliothèque constituée par des visages qui m'auront ému, troublé, éclairé. Un visage est éclairant quand un être est bienveillant et qu'il est tourné vers autre chose que lui-même. Le soin qu'il prend de l'autre, l'illumine, le rend vivant. Il capte une lumière et la renvoie. C'est quelque chose de rare. La richesse de cette vie est faite surtout de visages et de quelques paroles."

Christian Bobin

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vendredi 3 octobre 2025

"Les deux ensemble !"

 

Avant de « faire », se mettre à « l’écoute de l’infaisable » !

Lorsque la personne occidentale décide de s'engager dans la pratique du Yoga, du TaïchiChuan ou dans une discipline artistique, artisanale ou martiale qui a ses racines au Japon, il s'attend à devoir "faire" un exercice. D'où ma surprise lorsque j'entends le vieux sage de la Forêt Noire me dire que sur la Voie qu'il propose, il ne s'agit pas tout de suite de s'appliquer à "faire" quelque chose, un exercice inventé par l'homme.

Avant de faire, il importe tout d'abord de se mettre à l'écoute afin de laisser advenir "l'infaisable".

Se mettre à l'écoute de l'infaisable ?

Il est important de distinguer deux forces. Il y a la force qu'on développe et qu'on "fait" et l'autre qu'on ne peut absolument pas faire. Ainsi, on ne peut pas faire battre son cœur, il y a là une force que nous devons admettre. De même, Il est important pour la personne occidentale de distinguer deux niveaux d'actions. Ainsi, je ne peux pas "faire" cette action vitale qu'est la respiration, il y a là une action infaisable que je me dois tout simplement d'admettre.

Ce qui n'est pas de l'ordre du "faire" et que nous avons à laisser advenir, révèle ce qu'il y a d'universellement humain en l'homme. C'est un premier pas important sur le chemin que de reconnaître cette part de nous-mêmes qui nous dépasse.

Ceci dit, il faut se rendre compte que le caractère de la réalité qui transcende ce que l’être humain peut faire, dépend de notre vision du réel et pas d'une cause extérieure. D'où l'absolue nécessité lorsqu'on se met en chemin de distinguer deux approches du réel.

Graf Dürckheim distingue ce qu'il appelle l'esprit occidental et l'esprit oriental. L'esprit occidental PENSE le réel comme étant un ensemble d'objets. L'esprit oriental VOIT le réel comme étant un ensemble de processus.

Il voit là deux usages de ce qu'on appelle la conscience : la conscience DE et la conscience SANS de. « Se mettre à l'écoute implique une approche du réel autre que celle de notre conscience ordinaire : la conscience DE. La mise à l'écoute implique l'usage de la conscience SANS de. C'est vraiment important lorsqu'on va pratiquer un exercice. En effet, l'usage de la conscience DE me conduit à -penser- que "j'ai un corps" ; l'usage de la conscience SANS de me conduit à -voir- que" corps je suis" ».

Je ne comprends pas ! Le corps qu'on "a" // le corps qu'on "est" ? La conscience DE // la conscience SANS de ?

Mieux que les mots par lesquels nous cherchons à comprendre, une image peut bien souvent nous permettre de voir ... ce qui n'est pas à comprendre.

Regardez ce cylindre !

La lumière qui le rend visible projette sa forme sur deux écrans différents ; ce qui nous amène à envisager qu'un cylindre est circulaire ou qu'il est rectangulaire.

L'image ci-dessus semble démontrer qu'un cylindre dispose des mêmes propriétés qu'un rectangle ou qu'un cercle. Cette incompatibilité résulte non pas de la chose en soi mais de notre manière de la conceptualiser, de notre manière d'en être conscient.

En physique classique, des années durant, des scientifiques ont affirmé que la lumière est un phénomène ondulatoire alors que d'autres scientifiques affirmaient que la lumière est un phénomène corpusculaire.

Jusqu'au jour où en physique quantique, ces deux phénomènes sont considérés comme coexistants. En fonction du contexte expérimental, un électron peut donc se présenter soit sous forme de particule, soit sous forme d'onde.

Mais enfin ! La lumière est-elle faite d'ondes ou de particules ? Un maître Zen répondra : "Les deux ensemble!". Les deux ensemble !

Cette exclamation est insupportable pour tout être humain doué de raison. D'autant plus lorsqu'elle associe des oppositions qui nous paraissent inéluctables : le corps (et) l'esprit ... la santé (et) la maladie... le bien (et) le mal ... l'inspiration (et) l'expiration ... le calme (et) l'agitation... la vie (et) la mort ...

Dès qu'il vous est possible de faire usage de la conscience SANS de (déjà à notre disposition tout au long de la gestation) vous pouvez maintenant "faire" zazen! C'est à dire faire... rien ! Si ce n'est être à l'écoute (zen) de ce qui se présente lorsque vous êtes là assis absolument immobile (za.)

Grâce à une pratique régulière et renouvelée de l'exercice, l'expression "Les deux ensemble " est vue non seulement comme un principe constitutif de notre existence mais comme étant la source de cet état d'être qui manque cruellement à la personne occidentale : le CALME intérieur. Le grand calme qui n'est pas le contraire de l'agitation (dualité) mais l'absence de toute agitation (symptomatique de notre vraie nature).

Jacques Castermane

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jeudi 2 octobre 2025

Des signes...

Dans son nouvel ouvrage, Anne-Dauphine Julliand raconte sa confrontation à la mort d’un troisième enfant...


Je ne cherche pas de signes d’eux. Nulle part. Ni dans le dessin des nuages, ni dans le bourdonnement d’une ampoule, ni dans les soupirs de la maison. Je ne cherche pas de signes d’eux. Mais j’en vois. Comme ceux que Gaspard a vus après la mort de Thaïs.

« Tu verras, elle t’enverra des signes, c’est sûr. » Elles étaient trois amies venues me rendre visite, serrées sur le canapé. Je leur avais servi un jus de fruits, j’aurais préféré un alcool fort. De ceux que je ne bois jamais d’ordinaire. Mais les jours n’avaient plus rien d’ordinaire. Ils suivaient celui de la mort de Thaïs. « Mort ». J’ose le mot, comme Gaspard le faisait alors. Lui seul capable, dans l’insouciance de son enfance. Il n’avait pas encore six ans. Il est entré dans le salon, s’est laissé embrasser par chacune, baiser mouillé de larmes, puis il nous a oubliées. Il s’est installé sur le parquet, allongé sur le ventre, les jambes repliées en l’air qui, dans leurs battements, dessinaient des ciseaux. Il a étalé ses jouets; plongé dans son monde imaginaire, il parlait tout haut. Comme si nous n’étions pas là. Mais en réalité, il entendait, il écoutait notre conversation gênée. Il guettait nos réactions pour ajuster les siennes. Comme s’il devait apprendre de nous dans la peine. Sans savoir que c’était nous qui nous inspirerions de sa manière de faire. De son instinct à se confronter à la réalité, quand nous tentions de la fuir. De la simplicité de ses larmes, de sa confiance dans nos bras, de la spontanéité de ses paroles, de sa manière de s’adresser au ciel, de son rire retrouvé.

Quand elles se sont levées pour partir, leur verre à peine touché, l’une de mes amies a posé sa main sur mon bras. « Tu verras, Thaïs t’enverra des signes, c’est sûr. » Je n’ai rien répondu. Mais cette injonction à guetter des preuves m’a agacée. Pourquoi chercher à faire parler l’Au-delà ? J’ai refermé la porte derrière elles. Gaspard a disparu dans sa chambre. Avant de revenir, un livre dans la main. Celui que nous avions lu quelques nuits plus tôt, collés l’un contre l’autre. Une belle histoire d’amitié. Il voulait que je la lise encore. Quand j’ai tourné la dernière page, il a dit en caressant son oreille, comme il le faisait quand il était ému : « Ton amie tout à l’heure, elle a dit que Thaïs t’enverra des signes. C’est des signes comme celui-là ? C’est possible d’en avoir en vrai ? » Son doigt a pointé la couverture du livre, le dessin élégant et son titre « Mon cygne argenté ». Pour lui, les signes étaient des cygnes.

Je n’ai jamais oublié les cygnes de Gaspard. Grâce à eux, et à lui, je souris intérieurement chaque fois que l’on me demande si je vois des signes de mes enfants.

Ce matin, je suis partie toute seule marcher dans la campagne autour de la maison de mes parents. Un besoin de m’éloigner, de retrouver le calme et de hurler ma peine loin de toute oreille. Sur l’étang au bout du chemin de terre, là où nous aimons nous promener en refaisant le monde, une boucle empruntée par toutes les générations de la famille, sur l’étang, cinq taches blanches contrastent avec la surface sombre. Cinq cygnes dans toute leur élégance. J’admire la grâce de leur glissement sur l’eau. Trois d’entre eux se détachent et s’approchent de la rive. Tout près. Il suffirait que j’avance de quelques pas, le bras tendu, pour effleurer leur plumage. Je ne bouge pas. Nous restons dans un face-à-face. Puis, en un seul mouvement, ballet coordonné, ils courbent le cou, inclinent bas la tête. Tous les trois. Une révérence. Un salut. Un signe.

Mes signes sont des cygnes.

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mercredi 1 octobre 2025

Esprit perturbé

Ogyen Tendzin Jigme Lhundrup,
l’incarnation du grand maître tibétain Dilgo Khyentsé Rinpoché

"‍Mieux vaut donc nous raviser et faire preuve de bon sens. Or, si nous laissons notre esprit nous maltraiter au point que nous vivons dans la souffrance et faisons également souffrir les autres autour de nous, c'est le signe que nous manquons précisément de bon sens. On peut considérer comme ‟ négatives ” les pensées et les paroles qui proviennent de notre esprit perturbé. Si, au lieu de nous lamenter sur notre sort, nous cultivons l'altruisme et la compassion et que ces états d'esprit ‟ positifs ” améliorent notre bien-être et celui d'autrui, nous faisons preuve de bon sens."


 Dilgo Khyentsé Rinpoché

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