C'est le récit d'un chemin initiatique haut en couleur que je vous recommande à la lecture. Phytospiritualité avait déjà présenté cet homme. Il est bon de le rencontrer de nouveau...
Comme le danseur s'exerce à la barre sans relâche avant de voir ses efforts couronnés de succès, mon corps peu à peu se transforme. « Ce travail d'entraînement et d'enchaînement est capital si tu veux, un jour, prétendre représenter sur l'enluminure un vêtement de Dieu et non une forme de ton propre chaos », insiste mon Maître. Je comprends, grâce aux énergies que l'initiation a réveillées en moi, que briser une caillasse peut devenir un geste rituel qui agit sur moi en même temps que sur la matière. Avant et après ces trois jours, je ne travaille plus de la même façon. Je ne change pas seulement d'attitude, je change dans l'être. Au moment de moudre un caillou qui donnera du rose, j'entre dans la contemplation de la couleur. Et plus la poudre rose devient fine, plus elle libère son message et me guide dans mes méandres intérieurs : dans une sorte de vision, je sais alors dans quel contexte cette couleur va s'inscrire et je connais la signification profonde qu'elle donnera à l'enluminure. Une couleur enfermée dans un pot n'est rien, elle ne prend son sens et n'ouvre la voie qu'en illuminant une forme.
Je comprends peu à peu l'enseignement souterrain, la vertu qui résident dans les gestes les plus humbles : lorsqu'un geste est juste, il n'y a pas à réfléchir, à l'interpréter, il se transcende en soi... Il peut avoir la beauté des gestes d'un officiant. Car il dénote le comportement confiant d'un homme uni à tout. Dès lors, casser une pierre a la même importance que dresser délicatement une auréole bleue autour du visage et des yeux baissés de la Vierge. "Comme tu as trié la terre pour en isoler la matière lourde et en faire jaillir la lumière, traverse ta propre matière, purifie-la en séparant le vil du subtil. Soumets la matière tour que le mystère et le réel ne fassent plus qu'un ", m'enseigne mon Maître.
Je quitte mes sens ordinaires — les mélanges sont pestilentiels, la pierre est dure —, je me dirige vers mes sens spirituels, je vois au-delà de la forme, de la couleur, du toucher. Geste après geste, je cours d'éveil en éveil, je me libère, à mon rythme, de ce qui me bloque. Mes empêchements se dénouent. Même le bruit de mon marteau sur la pierre se transforme, au fil des mois, en incantation. Je pressens que là va être la clé de ma transformation. Un jour, une faille libératrice s'ouvre, l'esprit change de niveau et la pierre travaillée avec patience livre son trésor caché : ma propre pierre intérieure, réduite en poussière, se transforme, à son tour, en lumière bleue, jaune, rouge...
L'enseignement ne pouvait être qu'oral et expérimental : ce que j'apprends doit être vécu, assimilé, jamais oublié. Tout est déjà imprimé en moi. Je suis un livre vivant qui, depuis l'origine, porte le secret de toutes mes transformations futures.
Je réalise, avec des mois de recul, que, lors de l'initiation, le Maître m'a fait travailler sur les quatre éléments, terre, air, eau et feu. Ce sont les éléments constitutifs de la vie terrestre. Or, ces éléments nous fixent, nous suspendent, nous, la création, dans un état transitoire. Un enlumineur doit s'affranchir de cet état transitoire pour rejoindre un état d'éternité. « Tu dois prendre conscience de la quintessence qui se dissimule derrière chaque élément, chaque instant"...
Jean-Luc Leguay, "Le maître de lumière", Ed. Dervy Poche, p. 92-93
Comme le danseur s'exerce à la barre sans relâche avant de voir ses efforts couronnés de succès, mon corps peu à peu se transforme. « Ce travail d'entraînement et d'enchaînement est capital si tu veux, un jour, prétendre représenter sur l'enluminure un vêtement de Dieu et non une forme de ton propre chaos », insiste mon Maître. Je comprends, grâce aux énergies que l'initiation a réveillées en moi, que briser une caillasse peut devenir un geste rituel qui agit sur moi en même temps que sur la matière. Avant et après ces trois jours, je ne travaille plus de la même façon. Je ne change pas seulement d'attitude, je change dans l'être. Au moment de moudre un caillou qui donnera du rose, j'entre dans la contemplation de la couleur. Et plus la poudre rose devient fine, plus elle libère son message et me guide dans mes méandres intérieurs : dans une sorte de vision, je sais alors dans quel contexte cette couleur va s'inscrire et je connais la signification profonde qu'elle donnera à l'enluminure. Une couleur enfermée dans un pot n'est rien, elle ne prend son sens et n'ouvre la voie qu'en illuminant une forme.
Je comprends peu à peu l'enseignement souterrain, la vertu qui résident dans les gestes les plus humbles : lorsqu'un geste est juste, il n'y a pas à réfléchir, à l'interpréter, il se transcende en soi... Il peut avoir la beauté des gestes d'un officiant. Car il dénote le comportement confiant d'un homme uni à tout. Dès lors, casser une pierre a la même importance que dresser délicatement une auréole bleue autour du visage et des yeux baissés de la Vierge. "Comme tu as trié la terre pour en isoler la matière lourde et en faire jaillir la lumière, traverse ta propre matière, purifie-la en séparant le vil du subtil. Soumets la matière tour que le mystère et le réel ne fassent plus qu'un ", m'enseigne mon Maître.
Je quitte mes sens ordinaires — les mélanges sont pestilentiels, la pierre est dure —, je me dirige vers mes sens spirituels, je vois au-delà de la forme, de la couleur, du toucher. Geste après geste, je cours d'éveil en éveil, je me libère, à mon rythme, de ce qui me bloque. Mes empêchements se dénouent. Même le bruit de mon marteau sur la pierre se transforme, au fil des mois, en incantation. Je pressens que là va être la clé de ma transformation. Un jour, une faille libératrice s'ouvre, l'esprit change de niveau et la pierre travaillée avec patience livre son trésor caché : ma propre pierre intérieure, réduite en poussière, se transforme, à son tour, en lumière bleue, jaune, rouge...
L'enseignement ne pouvait être qu'oral et expérimental : ce que j'apprends doit être vécu, assimilé, jamais oublié. Tout est déjà imprimé en moi. Je suis un livre vivant qui, depuis l'origine, porte le secret de toutes mes transformations futures.
Je réalise, avec des mois de recul, que, lors de l'initiation, le Maître m'a fait travailler sur les quatre éléments, terre, air, eau et feu. Ce sont les éléments constitutifs de la vie terrestre. Or, ces éléments nous fixent, nous suspendent, nous, la création, dans un état transitoire. Un enlumineur doit s'affranchir de cet état transitoire pour rejoindre un état d'éternité. « Tu dois prendre conscience de la quintessence qui se dissimule derrière chaque élément, chaque instant"...
Jean-Luc Leguay, "Le maître de lumière", Ed. Dervy Poche, p. 92-93
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